mardi 9 avril 2013

Constantinople Anna de Noaïlles France ( Poème )






                                                         Constantinople


               J'ai vu Constantinople étant petite fille
               Je m'en souviens un peu
               Je me souviens d'un vase où la myrrhe grésille
               Et d'un minaret bleu.

      Je me souviens d'un soir aux Eaux-Douces d'Asie
               Soir si traînant, si mou
               Que déjà, comme un chaud serpent la Poésie
               S'enroulait à mon cou.

               Une barque passa, pleine de friandises
               O parfums balancés.
               Des marchands nous tendaient des pâtes de cerises
               Et des cédrats glacés.

               Une vieille faisait cuire des aubergines
               Sur l'herbe, sous un toit.
               Le ciel du soir était plus beau qu'on n'imagine,
               J'avais pitié de moi.

               Et puis j'ai vu cerné d'arbres et de fontaines,
               Un palais rond et frais.
               Des salons où luisait une étoile d'ébène
               Au milieu des parquets.

               Un lustre clair tintait au plafond de la salle
               Quand on marchait trop fort ;
                J'étais ivre d'ardeur, de pourpre orientale
                Mais j'attendais encore.

                J'attendais le bonheur que les petites filles
                Rêvent si fortement
                Quand l'odeur du benjoin et des vertes vanilles
                Évoque un jeune amant ;
                    Je cherchais quelle aimable et soudaine aventure
                Quel enfantin vizir
                Dans ce palais plus tendre et frais que la nature
                Allait me retenir.

                Ah ! si, tiède d'azur, la terre occidentale
                Est paisible en été,
                Les langoureux trésors que l'Orient étale
                Brûlent de volupté.

                O colliers de coraux, ô nacres en losanges,
                O senteurs des bazars ;
                Vergers sur le Bosphore, ou des raisins étranges
                Sont roses comme un fard.
 
                Vie indolente et chaude, amoureuse et farouche,
                Où tout le jour on dort,
                Où la nuit, les désirs sont des chiens, dont la bouche,
                Se provoque et se mord.

                Figuiers d'Amaout-keuï, azur qui luit et tremble,
                Monotone langueur
                De contempler sans trêve un horizon qui semble
                Consacré au bonheur.

                Hélas ! Pourquoi faut-il que les beaux paysages
                de rayons embrasés,
                Penchent si fortement les mains et les visages
                Vers les mortels baisers ?

                Tombes où des turbans coiffent les blanches pierres
                O morts qui sommeillez,
                Ce n'est pas le repos, la douceur, les prières
                Que vous nous conseillez.

                Vous nous dîtes " Vivez, ce que contient le monde
                 De sucs délicieux,
                 On le boit à la coupe émouvante et profonde
                 Des lèvres et des yeux.

                 " La beauté du ciel turc, des cyprès, des murailles
                 Nul ne peut l'enfermer
                 Mais le bel univers se répand et tressaille,
                 Dans des regards pâmés.

                 L'immense odeur du musc, du cèdre et de la rose
                 Glisse comme le vent ;
                 Mais l'Amour, de ses doigts divins la recompose
                 Au creux d'un chaud divan.

                 Sainte-Sophie, avec ses forêts de lumière
                 Et ses bosquets d'encens
                 Se laisse contempler et toucher tout entière
                 Sur un corps languissant. "

                 Vous me brûlez les os,
                 Hélas ! je vous entends, morts de la terre chaude,
                 Depuis mes premiers ans toute mon âme rôde
                 Auprès de vos tombeaux.

                 J'étais faite pour vivre au bord de l'eau profane
                 Sous le soleil pressant
                 Consacrant chaque soir à la jeune Diane
                 La ville du Croissant.

                 J'étais faite pour vivre en mangeant des pignolles
                 Sous le frêle prunier
                 Où Xanthé préparait, enfant joueuse et molle,
                 Le coeur d'André Chénier.

                 J'étais faite pour vivre en ses voiles de soi
                 Et sous ces colliers verts,
                 Qui serrent faiblement, qui couvrent et qui noient
                 Des bras toujours ouverts.

                 La douce perfidie et la ruse subtile
                 Auraient conduit mes jeux
                 Dans les jardins secrets où l'ardeur juvénile
                 Jette un soupir joyeux.

                 On n'aurait jamais su ma peine ou mon délire
                 Je n'aurais pas chanté,
                 J'aurais tenu sur moi comme une grande lyre
                 Les soleils de l'été.

                 Peut-être que ma longue et profonde tristesse
                 Qui va priant, criant,
                 N'est que dur besoin,qui m'afflige et m'oppresse,
                 De vivre en Orient ?



          
                                                                                                        Anna de Noaïlles
               

Anecdotes et réflexions d'hier pour aujourd'hui 16 journal Samuel Pepys ( Angleterre )






fragonard
                                                                                                                             17 mars 1660

            Ce matin, j'ai dit adieu au lit à  ma femme.  Nous nous sommes levés et j'ai donné à ma femme un peu d'argent pour couvrir ses besoins pendant quelque temps, et les papiers importants que je possède. Puis je la laissai se préparer et j'allai voir milord avec mon laquais Eliezer au domicile de milord chez Mr Crew. J'y réglai plusieurs affaires avec milord,  et il me remit une grande quantité de papiers pour que je les trie et que je l'en débarrasse comme du reste. Après quoi je revins à la maison avec Mr Moore et j'emmenai ma femme en voiture à l'Échiquier dans Holborne. Après nous y être rafraîchis elle est montée en voiture et adieu.. Je restai un moment avec Tom Alcok et Mr Anderson le frère de mon vieux camarade de chambre de Cambridge et nous primes un verre. Ils étaient venus me voir au sujet de quelqu'un qui voudrait une place dans la marine. De là j'allai dîner avec Mr Hawley chez Mr Crew. Après dîner je repassai chez moi ou toutes nos affaires avaient été rassemblées dans la salle à manger et mises sous clé ( ma femme avait emporté la clé avec elle ). Aujourd'hui,  en présence de Mr Moore ( qui l'a rédigé ) et de Mr Hawley j'ai, avant de partir avec ma femme, scellé mon testament et le lui ai remis. Je lui donne tout ce que j'ai au monde, à l'exception de mes livres que je donne à mon frère John, sauf les livres français qui doivent revenir à ma femme.
            Dans la soirée, à l'Amirauté j'y retrouvai milord et j'obtins une commission pour Williamson qui sera capitaine de la frégate la Harpe. Je me rendis ensuite en voiture, en compagnie de Mr Crips, chez milord et lui fit signer cette nomination à table,  pendant qu'il soupait. Je retournai ensuite à Westminster, toujours avec Crips qui est très désireux de partir en mer. Milord m'a dit aujourd'hui qu' il était prêt à lui consentir n'importe  quelle faveur.  Je rentrai donc avec lui chez sa mère, qui habite près de chez moi dans Axe Yard, j'y retrouvai la femme du Dr Claudius et je restai bavarder et écouter la vieille Mrs Crips jouer ses vieux morceaux au clavecin jusqu'à l'heure du coucher. Après quoi j'allai au lit, je dormis avec son fils Laud dans la meilleure chambre de la maison qui, en vérité, était joliment meublée.



