samedi 4 mars 2017

Correspondance Proust Gallimard 12 ( Lettres France )

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rivagedeboheme.fr

 
                                                        A Gaston Gallimard

                                                                                                         29 ou 30 novembre 1921

            Très important à lire entièrement.
             Mon cher Gaston
             C'est naturellement de la meilleure foi du monde que je vous annonçais une lettre pour dans . qq heures. J'ai eu de nouveau plus de 40 de fièvre avec rhumatismes. Excusez-moi. Tant souffrir, m'a fait un peu oublier ce que j'ai à vous dire. Je vais tâcher de ne pas oublier le principal.
            1°  Vous devez prévenir l'imprimeur que tous les n°s de pages mis en haut de chaque page ou au milieu de la page par votre dactylographe, ne comptent pas. La seule pagination c'est le n° mis par moi à la main en tête de chaque page. Quant au 1er placard de l'imprimeur, ne s'en occuper en rien ; le manuscrit, pour lequel le bon à tirer peut être donné sans épreuves, c'est la dactylographie de votre dactylographe mais avec mes ajoutés, ma pagination et, au début les premières pages de " Jalousie "
( qui naturellement ne s'appelle plus " Jalousie " ) Je crois que cela fera 2 volumes à paraître ensemble sous le titre "Sodome et Gomorrhe II ". Vous me direz où vous jugez qu'on doit, à peu près, faire la scission entre les 2 volumes. Je souhaiterais que ce fût au milieu d'un chapitre de manière à commencer le 2è volume de ce tome II  par un : Deuxième chapitre Suite, comme dans La guerre et la Paix. Je voudrais bien si vous les avez encore sous la main, ajouter 1/2 phrase aux pages de papier écolier écrites par moi, ou deux " courrières " me parlent un peu à la façon de jeunes indiennes de Chateaubriand vers 245 je crois. Et aussi le passage dactylographié sur la visite que me fait Me de
Cambremer ( Tout cela est vers le commencement de ce que j'imagine devoir être le 2è volume ). Cela ne fera pas 3 lignes à ajouter en tout et cela demande 1/4 d'heure. - . Avant la page 400 il y a qq n°S de pages de sautés je crois ( par exemple 400 placé peut-être après 392). C'est une erreur de pagination de ma part. Il n'y a aucun " blanc " ni des points de suspension à mettre dans le livre. Cela s'enchaîne.
Résultat de recherche d'images pour "livre proust liseuse"            Je n'ose pas vous demander de faire imprimer aussi clair et aussi gros que la traduction espagnole que vous avez eu la gentillesse de m'envoyer et dont je vous remercie bien, ni aussi gros que Grasset. Pourtant un livre est fait pour être lu. Et de plus dans les éditions préparatoires à la collection complète vous avez déjà changé une fois de caractères, un des volumes étant illisible. Il me semble donc que vous ne dérangeriez aucune homogénéité typographique en prenant des caractères un peu plus gros. Pour le volume suivant ( Sodome III ) auquel je vais m'atteler, cela ne sera pas si grave. Car ce sera un volume bref et d'action dramatique. Mais pour celui-ci si long et si analytique encore il ne faut pas donner trop de fatigue au lecteur. Je vous laisse juge.
            2° Comme Jacques Rivière ( qui me refuse toujours tout pour les autres, d'ailleurs très gentiment, et avec raison, car si nos goûts diffèrent parfois, il est juste que ce soit le directeur de la N.R.F. qui impose le sien, puisque ayant la responsabilité il doit avoir l'indépendance )
  n'a pas voulu que j'écrive sur Léon Daudet craignant le ton lyrique ( il ne se trompait pas ), je vous demande éventuellement la permission de faire cet article dans la Revue de la Semaine.
            Fayard ( que je ne connais pas mais qui a agi très délicatement avec moi ) me transmet une demande de traduction de Jalousie en italien et me laisse libre de répondre directement ( je vous communiquerai les documents ). Je n'ai répondu ni à Fayard ni à l'éditeur italien et j'attends votre sentiment. Le mien est qu'il m'est difficile d'écrire à l'éditeur italien que Jalousie n'est qu'un fragment mais que vous pourriez ( en en parlant par ex. avec Duvernois ) donner l'autorisation pour Sodome et Gomorrhe II, en disant que Jalousie est une partie qui ne se peut détacher, et faire vos conditions, en ne les faisant pas trop dures.
            D'autre part, si vous n'y voyez pas d'inconvénient puisque c'est Jalousie qu'on demande et que peut'être Sodome et Gomorrhe II semblera un trop gros morceau et exigerait peut'être les livres précédents, vous pourriez traiter pour Jalousie seulement ( on donnerait un autre titre ). Je crois qu'il ne faut pas trop arrêter le vent qui en ce moment gonfle nos voiles et dont la N.R.F. ne peut que profiter. Voyez, Binet-Valmer qui avait à peine consacré qq lignes à Sodome I, a fait tout un article                                  sur Jalousie. Morand me cite souvent des tentatives de me traduire qui échouent,                                     ( dernièrement en Allemagne ) par les trop grandes exigences de la N.R.F. Si seulement cela n'allait pas contre l'intérêt du livre, j'aurais l'air de prêcher pour mon Saint. Mais je prêche pour toute l'Eglise, la N.R.F. entière qui n'a pas d'intérêt à être trop " petite chapelle ". L'inconvénient serait d'accueillir des oeuvres de qualité médiocre - on ne peut pas dire que cela n'ait été fait quelquefois. Mais un livre que la N.R.F. juge de bonne qualité ( excusez-moi de parler ainsi de mon livre ) pourquoi en empêcher la diffusion ?
            Voulez-vous accuser réception pour moi à M. Monod ( je suis trop incertain d'avoir lu le nom pour écrire directement ) des 2 500 fr. qu'il m'a fait parvenir de votre part et dont je vous remercie. Je les ai d'ailleurs faits toucher aujourd'hui même.
            Croyez mon cher Gaston à ma bien vive affection


                                                                                                    Marcel Proust

            Ne me répondez pas, sauf sur les points que vous jugerez utiles.      blogs.mediapart.fr
Résultat de recherche d'images pour "proust canard enchainé"            Je ne réponds jamais à un journal. Je trouve cependant que Le Carnet de la Semaine ou Le Canard enchaîné, je ne sais plus lequel, passe un peu les bornes, en mettant Stylo Svan fabricant Marcel Proust ( à ses annonces ) et en publiant de fausses lettres de moi où censé démentir toute parenté avec un Capitaine Proust, accusé d'espionnage.
            Il est exact que je n'ai aucune parenté avec lui. Mais j'ai jugé inutile d'en informer personne, mon frère et moi étant les 2 seuls membres de notre famille qui portent ce nom. Le prétendu démenti au Canard enchaîné est donc une pure invention de ce journal. Et je me demande si je n'ai pas tort d'être si débonnaire.                                                                           
            Ne mettez pas je vous prie Morand en cause au sujet des traductions. Car c'est un très bon ami pour nous deux et son avis ne part que de bons sentiments. Je vous écris si librement que je ne remplace pas les noms propres par des XXX mais je serais extrêmement contrarié que vous en fissiez usage. Un éditeur est un confesseur.
            N'est-ce pas, c'est bien convenu, si la parution est impossible pour le 1er mai nous la remettons au 1er Octobre. Mais si on ne traîne pas, il y a tout le temps pour le 1er mai et de gds avantages.            
         


