jeudi 26 janvier 2012

Le Savetier Mallarmé ( extraits de Chansons bas ) et La Petite Marchande d"herbes aromatiques

                      Le Savetier, premier titre Le Carreleur de souliers  parait en 1889 dans des Types de Paris puis en 1892 dans La Revue Blanche où paraît aussi La Petite Marchande d'herbes aromatiques paru auparavant dans des Types de Paris sous le titre La petite marchande de lavandes. Les textes de Chansons bas furent écrits pour accompagner les dessins d'un graveur, Raffaelli. Ils furent mis en musique par Darius Milhaud en 1920.

                                                                                                  
                                                                                            
                   Le Savetier                                                          
                                                                                                
                                                                                                 
                   Hors de la poix rien à faire,                                    
                   Le lys naît blanc, comme odeur                              
                   Simplement je le préfère                                         
                   A ce bon raccommodeur.                                       
                   Il va de cuir à ma paire                                            
                   Adjoindre plus que je n'eus                                     
                   Jamais, cela désespère
                   Un besoin de talons nus.                                           

                    Son marteau qui ne dévie
                    Fixe de clous gouailleurs
                    Sur la semelle l'envie
                    Toujours conduisant ailleurs.                                   
                                                                                                   
                    Il recréerait des souliers,                                          
                   Ô pieds, sivous  le vouliez!                       




                      Stéphane Mallarmé

                                                                        **************

                     La Marchande d'herbes aromatiques


                Ta paille azur de lavandes,
                Ne crois pas avec ce cil
                Osé que tu me la vendes
                Comme à l'hypocrite s'il

                En tapisse la muraille
                De lieux les absolus lieux
                Pour le ventre qui se raille
                Renaître aux sentiments bleus.

                Mieux entre une envahissante
                Chevelure ici mets-la
                Que le brin salubrey sente,
                 Zéphirine, Paméla

                Ou conduise vers l'époux
                Les prémices de tes poux.



                     Mallarmé







            


                   

                                                                                                                                                                                        Les prémices de tes poux                                                                                                                                              

mardi 24 janvier 2012

BRISE MARINE Stéphane Mallarmé ( Poème France )

Mallarméphotographié par Nadar en 1896.Stéphane Mallarmé né à Paris en 1847 n'a cessé de recherché la
               beauté. Ses poèmes maintes fois retravaillés, il admire Baudelaire et ses Fleurs du Mal.
               Professeur d'anglais il traduit Edgar Poe. Chahuté par ses élèves, de santé fragile, il subit
               également la perte douloureuse d'un enfant. Verlaine publie certains textes dans Les Poètes
               Maudits ( Sonnets ). Le poème qui suit, Brise Marine, parait en 1866 dans le Parnasse
               Contemporain, alors qu'il est occupé par l'écriture de l'Après-midi d'un Faune. 1896
               Verlaine meurt, son titre  Prince des Poètes revient à Mallarmé, poète symboliste. Il
               disparaît en 1898.
               BRISE MARINE
               
               La chair est triste, hélas ! et j'ai lu tous les livres.
               Fuir ! Là-bas fuir ! Je sens que des oiseaux sont ivres
               D'être parmi l'écume inconnue et les cieux !
               Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux,
               Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe,
               O nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe
               Sur le vide papier que la blancheur défend,
               Et ni la jeune femme allaitant son enfant.
               Je partirai ! Steamer balançant ta mâture,
               Lève l'ancre pour une exotique nature !
               Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,
               Croit encore à l'adieu suprême des mouchoirs !
               Et, peut-être, les mâts, invitant les orages
               Sont-ils de ceux qu'un vent penche sur les naufrages
               Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots...
               Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots !
               Stéphane Mallarmé
                 

lundi 23 janvier 2012

L'envie Sophie Fontanel ( roman ) France

L'envieL'envie

                                                                          Durant une période indéterminée l'auteur nousconte à la

             première personne l'histoire d'une femme " ... j'ai vécu... lapire insubordinationde notre                    
            époque, qui est l'absence de vie sexuelle... ". Commencée à 13 ans dans les bras d'un mexicain,
            active jusqu'au jour où " ... derrière mon habitude d'obéir, j'avais la pulsion de m'enfuir... " Tout est
            prétexte pour comprendre son état d'esprit. Ses amis tentent de lui rendre service : présentation de
            candidats, look plus féminin. L'auteur, journaliste à Elle ( voir sa célèbre Fonelle ) a des relations, et
            les couples voient en elle l'oreille propre aux épanchements. Elle écoute, voyage, visite les églises.
            Un jour une collègue, les hommes " ... Y en a pas ..." Accompagner Sophie Fontanelle, après
            Grandir, apporte un joli moment de réflexion.








samedi 21 janvier 2012

Le Dôme des Invalides Balzac

Le Dôme des Invalides
                                         Hallucination
          Balzac entouré d'écrivains auteurs de romans fantastiques de Walter Scott à Nodier recherche lui aussi les " correspondances avec les esprits ". Cette nouvelle est le reflet de cette réflexion à un moment
de son itinéraire.