                                                                                                                    18 mars 1660

            Il a plu aujourd'hui  toute la journée.  Je me levai tôt et allai chez le barbier, Jerva, dans la cour du Palais. Il me coupa les cheveux, ensuite je pris avec lui une chope ou deux de bière et je commençai d'engager son domestique pour m'accompagner en mer. Ensuite au domicile de milord où je trouvai le capitaine Williamson. auquel je remis sa commission de capitaine de la Harpe et il me donna une pièce d'or et 20 livres en argent. Puis chez moi où je restai un moment avant d'aller dîner chez Mr Shipley au domicile de milord. Après cela chez Mr Messum qui fit un très élégant sermon sur " Priez pour la vie du roi, et le fils du roi. " ( Esdras 6.10 ).
        De là chez Mr Crew, mais comme milord n'y était pas, je ne restai pas, mais m'en allai.  Rencontrai Mr Woodfine qui m'emmena dans une taverne à bière dans Drury Lane. Nous restâmes à boire ensemble et à manger des petits pains grillés qui étaient très bons et dont l'aspect nous a bien fait rire avec la maîtresse de maison.  Je pris ensuite le chemin de la maison et je passai chez Mr Belgrave où je repris le billet que je lui avais signé pour 40 shillings qu'il m'avait prêtés sur gage il y a deux ans, cependant qu' il gardait mon luth, de sorte que nous sommes désormais quittes lui et moi. Puis chez Mrs Crisp. Elle, sa fille, son fils et moi restâmes à bavarder jusqu'à 10 heures du soir. Je leur donnai les meilleurs conseils que je pouvais donner au sujet de leur fils, à savoir qu' il devrait entrer dans la marine. Puis, au lit.



                                                                                                                        19 mars

            De bonne heure chez milord, où il y avait beaucoup de travail. J'en ai la tête pleine. En vérité, depuis deux ou trois jours je suis très préoccupé et je pense constamment à tous ces problèmes. Après cela à l'Amirauté où je restai un bon moment avec Mr Blackborne qui m'a dit qu'il était fort à craindre que le roi ne revienne, car on décourageait touts les républicains et toutes leurs initiatives. De là chez Wilkinson où je dînai  * avec Mr Shipley, pendant que nous dînions le garde du corps de milord Monck vint précédé du commandant militaire du Parlement, faire deux déclarations : la première est que tous les cavaliers doivent quitter la capitale, et la seconde que tous les officiers qui ont été récemment licenciés doivent faire de même. De cette seconde proclamation Mr Robert Creed a dit, je m'en souviens, que c'était comme si on avait dit que tout le peuple de Dieu devait quitter la capitale. De là je me rendis avec quelques officiers de marine à la taverne du Cygne, où nous bûmes du vin en attendant un certain Wilday qui devait venir me remettre de l'argent en  provenance de Worcester, à savoir 25 livres. J'allai dans une autre pièce, je pris l'argent, je bus avec lui jusqu'à ce que tous ceux qui m'accompagnaient fussent partis, et nous nous quittâmes. Pour rentrer, comme le fleuve était en crue, je demandai à Crockford de me porter sur ses épaules. Puis à la maison, où je déposai mon argent.
            On ne parle plus maintenant que du retour du roi et, d'après ce que j'entends, c'est le souhait de tous et tout le monde est persuadé que cela va avoir lieu.
            Je continue à être très triste pour ma pauvre femme, mais j'espère que cette entreprise en vaudra la peine.
            A Whitehall où je restai travailler tard à l'Amirauté, puis chez Tony Robin où se trouvaient le capitaine Stokes, Mr Luddington et d'autres. Je parlai au capitaine en faveur de Laud Crisp et il me promit qu'il le recevrait.
            Après cela chez Mrs Crisp où je retrouvai le Dr Clodius et sa femme. Lui avait bu et était très gai. Nous jouâmes aux cartes tard. Puis au lit
     **       Aujourd'hui milord a dîné chez le lord-maire. Jasper s'y est laissé enivré et milord en a été très en colère.



                                                                                                                    20 mars 1660

            Le temps reste très pluvieux. Ce matin je me levai tôt et je passai chez moi mettre un peu d'ordre dans mes affaires avant mon départ, que je crois être pour demain. Après cela chez milord où beaucoup de travail m'attendait. Il me donne toutes les lettres et tous les papiers qui arrivent pour lui concernant la marine, et je dois.lui préparer un compte-rendu pour lorsque nous serons à bord. De là me rendis avec le capitaine Isham en voiture à Whitehall, à l'Amirauté. Lui et moi ainsi que Chetwind, Doling et Llewellyn dînâmes ensemble chez Marsh à Whitehall. Ensuite, à la Tête de Taureau où William Simons vint nous rejoindre. Je leur jurai mon amitié avant de prendre la mer, et nous nous quittâmes. Ils me promirent de m'écrire en mer. Puis le domestique de Pim vint, selon mes instructions, avec deux montures pour que j'en choisisse une. Je pris la couleur la plus sombre et je laissai l'autre pour Mr Shipley ( J'ai fait une erreur ici, je n'ai en fait pris congé d'eux que le lendemain ). De là, en voiture à Londres. Je pris mélancoliquement congé de mon père et de ma mère, sans avoir le temps de prendre un verre ou de parler de nos affaires. En vérité, j'avais peur de ne plus jamais revoir ma mère, car elle avait alors un gros rhume. Ensuite, à Westminster où, en raison de la pluie et d'un vent d'est l'eau était si haute qu'on circulait en barque dans King Street et que toute notre cour était inondée, si bien qu'on ne pouvait pas accéder à ma maison. On n'avait pas vu cela de mémoire d'homme. La plupart des maisons sont inondées. Puis retour en voiture chez milord où je retrouvai Mr Shipley. Il resta avec moi à attendre que milord rentre, jusque tard dans la soirée. Alors lui et moi et William Howe allâmes avec nos épées chercher milord chez sir Henry Wright pour le reconduire chez lui. Il a décidé de partir demain si le vent se calme. Shipley et moi rentrâmes en voiture, moi chez Mrs Crisp qui m'avait attendu longtemps devant un bon souper qu'elle avait préparé. Nous restâmes à bavarder et à plaisanter jusque très tard, puis Laud et moi allâmes nous coucher.