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                                                 A Gaston Gallimard

                                                                                              Entre le 27 et le 30 décembre 1921

            Mon cher Gaston
            Je vous accuse réception et vous remercie de votre chèque de deux mille cinq cents francs reçu hier, ( mais je ne sais pas à quel mois il est imputable ). Mais ne prenez pas la peine de me répondre à ce sujet car je pourrais facilement trouver le renseignement
 dans mes comptes.                                                                                     art.mygalerie.com 
Résultat de recherche d'images pour "vallotton liseuse"            J'ai reçu un nouvel appel d'Halévy pour les Cahiers verts, j'ai répondu en substance qu'un cahier vert était un ouvrage, et que la N.R.F. ne l'admettait pas. Cela n'empêche pas que quand je vous verrai ( ce qui j'espère ne peut tarder ) je vous soumettrai des raisons morales, et d'opportunité que vous trancherez vous-même en dernier ressort selon qu'il vous conviendra. Ce qui me préoccupe en ce moment, tout de suite après l'état épouvantable de ma santé arrivée ( au point de regretter de ne pas posséder de cyanure de potassium ) c'est de savoir si sans retarder Sodome II  je ne pourrais pas faire quelques petits ajoutages d'une ligne ou deux qui me semble(nt) nécessaire(s). Pour tous les autres ajoutages, plus longs, je les rejette pour ne pas tout bouleverser dans le volume suivant. Mais il me semble difficile de me passer des autres. Si cela pouvait simplifier, je vous ferais une proposition, qui va vous paraître fort étrange. Ce serait que j'aille moi-même chez l'imprimeur, cela semble bien contradictoire avec l'aggravation de mon état de santé. Mais justement cette aggravation s'accélère tellement et se revêt de formes nouvelles si pénibles que j'ai par moments soif de sortir, même peu sagement, de mon enfer. - . Si vous voyez Du Bos ou Larbaud ou tel moindre anglicisant, je voudrais bien savoir si Monsieur Murry qui écrit à l'Athenoeum est, ou n'est pas, Sir. Je ne lui répondrais pas non plus qu'aux autres personnes qui ont fait des articles sur moi s'il ne m'avait écrit une lettre extrêmement gentille, je ferais traduire l'article et remercierais s'il y a lieu, mais je voudrais savoir si dans l'adresse  il faut faire figurer le titre de Sir. Je vois que le chèque est signé par votre frère. Voulez-vous le remercier d'avoir pris cette peine. Je ne vous parle jamais de vos matinées qui me tenteraient beaucoup, mais vous savez que quand par hasard je sors, ce n'est jamais que le soir.
            Croyez mon cher Gaston à mon affectueux attachement


                                                                                         Marcel Proust
            

Gourmandises 3 Agatha Christie ( Crèmes et Châtiments Grande Bretagne )


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cuisine.notrefamille.com


                                              Crèmes et
                                                               Châtiments
                                     Recettes délicieuses et criminelles
                                                     ( extraits )
                                         
            Lisant la recette de la confiture de Groseilles, n'est-ce pas là le modèle d'écriture d'un polar...

                                                       Confiture de Groseilles

            Pour une bonne histoire, non

            Pour 1 kg de groseilles prêtes à cuire dans un faitout, à feu doux,
            Poudre de sucre 1 kg ajouté doucement en remuant. Cuire environ 10 mn le sucre bien incorporé. Mettre en pots, ne refermer que refroidie.
            Valeurs pour 4 pots de 500 gr

            Si les délicieux petits fruits sont préférés en gelée, la recette est un peu plus compliquée

            8 pots de 500 gr
            
            Cueillir 3 kg de groseilles                                                           bcommebon.canalblog.com 
Résultat de recherche d'images pour "GROSeilles"            Laver les fruits et les déposer dans 20cl d'eau au fond d'une bassine. Laisser mijoter, remuer, feu moyen, tout en écrasant les grains avec le dos d'une écumoire conseillent les auteurs. Laisser bouillir 3 mn et retirer du feu.
            Filtrer alors le jus mesuré et ajouter  très lentement le même poids en sucre ( que le jus ). Lorsque le tout est bien réuni ( 15 mn par kilo de sucre ) continuer avant de cesser de remuer 5 mn.
            En pots ! Mais ne couvrir qu'une demi-journée plus tard.

            Telle est la recette de la reine du roman policier.


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            Humour blafard
                                                                                                   chocolatatouslesetages.fr
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            La mort exquise

            Tel est le nom donné à ce gâteau au chocolat, prévu pour 10 personnes, et pour une fête peut être cuit dans des petits moules individuels.

             Trempez 100 gr de raisins secs dans au choix, cointreau, liqueur d'oranges ou autres.
            250 gr de chocolat noir cuire au bain-marie en ajoutant 150 gr de beurre fondu au préalable dans le four. Crème bien lisse ajouter 6 jaunes d'oeufs et 200 gr de sucre. Bien mélanger. Puis ajouter les 6 blancs montés en neige, délicatement, et la farine 40 gr, en pluie. Verser dans le moule beurré. Semez des morceaux d'une poignée de raisins secs découpés. Cuisson 30 à 35 mn à 180°.
           Coeur fondant, il faut donc sortir le gâteau encore brûlant. avant qu'il ne sèche pas.

            A ce gâteau déjà délicieux il manque

            La crème anglaise !

            Pour 1 litre de lait 2 gousses de vanille.
            Chauffer. Par ailleurs battre 8 jaunes d'oeufs avec 200 gr de sucre, et verser très délicatement le lait sur la préparation, hors du feu. Remuer et remettre à cuire en remuant. La crème est prête lorsque " ....... la spatule se nappe entièrement ".

            Bon appétit et bon dessert. Mais que faire des blancs d'oeufs ? Ceci est une autre histoire.


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                                    Rochers aux raisins                                            dieteticgourmand.canalblog.com
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                        Pour seulement 6 personnes !

            Faire fondre 50 gr de beurre, four chauffé à 180°
            Par ailleurs pour la préparation, dans 75 gr de farine ajouter 140 gr de flocons d'avoine, 50 gr de cassonade, 1 sachet de levure, 20 gr d'amandes en poudre et 100 gr de raisins secs. Battre deux blancs d'oeufs ( réserver les jaunes pour une autre recette ). Lorsqu'ils sont bien fermes ajouter
2 cuillères à café de miel liquide. Ajouter au précédent appareil - farine flocons d'avoine... - Bien mélanger. Remplir des petits moules, et enfourner, Cuisson 15 mn.
            Rapide. Délicat.

                       
                                              Les auteurs de ce très joli livre de recettes de
                                         Reine du Crime Résolu
                                              Anne Martinetti
                                            et François Rivière
                                              Photographies
                                              Philippe Asset         

           
                                 

jeudi 2 mars 2017

L'Espionne Paulo Coelho ( Roman Brésil )


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                                        L"Espionne

            Née à Leeuwarden en Hollande, Margaretha Zeller devient très jeune Madame Rudolph Mac Leod, et fuyant un époux brutal la jeune femme s'appellera Mata Hari en arrivant à Paris. Son nom de scène, son nom qui lui servit sans certitude en définitive à lui valoir une condamnation à mort, accusée d'espionnage au profit de l'ennemi. Agent double, pour la France, pour l'Allemagne, les preuves manquent. Paulo Coelho présente plusieurs exemples, notamment un homme, Ladoux, homme haineux qui reconnut que son rapport était basé surtout sur le fait que Mata Hari était une danseuse, danses exotiques qui ravagèrent plus d'un spectateur, et lui valurent de multiples amants dans les milieux mondains et politiques. Elle fut aussi la première à présenter un numéro de streape tease, mais fut récusée par l'imprésario de Nijinski. Elle gagna beaucoup d'argent et en dépensa autant dans la ville qui inaugurait une haute tour en fer, qui devait être détruite 4 ans après la fin de l'exposition universelle, mais la tour de Monsieur Eiffel résista, et la quarantaine arrivée Mata Hari accepta d'éventuels contrats à Berlin. 1914. Les mouvements de troupes, les étrangers n'ont plus le droit de travailler. L'assassinat de Sarajevo et ses conséquences dramatiques. Une issue est proposée à Mata Hari, retourner en Hollande, espionner grâce aux contacts prévus. Tout cela Mata Hari le raconte dans une longue lettre à sa fille éloignée. Le livre est en fait une suite de courts chapitres. " Les souvenirs apportent avec eux un démon appelé Mélancolie........ Avec eux arrivent des démons encore plus effrayants que la Mélancolie : les remords, mes seuls compagnons....... " Elle commença à danser grâce à Guimet. Beaucoup de noms célèbres de l'époque se croisent, mais l'erreur judiciaire qui valut l'exil au capitaine Dreyfus se reproduit puisqu'elle avoue n'avoir jamais pu ou su produire de renseignements aux services secrets : '' Ce n'était que des bavardages ". Elle mentait beaucoup, aimait l'argent et était sensible à la compagnie des gens fortunés et aux compliments. Elle mourut en 1917, assez lucide, écrit l'auteur, dans de telles circonstances. Le livre est court, romancé dans sa présentation. Paulo Coelho a transféré sur son site web " Le Dossier Mata Hari " des Services Secrets Britanniques rendu public en 1999. Quelques photos montrent une beauté de l'époque.

mardi 28 février 2017

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 71 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

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                                                                                                                                1er juin 1662
                                                                                                                  Jour du Seigneur
            A l'église ce matin un inconnu a fait un excellent sermon. Dîner à la maison et visite de Mr Spong. Nous chantâmes un moment des psaumes français et arrivèrent Mr Shipley et Mr Moore, et à nouveau à l'église où un pasteur presbytérien a fait un triste et long sermon, ce qui m'a contrarié, et retour à la maison. Et promenade sur la terrasse, et souper et la prière, et au lit.