          Ce fut par une belle journée du mois de juin, entre quatre et cinq heures, que je quittai la cellule de la rue du Bac où mon honorable et studieux ami le baron de Werther m'avait donné le déjeuner le plus délicat dont il puisse être fait mention dans les chastes sobres annale de mon estomac ; car l'estomac a sa littérature, sa mémoire, son éducation, son éloquence ; l'estomac est un homme dans l'homme ; et jamais je n'éprouvai si curieusement l'influence exercée par cet organe sur mon économie mentale.
          Après nous avoir gracieusement régalés de vins du Rhin et de Hongrie, il avait par politesse terminé le repas amical en faisant servir du vin de Champagne. - Jusque-là, son hospitalité se serait trouvée vulgaire, sans sa causerie artiste, sans ses récits fantastiques, et surtout sans nous autres, nous ses amis, tous gens d'entraînement, de coeur et de passion.
          Nous nous trouvâmes, vers la fin du déjeuner, livrés tous à une mélancolie douce, et plongés dans une absorption assez naturelle aux gens qui ont bien mangé.
          Voyant cela, le baron, cet excellent critique, cet Allemand érudit, qui, malgré sa baronnie, mène l'admirable et poétique vie des moines du XVè siècle devant un paysage monacal, dans une cellule abbatiale ; notre moine, dis-je, couronna son oeuvre de gastrolâtrie par un vrai tour de moine;
          Au moment où la conversation s'arrêta, quand nous fûmes tous sur des fauteuils inventés par le confort anglais et perfectionnés à Paris, qui eussent fait l'admiration des bénédictins, Werther s'assit à une petite table, et, levant une partie du couvercle, il tira, d'un instrument allemand, des sons qui tiennent un juste milieu
entre les accents lugubres d'un chat implorant une chatte ou rêvant des joies de la gouttière, et les notes d'un orgue vibrant  dans une église. - µJe ne sais ce qu'il fit de ce terrible appareil de mélancolie, mais jamais mon intelligence ne fut plus cruellement bouleversée. Le souffle de l'air, dirigé sur des métaux, produisait des vibrations harmoniques si fortes, si graves, si perçantes, que chaque note attaquait immédiatement une fibre, et cette musique de vert-de-gris, ces mélodies pleines d'arsenic, introduisirent violemment dans mon âme toutes les rêveries de Jean-Paul, toutes les ballades allemandes, toute une poésie fantastique et douloureuse qui me mit en fuite, moi gai, moi jovial, mais souffrant, mais agité. Je me trouvais comme dédoublé. Mon être intérieur avait quitté cette forme extérieure pour laquelle une ou deux femmes, ma famille et moi, nous témoignions assez d'amitié. - L'air n'était plus de l'air ; mes jambes n'étaient plus des jambes ; c'était une nature molle et sans consistance qui pliait, et les pavés s'enfonçaient, les passants dansaient et je trouvais Paris singulièrement gai.
          Je pris par la rue de Babylone, et je marchai mélancoliquement vers les boulevards, en prenant le Dôme des Invalides pour mon orient. - Au détour de je ne sais quelle rue, je vis le Dôme venir à moi ! - Dans le premier moment, je fus un peu surpris et je m'arrêtai. - C'était bien le Dôme des Invalides, il se promenait sur sa pointe, et se mettait au soleil comme un bon bourgeois du Marais. Je pris d'abord cette vision pour un effet d'optique et j'en jouis avec délices, sans vouloir m'expliquer le phénomène ; mais j'eus une sensation de frayeur, quand en le voyant s'avancer, il voulut me marcher sur les talons... Je me mis à courir, mais j'entendis derrière moi le pas lourd de ce coquin de Dôme, qui avait l'air de se moquer de moi. ses yeux riaient ; en effet, le soleil, passant à travers les ouvertures qui y sont pratiquées de distance en distance leur donnait une vague apparence, avec des yeux, et de Dôme me jetait de véritables regards...
          " Je suis bien bête, pensais-je, je vais aller derrière lui !... "
          Je le laissai passer, et alors il se remit la pointe en l'air.
          Dans cette situation, il me fit un signe de tête, et sa maudite robe bleu et or se plissa comme la jupet d'une femme...
          Alors, je fis quelques pas en arrière pour le planter là ; car je commençai à être extrêmement inquiet. Certes, les journaux, le lendemain, n'allaient pas manquer de raconter que moi, l'auteur de quelques articles insérés dans la Revue, j'avais emporté le Dôme des Invalides ; mais cela m'était assez indifférent, parce que je comptais bien réclamer, et raconter naïvement que le Dôme m'avait pris en amitié, m'avait sui de son propre mouvement. Mon caractère bien connu, mes habitudes et mes moeurs, devaient faire supposer que loin de dégrader les monuments publics, je plaiderais plutôt pour leur conservation.
          La difficulté la plus grande, et qui m'embarrassait le plus, entre toutes les autres, était de savoir ce que j'allais faire de ce Dôme. Certes, il y avait une fortune immense à gagner. Outre que l'amitié du Dôme des Invalides pour un homme n'avait rien que de très flatteur, je pouvais l'emmener en pays étranger, le montrer à Londrer auprès de Saint-Paul ; mais, s'il allait me suivre ainsi, comment rentrer chez moi ? - Naturellement, il allait faire des dégats considérables par les rues où il passerait ; mais je pouvait l'emmener par les quais et le tenir du côté de la rivière. En criant gare, chacun se rangerait ; mais son contact, s'il voulait entrer chez moi, renverserait la maison où je loge. quelle indemnité le propriétaire ne me demanderait-il pas ! Sa maison n'est pas assurée contre les dômes. Puis, si je l'emmenais à Londres ou à Berlin, que de dégâts sur la route, car il n'avait pas la voie...
          - Dieu ! comme les Invalides sont drôles sans le Dôme !... m'écriai-je.
          A ces mots, quelques personnes qui se trouvaient là levèrent les yeux sur l'église,et se mirent à rire.
          Quelques-uns dirent :
          - Mais qu'est-il donc devenu ?
          - Je suis sûr que tout Paris est en rumeur !...
          Alors, j'entendis un brouhaha, des clameurs à faire croire que la fin du monde approchait.
          - Allons, les voilà qui crient après leur Dôme !... me dis-je.
          Ils avaient bien raison, le Dôme des Invalides est un des plus beaux monuments de Paris ; et, depuis que, par une fantaisie assez rare chez les dômes, il était devenu ma propriété, je l'admirais avec ravissement. Il brillait sous les rayons du soleil comme s'il eut été couvet de pierreries ; son azur se directait vivement  sur celui du ciel, et sa lanterne si gracieuse, si merveilleusement élégante et légère, semblait m'offrir des beauté que je n'avais pas encore remarquées. Il avait bien quelques endroits fanés et dédorés où le plom reparaissait ; mais je n'étais pas assez riche pour leur restituer leur éclat impérial.
          J'ai vu, dans les environs de Nemours, un paysan qui a la singulière puissance de fasciner les abeilles, et de s'en faire suivre sans qu'elles le piquent. Il est leur roi ; ils les siffle, elles viennent. - Il leur dit de s'en aller , elles décampent. - Peut-être étais-je arrivé dans ma vie à un développement moral, à un pouvoir surnaturel, et peut-être avais-je le pouvoir d'attirer les dômes.
          Alors, je pensais, dans l'intérêt de la France, à remettre celui-ci à sa place et à voyager en Europe afin de ramener à Paris plusieurs dômes célèbres, ceux d'Orient, ceux d'Italie, et les plus belles tours de cathédrales... Quelle gloire !... qu'étaient les Paganini, les Rossini, les Cuvier, les Canova, les Goethe, auprès de moi !  - J'avais déjà dans mon pouvoir la foi la plus immense, cette foi dont le Christ a parlé, cette volonté sans bornes avec laquelle nous pouvons abolir les lois de l'espace et du temps, lorsque je vis venirau plus grand trot que puissent avoir les chevaux de régie, un cabriolet qui déboucha par la rue Saint-Dominique.
          - Prenez garde au Dôme !... criai-je.
          Le conducteur ne m'entendit pas : il poussa son cheval dans le beau milieu du Dôme ; je jetai un grand cri, car le pauvre Dôme, n'ayant pas pu se ranger, se brisa en mille pièces , je fus horriblement éclaboussé. Puis, quand le damné cabriolet eut passé, je vis le Dôme têtu se remettre sur sa pointe par petites secousses ; les pierres s'ajustaient, les belles rayures d'or reparaissaient insensiblement, et je m'essuyai la figure machinalement ; car en ce moment mon être extérieur revint, et je me trouvai près des Invalides, devant une grande nappe d'eau où se mirait le Dôme des Invalides.
         Il me semble que j'étais ivre. - Maudit phys-harmonica ! cela donne sur les nerfs !...


         Honoré de Balzac

         Paris 1831




                                        

vendredi 20 janvier 2012

Contribution à la Théorie du Baiser Alexandre Lacroix ( Essai France )




Contribution à la théorie du baiser  
                             Contribution à la théorie du baiser


Alexandre Lacroix directeur de Philosophie Magazine nous introduit dans sa vie privée "... ma première grande histoire d'amour avec une femme qui a duré près de douze ans... notre amour était en sursis : nous ne nous embrassions presque pas. " Plus tard une autre femme, son épouse lui reproche " Tu ne m'embrasses pas assez." Alors l'auteur s'interroge, reprend un texte de Kierkegaard ( Le journal du séducteur ). Ainsi débute son enquête sur ce geste pas si banal puisqu'il n'existe pas sous certaines latitudes, est pratiqué différemment sous d'autres, sans oublier la France et son French Kiss. La chevalerie, Salluste, les Romains,
le baiser accolade, le baiser d'amour. Lacroix étudie les films, l'histoire, internet et ses ramifications, la peinture, Munch, Magritte Klimt. Baisers d'adolescentes, baisers de lesbiennes. Au XVIè un certain très érudit Patrizi s'est intéressé à l'hydraulique de plus inventa un dialogue avec Platon " laisse deviner comment ... concevait les enjeux du palot - rien à voir avec le quart d'heure américain sexy et baveux... " Ronsard a publié Les Amours. L'auteur poursuit ses réflexions. Voici Freud et Férenczi "... le baiser était pour moi un acte presque indifférent. J'ai mis longtemps à comprendre que le rejet de l'autre commence par la bouche." Les odeurs, de fin de repas, de petits matins. Le baiser désabusé. Les baisers copains copains. Pour certains le baiser est tombé en désuétude. Bien et joyeusement malmené, avec scepticisme, AlexandreLacroix a cassé l'enveloppe de cet instrument géométrique dit-il, la bouche.