                                                                                                             21 mars 1660

            Chez milord, mais comme le vent soufflait très fort contre nous et que le temps était mauvais nous n'avons pas pu partir aujourd'hui. J'ai fait beaucoup de travail, je suis ensuite allé voir milord Widdrington de la part de milord qui désirait pouvoir disposer des lettres ordonnant  des élections pour les  Cinque Ports. Milord fut très civil avec moi. Il fit apporter du vin et il écrivit une longue lettre de réponse. De là je suis allé dans une taverne en face de chez Mr Pearse avec le juge rapporteur Fowler et Mr Burr, je restai boire avec eux deux ou trois pintes. Après cela je retournai chez Mr Crew et rendis compte à milord de ce que j'avais fait. Ensuite, je m'occupai d'aller prendre congé de mon père et de ma mère. J'ai par erreur consigné ces adieux pour la journée d'hier. De là à Westminster chez Mr Crisp où nous passâmes un fort bon moment. La vieille femme envoya chercher à souper pour moi et m'offrit un mouchoir décoré de fraises en bouton. Ensuite, au lit.



                                                                                                                  22 mars

            Debout de bon matin. Je rangeai tout chez moi, et ensuite je pris congé de Mrs Crisp, de sa fille qui était au lit et de Mrs Hunt. Puis je fis de même à la grille du domicile de milord où Mr Hawley vint me voir. Je lui confiai la clé de ma maison, il m'accompagna chez Mr Crew et là je pris congé de lui pour de bon. Mais comme il continue de faire mauvais temps, milord n'a pas voulu partir aujourd'hui. Milord passa la matinée en privé à sceller ses dernières volontés et son testament avec Mr William Mantagu. Après cela je sortis m'occuper de mes propres affaires. J'achetai une paire de bas de serge grise pour monter à cheval, une épée, une ceinture et des souliers. Après quoi j'emmenai Wotton et Brigden à la taverne de la Tête du Pape dans Chancery Lane, où se trouvaient déjà Gilbert Holland et Shelston. Nous dînâmes et bûmes une grande quantité de vin. Ils payèrent tout.
            C'est étrange de voir que ces gens me promettent maintenant n'importe quoi : l'un m'a promis une rapière, l'autre un flacon de vin ou une robe de chambre et m'a prié de lui faire la faveur d'accepter son ruban de chapeau en fil d'argent. Je prie Dieu de me garder de tirer vanité de tout cela ou d'être trop imbu de mon importance.
            Après cela à Westminster où je pris congé de Kate Sterpin qui était très triste de mon départ, et ensuite de Mr Montagu. Puis je reçus de Mr Blackborne mon mandat de secrétaire des deux amiraux de la flotte. Allai ensuite prendre congé des secrétaires du Conseil privé. Ensuite Doling et LLewellyn voulurent que je les accompagne au bureau du Mount, où nous bavardâmes et bûmes. Puis je les quittai. Je me rendis chez milord après avoir rencontré en chemin Chetwind et Swan et leur avoir dit adieu, et j'y dormis toute la nuit avec Mr Andrew.
            Aujourd'hui Mr Shipley s'est rendu à bord et j'ai envoyé mon domestique avec lui. Aujourd'hui aussi Mrs Jemima est allée à Marrowbone, de sorte que je n'ai pas pu la voir.
            Mr Moore n'étant pas en ville ce soir, je n'ai pu prendre congé de lui, ni lui parler affaires, ce qui m'a beaucoup ennuyé.
            J'ai donc laissé mes petites clefs à son intention auprès de Mr Andrew.



                                                                                                            23 mars 1660

            Levé tôt. Je portai le testament dans un coffret noir à Mr William Montagu afin qu'il le garde. Puis chez le barbier où je mis ma cravate. Puis retour chez milord qui était presque prêt à partir et m'avait attendu.
   ***         Gilbert Holland vint m'apporter une rapière et Shelston un pain de sucre. Il avait amené sa femme qui, d'après lui, était une très jolie femme, à la taverne du Navire, à côté, pour que je la voie, mais je n'avais pas le temps. Le jeune Reeves m'apporta également une petite longue-vue que j'ai achetée pour milord : elle m'a coûtée 8 shillings. Puis, après cela, milord partit dans la voiture de sir Henry Wright avec le capitaine Isham, accompagné de Mr Thomas et de John Crew, et moi et William Howe dans un fiacre jusqu'à la Tour de Londres où les barques nous attendaient.
            Milord et le capitaine montèrent dans une, William Howe, moi, Mr Ibbot et Mr Burr dans l'autre, et nous gagnâmes le grand bief où le Swiftsure était mouillé. Au passage nous vîmes la grande brèche que la crue récente avait faite et qui avait causé pour plusieurs milliers de livres de dégâts à la population autour de Limehouse. Dès que milord fut à bord les navires le saluèrent par une salve de canon. Peu après le vice-amiral Lawson vint et sembla témoigner un grand respect à milord comme d'ailleurs les autres commandants des frégates qui nous entouraient.
            Je rejoignis la cabine qui m'était allouée qui était la meilleure de toutes celles attribuées aux gens de la suite de milord. Je sortis certaines affaires de mes coffres pour écrire et Mr Burr et moi nous mîmes tous deux au travail. Je soupai à la table des officiers avec Mr Shipley. Nous étions en retard car nous avions écrit les ordres pour qu'on prépare les navires, etc... et encore autres ordres pour chacun des ports maritimes entre Hastings et Yarmouth pour qu'on arrête toutes les personnes qui vont et viennent entre les Flandres et l'Angleterre.
            Après cela, au lit dans ma cabine où j'étais un peu à l'étroit, je m'en arrangeai cependant et je dormis très bien. Comme le temps était beau je n'ai pas du tout été malade. Je ne sais pas quand je le serai.


*     george monck
**   hals
*** murillo                                                                                                      
                                                                                                             ............../ 24 m...