                                                                                                                               2 juin

            Levé de bonne heure pour affaires, puis à la Garde-Robe avec Mr Moore. Discussion avec milord pour changer les crusados en monnaie sterling, et d'autres sujets. Me rendis ensuite chez mon frère Tom voir mon père et retour à la maison. Mon père vint ensuite dîner avec moi. Puis en voiture, je le déposai dans Cheapside. Ma femme et moi chez Mrs Clarke, à Westminster pour la première fois ensemble. Nous la trouvons en " dishabillée " avec l'intention d'aller à Hampton Court demain. Nous avons eu une longue et agréable conversation. C'est vraiment une femme très élégante. Puis par le fleuve à Salisbury Court, et Mrs Turner étant absente, retour en voiture. Après une promenade sur le terrasse et le souper, au lit. Aujourd'hui ma femme a mis son corselet à crevés qui est fort élégant.


                                                                                                                            3 juin
uncertainregard.eklablog.fr
Résultat de recherche d'images pour "corset femme 18è( siècle"            Levé avant 4 heures, et au travail dans mon cabinet à équilibrer les comptes entre milord et moi-même. Je voudrais bien être maître de 1 000 livres, mais je n'en suis encore qu'à 530.
            Au bureau toute la matinée. Mr Coventry a apporté des lettres patentes et a pris rang parmi nous ce matin. Comme nous dressions un contrat, je m'apprêtais, comme je le fais toujours, à en établir les articles, mais sir William Penn m'a sans le moindre égard déclaré que c'est au contrôleur de le faire, et il y a donc mis Mr Turner, ce dont je fus fort contrarié et que je commençai à discuter. Et grâce à la lettre contenant les ordres du Duc et à celle de Mr Barlow et conformément à la coutume de nos prédécesseurs, dont sir George Carteret était parfaitement informé lorsqu'il était contrôleur, il fut décidé en ma faveur. Ce que fera sir John Mennes quand il viendra, je n'en sais rien, mais sir William Penn s'est comporté en vil coquin et je me souviendrai de lui tant que je vivrai.
            Ayant terminé au bureau je descendis à l'appontement de la Tour où Mr Creed et Shipley étaient prêts avec trois coffres de crusados soit environ 6 000 livres sterling prêts à débarquer et à être déposés chez moi. Ce qu'ils firent, et je les mis dans ma deuxième cave, et Mr Shipley en prit la clé. J'ai retrouvé mon père, le Dr Williams et Tom Trice dans l'Old Bailey chez Short le marchand de bière, mais je n'ai pas pu arriver à un accord avec TomTrice. De là à la Garde-Robe où je trouvai milady revenue de Hampton Court et où la reine s'est montrée fort aimable avec elle, et milady me dit que c'est une fort jolie femme, ce qui me fait plaisir.
            Hier, m'a dit sir Richard Ford, les échevins de la Cité se sont présentés à elle en costume et lui ont offert une coupe d'or contenant 1 000 livres en pièces d'or. Mais il m'a dit que leur trésor est si pauvre qu'ils ont été obligés de nommer deux ou trois échevins pour lever des amendes afin d'arriver à la somme, et parmi eux sir William Warren.
            A la maison et au bueau où vers 8 heures du soir arrivent sir George Carteret et William Batten. Nous avons un peu travaillé. Puis à la maison et au lit, tracassé par sir William Penn, sa façon indigne d'agir envers moi aujourd'hui. Aussi par la responsabilité de l'argent qui est chez moi que j'avais oublié. Mais j'ai fait se lever les servantes pour allumer une chandelle et la mettre dans la salle à manger pour faire peur aux voleurs. Et sommeil.


                                                                                             4 juin
                                                                                                                     
           Levé de bonne heure et visite de Mr Moore venu m'annoncer la mort de Mr Barnwell, ce qui me tracasse un peu, d'autant plus que je crois que nous allons perdre la compagnie de Mr Shipley.
Résultat de recherche d'images pour "crusados"            Au bout d'un moment avec sir William Batten par le fleuve à Woolwich et nous vîmes là l'expérience qu'on faisait du fil du caret de Hollande de sir Richard Ford, qui a provoqué tant de remous chez nous, et je me suis beaucoup inquiété pour notre cordier, Mr Hugues, qui le déclare de mauvaise qualité. Nous l'avons trouvé de très mauvaise qualité et cassant plus vite au cours d'un essai loyal, à cinq fils que celui à quatre fils de Riga, et aussi que parfois il contient du vieux fil qu'on a goudronné et recouvert de chanvre neuf, ce qui est une tromperie inouïe. Je suis content de cette découverte parce que je ne veux pas qu'on décourage les ouvriers du roi ( comme le fait fort malhonnêtement sir William Batten ) de déclarer les défauts des marchandises fournies par les négociants quand elles en ont.
            Après avoir mangé du poisson que nous avions acheté sur le bateau chez Falconer, nous allâmes à Woolwich pour examiner la charpente de nos maisons, et retour. Et j'allai chez milord que je trouvai décidé à acheter le manoir de Brampton à sir Peter Ball, ce qui me fait plaisir. De là à Whitehall et j'exposai la tromperie à sir George Carteret. Puis à la Garde-Robe où je soupai avec milady, milord n'a pas mangé, il écrit ce soir des lettres à différentes destinations, car il doit quitter Londres demain. Rentrai tard et au lit.


                                                                                                             5 juin 1662

             A la Garde-Robe où milord me demanda ce que je pensais de Mr Moore. Je lui en dis tout le bien que je pouvais, et par ce moyen je le ferai adjoindre à Mr Townshen pour les affaires de la Garde-Robe. Il m'a aussi donné à examiner tous les comptes de Mr Shipley et de Mr Moore, ce qui me fait plaisir, car cela montre la grande confiance qu'il a en moi, et je désire conserver sa protection. Puis pris congé de lui, puisqu'il part aujourd'hui, et allai au bureau où ils venaient de commencer. Je leur montrai la découverte faite hier, et j'ai de ce fait, un nouvel ennemi, sir Richard Ford. Mais cela m'est égal, car c'est mon devoir et j'ai donc fait suspendre sa facture pour le présent.
            A dîner je trouve le Dr Thomas Pepys à la maison. Mais je dus quitter le dîner appelé par un billet de Mr Moore chez l'échevin Backwell pour y surveiller la pesée de quelques milliers de crusados de milord. Et nous trouvons que 3 000 valent à peu près 530 ou 540 livres sterling en tout.
            De retour à la maison je trouve mon père. Nous avons causé un bon moment et nous sommes quittés/
            Réunion au bureau pour terminer les comptes de Mr Gauden, mais nous n'avons pas tout à fait fini. Dans la soirée, avec Mr Moore, chez Backwell avec encore 12 000 crusados dont nous avons surveillé la pesée, et à la maison. Et au lit.


                                                                                                            6 juin

            A mon bureau, tout seul toute la matinée. Le serrurier, était avec moi pour autre chose, ouvrit un coffre qui était dans mon bureau depuis mon arrivée. Nous trouvons la maquette d'un beau navire. J'aimerais savoir si elle est au roi  ou à Mr Turner.
            A midi à la Garde-Robe, comme convenu, pour retrouver mon père qui fut bien reçu par milady qui me dit avoir quelque idée d'envoyer ses deux petits garçons chez nous à Brampton/ Mais j'ai obtenu la permission de les emmener avec moi et ma femme à Hampon Court demain ou dimanche. De là chez mon frère Tom. Nous trouvons une lettre de Pall disant que ma mère est gravement malade, en danger de mort. Ce qui nous inquiète beaucoup, mais j'espère qu'il n'en est rien, cette lettre a été écrite il y a quatre jours.  A la maison et à mon bureau et au lit à la lumière du jour.
            Aujourd'hui, à la demande de mon père, j'ai prêté 20 livres à mon frère Tom, qu'il remboursera sur la vente de Stirtloe quand celle-ci pourra avoir lieu. J'ai envoyé cet argent tout en monnaie nouvelle par mon petit laquais, de chez l'échevin Backwell.