mercredi 18 janvier 2012

Les Putains et les Jongleurs ( fablel conte extrait des Fabliaux )

         Les Putains et les Jongleurs

          Lorsque Dieu eut créé le monde tel qu'on peut le voir à la ronde, avec tout ce qu'il mit dedans, il fonda trois classes de gens : les nobles, les clercs, les vilains. Les chevaliers eurent les terres ; quant aux clercs il leur octroya le fruit des dîmes et des quêtes ; le travail fut le lot des autres. La chose faite, il s'en alla.
          Sur son chemin il aperçoit une bande de chenapans : des ribaudes et des jongleurs. Il ne va pas loin, ils l'accostent et se mettent tous à crier :
          " Restez là, sire, parlez-nous. Ne partez pas ; où allez-vous ? Nous n'avons rien eu en partage quand vous avez doté les autres "
          Notre-Seigneur les regarda et, les entendant, demanda à saint Pierre qui le suivait quels pouvaient être ces gens-là.
          " Ce sont des gens faits par mégarde, que vous avez pourtant créés comme ceux qui ont foi en vous. S'ils vous hèlent, c'est qu'ils voudraient avoir leur part à vos largesses. "
          Notre Seigneur, au même instant et sans faire d'autre réponse, vint aux chevaliers et leur dit :
          " A vous qui possédez les terres je baille et donne les jongleurs. Vous devez en prendre grand soin et les retenir près de vous. Ne les laissez manquer de rien ; accédez à tous leurs désirs. Tenez bien compte de mes ordres. A vous maintenant, seigneurs clercs, je donne à garder les putains. "
          Depuis, les clercs se gardent bien de désobéir au Seigneur : ils n'ont d'yeux que pour les ribaudes et les traitent du mieux qu'ils peuvent.
          Comme ce fabliau le montre, si vous l'avez bien entendu, les chevaliers vont à leur perte quand ils méprisent les jongleurs, leur refusant le nécessaire, et les laissent aller pieds nus. Les putains ont chaudes pelisses, doubles manteaux, doubles surcots ; les jongleurs ne reçoivent guère de tels cadeaux des chevaliers. Ils ont beau savoir bien parler ; ils n'ont droit qu'à de vieilles nippes ; on leur jette comme à des chiens quelques bouchées de bons morceaux. Mais en revanche les putains changent de robes tous les jours ; elles couchent avec les clercs qui subviennent à leurs besoins. Ainsi les clercs font leur salut. Quant aux chevaliers, ce sont pingres qui ne donnent rien aux jongleurs, oubliant les ordres de Dieu. Les clercs en usent autrement, pour les putains ont la main large et se plient à tous leurs caprices. Pour elles, voyez-les à l'oeuvre : ils dépensent leur patrimoine et les richesses de l'Eglise ; en leurs mains est bien employé l'argent des rentes et des dîmes.
          Donc, si mon fabliau dit vrai, Dieu veut que les clercs soient sauvés, que les chevaliers soient damnés.

          MR
         


















mardi 17 janvier 2012

Le Miroir Baudelaire ( extrait du Spleen de Paris )

          Le Miroir

          Un homme épouvantable entre et se regarde dans la glace.

          " - Pourquoi vous regardez-vous au miroir puisque vous ne pouvez vous y voir qu'avec déplaisir ? "

          L'homme épouvantable me répond :

          " - Monsieur d'après les immortels principes de 89, tous les hommes sont égaux en droits ; donc  je            possède le droit de me mirer ; avec plaisir ou déplaisir, cela ne regarde que ma conscience. "

          Au nom du bon sens, j'avais sans doute raison ; mais, au point de vue de la loi, il n'avait pas tort.


          Charles Baudelaire
         
         

dimanche 15 janvier 2012

Jerry Lewis avec J Kaplan

Dean et moi


          Le sous-titre une " histoire d'amour" ne dément pas ce que l'on connaît des histoires d'amour. Elle dura dix ans, ils ne se supportèrent plus et se séparèrent pour jouer en solo. Le tandem débuta un 23 juillet 1946. " A l'époque d'Eisenhower et du sénateur McCarthy, on a libéré l'Amérique... nous avons écrit l'Histoire... " Martin et Lewis de Las Végas au Copacabana, le petit juif né à Newark, enfant de la balle, et l'Italien à l'accent du sud " un type sexy flanqué de l'idiot de service."
Le Dieu Hasard leur sourit dans le choix de leurs sketchs et des scénaris de leurs premiers films. Il les accompagna même, dit-il, un jour où ils jouèrent au casino 24 h alors qu'ils avaient bourse plate et chacun femme et enfants. Mais Dean Martin crooner blessé sans doute par une jeunesse passée à fuir les képis, de neuf ans l'aîné de Jerry Lewis, ce dernier n'avait que 20 ans lors de leur rencontre, éprouvait le besoin de prouver qu'il était un comédien complet.
Trois spectacles par soirée, parfois quatre, radio, télévision, films, spots publicitaires, les millions s'accumulèrent. Jerry mit en scène, produisit, écrivit les scénarios. Dean eut sept enfants, Jerry six garçons avec Patti " Si Patti et moi sommes restés ensemble aussi longtemps, 34 ans, c'est peut-être parce qu'elle m'a laissé entendre, dès le début, que je serais soumis à des tentations en tournée et qu'étant un homme j'y succomberais." Patti était chanteuse, sa deuxième épouse est danseuse.
La tendresse de Jerry pour son complice est immense. Il nous dépeint un Dean plutôt glacé, est-ce un fard. Le monde des cabarets n'est pas simple et parfois dangereux ils durent accepter certaines prestations sans gratifications. Jerry a tant de souvenirs, il y eut Marylin et Franck et tant d'autres. Ils furent adulés. " C'est donc là, à l'angle de Broadway et de la 55è Rue dans l'optimisme de l'extrême fin de la guerre, que j'ai rencontré la chance de ma vie. "
Jerry un deuxième volume peut-être


























































































Les recettes de cuisine d'Alfred Hitchcock

La sauce était presque parfaite 80 recettes d'après Alfred Hitchock Anne Martinetti François Rivière




(France éd Cahiers du Cinéma) - L'homme au chapeau rond, bedonnant, toujours vêtu de costumes foncés génial Alfred est né à Leytostone où ses parents tiennent une épicerie en gros. Il quitte parfois l'est de Londres, accompagne son père à Covent Garden au coeur des marchés de quatre saisons. Il n'a que 14 ans lorsque son père meurt.
Le livre n'est pas une biographie du cinéaste mais bourré de photos, d'extraits de films et de quelques dialogues hors les 80 recettes préférées heureusement cuisinées nous dit-on par Alma son épouse. La lecture des recettes est un plaisir "Breakfast Scotland Yard - Choux à la crème - Perdrix sauce ivoire - Spaghettis au chutney _ Birthday cake gateau rose présent dans le film Les Oiseaux - Bündnerfleisch au gratin - Smorgasbord n'oublions pas Les escargots à la française et le Plum Cake -et la purée de pommes de terre et les oignons frits de sa mère reproduits par Alma "
De fait le texte murmure aux côtés des images ( photographies Philippe Asset ) " Plutôt que de se lamenter, Hitch préféra rire de son image " Ce qui m'inquiète ce n'est pas mon poids mais mes dimensions. "
Ce joli livre plaisant en tout point s'adresse à ceux qui se laissent captiver par l'étrange humoriste, metteur en scène amoureux des déesses froides et blondes, des films d'espionnage et de meurtres, tout cela avec l'élégance toute british d'époque.
A Paris il fut " ... adulé par une jeune critique qui le considère comme un véritable génie. " Alfred Hitchock, né le 13 août 1899 il aimait le suspense, Chesterton...