                                                     

dimanche 7 avril 2013

Des clous dans le coeur Danielle Thiéry ( policier France )



Danielle Thiéry - Des clous dans le coeur.
                                       
                                                       Des clous dans le coeur

           20 décembre quelques membres de la PJ de Versailles sont appellés à enquêter sur la mort d'une star du rock, Eddy Stark de son vrai nom Michel Dupont. A leur tête le commandant Maxime Revel, 1m90, 100 kilos, gros fumeur, il tousse, crache le sang, s'étouffe affaibli. L'homme père de Léa, jeune fille devenue anorexique, est parallèlement aux enquêtes qu'il couvre avec rigueur et honnêteté obsédé par la recherche inaboutie à ce jour de sa femme, suédoise, musicienne, disparue depuis dix ans. Le hasard parfois, réuni encore une fois morts et vivants. Passant devant un salon connu pour recevoir des couples, vendu, repeint, il entre chez une vieille connaissance marchande de presse : " Bonjour inspecteur ! - Comment m'avez-vous reconnu Madame Reposoir ? - A votre voix d'outre-tombe et à l'odeur... une brûlerie à vous tout seul, et pourtant j'en fréquente des fumeurs... " Mais elle ajoute des commentaires qui intéressent Revel. Le salon maison de rendez-vous a été repris par le petit-fils des grands-parents assassinés 10 ans plus tôt, le jour de la disparition de sa femme. Les assassins n'ont pas été retrouvés. Ces dix ans ont permis à un enfant atteint "... d'une forme sévère de la maladie d'Asperger... son évolution et sa mémoire exceptionnelle... "  d'apporter des précisions sur les scènes qu'il suivait à l'époque de sa fenêtre, et les voitures marques et numéros qu'il mémorise toujours. Les commissaires, juges, capitaines, femmes et hommes, bien campés entourent un commandant qui nourrit jusqu'au bout de ses forces le crabe qui mange ses poumons. Arrivera-t-il néanmoins à résoudre "... Il y a des affaires comme celle-là qui te pourrisse la vie... elles te hantent, elles restent en toi, plantées dans la mémoire et dans ton coeur, comme un clou... " Entre Rambouillet et Versailles, Danièlle Thiéry, connait parfaitement le fonctionnement de la PJ, offre un nouveau roman, le 16è, et nous promène dans des rues assez éloignées des châteaux. 66è Prix du Quai des Ofèvres.

dimanche 31 mars 2013

L'ami Joseph Guy de Maupassant ( nouvelle France )



maupassant et sa mère
                                                        L'ami Joseph