                                                                                                              7 juin
baby.perroq.com
Résultat de recherche d'images pour "perroquet"            Au bureau toute la matinée. Je vois que Mr Coventry est résolu à faire beaucoup de bien et à s'enquérir de tout ce qui ne va pas au bureau. Dînai avec lui à midi et avec sir William Batten à Trinity House où se trouvait, entre autres, sir John Robinson, lieutenant de la Tour. Il dit qu'hier sir Henry Vane a présenté sa défense complète au Banc du roi, et qu'il a été déclaré coupable. Et qu'il n'a jamais entendu personne plaider avec autant de simplicité, et c'est aussi ce que d'autres disent.
            J'ai grande peine à décider s'il faut que j'aille, comme j'en avais l'intention, à Hampton Court demain. J'ai finalement résolu de ne pas y aller, à cause de la dépense et parce que je redoute maintenant de présenter des notes de frais de voyage, et ce sera aussi le cas d'autres, je suppose, parce que Mr Coventry les examine.
            De là j'ai été appelé chez sir George Carteret. Nous avons causé un grand moment. Je vois, comme il me l'a dit, que si ce n'est que Mr Coventry a déjà mis du foin dans ses bottes en vendant des places, il lui plaît beaucoup et espère grand bien de lui. Mais il a tellement lieu de se plaindre du manque d'argent que j'en suis tout affligé, craignant que ce ne soit la perte du bureau. A mon bureau tout l'après-midi, et le soir j'apprends que mon père est parti pour la campagne, mais si c'est pour Richmond comme il en avait eu l'intention pour me retrouver ensuite à Hampton Court lundi, ou si c'est pour Brampton, je ne le sais pas, ce qui me tracasse fort. Dans la soirée à la maison et au lit.

                                                                                                                                                                                                                                                                                    8 juin 1662              
                                         Jour du Seigneur
            Resté au lit jusqu'à l'heure de l'office, puis levé et été à l'église. Je vois que Mr Miller est revenu de la campagne et a prononcé un bien languide sermon. A la maison et dînai avec ma femme et de nouveau à l'église avec ma femme.
            De là à pied chez milady avec qui je soupai et avons été réjouis entre autres par le perroquet que milord a rapporté de son voyage. Il parle très bien et cri " Pall " de façon si charmante que cela conduit milord à le donner à milady Paulina. Mais la mère de milady ne l'aime pas.
            A la maison. J'aperçois mon domestique Will qui marche le manteau rejeté sur l'épaule comme un voyou. Je ne sais si c'était parce qu'il ne voulait pas qu'on le vît marcher en compagnie du petit laquais, mais j'en fus contrarié. Et de retour après la prière je lui demandai où il avait appris cette tenue impudente, il me répondit qu'elle n'était pas impudente, ou une réponse insolente de ce genre, sur ce je lui donnai une paire de gifles. Ce qui ne m'était jamais arrivé, et j'en fus ensuite un peu tourmenté. Et au lit.


                                                                                                                9 juin

            Levé de bonne heure et au bureau avec Mr Hayter à faire mon bordereau de marchés que je suis maintenant très désireux de terminer, car je suis décidé à m'enquérir sérieusement du prix des marchandises.
            Dînai à la maison, ensuite chez mon frère et en différents endroits, entre autres chez Greatorex
 et à la taverne, mais je n'ai pas pris de vin. Il m'a recommandé Bond de notre côté de la ville pour m'apprendre à cuber le bois de charpente et d'autres choses que je désire apprendre pour ma charge. Retour au bureau où Thomas Hayter et moi avons terminé mon bordereau, ce qui m'a fait grand plaisir. Puis rentrai souper et au lit.


                                                                                                                    10 juin

            Au bureau toute la matinée. Beaucoup de travail et grand espoir d'améliorer les choses au bureau grâce à Mr Coventry. Dînai à la maison avec Mr Hunt. Retour au bureau dans l'après-midi mais, comme la réunion de l'après-midi n'avait pas lieu, j'allai chez mon frère et chez le libraire, et ailleurs pour affaires, et je payai tous les livres jusqu'à aujourd'hui et je ne veux plus en acheter d'aucune sorte pendant un bon moment, quoique j'ai grande envie d'acheter les oeuvres du roi qui viennent de paraître en in-folio et de les offrir à milord. Mais je crois que je ferais mieux de mettre cet argent de côté. Rentré à la maison, et au lit.


                                                                                                                      11 juin
la-croix.com in MOMA San Francisco
Résultat de recherche d'images pour "été   londres peinture moma"            Au bureau toute la matinée. Avec sir William Batten et sir William Penn pour les comptes de l'entrepreneur des subsistances. Puis rentrai dîner et encore au bureau tout l'après-midi. Mr Hayter et moi recopions au net mon bordereau, et j'ai pris grand plaisir à régler le papier et à écrire les têtes de chapître à l'encre rouge. Puis rentrai souper. Ce soir Mr Saill, le peintre, est venu vernir le portrait de ma femme et le mien et je le payai pour mon portrait en miniature 3 livres, de sorte que je suis en règle avec lui. Et après souper, au lit.
            J'ai reçu aujourd'hui une lettre de mon père disant qu'il est bien arrivé et qu'il trouve ma mère assez bien remise. Ce qui me laisse bien fâché contre Pall qui a écrit à mon père tant de choses sur la maladie de ma mère qui, je crois, n'était pas si grave, et qui l'a obligé à retourner brusquement à la campagne, sans dire adieu ou prendre aucun divertissement ici.


                                                                                                                      12 juin

            J'ai essayé ce matin mon habit de cheval de drap avec les genoux ajustés, le premier que j'aie fait faire, et je les crois très commodes si ce n'est pas trop chaud pour que par la suite on souhaite en porter un pas fermé aux genoux. Au bureau toute la matinée où nous avons une réunion plénière du conseil de la Marine, à savoir sir George Carteret, sir John Mennes, sir William Batten, Mr Coventry, sir William Penn, Mr Pett et moi. J'ai ensuite obtenu que tous signent une résolution sur mes autorisations de paiement sans qu'ils soupçonnent l'usage que je veux en faire, entre autres. Mais il s'agit de demander que mes commis aient le droit de délivrer toutes les autorisations, ce dont je ne suis pas peu satisfait. Une grande querelle s'éleva entre sir George Carteret et Mr Coventry sur l'apurement des comptes de l'entrepreneur des subsistances et savoir si c'est George Carteret qui doit lui payer ce qui lui est dû ou si c'est l'Echiquier. Sir George prétend que c'est à lui afin de conserver ses 3 pence. Ils se mirent en colère, et je crois bien que cela finira devant le roi et son Conseil. J'ai fait ce que j'ai pu pour ne pas m'en mêler, ayant des questions personnelles à régler avant de vouloir paraître un rien passionné.
            De là dîner sur l'invitation de Mr Gauden, au Dauphin, où le repas fut bon. Mais ce qui m'étonne beaucoup, c'est que j'ai sans peine passé tout le dîner sans boire une goutte de vin.
Résultat de recherche d'images pour "été   londres peinture moma"            Après le dîner allai au bureau la tête remplie par les affaires, et à la maison, et comme c'était le jour le plus long de l'année j'ai envoyé tout le monde coucher à la lumière du jour. Mais alors que j'étais au lit, et endormi, un mot est arrivé de mon frère Tom pour me dire que le mari de ma cousine Anne Pepys du comté de Worcester est mort et qu'elle est remariée, et que son deuxième mari est à Londres et veut venir me voir demain.
                                                                                                                                                                                                                                      evous.fr     in Moma                                                                                                                