mercredi 11 janvier 2012

Le chien et le flacon Charles Baudelaire ( petit poème en prose )

Baudelaire par Etienne CarjatLe chien et le flacon
 
 
                                       Mon beau chien, mon bon chien, mon cher toutou, approchez et venez respirer
                                       un excellent parfum acheté chez le meilleur parfumeur de la ville. "
                                       Et le chien, en frétillant de la queue, ce qui est, je crois, chez ces pauvres êtres,
                                       le signe correspondant du rire et du sourire, s'approche et pose curieusement
                                       son nez humide sur le flacon débouché ; puis, reculant soudainement avec effroi
                                       il aboie contre moi en manière de reproche.
                                       " - Ah! misérable chien, si je vous avais offert un paquet d'excréments, vous
                                       l'auriez flairé avec délices et peut-être dévoré. Ainsi, vous-même, indigne
                                       compagnon de ma triste vie, vous ressemblez au public, à qui il ne faut jamais
                                       présenter des parfums délicats qui l'exaspèrent, mais des ordures
                                       soigneusement choisies. "
 
 
 
                                       Charles Baudelaire

lundi 9 janvier 2012

Les Trois Dames de Paris ( extrait des Fabliaux )

          Les Trois Dames de Paris 

          Colin, Hauvis, Jetrut, Hersent autrefois avaient l'habitude de conter de belles histoires pour les fêtes et les veillées. Aujourd'hui partout à Paris, dans les maisons et dans les rues, on s'entretient de ce que firent il n'y a pas longtemps trois femmes. En quelques mots je le dirai si vous voulez bien m'écouter. Je ne ferai pas de mensonge : cette histoire est vérité pure ; jamais en nul pays du monde n'arriva pareille aventure.
          C'était en l'an 1320, au grand jour des rois de Cologne. Le matin, avant la grand-messe, la femme d'Adam de Gonesse et sa nièce Marion Clippe voulurent aller à la tripe et y dépenser deux deniers. Elles partent sans plus tarder pour aller chez Perrin du Terne : c'était un nouveau tavernier. Et comme elles pressaient le pas, impatientes d'arriver, il leur advint de rencontrer dame Tifaigne la coiffière qui dit :
          - Je sais vin de Rivière si bon que tel ne fut jamais. En boire, c'est la vraie santé, car c'est un vin clair et brillant, fort, fin, frais, friand sous la langue, doux et plaisant à avaler. Y resterait-on trois jours pleins, on ne saurait nous y trouver. L'hôte à chacune volontiers nous fera crédit de dix sous .
          - Que celle qui parla si bien ait le corps béni et absous, répondit Margue ; allons-y donc. S'il y fait bon, Dieu me conduise.
           Toutes trois prennent le chemin de la taverne des Maillets. Avec elles vint un valet ; c'était le fils Drouin Baillet ; grâce à lui, je connais l'histoire, car il leur servit à manger et leur apporta à leur gré tout ce qu'on peut trouver de bon. Il fallait les voir jouer des dents, emplir et vider les hanaps : en un rien de temps, je crois bien, quinze sous furent dépenseés.
          - Rien pour moi n'aura de saveur dans ce repas, dit Margue Clouve, si nous n'avons une oie bien grasse avec des aulx plein une écuelle.
          Drouin enfile la ruelle, va courant chez le rôtisseur. Il prend une oie, et puis des aulx de quoi remplir tout un grand plat, et pour chacune un gâteau chaud ; il ne s'attarda pas en route. Quel tableau de les voir tâter des aulx piquants et de l'oie grasse qui fut mangée en moins de temps qu'il n'en fallut pour la tuer ! Et Margue commence à suer , et boit à grandes hanapées. En un clin d'oeil furent vidées trois chopines dans son gosier.
          - Dame, j'en atteste Saint Georges, dit Maroclippe sa commère, ce vin me fait la bouche amère ; ce que je veux c'est du grenache. Me faudrait-il vendre ma vache, j'en aurai au moins un plein pot.
          Elle hèle à grands cris Drouin et lui dit :
          - Va nous apporter, pour nous ragaillardir la tête, trois chopines de bon grenache. Garde-toi de nous faire attendre. Apportes des oublies, des gaufres, amandes pelées, du fromage, des noix, du poivre, des épices, que nous en ayons à plenté pour florins et pour gros tournois.
          Drouin galope et elle entonne par jeu une chanson nouvelle !
          - " Commère, menons grande joie ! Le vilain paiera la dépense mais au vin ne goûtera pas ".
          Chacune ainsi prend du bon temps. Drouin apporte le grenache et le verse dans le hanaps :
          - Ma commère, buvons-en bien, dit Marie à dame Fresens. C'est du vin, pour garder sa tête, bien meilleur que le vin français.
          Chacune de lever son verre. Aussitôt, en un tournemain, tout fut lapé et englouti.
          - Ce méchant pot est trop petit, dit Marion, par saint Vincent, et vraiment nous n'avons pas peur de boire le quartier d'un cent. Je n'ai fait que goûter au vin. J'en veux encore, il est si bon. Va, Drouin - Dieu te vienne en aide ! -, et rapportes-nous-en trois quartes. Avant que tu partes d'ici tout sera lampé.
          Drouin court ; il revient le plus tôt qu'il peut et donne à chacune son pot.
          - Tiens, camarade bienvenu, mange un morceau et bois un coup. Cela vaut mieux que vin d'Arbois ou que vin de Saint-Emilion.
          - C'est bien vrai, répond Marion. Que mon pot soit plein jusqu'aux bords, bientôt il n'en restera goutte.
          - Que tu as la gorge gloutonne, dit Maroclippe, belle nièce ! Je ne le boirai pas d'un coup, mais le boirai à petits traits, pour mieux le garder sur la langue. Il est bon de faire un soupir un instant entre deux lampées : ainsi plus longtemps reste en bouche la douceur du vin et sa force.
          Chacune se met en devoir d'engloutir son pot de grenache et personne ne pourrait croire comment elles s'y employèrent. Du matin jusqu'à la mi-nuit elles menèrent vie joyeuse, ayant toujours le hanap plein.
          - Je voudrais m'en aller dehors, dit Margue Clippe, dans la rue danser sans que nul ne nous voie. Cela couronnera la fête. Nous nous découvrirons la tête et mettrons nos corps à l'air.
          - Vous laisserez ici vos robes, dit Drouin, en guise de gage.
          Et Drouin les pousse dehors chantant chacune à pleine voix :
          " Amour, au vireli m'en vais... "
          Leurs pauvres maris les croyaient toutes trois en pèlerinage...