            On s'était connu intimement pendant tout l'hiver à Paris. Après s'être perdus de vue, comme toujours, à la sortie du collège, les deux amis s'étaient retrouvés, un soir, dans le monde, déjà vieux et blanchis, l'un garçon, l'autre marié.
            M. de Méroul habitait six mois Paris et six mois son petit château de Tourbeville. Ayant épousé la fille d'un châtelain des environs, il avait vécu d'une vie paisible et bonne dans l'indolence d'un homme qui n'a rien à faire. De tempérament calme et d'esprit rassis, sans audaces d'intelligence, ni révoltes indépendantes, il passait son temps à regretter doucement le passé, à déplorer les moeurs et les institutions d'aujourd'hui, et à répéter à tout moment à sa femme qui levait les yeux au ciel et parfois aussi les mains en signe d'assentiment énergique : " Sous quel gouvernement vivons-nous, mon Dieu ? "
             Mme de Méroul ressemblait intellectuellement à son mari, comme s'ils étaient frère et soeur. Elle savait par tradition qu'on doit d'abord respecter le Pape et le Roi !
            Et elle les aimait et les respectait du fond du coeur, sans les connaître, avec une exaltation poétique, avec un dévouement héréditaire, avec un attendrissement de femme bien née. Elle était bonne jusque dans tous les replis de l'âme. Elle n'avait point eu d'enfant et le regrettait sans cesse.
            Lorsque M. de Méroul retrouva dans un bal Joseph Mouradour son ancien camarade, il éprouva de cette rencontre une joie profonde et naïve, car ils s'étaient beaucoup aimés dans leur jeunesse.
            Après les exclamations d'étonnement sur les changements que l'âge avait apportés à leur corps et à leur figure, ils s'étaient informés réciproquement de leurs existences.
       *     Joseph Mouradour, un Méridional, était devenu conseiller général dans son pays. D'allures franches, il parlait vivement et sans retenue, disant toute sa pensée avec ignorance des ménagements. Il était républicain, de cette race de républicains bons garçons qui se font une loi du sans-gêne, et qui posent pour l'indépendance de parole allant jusqu'à la brutalité.
            Il vint dans la maison de son ami et y fut tout de suite aimé pour sa cordialité facile, malgré ses opinions avancées. Mme de Méroul s'écriait :
            - Quel malheur ! Un si charmant homme !
            M. de Méroul disait à son ami d'un ton pénétré et confidentiel :
            - Tu ne te doutes pas du mal que vous faites à notre pays.
            Il le chérissait cependant, car rien n'est plus solide que les liaisons d'enfance reprises à l'âge mûr. Joseph Mouradour blaguait la femme et le mari, les appelait " mes aimables tortues ", et parfois se laissait aller à des déclamations sonores contre les gens arriérés, contre les préjugés et les traditions.
            Quand il déversait ainsi le flot de son éloquence démocratique le ménage, mal à l'aise, se taisait par convenance et savoir-vivre, puis le mari tâchait de détourner la conversation pour éviter les froissements. On ne voyait Joseph Mouradour que dans l'intimité.
            L'été vint. Les Méroul n'avaient pas de plus grande joie que de recevoir leurs amis dans leur propriété de Tourbeville. C'était une joie intime et saine, une joie de braves gens et de propriétaires campagnards. Ils allaient au-devant des invités jusqu'à la gare voisine et les ramenait dans leur voiture, guettant les compliments sur leur pays, sur la végétation, sur l'état des routes dans le département, sur la propreté des maisons des paysans, sur la grosseur des bestiaux qu'on apercevait dans les champs, sur tout ce qu'on voyait par l'horizon.
  * *          Ils faisaient remarque que leur cheval trottait d'une façon surprenante pour une bête employée une partie de l'année aux travaux des champs, et ils attendaient avec anxiété l'opinion du nouveau venu sur leur domaine de famille, sensibles au moindre mot, reconnaissants de la moindre intention gracieuse.
           Joseph Mouradour fut invité et il annonça son arrivée.
           La femme et le mari étaient venus au train, ravis d'avoir à faire les honneurs de leur logis.
           Dès qu'il les aperçut, Joseph Mouradour sauta de son wagon avec une vivacité qui augmenta leur satisfaction. Il leur serrait les mains, les félicitait, les enivrait de compliments.
           Tout le long de la route il fut charmant, s'étonna de la hauteur des arbres, de l'épaisseur des récoltes, de la rapidité du cheval.
           Quand il mit le pied sur le perron du château M. de Méroul lui dit avec une certaine solennité amicale :
           -Tu es chez toi, maintenant .
           Joseph Mouradour répondit :
           - Merci mon cher, j'y comptais. Moi d'ailleurs, je ne me gêne pas avec mes amis. Je ne comprends l'hospitalité que comme ça.
           Puis il monta dans sa chambre pour se vêtir en paysan, disait-il, et il redescendit tout costumé de toile bleue, coiffé d'un chapeau canotier, chaussé de cuir jaune, dans un négligé complet de Parisien en goguette. Il semblait aussi devenu plus commun, plus jovial, plus familier, ayant revêtu avec son costume des champs un laisser-aller et une désinvolture qu'il jugeait de circonstance. Sa tenue nouvelle choqua quelque peu M. et Mme de Méroul qui demeuraient toujours sérieux et dignes, même en leurs terres, comme si la particule qui précédait leur nom les eût forcés à un certain cérémonial jusque dans l'intimité.
            Après le déjeuner on alla visiter les fermes : et le Parisien abrutit les paysans respectueux par le ton camarade de sa parole.
            Le soir, le curé dînait à la maison, un vieux gros curé habitué des dimanches, qu'on avait prié ce jour-là exceptionnellement en l'honneur du nouveau venu.
            Joseph en l'apercevant fit une grimace, puis il le considéra avec étonnement, comme un être rare d'une race particulière qu'il n'avait jamais vu de si près. Il eut dans le cours du repas des anecdotes libres permises dans l'intimité, mais qui semblèrent déplacées à Méroul, en présence d'un ecclésiastique. Il ne disait point " Monsieur l'abbé ", mais " Monsieur ", tout court. Et il embarrassa le prêtre par des considérations philosophiques sur les diverses superstitions établies à la surface du globe. Il disait :
            - Votre Dieu, monsieur, est de ceux qu'il faut respecter, mais aussi de ceux qu'il faut discuter. Le mien s'appelle Raison. Il a été de tout temps l'ennemi du vôtre.
            Les Méroul, désespérés, s'efforçaient de détourner les idées. Le curé partit de très bonne heure.
            Alors le mari prononça doucement :
            - Tu as peut-être été un peu loin devant ce prêtre ?
            Mais Joseph aussitôt s'écria :
            - Elle est bien bonne celle-là ! Avec ça que je me gênerais pour un calotin ! Tu sais d'ailleurs, tu vas me faire le plaisir de ne plus m'imposer ce bonhomme-là pendant les repas. Usez-en vous autres, autant que vous voudrez, dimanche et jours ouvrables, mais ne le servez pas aux amis, saperlipopette !
            - Mais mon cher, son caractère sacré...
        ***    Joseph Mouradour l'interrompit :
            - Oui, je sais, il faut les traiter comme des rosières ! Connu, mon bon ! Quand ces gens-là respecteront mes convictions, je respecterai les leurs !
            Ce fut tout, ce jour-là.
            Lorsque Mme de Méroul entra dans le salon, le lendemain matin, elle aperçut au milieu de sa table trois journaux qui la firent reculer : Le Voltaire, La République française et La Justice.
            Aussitôt Joseph Mouradour, toujours en bleu, parut sur le seuil, lisant avec attention L'Intransigeant. Il s'écria :
            - Il y a là-dedans un fameux article de Rochefort. ce gaillard-là est surprenant.
            Il en fit la lecture à haute voix, appuyant sur les traits, tellement enthousiasmé, qu'il ne remarqua pas l'entrée de son ami.
            M. de Méroul tenait à la main Le Gaulois pour lui, Le Clairon pour sa femme.
            La prose ardente du maître écrivain qui jeta bas l'empire, déclamée avec violence, chantée dans l'accent du Midi, sonnait par le salon pacifique, secouait les vieux rideaux à plis droits, semblait éclabousser les murs, les grands fauteuils de tapisserie, les meubles graves posés depuis un siècle aux mêmes endroits, d'une grêle de mots bondissants, effrontés, ironiques et saccageurs.
            L'homme et la femme, l'un debout, l'autre assise, écoutaient avec stupeur, tellement scandalisés qu'ils ne faisaient pas un geste.
           Mouradour lança le trait final  comme on tire un bouquet d'artifice, puis déclara d'un ton triomphant :
           - Hein ? C'est salé cela ?
           Mais soudain il aperçut les deux feuilles qu'apportait son ami, et il demeura lui-même perclus d'étonnement. Puis il marcha vers lui, à grands pas, demandant d'un ton furieux :
           - Qu'est-ce que tu veux faire de ces papiers-là ?
           M. de Méroul répondit en hésitant :
           - Mais... ce sont mes... mes journaux !
           - Tes journaux... Ça, voyons, tu te moques de moi ? Tu vas me faire le plaisir de lire les miens qui te dégourdiront les idées, et quant aux tiens... voici ce que j'en fais, moi...
           - Et, avant que son hôte interdit ait pu s'en défendre, il avait saisi les deux feuilles et les lançait par la fenêtre. Puis il déposa gravement La Justice entre les mains de Mme de Méroul, et il s'enfonça dans un fauteuil pour achever L'Intransigeant.
            L'homme et la femme, par délicatesse, firent semblant de lire un peu, puis lui rendirent les feuilles républicaines qu'ils touchaient du bout des doigts comme si elles eussent été empoisonnées.
            Alors il se remit à rire et déclara :
            - Huit jours de cette nourriture-là et je vous convertis à mes idées.
            Au bout de huit jours, en effet, il gouvernait la maison. Il avait fermé la porte au curé, que Mme de Méroul allait voir en secret, il avait interdit l'entrée au château du Gaulois et du Clairon qu'un domestique allait mystérieusement chercher au bureau de poste et qu'on cachait lorsqu'il entrait, sous les coussins du canapé.Il réglait tout à sa guise, toujours charmant, toujours bonhomme, tyran jovial et tout puissant.
             D'autres amis devaient venir, des gens pieux et légitimistes. Les châtelains jugèrent une rencontre impossible et, ne sachant que faire, annoncèrent un soir à Joseph Mouradour qu'ils étaient obligés de s'absenter quelques jours pour une petite affaires et ils le prièrent de rester seul. Il ne s'émut pas et répondit :
            - Très bien, cela m'est égal, je vous attendrai ici autant que vous voudrez. Je vous l'ai dit : entre amis pas de gêne.Vous avez raison d'aller à vos affaires, que diable ! Je ne me formaliserai pas pour cela, bien au contraire. Ça me met tout à fait à l'aise avec vous. Allez, mes amis, je vous attends.
            M. et Mme de Méroul partirent le lendemain.
            Il les attend.