                                                                                                                13 juin

            Levé à quatre heures du matin et lu le Deuxième Discours contre Catilina de Ciceron qui m'a infiniment plu. J'y vois bien plus de choses que je n'avais pensé qu'on y trouvât. Mais je vois bien que c'était par ignorance et qu'il est aussi bon écrivain qu'aucun que je connaisse.
            Puis j'ai été chez George Carteret pour parler de la querelle d'hier au bureau, et je lui ai offert mes services pour chercher dans tous les vieux registres et les vieux papiers que j'ai ce qui peut être en sa faveur. Il en a été fort satisfait et a fort déclamé contre Mr Coventry me racontant qu'il lui avait rendu service au Parlement quand Prynne avait établi une accusation en forme contre lui pour avoir reçu de l'argent en échange de nominations. Qu'il l'avait, sur sa demande, exprimée par lettre, empêché d'agir en ce sens. Et il m'a raconté bien d'autres choses, par exemple que le roi avait des obligations et dans quelle misérable situation sa famille se trouverait s'il venait à mourir avant d'avoir liquidé ses comptes. Je vois en somme qu'il m'estime beaucoup et qu'il m'est ami. Et il pourra m'être utile
            De là en divers lieux pour affaires. Eté, entre autres, voir mon frère où Tom Benier, le barbier, m'a coupé les cheveux.
            De là chez milady et dînai avec elle et Mr Loxton, Gibbons et Goodroom, et après dîner fait un peu de musique, et rentrai travailler, et dans la soirée ma femme et Sarah et le petit laquais très agréable promenade jusqu'à la Demi-Etape. Et retour, et au lit.


                                                                                                             14 juin1662

            Levé à 4 heures du matin et été travailler au bureau. Puis réunion pour travailler et vers 11 heures, ayant une chambre que nous avions réservée, nous sommes allés à la colline de la Tour et là, en face d'un échafaud élevé exprès ce jour nous avons vu amené Henry Vane. Une grande presse. Il a fait un long discours interrompu à de nombreuses reprises par le shérif et par d'autres, et il lui aurait enlevé le papier qu'il tenait, sauf qu'il ne se le laissa pas arracher. Mais ils firent livrer au shérif tous les calepins de ceux qui prenaient des notes, et on fit venir les trompettes sous l'échafaud pour empêcher qu'on l'entendît.        
            Puis il pria, se prépara et reçut le coup. Mais il y avait tant de monde sur l'échafaud que nous n'avons rien vu, alors que Borman qui était sur place vint et nous raconta qu'il avait commencé par parler de l'irrégularité de son procès disant qu'on avait, contrairement à la Grande Charte, refusé d'admettre les exceptions qu'il avait soulevées contre l'acte d'accusation, et qu'à ce moment il fut interrompu par le shérif. Il tira alors ses notes de sa poche et commença à les lire. Il dit d'abord qu'il était né gentleman et qu'il avait été élevé en gentleman, qu'il en avait les qualités, et pour paraître aux yeux du monde encore plus gentleman, il avait été jusqu'à 17 ans un bon vivant, mais qu'alors il avait plu à Dieu de déposer dans son coeur une fondation de grâce qui le convainquit, contre son intérêt en ce monde, de renoncer à toute carrière et à quitter le pays pour aller où il pourrait servir Dieu avec une plus grande liberté. Il fut alors rappelé et élu membre du Long Parlement. Il n'a là jamais agi contre sa conscience, mais toujours pour la gloire de Dieu. Ici il voulut leur exposer les actes du Long Parlement mais on l'interrompit si souvent qu'enfin il fut forcé de renoncer. Il pria alors pour l'Angleterre en général, puis pour ses églises et enfin pour la cité de Londres. Et il prit la position requise pour le billot et reçut le coup. Il avait une cloque ou une suppuration au cou et il demanda qu'on ne la blessât pas. Il ne changea ni de couleur, ni de langage jusqu'à la fin, mais il mourut en se justifiant ainsi que la cause qu'il avait défendue. Il dit avec une grande assurance qu'il serait à la droite du Christ. Il se montra en tout l'homme le plus résolu qui soit mort de cette façon, manifesta plus d'ardeur que de peur mais avec une humilité et une gravité parfaites. Quelqu'un lui demanda pourquoi il ne priait pas pour le roi. " Si, dit-il, vous allez voir que je sais prier pour le roi, que Dieu le bénisse ! "
            Le roi avait promis son corps à sa famille, aussi dit-il qu'il espérait qu'on aurait des égards pour son corps quand il serait mort et demanda qu'on lui permît de mourir en gentleman et en chrétien et non pas dans la foule et la cohue.                                                 lartpourtous.blog.tdg.ch   in Moma 
Résultat de recherche d'images pour "été   londres peinture moma"            Un petit moment au bureau puis nous nous rendîmes tous à Trinity House pour dîner, et de nouveau au bureau jusqu'au soir, et rentrai, et au lit. J'apprends aujourd'hui que milord Peterborough est arrivé inopinément de Tanger pour exposer au roi la situation sur place qui, nous en avons peur, n'est pas des meilleures. Nous apprenons aussi que les Espagnols sont devant Lisbonne avec treize navires, dont six hollandais. Ce qui, je le crains, augure mal pour le Portugal.
            J'ai écrit une lettre relatant tous les événements de cette journée à milord qui se trouve à Hinchingbrooke. Il est me dit-on, satisfait des travaux qu'ils y font.


                                                                                                                            15 juin
                                                                                                         Jour du Seigneur
            A l'église ce matin et dînai à la maison où arrivèrent mon frère Tom et Mr Fisher, second mari de ma cousine Nan Pepys, un homme très facile à vivre, un vieux Cavalier. Je lui ai fait fête autant que je pouvais, et nous avons été très gais. Je suis content qu'elle ait trouvé un si excellent homme. Après leur départ de nouveau à l'église, mais comme ma femme n'était pas habillée à mon goût je me fâchai et elle, une fois en route pour l'église s'en revint, vexée. Mr Mills fit un sermon banal. De retour je m'aperçus que ma femme et Sarah étaient allées à une église voisine, ce qui ne me déplut pas. Elle revint bientôt et après quelques propos acerbes nous fûmes réconciliés. Son frère vint alors la voir. Elle me dit ensuite qu'elle le croyait marié à une femme qui lui apporte 500 livres et qu'il avait demandé ce qu'il ferait de mieux de cet argent. Mais je m'abstins de lui donner quelque conseil tant qu'elle ne pourrait pas me dire avec certitude ce qu'il en est, répugnant à me mêler trop tôt de ses affaires. Puis promenade sur la terrasse, souper, et au lit.


                                                                                                                   16 juin 1662

            Levé avant 4 heures et après un peu de travail pris Will. Nous franchîmes à pied la colline de la Tour. La porte n'était pas ouverte, nous sommes par Sainte-Catherine et par Ratcliff, je crois, au bord du fleuve, parcourant plus d'une demi-lieue avant de trouver un canot. Nous avons alors passé le fleuve dans un canot à un seul rameur, ce qui ne m'était pas arrivé depuis longtemps, et sommes finalement allés à pied à Deptford où j'ai vu où en est le travail pour la maison de sir William Batten et pour la mienne. Il est presque terminé. J'ai aussi, avec Mr Davies, inspecté le suif de mon cousin Joyce et l'ai comparé avec le suif d'Irlande récemment acheté. Le nôtre est beaucoup plus blanc mais aussi mou. Lequel des deux a un défaut, si c'est un défaut, je n'en sais rien.
            Nous retournâmes donc à pied jusqu'en face de la Tour et passâmes là le fleuve, et à la maison où je trouve sir William Penn et sir Mennes discutant de l'habitation de sir Mennes et de ce qu'il vienne demeurer avec nous. Je crois qu'il projette de prendre la maison de Mr Turner et que celui-ci prenne son logis, ce qui me plaît beaucoup. Nous allâmes tous les trois chez Mr Turner examiner la maison pour, je crois, que Mr Mennes la vît.
            Puis par le fleuve, avec ma femme, à la Garde-Robe où nous dînâmes, et l'après-midi, avec tous les enfants, par le fleuve à Greenwich où je leur montrai le yacht du roi, le palais et le parc, tous fort agréables, et nous allâmes à la taverne, avons entendu leur musique, et retour gaiement. Will et moi revînmes de la Garde-Robe à pied ayant laissé ma femme à l'appontement de la Tour. Je la retrouve couchée, pas très bien, car elle a ses époques. Et au lit.


                                                                                       à suivre.......
                                                                                                       17 juin 1662

            Levé, Mr M........
   