          Jean Watriquet Brassenel

          MR




samedi 7 janvier 2012

Amour Guy de Maupassant Conte

            AMOUR

          Je viens de lire dans un fait divers de journal un drame de passion. Il l'a tuée, puis il s'est tué, donc il l'aimait. Qu'importe Il ou Elle ? Leur amour seul m'importe ; et il ne m'intéresse point parce qu'il m'attendrit ou parce qu'il m'étonne, ou parce qu'il m'émeut ou parce qu'il me fait songer, mais parce qu'il me rappelle un souvenir de ma jeunesse, un étrange souvenir de chasse où m'est apparu l'Amour comme apparaissaient aux premiers chrétiens des croix au milieu du ciel.
          Je suis né avec tous les instincts de l'homme primitif, tempérés par des raisonnements et des émotions de civilisé. J'aime la chasses avec passion ; et la bête saignante, le sang sur les plumes, le sang sur mes mains, me crispent le coeur à le faire défaillir.
          Cette année-là, vers la fin de l'automne, les froids de l'hiver arrivèrent brusquement, et je fus appelé par un de mes cousins, Karl de Rauville, pour venir avec lui tuer des canards dans les marais, au lever du jour.
          Mon cousin, gaillard de quarante ans, roux, très fort et très barbu, gentilhomme de campagne, demi-brute aimable, d'un caractère fort gai, doué de cet esprit gaulois  qui rend agréable la médiocrité,   habitait une sorte de ferme-château dans une vallée où coulait une rivière. Des bois couvraient les collines de droite et de gauche, vieux bois seigneuriaux où restaient des arbres magnifiques et où l'on trouvait les plus rares gibiers à plume de toute cette partie de la France. On y tuait des aigles quelquefois ; et les oiseaux de passage, ceux qui presque jamais ne viennent en nos pays trop peuplés, s'arrêtaient presque infailliblement dans ces branchages séculaires comme s'ils eussent connu ou reconnu un petit coin de forêt des anciens temps demeuré là pour leur servir d'abri en leur courte étape nocturne.
          Dans la vallée, c'étaient de grands herbages arrosés par des rigoles et séparés par des haies ; puis, plus loin, la rivière, canalisée jusque-là, s'épandait en un vaste marais. Ce marais, la plus admirable région de chasse que j'aie jamais vue, était tout le souci de mon cousin qui l'entretenait comme un parc. A travers l'immense peuple de roseaux qui le couvrait, le faisait vivant, bruissant, houleux, on avait tracé d'étroites avenues où les barque plates, conduites et dirigées avec des perches, passaient, muettes, sur l'eau morte,  frôlaient les joncs, faisaient fuir les poissons rapides à travers les herbes et plonger les poules sauvages dont la tête noire et pointue disparaissait brusquement.
          J'aime l'eau d'une passion désordonnée : la mer, bien que trop grande, trop remuante, impossible à posséder, les rivières si jolies, mais qui passent, qui fuient, qui s'en vont, et les marais surtout où palpite toute l'existence inconnue des bêtes aquatiques. Le marais, c'est un monde entier sur la terre, monde différent, qui a sa vie propre, ses habitants sédentaires, et ses voyageurs de passage, ses voix, ses bruits et  son mystère surtout. Rien n'est plus troublant, plus inquiétant, plus effrayant, parfois, qu'un marécage. Pourquoi cette peur qui   plane sur ces plaines basses couvertes d' eau? Sont-ce les vagues rumeurs des roseaux, les étranges feux follets, le silence profond qui les enveloppe dans les nuits calmes, ou bien les brumes bizarres, qui traînent sur les joncs comme des robes de mortes, ou bien encore l'imperceptible clapotement, si léger, si doux, et plus terrifiant parfois que le canon des hommes ou que le tonnerre du ciel, qui fait ressembler les marais à des pays de rêve, à des pays redoutables cachant un secret inconnaissable et dangereux.
          Non. Autre chose s'en dégage, un autre mystère plus profond, plus grave, flotte dans les brouillards épais, le mystère même de la création peut-être ! Car n'est-ce pas dans l'eau stagnante et fangeuse, dans la lourde humidité des terres mouillées sous la chaleur du soleil, que remua, que vibra, que s'ouvrit au jour le premier germe de vie ?