                                                                                                              Guy de Maupassant

*     jules grand-père maupassant
**   château de miromesnil
*** giverny claude monet               

dimanche 24 mars 2013

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 15 Samuel Pepys ( journal Angleterre )

 
    westminster                          

                                                                                                              9 mars 1660

            J'allai voir milord à son domicile et je me rendis à Westminster avec lui en voiture, en compagnie de Mr Dudley. Nous nous promenâmes dans la Chambre peinte un bon moment et je lui dis que j'étais prêt et décidé à l'accompagner en mer. Il approuva ma décision et me conseilla ce que je devais écrire à Mr Downing à ce propos. Ce que je fis à mon bureau : je proposai que selon le désir de milord mon poste soit temporairement occupé par Mr Moore et que moi et mon substitut soyons liés vis-à-vis de lui par les mêmes engagements. J'allai dîner chez Mr Crew où Mr Hawley me rejoignit. Je lui racontai toute l'affaire et lui montrai ma lettre en lui promettant 20 livres, ce qui lui fit très plaisir. Je fis la même chose pour Mr Moore qui reçut également très bien mon offre. Dans l'après-midi je me rendis en voiture, en prenant avec moi Mr Butler au ministère de la Marine, pour m'occuper des 500 livres de milord. On me promit que je les aurai demain matin. Puis retour, toujours en voiture. A Whitehall dans la salle du Conseil, je parlai avec milord et je lui fis signer l'acquit pour les 500 livres. Il me dit également qu'il avait parlé à Mr Blackborne de renvoyer Mr Creed et que je devrais aller le voir pour recevoir ses instructions concernant cet emploi.
            Après quoi, Mr Butler et moi allâmes chez Harper, où nous restâmes deux heures à boire, jusqu'à dix heures du soir. La vieille femme qui était ivre se mit à parler bêtement en faveur de son fils James.
            A la maison et au lit.
            Je n'ai pas fermé l'oeil de la nuit, car j'étais préoccupé par la façon dont je pouvais régler mes affaires étant donné le grand changement qui m'arrive. Échauffé par la boisson j'avais trop chaud, aussi fis-je la promesse, le matin suivant, de ne boire aucune boisson forte cette semaine, car je me rends compte que cela me fait transpirer au lit et me trouble l'esprit. Aujourd'hui il a été décidé que les lettres pour les élections seraient envoyées au nom des gardiens des libertés. J'ai entendu dire qu'il a été décidé secrètement de proposer un traité au roi. Et que Monck a tancé ses soldats vertement pour ce qu'ils ont fait hier.



                                                                                                               10 mars

            Ce matin allai voir mon père que je trouvai dans l'appentis à bois. Je lui fis part de ma résolution d'accompagner milord en mer et lui demandai conseil sur les dispositions à prendre pour ma femme. Finalement je décidai qu'elle irait résider chez Mr Bowyer. Je me rendis ensuite à la trésorerie de la Marine où je reçus 500 livres pour milord. Après en avoir laissé 200 à Mr Rawlinson pour Shipley je me rendis avec les autres à la taverne du Soleil sur la colline de Fish Street où Mr Hill, Mr Stevens et Mr Hater, du bureau de la Marine, m'avaient invité. Nous eûmes droit à de belles paroles et à un bon déjeuner de la part de Mr Hater. Je rentrai ensuite à la maison en voiture et je profitai pour faire part à ma femme de mon départ en mer. Elle en fut très fâchée et, après une querelle, elle accepta finalement d'aller s'installer en mon absence chez Mr Bowyer. Après cela j'allai voir Mrs Jemima et je payai 7 livres à sa domestique. Puis j'allai voir Mr Blackborne qui me rapporta ce que disait Mr Creed de la nouvelle selon laquelle j'allais le remplacer, et qu'il avait proposer à milord d'avoir deux secrétaires. Cela m'incita à aller chez sir Henry Wright où milord dînait, pour lui parler. Mais il ne semblait pas prêt à accepter la proposition. William Howe vint me chercher et nous nous rendîmes à Westminster. En chemin il me dit ce qu'il fallait que j'emporte et que je prépare en vue de mon départ. Il m'accompagna à mon bureau. Mr Mage vint aussi. Il était à moitié saoul et a fait le sot au violon, et j'en étais bien las. Puis à Whitehall et ensuite à la maison, où je mis pas mal d'affaires en ordre en vue de mon départ. Ma femme veilla pour me confectionner des bonnets, et la servante termina une paire de bas qu'elle tricotait. Ensuite, au lit.



                                                                                                                  11 mars 1660
                                                                                                            Dimanche

            M'activai toute la journée sans cravate, à ranger mes livres et mes affaires avant mon départ en mer.
Le soir, ma femme et moi allâmes souper chez mon père où Joyce Norton et Charles Glascock soupèrent avec nous. Après souper, à la maison où la servante avait tout préparé pour la lessive de demain. Puis, au lit. Mon rhume et ma toux m'ont beaucoup gêné pour dormir.



                                                                                                                   12 mars

            Aujourd'hui la servante s'est levée à deux heures du matin pour faire la lessive  et ma femme et moi sommes restés au lit à parler un grand moment. Je ne pouvais pas dormir à cause de mon rhume.Ma femme et*  moi sommes allés à la Bourse où nous avons acheté beaucoup d'affaires. Je l'y ai laissée et me suis rendu à Londres. Chez Bedell, le libraire de Temple Gate, j'ai payé 12 livres 10 shillings et 6 pence pour Mr Fuller selon ses instructions. Et j'ai réglé pas mal de choses en vue de mon départ. Je suis ensuite revenu et chez Wilkinson j'ai retrouvé Mr Shipley et certains marins comme le cuisinier du Naseby et d'autres pour dîner. Puis au Cheval blanc, dans King Street, où je pris le cheval de Mr Biddle pour me rendre à Huntsmore chez Mr Bowyer. Je le trouvai lui et sa famille en bonne santé. Ils sont prêts à ce que ma femme s'installe chez eux pendant que je serai en mer, ce qui était la raison de ma visite. Je restai coucher chez eux et je pris un remède pour mon rhume que m'a conseillé Mr Bowyer, à savoir une cuillère de miel avec de la noix de muscade râpée que l'on met dans la bouche. J'ai trouvé que cela m'avait fait beaucoup de bien.