                                                                                                             

            

dimanche 26 février 2017

La vengeance des mères Jim Fergus ( Roman EtatsUnis )


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                                               La Vengeance des Mères

            Les Indiens ont des dons. Imiter à la perfection le cri du vautour ou se faire oublier et réapparaître sous une autre forme. Un jour le jeune journaliste propriétaire d'une revue reçoit la visite d'une jeune femme vêtue à quelques détails près comme une Indienne. Apparition, non puisqu'elle lui
abandonne une serviette remplie de cahiers. Malgré les difficultés et les obligations de son métier il les lit. Et plonge dans un univers, dans une autre époque, en-dehors de Chicago et de ses activités habituelles. Seize ans plus tôt Fergus a publié " Mille femmes blanches ". Epopée racontant la proposition faite par les Cheyennes d'un échange : mille chevaux contre mille femmes blanches. Le capitaine Grant accepta. Mais les guerres continuèrent. Le livre s'achevait en 1876. Nombre de femmes acceptèrent espérant fuir qui la prison, d'autres souteneurs, telle Lulu, chanteuse et danseuse de Cancan, arrivée de Marseille passée par San Francisco. On retrouve sa gouaille et ses peurs dans les cahiers qui constituent un journal des événements. Trois d'entre elles l'entretiennent Molly Mc Gill, forte et pleine d'une douleur de mère ainsi que les soeurs Kelly, rousses, demeurées surtout pour venger la mort de leurs petites filles, mortes de froid alors qu'elles étaient obligées de fuir l'attaque de leur village de tipis. Village de Little Wolf, de Crazy Horse. Les Indiens veulent conserver leurs territoires où courent les bisons, si nécessaires, épaisse fourrure, peau, les cerfs, et les chevaux pour parcourir les très vastes territoires. Nous sommes à la fin de l'hiver, même si le froid est encore intense la neige fond et ruisseaux et rivières abondent en truites, quelques racines émergent. Mais les pauses sont rares, les troupes américaines pourchassent les cheyennes, les yacotas, tous les groupes indiens, pour récupérer des terres nécessaires aux nouveaux arrivants, créer des fermes, amener des troupeaux de vaches. Les luttes sont sanglantes, les femmes n'hésitent pas à tuer, scalper et plus quand elles peuvent pour venger les enfants enlevés ou cruellement blessés. Les moeurs indiennes sont bien décrites, pas d'intimité, timidité des hommes durant les danses prévues pour les accordailles. Et les chevaux auxiliaires vaillants pour traverser falaises, plaines et collines dans ce nord ouest de l'Amérique. Sitting Bull et sa suite se joint à celle de Little Wolf. Nous sommes en 1876, les armes à feu sont rares, pourtant les femmes apprennent à tirer accrochées à la crinière de l'animal d'une main, d'un pied à la croupe, alors qu'elles penchées à hauteur des jambes, invisibles peuvent tirer sur l'ennemi. Mais l'usage des flèches, des sabres et des couteaux est un atout pour les valeureux guerriers qui ne pourront préserver que quelques réserves. C'est un western.









Gourmandises 2 Agatha Christie ( Crèmes et Châtiments Grande Bretagne )

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francokurde.blogspot.com


                                                           Crèmes 
                                                                       et Châtiments

            Agatha Christie était non seulement une grande gourmande, elle était aussi une grande voyageuse, suivant en Orient, notamment en Irak son second mari archéologue. Les épices accompagnent les aubergines frites ou les poivrons de cette recette

            Dinde à l'Irakienne

           Frictionner la dinde avec un mélange de sel thym poivre et moutarde à l'extérieur et à l'intérieur. Et de farce la remplir, pour cela :
            1 pomme rissolée dans de préférence de l'huile d'olive, touillez les petites lamelles qu'accompagnent une poignée de raisins secs et une tranche de poitrine fumée découpée. Muscadez, dorée la préparation la recouvrir d'un bol de riz, et d'eau. Cuisson douce. Plus d'eau ? alors il est temps de nourrir l'animal.                                                  
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            Dans un plat allant au four, largement graissé ainsi que l'oiseau de tous côtés, au four, thermostat 6/7, une heure et demie environ, l'arroser de son jus en la retournant. A ce moment, récupérer le jus de la dinde dans une casserole ajouter un verre de vin blanc et un verre d'eau, porter à ébullition en ajoutant : un de oignon,ux gousses d'ail, une carotte et une branche de céleri finement découpés.
            Contemplez l'oiseau doré et... dégustez.


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             Dans ce joli livre très imagé, on apprend que l'auteur de ces délicieux romans policiers, trop gourmande parfois, s'obligeait à la diète, soit thé léger sans lait, pendant 4 jours.

              Fricassée à l'iranienne

            1 kg de mouton ou de préférence d'agneau découpé en morceaux. Farinez et rissolez dans l'huile.    blog-de-guy.blogspot.com 
Résultat de recherche d'images pour "cuisine mouton aubergines iran"            Par ailleurs laisser dégorger 4 belles aubergines découpées en gros carrés et les saler, gros sel.
            Hachez finement deux oignons mélangés à une livre de tomates épluchées et épépinées réduites en purée et en recouvrir la viande, en ajoutant poivre rouge et curcuma, une pincée.
            Rissoler alors quelques minutes les carrés d'aubergines dans un peu d'huile et jeter sur la viande. Recouvrir de deux verres d'eau. En cours de cuisson ajouter le jus d'un citron.
            Conseil du livre : déguster avec du riz ou des pâtes orientales coupées en petits carrés.


°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°                                                           cuisinedaubery.com/feed  
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             Agatha Christie et le Tour du Monde. Elle le fit avec son premier mari, Archibald Christie, dont elle garda le nom pour son oeuvre, en 1920. Travail de conseiller financier pour lui, et plaisir de gourmande pour l'écrivain qui, à Honolulu, découvre, dit-on, le surf et les fruits exotiques.

            Salade d'Honolulu

            1 ananas
,           1 papaye
            5 petites bananes
            2 poignées de litchis                                                                     boomeresque.com
Résultat de recherche d'images pour "honolulu"            2 mangues
            1 citron vert
            1 bol de sucre roux
            1 verre de jus d'orange
            Une cuillère à soupe de rhum
            Eplucher les fruits, les découper.
            Verser dans le compotier le jus d'orange et de citron vert, le rhum.
            Ranger tout d'abord les bananes coupées finement, puis les mangues et la papaye, ensuite les litichis et enfin couronner par de grandes tranches d'ananas. Saupoudrer de sucre roux. Mettre au frais.
         Conseil du livre : utiliser un plat transparent afin que les couleurs des différents fruits s'apprécient.
            Glace vanille pour accompagner ce délicieux dessert ou sorbet citron.

         
     
                                                                   in extraits Crèmes et Châtiments
                                                                                 
                                                          

jeudi 23 février 2017

Mots d'auteur Anton Tchekhov ( Flash )

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                                               ** Flash **


            ............ Jugeant des autres d'après soi, il ne croyait pas à ce qu'il voyait et supposait toujours que, pour chaque homme, c'était sous le couvert du secret comme sous le couvert de la nuit que se déroulait sa vraie vie, la plus intéressante. Toute existence personnelle se fonde sur le secret, et peut-être est-ce en partie pour cela que l'homme civilisé s'énerve tant pour que le secret de la vie privée soit respectée............