         
          J'arrivai le soir chez mon cousin. Il gelait à fendre les pierres.
          Pendant le dîner, dans la grande salle dont les buffets, les murs, le plafond étaient couverts d'oiseaux empaillés, aux ailes étendues, ou perchés sur des branches accrochées par des clous, éperviers, hérons, hiboux, engoulevents, buses, tiercelets, vautours, faucons, mon cousin pareil lui-même à un étrange animal des pays froids, vêtu d'une jaquette en peau de phoque, me racontait les dispositions qu'il avait prises pour cette nuit même.
          Nous devions partir à trois heures et demie du matin, afin d'arriver vers quatre heures et demie au point choisi pour notre affût. On avait construit à cet endroit une hutte avec des morceaux de glace pour nous abriter un peu contre le vent terrible qui précède le jour, ce vent chargé de froid qui déchire la chair comme des scies, la coupe comme des lames, la pique comme des aiguillons empoisonnés, la tord comme des tenailles, et la brûle comme du feu.
          Mon cousin se frottait les mains : " Je n'ai jamais vu une gelée pareille, disait-il, nous avions déjà douze degrés sous zéro à six heures du soir. "
          J'allai me jeter sur mon lit aussitôt après le repas, et je m'endormis à la lueur d'une grande flamme flambant dans ma cheminée.
          A trois heures sonnantes on me réveilla. J'endossai, à mon tour, une peau de mouton et je trouvai mon cousin Karl couvert d'une fourrure d'ours. Après avoir avalé chacun deux tasses de café brûlant suivies de deux verres de fine champagne, nous partîmes accompagnés d'un garde et de nos chiens : Plongeon et Pierrot.
          Dès les premiers pas dehors, je me sentis glacé jusqu'aux os. C'était une de ces nuits où la terre semble morte de froid. L'air gelé devient résistant, palpable tant il fait mal ; aucun souffle ne l'agite ; il est figé, immobile ; il mord, traverse, dessèche, tue les arbres, les plantes, les insectes, les petits oiseaux eux-mêmes qui tombent des branches sur le sol dur, et deviennent durs eux aussi, comme lui, sous l'étreinte du froid.
          La lune, à son dernier quartier, toute penchée sur le côté, toute pâle, paraissait défaillante au milieu de l'espace, et si faible qu'elle ne pouvait plus s'en aller, qu'elle restait là-haut, saisie aussi, paralysée par la rigueur du ciel. Elle répandait une lumière sèche et triste sur le monde, cette lueur mourante et blafarde qu'elle nous jette chaque mois, à la fin de sa résurrection.
          Nous allions côte à côte, Karl et moi, le dos courbé, les mains dans nos poches et le fusil sous le bras. Nos chaussures enveloppées de laine afin de pouvoir marcher sans glisser sur la rivière gelée ne faisaient aucun bruit ; et je regardais la fumée blanche que faisait l'haleine de nos chiens.
          Nous fûmes bientôt au bord du marais, et nous nous engageâmes dans une des allées de roseaux secs qui s'avançaient à travers cette forêt basse.
          Nos coudes, frôlant les longues feuilles en rubans, laissaient derrière nous un léger bruit, et je me sentis saisi, comme je ne l'avais jamais été, par l'émotion puissante et singulière que font naître en moi les marécages. Il était mort, celui-là , mort de froid, puisque nous marchions dessus, au milieu de son peuple de joncs desséchés.
          Tout à coup, au détour d'une des allées, j'aperçus la hutte de glace qu'on avait construite pour nous mettre à l'abri. J'y entrai, et comme nous avions encore près d'une heure à attendre le réveil des oiseaux errants, je me roulai dans ma couverture pour essayer de me réchauffer.
          Alors, couché sur le dos, je me mis à regarder la lune déformée, qui avait quatre cornes à travers les parois vaguement transparentes de cette maison polaire.
          Mais le froid du marais pelé, le froid de ces murailles, le froid tombé du firmament me pénétra bientôt d'une façon si terrible, que je me mis à tousser.
          Mon cousin Karl fut pris d'inquiétude : " Tant pis si nous ne tuons pas grand-chose aujourd'hui, dit-il, je ne veux pas que tu t'enrhumes ; nous allons faire du feu. " Et il donna l'ordre au garde de couper des roseaux.
          On en fit un tas au milieu de notre hutte défoncée au sommet pour laisser échapper la fumée ; et lorsque la flamme rouge monta le long des cloisons claires de cristal, elles se mirent à fondre, doucement, à peine, comme si des pierres de glace avaient sué. Karl, resté dehors, me cria : " Viens donc voir ! " Je sortis et je restai éperdu d'étonnement. Notre cabane, en forme de cône, avait l'air d'un monstrueux diamant au coeur de feu poussé soudain sur l'eau gelée du marais. Et dedans, on voyait deux formes fantastiques, celles de nos chiens qui se chauffaient.
          Mais un cri bizarre, un cri perdu, un cri errant, passa sur nos têtes. La lueur de notre foyer réveillait les oiseaux sauvages.
          Rien ne m'émeut comme cette première clameur de vie qu'on ne voit point et qui court dans l'air sombre, si vite, si loin, avant qu'apparaisse à l'horizon la première clarté des jours d'hiver. Il me semble à cette heure glaciale de l'aube, que ce cri fuyant emporté par les plumes d'une bête est un soupir de l'âme du monde !
         Karl disait : " Eteignez le feu. Voici l'aurore. "
          Le ciel en effet commençait à pâlir, et les bandes de canards traînaient  de longues taches rapides, vite effacées, sur le firmament.
          Une lueur éclata dans la nuit, Karl venait de tirer ; et les deux chiens s'élancèrent.
          Alors, de minute en minute, tantôt lui et tantôt moi, nous ajustions vivement dès qu'apparaissait au-dessus des roseaux l'ombre d'une tribu volante. Et Pierrot et Plongeon, essoufflés et joyeux, nous rapportaient des bêtes sanglantes dont l'oeil quelquefois nous regardait encore.
          Le jour s'était levé, un jour clair et bleu ; le soleil apparaissait au fond de la vallée et nous songions à repartir, quand deux oiseaux, le col droit et les ailes tendues, glissèrent brusquement sur nos têtes. Je tirai. Un d'eux tomba presque à mes pieds. C'était une sarcelle au ventre d'argent. Alors, dans l'espace au-dessus de moi, une voix, une voix d'oiseau cria. Ce fut une plainte courte, répétée, déchirante ; et la bête, la petite bête épargnée se mit à tourner dans le bleu du ciel au-dessus de nous en regardant sa compagne morte que je tenais entre mes mains.
          Karl, à genoux, le fusil à l'épaule, l'oeil ardent, la guettait, attendant qu'elle fût assez proche.
          - Tu as tué la femelle, dit-il, le mâle ne s'en ira pas.
          Certes il ne s'en allait point ; il tournoyait toujours et pleurait autour de nous. Jamais gémissement de souffrance ne me déchira le coeur comme l'appel désolé, comme le reproche lamentable de ce pauvre animal perdu dans l'espace.
          Parfois, il s'enfuyait sous la menace du fusil qui suivait son vol ; il semblait prêt à continuer sa route, tout seul à travers le ciel. Mais ne s'y pouvant décider il revenait bientôt pour chercher sa femelle.
          - Laisse-la par terre, me dit Karl, il approchera tout à l'heure.
          Il approchait, en effet, insouciant du danger, affolé par son amour de bête, pour l'autre bête que j'avais tuée.
          Karl tira ; ce fut comme si on avait coupé la corde qui tenait suspendu l'oiseau. Je vis une chose noire qui tombait ; j'entendis dans les roseaux le bruit d'une chute. Et Pierrot me le rapporta.
          Je les mis, froids déjà, dans le même carnier ...  et je repartis, ce jour-là pour Paris.
          


          MAUPASSANT

jeudi 5 janvier 2012

Le club des policiers yiddish Michael Chabon ( roman EtatsUnis )

Le Club des policiers yiddishLe Club des policiers yiddish


          En 1940  les EtatsUnis proposèrent aux juifs de fuir le nazisme et l'Alaska comme terre d'accueil. Le projet n'aboutit pas mais Michael  Chabon reprend l'idée et construit un roman autour d'une communauté et dans un environnement troublant par ses divisions. Ici ce sont les amérindiens, là les ultra-religieux. Pour mieux traduire les sentiments, les divergences de cette société il crée le personnage du policier Landsman, frère de Philippe Marlow, chapeau et boissons compris. Depuis neuf mois Meyer Landsman occupe la chambre 505 d'un hôtel miteux le Zamenhof sans s'être préoccupé de ses voisins. " Et maintenant quelqu'un a logé une balle dans la cervelle de l'occupant du 208, sur la table de chevet un jeu d'échecs. A Sitka la vie sociale est bien organisée, les clubs de joueurs d'échecs aussi. Le jeune homme assassiné peut-être fils du principal rabbin de la ville confiné dans son logement et de son épouse raffinée et intelligente qui vit selon le rituel des juifs orthodoxes. Un policier entre partout a une famille Berko par exemple immense fils d'une amérindienne et d'un policier juif, Bina son ex-épouse. Le jeune junkie était un enfant connu pour son intelligence et, qui sait, provocateur de miracles, le nouveau messie. L'auteur  aime Chandler et Dashiel Hammet mais aussi Philip K Dick, et nous quitterons avec regrets cette société car Meyer Landsman " ... sort son jeu d'échecs de poche ... saute de case en case à la poursuite de l'assassin... découvre qu'il connait déjà son identité... son rêve progresse selon la logique du cavalier... en fonction de l'éternel retour du juif, et comment celle-ci peut être évaluée seulement en fonction de l'éternel exil du juif... " Michael Chabon l'un des très bons écrivains américains reçut le prix Pulitzer pour Les Extraordinaires Aventures de Kavalier § Clay.

mardi 3 janvier 2012

Enivrez-vous Charles Baudelaire ( petits poèmes en prose )

Enivrez-vous


          Il faut être toujours ivre. Tout est là : C'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.
          Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous.
          Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, dans la solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge, à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est ; et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront : " Il est l'heure de s'enivrer ! Pour n'être pas les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous ; enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. "


Charles Baudelaire        ( extrait des Petits Poèmes en prose )

vendredi 30 décembre 2011

Muse Joseph O'Connor ( roman Irlande )


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                                                     Muse                                                                       