                                                                                                                        13 mars

            Il a plu très fort. Je me levai de bonne heure et j'étais à Londres à 8 heures. Je me rendis au domicile de milord et je parlai avec lui. Il me dit que je serai secrétaire et que Creed serait trésorier adjoint de la flotte, ce qui m'ennuya, mais je ne pouvais rien y faire. Après cela je me rendis chez mon père pour m'occuper de certaines affaires, puis chez mon bottier et chez d'autres marchands. Dans la soirée j'allai à Whitehall où je rencontrai Simons et Llewellyn, je pris un verre avec eux chez Robert à Whitehall. Puis à l'Amirauté où je parlai avec Mr Creed, en fait aux deux frères, et ils me donnèrent l'impression qu'ils acceptaient et qu'ils étaient contents que j'aie le poste de secrétaire, puisque milord voulait le confier à quelqu'un d'autre que lui. A la maison et au lit.
            Aujourd'hui le Parlement a voté que toutes les décisions qui avaient été prises par l'ancien Parlement croupion à l'encontre de la Chambre des lords étaient nulles. Et ce soir il a été décidé d'envoyer les mandements pour l'élection sans imposer aucun critère de candidature. Il semble impossible de prévoir comment tout cela finira, car le Parlement semble soutenir le roi, tandis que les soldats se déclarent tous contre lui.



                                                                                                                           14 mars

            Chez milord : il est arrivé une quantité infinie de demandes adressées à lui et à moi, à mon grand dam. Milord me confia tous les papiers qu'on lui remettait, pour que je les classe et que je lui en fasse un rapport. J'ai reçu dix shillings d'une personne que Mr Wright recommandait à milord pour être prédicateur à bord de la frégate Speaker. De là me rendis au palais St James en compagnie de Mr Pearse le chirurgien, pour parler avec Mr Clarke, le secrétaire de Monck, de retirer certains soldats de Huntingdon et de les envoyer à Oundele. Milord me dit qu'il faisait cela pour faire une faveur à la ville, afin d'obtenir leur soutien pour les prochaines élections législatives, non qu'il ait l'intention de se présenter lui-même comme député, mais pour pouvoir y faire élire Mr George Montagu et milord Mandeville en dépit des Bernard. Ceci fait, à cette occasion je vis le général Monck et, selon moi, c'est un homme terne et ennuyeux. Lui et moi nous rendîmes à Whitehall où nous dînâmes avec Llewellyn chez Marsh. En rentrant à la maison, comme je racontais à ma femme ce que nous avions mangé, elle eut envie de chou, et j'en envoyai chercher pour elle. Je me rendis à l'Amirauté où je constatai avec étonnement que les gens me faisaient déjà leur cour. Ce matin, entre autres personnes qui vinrent me voir, j'engageai le fils Jenkins de Westminster et je pris Burr comme employé aux écritures. Ce soir, je suis allé au bureau de Mr Creed et il m'a remis l'ancien livre des archives de la Flotte et le sceau. Ensuite chez Harper où se trouvait le vieux Beard. Je l'ai emmené chez milord en voiture, mais milord était sorti. Je l'ai ensuite trouvé chez sir Henry Wright. Ensuite je me suis rendu en voiture, car il pleuvait fort, chez Mrs Jemima. J'y suis resté un moment, puis à la maison. Jusque tard dans la nuit, j'ai mis mes affaires dans un coffre de marin que Mr Shipley m'a prêté, puis au lit.



                                                                                                                    15 mars 1660

            Levé de bonne heure pour empaqueter mes affaires et les envoyer au domicile de milord pour qu'elles partent en voiture avec les bagages de milord. Ensuite, chez Will où je pris congé de certains de mes amis. J'y retrouvai Adam Chard et Tom Alcock qui étaient à l'école avec moi à Huntingdon, mais cela fait seize ans que je ne l'ai pas vu. Ensuite à Westminster où je payai ce que je devais à Mr et Mrs Mitchell. Je rencontrai ensuite Dick Mathews vint en ville et j'allai prendre un verre avec lui chez Harper.Puis me rendis à Londres par le fleuve. Dans Fish Street, ma femme et moi achetâmes un morceau de saumon pour 8 pence et allâmes le manger à la taverne du Soleil. Je lui promis de lui laisser la totalité de mes biens, à l'exception de mes livres, au cas où je mourrais en mer. De là à la maison. En chemin ma femme acheta du linon pour faire trois chemises et d'autres vêtements. Je me rendis chez milord pour lui parler, puis je raccompagnai Mrs Jemima chez elle en voiture, et ensuite je rentrai chez moi. De là, au Renard dans King Street, pour souper d'une bonne dinde offerte par Mr Hawley, en compagnie de quelques-uns de ses amis, Will Bowyer, etc... Après souper j'allai au palais de Westminster où le Parlement a siégé jusqu'à 10 heures du soir, car il pensait procéder à sa dissolution aujourd'hui, tout le monde s'y attendait. Mais il n'en fut rien. On dit un peu partout ce soir que les officiers mécontents avaient l'intention de se faire entendre dans la soirée, mais ils en ont été empêchés. A nouveau au Renard. Retour à la maison avec ma femme et au lit. Je tombai de sommeil.