                                                                           Anton Tchekhov
                                                                                            ( in La Dame au petit chien )                  

mardi 21 février 2017

Contre-Attaque Philippe Sollers ( Roman France )

Contre-attaque


                                                 Contre -Attaque
                                                                   Entretiens avec Franck Nouchi

           De " La France moisie " Philippe Sollers poursuit une réflexion qui dans ce beau texte décrit une " France suffocante "selon ses mots. D'un entretien avec Franck Nouchi débuté 27 octobre 2015 achevé le 25 mars 2016 il ressort une somme de pensées soutenues par les philosophes"....... Oui, finalemet, ce XXè sc a été très décevant....... repartir d'avant 1914, de Péguy..... " Notant une grande misère spirituelle, idéologique. Parlant des écrivains, Voltaire et son " Traité sur la tolérance ", il indique la plus grande aptitude des auteurs à transmettre la pensée plutôt que les idéologues." Paris est une fête  ", Hémingway ", livre très recherché après un attentat. Houellebecq très lu en Europe, moins aux EtatsUnis, prémonitions. Mais Philippe Sollers bordelais ne cesse de revenir sur ses écrits, ses différends avec Debray, dissèque les propos de Alain Finkielkraut, et revient toujours sur la société du spectacle de Debord. Mais toujours Sollers rappelle les textes-trésors de Rimbaud, Proust, Baudelaire.
Et revient tout au long de l'ouvrage sur le problème des religions. Et l'enfance "...... Je ne vois pas pourquoi je devrais oublier mon enfance....... un endroit extrêmement important pour tout artiste, pour tout écrivain...... " Le débat "...... Les pontes ne comprennent rien....... Ils sont hostiles, à priori, à toute représentation de la contradiction. Elle est trop vivante....... Philip Roth écrit : - Rendre la nuance, telle est la tâche de l'artiste. Sa tâche est de ne pas simplifier...... d'élucider la complication, et d'impliquer la contradiction...... " Philippe Sollers transmet sa culture dans ses nombreuses parutions, ses précédents écrits, il est ainsi possible d'approfondir à son rythme en le relisant tous les sujets suggérés par l'auteur. 13 chapîtres. En attendant son prochain ouvrage, sans doute " Les lettres à Dominique Rollin ".

samedi 18 février 2017

Correspondance Proust Gallimard 11 A Gustave Tronche ( Lettres France )

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lesmaterialistes.com
                                           
                                              A Gustave Tronche

                                                                                                         19 ou 20 juin 1921

            Cher ami
            ( ou plutôt bien cher ami, formule de vous que je trouve plus gentille ) j'ai reçu tantôt deux pneumatiques charmant de Léon Daudet ( tout ceci confidentiel ). Mais comme de ces pneus il ressort que pour des raisons que je vous donnerai verbalement, L'Action Française va proposer à la N.R.F un nouveau texte, mais que dans cet écho ni le nom de Vendérem ni le titre Sodome et Gomorrhe ne figureront, mon avis est celui-ci :
            1° Comme avant tout je suis désireux de ne pas fâcher Léon Daudet, je serais d'avis d'accepter l'écho qu'ils proposeront ( je crois que l'antisémitisme n'était pour rien dans la chose mais que sale juif est une " épithète homérique dans la maison ") si l'écho est suffisamment élogieux pour compenser le manque de précision.
            2° Mais si l'écho se trouve insultant pour Vandérem ( et je trouverais tel qu'on citât textuellement des phrases de lui sans le nommer ) il vaut mieux répondre que vous ne pouvez accepter ce texte et que désormais la N.R.F. s'adressera pour la publicité à des journaux où c'est moins compliqué.
            Vous serez bien gentil de rendre cette lettre à Odilon après l'avoir mise sous enveloppe que vous fermerez.
            J'ai fait téléphoner ce soir à Jacques Rivière, non pour lui dire ce que vous me défendez, mais pour qu'il vienne me voir. Mais sa concierge a répondu qu'on ne répondait pas de chez lui, et comme il était en effet plus de neuf heures et demie je n'ai pas insisté pour ne pas être une cause de fatigue pour lui.
            Je vais écrire à Gaston pour le remercier du chèque que vous avez eu la gentillesse de faire doubler. Je reste navré de votre décision et y pense sans cesse
            Votre ami

                                                                                Marcel


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                                                   A Gustave Tronche

                                                                                                             20 juin 1921

            Bien cher ami
            Vous seriez bien gentil de m'envoyer un pneu ( je ne l'aurai sans doute que très tard, doutant fort de pouvoir me déshabiller avant 1 heure de l'après-midi, et le temps des fumigations et du repos me mènera tard ).
Résultat de recherche d'images pour "antisemitisme tableaux"            1° J'ai relu plus attentivement les 2 télégr peu lisibles de Léon Daudet et je me demande s'il ne dit pas que son journal a proposé une rédaction n.. à la N.R.F. ). En un mot j'avais compris un amendement à venir, alors que peut-être c'est un amendement passé. S'il s'agit d'un amendement passé, c'est que votre messager l'a repoussé sans vous consulter, en quoi il a eu grand tort. Mais dans ce cas je ne vous conseille pas ni à vous, ni à lui, ni à personne de prendre l'initiative d'un nouvel écho à l'A.F. Je trouve que ce serait manquer de dignité. ( Cela n'empêche pas les deux télégr de Daudet d'être charmants et assurément s'il était seul rien ne se serait produit. Dans ce cas nous nous tiendrons à votre système du  Temps etc. ( Je suis contre les Débats. Peut-être Bonsoir ). - Mais peut-être avais-je bien lu la 1re fois et allez-vous recevoir des suggestions  de l'A.F. Dans ce cas vous verrez pour le mieux en évitant que ce soit blessant pour Vandérem.
            2° Les "Belles Lettres " dirigées par un M. Landeau (?) ont-elles une importance qconque. J'ai le sentiment de n'avoir pas répondu à beaucoup de lettres d'eux. En tous cas je viens d'écrire à M. Gallien qui me demandait un rendez-vous afin de dessiner ma gueule pour cette revue que j'étais trop souffrant. Je lui enverrai peut-être une photo. De tout coeur à vous.


                                                                                        Marcel Proust


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                                                   A Gaston Gallimard

                                                                                                            Samedi soir
                                                                                                  10 septembre 1921

            Mon cher Gaston
            J'ai reçu aujourd'hui une dépêche qui m'a fait un plaisir profond, et une lettre qui m'a bien ennuyé. La dépêche était de Jacques. Comme dans sa lettre d'hier il avait l'air tourmenté que je ne donne pas d'extrait à la NR.F. ( non évidemment qu'il y tienne mais parce qu'il fallait alors boucher un trou  et que me chercher un substitut surmenait ses nerfs ) je lui ai envoyé à la première heure dépêche pour qu'il ne se fasse pas de bile et pour l'assurer que Paulhan avait l'extrait. Sa réponse télégraphique que j'ose à peine vous dire tant elle était heureuse, témoignait d'un tel calme reconquis que j'en ai été ému du fond du coeur.                                                                 contrecourant.Wordpress.com  
Résultat de recherche d'images pour "antisemitisme tableaux"            La lettre qui m'a ennuyé est la vôtre ( reçue seulement ce soir Samedi ) et vous comprenez bien si elle me contrarie, c'est parce que je sens que vous ai contrarié. Mais mon cher Gaston puisque cela vous contrariait vraiment, et puisque j'avais dit à Duvernois que c'était, sous réserve de votre autorisation, pourquoi ne pas m'avoir dit à temps " ne le faites pas ". Je me suis engagé aussitôt après vous avoir vu. Je comprends bien que vous ne m'avez rien dit par délicatesse, mais j'aurais mieux aimé ne pas vous ennuyer. J'envoie un mot à Duvernois pour lui proposer comme titre : " Une jalousie ", au lieu de Sodome et Gomorrhe 2 ( mais je ne lui demande pas de mettre : " Extrait d'un volume "etc, car du moment que cela change de titre, voyez d'ici quelle confusion cela ferait. Un lecteur viendrait à la N.R.F. demander : " Donnez-moi Une Jalousie de M. Proust . - Ah ! il n'a rien publié ici sous ce titre ).Votre lettre me contrarie aussi ( mais ceci est secondaire ) parce que je vois qu'il faut renoncer à l'espoir de publier d'autres extraits d'autres volumes, aux Oeuvres Libres.  Puisque vous me dites, trop tard, que vous n'approuvez pas que j'aie donné un 1er article aux Oeuvres Libres, cela me ferme la voie pour toujours. Car maintenant je suis averti, cela vous contrarie, donc je ne pourrai jamais récidiver, désirant avant tout ne pas vous contrarier. Sur la question d'argent il m'est difficile de vous répondre car je comprends mal votre raisonnement. En deux mots si j'ai saisi, cette collaboration fait gagner de l'argent à M. Proust, mais elle en fait gagner infiniment plus à M. Fayard. Mais songez qu'en m'interdisant pour l'avenir de recevoir de l'argent de M. Fayard ( je me soumets naturellement et ne vous reparlerait pas des Oeuvres Libres ), vous me mettez dans une position d'autant plus délicate que je n'en recevrai pas plus de la N.R.F. Elle me doit en ce moment ( si je compte bien et je peux me tromper ) environ soixante mille francs. Comment pourra-t-elle jamais me les payer ( au fond j'espère bien que si et qu'elle me les paiera ). C'est bien loin d'être un reproche et vous savez que j'ai accepté moi-même votre mode de paiement à 2 500 fr par mois. Mais il ne fonctionne pas tous les mois. Et ce que je touche un mois est " imputable " à des mois antérieurs. D'autre part au fur et à mesure que la N.R.F. ne pourra pas me payer, je lui livrerai de nouveaux livres qui accroîtront encore sa dette. C'est le tonneau des Danaïdes. Croyez bien que je vous dis tout cela dans un esprit tout " affectueux ", et avec une affection que je ne mettrais même pas si je me parlais à moi-même. Ce n'est ni une critique, ni une demande, tout simplement le regret que vous ne laissiez pas d'autres, compenser un peu cela. - Vous savez que pour la question des - voisinages - je n'ai jamais cru qu'ils nuisaient autant que vous le croyez à un auteur tant soit peu classé. Sans cela il n'y avait pas de raison pour que je ne refuse pas le Prix Goncourt parce que Claude Farrère et tant d'autres l'ont eu. Et la N.R.F. elle-même ne publie pas que des chefs-d'oeuvre, à commencer par les oeuvres de votre serviteur et ami