                         - C'était en 1907 à Dublin, un poète irlandais lui aussi, Yeats, présente une jeune comédienne Marie O'Neill au poète dramaturge John Millington Synge. Elle joue au théâtre Abbey de Dublin. Elle a 19 ans est catholique, sa famille est modeste, il est riche, protestant et a 37 ans, devient le pygmalion de la jeune fille Molly Allgood, son nom de famille. Leur relation dure deux ans ( il meurt en 1909 ). Quelle Fut-elle ? Secrète, discrète, absolument refusée par les comédiens comme par les familles. Malade, vivement critiqué pour les idées qu'il impose dans sa célèbre pièce Le Balladin du Monde Occidental, ils se séparent. Joseph O'Connor décrit ici 24 heures de la vie d'une comédienne déchue et alcoolique un demi-siècle plus tard, dans un Londres d'après-guerre, immeubles en ruines aux fenêtres murées. Ce matin d'octobre 1952 " la nuit dernière une tornade a frappé Londres ". Un rêve éveille des souvenirs éloignés et Molly à 6h 43 ce matin-là remonte le fil de sa rencontre, de sa liaison avec Synge. Il écrivit 400 lettres à celle qu'il appelait " Mon enchanteresse ". Il lui en reste une qu'elle vendra peut-être au vieux libraire, pour se nourrir ou pour du cognac. Et elle interpelle, croyant apercevoir la silhouette de son " cher vagabond ". Ont-ils parcouru le Connemara ou les falaises des bords de mer, O'Connor précise qu'il s'agit d'une oeuvre d'imagination, mais il vécut à quelque cent mètres de la maison de la mère de Synge si dure. L' amour, le petit monde théâtral, les landes, le livre et son histoire nous enrobent. La langue propre à la famille de Molly puis celle policée et poétique de la famille Synge sont parfaitement retransmises. Suivre l'histoire douloureuse de ces deux êtres, ne pas oublier les petites supperstitions " quand un théâtre est fermé il faudrait toujours laisser une lampe allumée sur scène afin que les fantômes puissent jouer leurs propres pièces." Elle a 65 ans, est affamée, un peu ivre et sort pour un ultime enregistrement à la BBC, " on n'annule jamais une représentation ". Un très beau roman.

mardi 27 décembre 2011

La République et les lois Platon ( extrait )

La Démocratie

- Sous la plume de Platon 4 è sc avant notre ère. Lecture au XXI è sc.

          Dès qu'un État devenu démocratique, brûlant de la soif de liberté, a trouvé dans ses magistrats des échansons imprudents, qui lui ont versé toute pure la liqueur fatale dont il s'est enivré alors, s'ils ne sont pas toujours faibles, s'ils n'offrent pas au peuple la pleine coupe, le peuple les accuse et les châtie comme des traîtres qui aspirent à la gouverner. Ose-t-on leur obéir encore, on est méprisé comme un ami de la servitude dont le sort est de ramper sous un maître. Il faut s'assimiler partout à des inférieurs, rivaliser avec des supérieurs pour être loué, pour être honoré. Est-il possible qu'une telle république ne se précipite pas dans toutes les folies de l'indépendance ? Je vois déjà l'intérieur des familles en proie à cette insolente égalité. Tout jusqu'aux animaux semble respirer l'anarchie. Déjà le père s'accoutume à regarder et à respecter son fils comme un égal ; le fils à ne plus l'honorer ni le craindre pour dire : "Je suis libre ", les anciens et les nouveaux venus à confondre tous les droits ; les étrangers même à s'égaler aux citoyens. Mais descendons jusqu'aux moindres rapports de la société : voilà le précepteur qui craint et flatte son disciple et le disciple qui méprise son gouverneur et son maître ; voilà les jeunes gens qui marchent de pair avec les vieillards, qui agissent, qui parlent comme eux, et les vieillards qui redevenus jeunes affectent les grâces et la frivolité toujours en garde contre un air morose et despotique. Enfin ce qui me semble le dernier excès de la liberté dans tous les rangs, les esclaves des deux sexes ne sont pas moins libres que celui qui les achète, car les femmes aussi veulent être libres ; l'égalité est aussi pour les femmes. Je l'avais presque oublié.

dimanche 25 décembre 2011

Le vilain ânier ( fabelet )

          Le vilain ânier

          Il arriva à Montpellier qu'un vilain avait l'habitude de ramasser, avec deux ânes, du fumier pour fumer sa terre. Un jour, ayant chargé ses bêtes, il entre bientôt dans la ville, poussant devant lui les deux ânes, souvent contraint de crier : " Hue ! " Il arrive enfin dans la rue où sont les marchands épiciers : les garçons battent les mortiers. Mais sitôt qu'il sent les épices, lui donnât-on cent marcs d'argent qu'il n'avancerait plus d'un pas. Il tombe aussitôt évanoui, si bien qu'on peut le croire mort. A cette vue, on se désole ; des gens disent : " Mon Dieu, pitié ! Voyez ici cet homme mort. " Mais aucun n'en sait le pourquoi. Les ânes restent arrêtés bien tranquillement dans la rue ; car l'âne n'a guère coutume d'avancer qu'on ne l'y invite. Un brave homme du voisinage, s'étant trouvé là par hasard, vient et demande aux gens qu'il voit : " Qui veut faire guérir cet homme  ? Je m'en chargerais pour pas cher. " Alors un bourgeois lui répond : " Guérissez-le-moi tout de suite ; vous aurez vingt sous de ma poche " ; et l'autre dit : " Bien volontiers ! " Avec la fourche que portait le vilain en poussant ses ânes, il prend un paquet de fumier et va le lui porter au nez . Humant le parfum du fumier, l'homme oublie l'odeur des épices : il ouvre les yeux et se dit tout à fait guéri ; et, bien content, de déclarer : " Je n'irai plus jamais par là, si j'arrive à passer ailleurs. "
Je veux montrer par cet exemple que n'a ni bon sens ni mesure qui veut renier sa nature ; chacun doit rester ce qu'il est.


                       MR



jeudi 22 décembre 2011

L'Etranger Charles Baudelaire extrait du Spleen de Paris Petits Poèmes en prose

  1. En 1862 Charles Baudelaire a déjà publié la 2è édition des Fleurs du mal, par ailleurs il a lu Gaspard de la nuit d'Aloysius Bertrand , qui lui plaît énormément. Il décide alors une autre approche de l'écritu-
re et écrit à Arsène Houssaye "...qui n'a pas, dans ses jours d'ambition, rêvé le miracle d'une prose poétique, musicale, sans rythme et sans rime..." L'Etranger paraît donc parmi 14 autres Petits Poèmes en prose dans la Presse, les 26 et 27 août. Mis en musique, Léo Ferré chante ce merveilleux texte.


          L'Etranger

          - Qui aimes-tu le mieux, homme énigmatique, dis ? ton père, ta mère, ta soeur ou ton frère ?

          - Je n'ai ni père, ni mère, ni soeur, ni frère.

          - Tes amis ?

          - Vous vous servez là d'une parole dont le sens m'est resté jusqu'à ce jour inconnu.

          - Ta patrie ?

          - J'ignore sous quelle latitude elle est située.

          - La beauté ?

          - Je l'aimerais volontiers, déesse et immortelle.

          - L'or ?

          - Je le hais comme vous haïssez Dieu.

          - Eh ! qu'aimes-tu donc , extraordinaire étranger ?

          - J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas... les merveilleux nuages !


          CB


http://www.youtube.com/watch?v=g5DwhD3ZOu4

dimanche 18 décembre 2011

Brunain la vache au prêtre de Jean Bodel ( France )

Les contes appelés fabelets, fableaux enfin fabliaux apparaissent aux environs du 12è siècle. Petites
scènes, comédies en vers et en prose. Voici l'un d'eux extrait d'un recueil de fabliaux.