                                                                                          Marcel Proust

Encore une fois, lisez cela comme cela a été écrit, en toute amitié.

P.S. Faites attention que par erreur j'ai laissé trois ! feuille(?) blanche(?) fiez-vous seulement aux n°s des pages.


                                                       A Gaston Gallimard

                                                                                             Le 19 ou 20 septembre 1921

           Lettre importante à lire soigneusement.

           Mon cher Gaston                                                                 Van Gogh in the moma   pinterest.fr
Résultat de recherche d'images pour "impressionnistes moma"           Bien qu'ayant fait une petite chute dans ma chambre qui ne me rend pas très agréable d'écrire aussitôt après, je mentirais si je vous taisais que j'ai peu de satisfaction de la N.R.F. et comme cette même chute ( d'ailleurs insignifiante ) m'empêchera vraisemblablement de recevoir et de sortir, surtout si vous devez toujours aller en Bretagne. La N.R.F. a pour me martyriser deux directeurs, l'un le directeur général est vous. Il est toujours absent, pour des rendez-vous d'affaires etc mais enfin où je ne peux le relancer quand j'ai un conseil à lui demander. Et même quand il est à la Revue il me fait répondre qu'il n'y est pas ( ce qui me ramène au temps où Swann fut refusé et où je téléphonais avec une vaine naïveté trois fois par jour ). Le directeur de la Revue mon très cher Jacques Rivière, a imaginé je ne sais sur quoi qu'il n'avait pas comme extrait tout ce qu'il a demandé, alors qu'il a tout et un peu plus. Il en est résulté des semaines de lettres, de dépêches, d'angoisse pour moi à devenir fou.
 ( Excusez-moi bien auprès de M. Paulhan. Sans ma chute j'aurais cherché à aller le remercier.) Craignant que Jacques n'eût besoin d'encore plus je lui ai offert en surplus la Visite des Cambremer. Mais il paraît que c'est trop long. Enfin je lui ai offert pour le n° de novembre toute la fin du livre. Mais il faudrait des coupures. Je m'y refuse absolument ( envoyez-lui cette lettre car cela me fatigue trop d'écrire à vous deux ). Vous craignez qu'un extrait aux Oeuvres libres n'empêche de lire le livre. Mais au moins le titre étant différent il y a chance pour que ce soit le contraire. Dans la N R f en revanche où le public est mon public, tout le monde comprendra que c'est la suit  et si je faisais des coupures, je mutilerais mon oeuvre car personne ne se reporterait au livre. Dites en conséquence à Jacques que je ne lui donnerai rien en Novembre, il aura seulement en Octobre ce qu'il a demandé et un peu plus. Je renonce à répondre à la N.R.F. puisque il s'obstine ( pas Jacques Boulenger, Jacques Rivière ). En admettant le principe que l'extrait aux Oeuvres Libres ne nuit pas au livre, je reconnais ou plutôt je crains ( car je n'ai pas encore eu d'épreuves ) que le fragment soit très long et très fâcheusement choisi pour le livre. Je vous aurais demandé conseil quand il en était temps si vous ne m'aviez volontairement glissé entre les doigts comme une vraie anguille. ( Vous n'avez même pas répondu à ma lettre ). J'ai vu Duvernois après vous avoir vu, avant son départ pour Bruxelles où il est. Il m'a fait envoyer immédiatement un à-valoir de 10 000 fr. Il croit ( ? ) qu'à la répartition je peux avoir autant. Je lui ai dit votre sympathie ce qui a paru beaucoup le toucher, et je lui ai dit que jamais plus il n'aurait une ligne de moi dans les Oeuvres libres car je craignais de vous contrarier. Il en a paru très ennuyé, m'a dit de ne pas perdre tout espoir mais ma décision, bien que prise à regret, est formelle. Je n'écrirai plus aux Oeuvres libres ( comme je n'y aurais jamais écrit si vous me l'aviez dit le soir où vous êtes venu ). Maintenant mon cher Gaston je tiens à vous faire une recommandation très importante. N'allez pas ( bien entendu la question de votre loyauté et des droits ne se pose pas, j'ai pleine confiance en vous ), pour me prouver que Duvernois se trompe et que les Oeuvres libres feront tort à Sodomorrhe 2, soigner moins la diffusion de ce volume ( peut-être en 2 volumes ) que des précédents. Ce serait d'abord absurde puisque je vous ai promis de ne plus écrire aux Oeuvres Libres. Ce serait de plus très fâcheux. Cet ouvrage ( Sodome 2 ) est le plus riche en faits psychologiques et romanesques que je vous aie encore donné. La partie qu'a Duvernois est de beaucoup la moins bonne ( et je le regrette de ttes façons car c'est la plus nuisible au livre ). Donc mettez d'autant plus d'activité à lancer ce volume ( ou ces 2 volumes, c'est très long ) pour effacer le tort que la publication d'une partie en revue aura pu faire, et pour me récompenser de mon sacrifice puisque je refuse désormais leur collaboration.
Résultat de recherche d'images pour "antisemitisme tableaux"            Pour le titre de l'extrait de Jacques j'aimerais quelque chose comme " La perte après coup de ma grand'mère ".
            Vous pouvez mettre en note extrait de Sodome 2 ( bien que le morceau choisi par Jacques ne soit guère de nature à faire lire le livre ). En tous cas comme il n'y a dans ce morceau ni Sodome ni Gomorrhe, ces 2 noms seraient déplacés en titre principal. Voulez-vous le dire à Paulhan avec mes amitiés. La fatigue, l'épuisement pour mieux dire m'arrêtent. Je suis mon cher Gaston affectueusement votre dévoué

                                                         Marcel Proust

Je reçois avant que cette lettre soit fermée les épreuves de la N.R.F. qui "tombent " ( comme moi ! ) aussi mal que possible. Je vais néanmoins les corriger mais vous demande quand on n'en aura plus besoin qu'on me les renvoie car mes corrections ( les fautes sont nombreuses ) serviront pour le volume. Le titre le meilleur est : Les Intermittences du Coeur. C'est le mieux, il n'y a pas à hésiter. Je constate avec joie en parcourant ces épreuves que tout ce que m'avait demandé Jacques et dites-le lui en plaisanterie gentille, qu'il m'a tourmenté pour rien. - . Je trouve que je suis très gentil de vous sacrifier pour l'Avenir les Oeuvres libres cher prieur, car notre traité ne contient nul voeu de célibat, de chasteté, de pauvreté. Je vous recommande à nouveau de vous donner un peu de mal pour le lancement de mon nouveau livre sur lequel j'entasserais volontiers tous les éloges que Balzac dans sa correspondance, donne, avec tant de naïveté mais du génie, aux siens. Or comme les deux suivants sont encore " mieux " ( ! ) il ne faut pas que j'aie l'air, avec un nombre restreint d'éditions, d'être
 " fini". Déjà M. Souday semble me préférer Binet-Valmer. Preuve d'indépendance politique sans doute.

P.S. Hélas je vois qu'une goutte de café est tombée sur la 1re page de cette lettre. Mais recommencer 17 pages c'est impossible.