          C'est d'un vilain et de sa femme que je veux vous conter l'histoire. Pour la fête de Notre-Dame, ils allaient prier à l'église. Avant de commencer l'office, le curé vint faire son prône ; il dit qu'il était profitable de donner pour l'amour de Dieu et que Dieu au double rendait à qui le faisait de bon coeur.
" Entends-tu ce que dit le prêtre ? fait à sa femme le vilain. Qui pour Dieu donne de bon coeur recevra
de Dieu deux fois plus. Nous ne pourrions mieux employer notre vache, si bon te semble, que de la donner au curé. Elle a d'ailleurs si peu de lait. - Oui, sire, je veux bien qu'il l'ait, dit-elle, de cette façon." Ils regagnent donc leur maison, et sans en dire davantage. Le vilain va dans son étable ; prenant
la vache par la corde, il la présente à son curé. Le prêtre était fin et madré : " Beau sire, dit l'autre,
mains jointes, pour Dieu je vous donne Blérain. " Il lui a mis la corde au poing, et jure qu'elle n'est plus
sienne. " Ami, tu viens d'agir en sage, répond le curé dom Constant qui toujours est d'humeur à prendre ;
si tous mes paroissiens étaient aussi avisés que tu l'es, j'aurais du bétail à plenté. " Le vilain prend congé du prêtre qui commande, sans plus tarder, qu'on fasse, pour l'accoutumer, lier la bête du vilain
avec Brunain, sa propre vache. Le curé les mène en son clos, les laisse attachées l'une à l'autre. La vache du prêtre se baisse, car elle voulait pâturer. Mais Blérain ne veut l'endurer et tire la corde si fort qu'elle entraîne l'autre dehors et la mène tant par maisons, par chenevières et par prés qu'elle revient enfin chez elle, avec la vache du curé. Le vilain regarde, la voit ; il en a grande joie au coeur. " Ah !
dit-il alors, chère soeur, il est vrai que Dieu donne au double. Blérain revient avec une autre : c'est
une belle vache brune. Nous en avons donc deux pour une. Notre étable sera petite ! "
          Ce fabliau veut nous montrer que fol est qui ne se résigne. Le bien est à qui Dieu le donne et
non à celui qui l'enfouit. Nul ne doublera son avoir sans grande chance, pour le moins. C'est par chance que le vilain eut deux vaches, et le prêtre aucune. Tel croit avancer qui recule.

          Jean Bodel

samedi 26 novembre 2011

Jirô Taniguchi - Masayuki Kusumi - Le gourmet solitaire.


Le traducteur conseille : " faites yoyû " en lisant. De fait cette histoire pour solitaire amateur de dégustation silencieuse et aux papilles en alerte se lit au même rythme que certains romans de Duras, avec lenteur

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Jirô Taniguchi - Quartier lointain



400x564 - Quartier lointain 1.  Tome 1Voyage à l’envers. Rêve. Cauchemar. Réalité. Problème de résilience ? Peut-être. Et toujours les traits tout raides, tout droits, même plats du dessinateur. Troublant

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vendredi 25 novembre 2011

L'appartement de Kang Do-Young



AppartementA l'inverse de La bicyclette rouge dont je vous parle plus haut, L'appartement vous apporte stress, angoisse. Et pourtant, avare de texte, dessins simplifiés mais tout à fait expressifs nous enferment dans l'atmosphère des appartements des grands immeubles - barres de banlieue. Cette effroyable aventure aurait pu aussi bien être dépeinte dans le cadre de Paris, Londres, New-York ou autres mais c'est Séoul. Sanglant, angoissant, ajouter les problèmes de solitude, tout est bon dans cette manhwa aux couleurs gris, jaunes, rouges. " Ne me regardez pas dans les yeux " dit le héros, oui vraiment.

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La bicyclette rouge de Kim Dong - hwa.


 
En ces temps de stress, de course contre la montre plongez dans cette manhwa délicieuse. La campagne coréenne, est-ce réaliste peu importe l'auteur l'a vue ainsi, les dessins simples et doux, de jolies couleurs, et nous suivons la vie d'un couple de paysans éloignés de Séoul. Le facteur est là un lien précieux le amis sont des "potes " malgré leur âge. La culture du concombre, la jalousie drôlement amenée entre ces personnes âgées, et leur petite fille, adulte, venue en visite apporte la vie de la capitale. ( 3 volumes )

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AYA Conseillère culinaire, ISHIKAWA SABURÔ, scénario Aouchi Akio supervision Kobayakawa Yôsei


Cette jolie manga conte l'histoire tokyoïte de transmission du goût dans les familles de grands chefs, de repreneurs des restaurants. Aya, jolie calculatrice recherche les bons sentiments, les valeurs avec peut-être une arrière-pensée. Dessins propres aux mangas, mais les histoires assez fortes retiennent bien l'attention. Avec quelques recettes.

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mercredi 23 novembre 2011

Un loup à ma table Auguten Burrougs


Augusten Burroughs fils de la poétesse Margaret Robison se penche à nouveau sur son passé.

Un loup à ma tablePeu scolarisé, les crises de colère du père professeur de philosophie, obligeaient la mère à les éloigner de leur maison. Tout petit il essaie vainement d'attirer quelque marque de tendresse, repoussé violemment il se confectionne un papa à l'aide de vêtements bourrés de vêtements qui portent l'odeur paternelle.

L'adulte est à la recherche de chaque senteur, de goût, très sensible il détaille ses premiers pas de bébé, et revient à ce père assis à la table de la cuisine apparemment inactif, le regard fixé sur la télévision éteinte. Pourquoi ne répond-il pas à ses questions d'enfant ? Parce qu'il est occupé ne le voit-il pas.

Puis voici la réalité de l'homme souriant et affable hors du foyer, haineux, cruel avec le cochon d'inde, ses fils, sa femme. Atteint de psoriasis, sur le corps, les mains déformées, la bouche, les dents, pervers, psycopathe. La mère, fume, fume, tape à la machine des textes poétiques, se rend 4 fois par semaine chez son psychiatre à qui elle finira par confier Augusten. Habile, elle coud ses robes, dessine, peint.

Burrougs dépeint avec minutie les affres que vit le couple, joli enfant blond aux cheveux longs troublant.

Tout le livre est une interrogation, son père pourrait-il tuer, et lui possède-t-il les gênes qui le pousseraient à assassiner cet homme destructeur ? Il aime désespérément un homme qu'il voudrait tuer ou appeler papa sans crainte. Après Déboire et Courir avec les oiseaux cruel parcours d'un homme qui a malgré tout une réussite professionnelle.

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mardi 22 novembre 2011

Paradise Kiss ( 1er vol.) de Aï Yazawa


Voici une jolie manga pour jeunes teenagers peu attirés par certains sujets assez brutaux de cette collection. Dessins ravissants, des personnages troubles. Etudiants à l'université, d'autres déjà prêts à entrer dans le milieu de la mode. 

Les scènes se passent dans le quartier Shibuya mais pourquoi pas à Londres. Aï (Amour) mangaka très douée nous offre là une histoire simple ( 4 volumes suivent ) de gracieux dessins, une shöjo manga.

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dimanche 20 novembre 2011

Bienvenue dans le Marais de Hugues Barthe


Bande dessinée pour Adultes - Si vous avez aimé "le petit Lulu" vous retrouverez la même simplicité dans ce dernier opus: cases peu chargées, dessin simplissime, sujet et images ne sont donc pas indigestes. Les personnages, notamment Hugo admis aux Arts Déco qui quitte St Romain le Duc se rend à Paris où il est hébergé par son cousin Manu, vivent plaisamment leurs vies de garçons. Entraîné par son cousin, Hugo découvre le Marais, quartier chic devenu repaire des homosexuels. Loin d'afficher la même liberté que Manu pour entrer en contact avec l'un ou l'autre des garçons Hugo se défie puis se défoule. Découverte des bars, saunas et autres backrooms. Son goût pour l'homme à petit bedon étonne. L'inquiétante maladie est effleurée. Mais tous veulent retrouver la nature, et en définitive vivre entourés de poules, de dindons.

"Bienvenue n'est pas la 1è bande dessinée de Barthe sur le sujet. Son style et son dessin bien personnels, affirmés, cette BD est réussie.

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