                   
                                                                                                                   16 mars

            Je n'étais pas plus tôt levé que je fus dérangé par une abondance de clients, de marins. Le domestique de Wanley, mon propriétaire, vint me voir comme je le lui avais demandé hier quand j'étais passé chez lui en me rendant à Londres par le fleuve. Je lui payai le loyer pour ma maison, pour ce terme qui se termine à la fête de l'Annonciation et il me remit un acquit de la part de son maître. Ensuite j'allai voir Mr Shipley à la taverne Rhénane. Mr Pim, le tailleur, s'y trouvait et il nous offrit une boisson du matin et une langue de boeuf. A la maison, et avec ma femme à Londres. Nous dînâmes chez mon père, où Joyce Norton et Mr Arminger dînaient également. Après dîner ma femme prit congé afin de préparer son départ pour Huntsmore pour demain. En rentrant à la maison je passai à la chapelle dans Chancery Lane pour commander du papier de toutes sortes et autres choses nécessaires pour écrire, en vue de mon expédition.
Puis à la maison, où je consacrai une heure ou deux à mes affaires dans mon cabinet de travail. De là à l'Amirauté où je restai un moment, puis retour à la maison où Will Bowyer vint nous dire qu'il tiendrait compagnie à ma femme dans la voiture demain. Puis à Westminster où j'appris que le Parlement  s'était dissous aujourd'hui et avait traversé la Grand-Salle dans la liesse tandis que le président ne portait pas la masse. Tout le palais s'en est réjoui, tout autant que les députés. Ils commencent maintenant à parler à voix haute du roi. Ce soir j'ai appris qu'hier vers 5 heures de l'après-midi quelqu'un est venu avec une échelle à la grande Bourse effacer avec une brosse l'inscription au-dessus de la statue du roi Charles et qu'on a fait à la Bourse un grand feu de joie et qu'on a crié : " Dieu bénisse le roi Charles II  ! " De Westminster je rentrai à la maison me coucher, très triste à l'idée de me séparer de ma femme demain, mais que la volonté de Dieu soit faite !


                                    
* david teniers                                                                                             ............/

                                            

vendredi 22 mars 2013

Air de Dylan Enrique VIla-Matas ( roman Espagne )




                                        Air de Dylan

            " Un air de Dylan est un livre difficile à résumer ", dit Vila-Matas. Livre étrange. Comment vivre sans motivation. Vilnius Lancaster jeune cinéaste espagnol présente une conférence sur l'échec et ses archives à Saint-Gall. Le but, parler jusqu'au départ du dernier auditeur déçu par le propos. Mais ce sera un demi-échec. L'auteur du roman habite Barcelone comme Vilnus, mais change de quartier au moment où il reçoit une invitation de l'université suisse où il assistera et écoutera son jeune compatriote jusqu'à la fin. Vilnus :" ...l'impression que la mémoire et l'expérience de mon père s'étaient infiltées dans ma tête... une chanson chantée par Sinatra, L'amour n'est-il pas un coup de pied dans la tête ?..." Plus tard au cours d'une conversation où l'auteur apprend qu'il a connu le-dit grand Lancaster auteur post-moderniste mort récemment d'une façon étrange et père envahissant de Vilnus qui fait partie des jeunes gens sans but, sans désir et san motivation. Si pourtant, ayant vu 3 Camarades il retient une phrase qu'il croit pouvoir associer à Scott Fitzgerald l'un des scénaristes du film, ce qui, et malgré son appartenance à un groupe " de jeunes artistes indolents " le conduiera à Hollywood. Une réponse inattendue l'attend. Par ailleurs l'auteur a décidé de ne plus écrire, de rester silencieux, même avec sa femme. Mais nouveau quartier, les énigmes posées par Vilnus, Débora ex-petite amie de son père devenue la sienne et qui réclame l'autobiographie du Grand Lancaster à elle promise alors que l'épouse l'aurait mangé ou brûlé, ou pas. Vilnus demande à l'auteur d'écrire la biographie de son père. " Peut-être ne travaillerait-il même pas à la rédaction ... ils cherchaient quelqu'un pour l'écrire, quelqu'un de la vieille culture de l'effort...qui les aiderait à surmonter... cette perception de l'absurde dont on fait inexorablement l'expérience quand la nuit tombe et qu'on se rappelle qu'il existait jadis une lointaine planète à laquelle nous étions destinés. " Le titre " Air de Dylan " est une référence à " l'Air de Paris " de Duchamp.

jeudi 21 mars 2013

L'Homme-Fille Guy de Maupassant ( nouvelle France )



      
               bony de castellane
                       
                                                        L'homme-Fille


            Combien de fois entendons-nous dire : " Il est charmant cet homme,  mais c'est une fille une vraie fille. "
            On veut parler de l'homme-fille,  la peste de notre pays.
            Car nous sommes tous en France des hommes-filles,  c'est-à-dire changeants, fantasques, innocemment perfides, sans suite dans les convictions ni dans la volonté, violents et faibles comme des femmes.
            Mais le plus irritant des hommes-filles est assurément le Parisien et le boulevardier dont les apparences d'intellectuels sont plus marquées et qui assemble en lui, exagérés par son tempérament d'homme toutes les séductions et tous les défauts des charmantes drôlesses.
            Notre Chambre des députés est peuplée d'hommes-filles. Ils y forment le grand parti des opportunistes aimables qu'on pourrait appeler " les charmeurs ". Ce sont ceux qui gouvernent avec des paroles douces et des promesses trompeuses, qui savent serrer les mains de façon à s'attacher les coeurs dire mon cher ami d'une manière délicate à ceux qu'ils connaissent le moins, changer d'opinion sans même s' en douter,  s'exalter pour toute idée nouvelle, être sincères dans leurs croyances de girouette, se laisser tromper comme ils trompent eux-mêmes, ne plus se souvenir le lendemain de ce qu' ils affirmaient.
            Les journaux sont pleins d'hommes-filles. C'est peut-être là qu'on en trouvera le plus, mais c'est là aussi qu'ils sont le plus nécessaires. Il faut excepter quelques organes comme " les Débats ou la Gazette de France ".
            Certes tout bon journaliste doit être un peu fille, c'est-à-dire aux ordres du public, souple à suivre inconsciemment les nuances de l'opinion courante, ondoyant et divers, sceptique et crédule, méchant et dévoué, blagueur et Prudhomme, enthousiaste et ironique et toujours convaincu sans croire à rien.
            Les étrangers, nos anti-types, comme disait Mme Abel, les Anglais tenaces et les lourds Allemands,  nous considèrent et nous considéreront jusqu'à la fin des siècles avec un certain étonnement mêlé de mépris. Ils nous traitent de légers. Ce n'est pas cela. Nous sommes des filles, et voilà pourquoi on nous aime malgré nos défauts, pourquoi on revient à nous malgré le mal qu'on dit de nous. Ce sont des querelles d'amour !...
            L'homme-fille, tel qu'on le rencontre dans le monde, est si charmant qu'il vous capte en une causerie de cinq minutes. Son sourire semble fait pour vous. On ne peut penser  que sa voix n'ait point à votre intention des intonations particulièrement aimables. Quand il vous quitte on croit le connaître depuis vingt ans. On est tout disposé à lui prêter de l'argent s'il vous en demande. Il vous a séduit comme une femme.
            S'il a pour vous des procédés douteux, on ne peut lui garder rancune, tant il est gentil quand on le revoit ! S'excuse-t-il ? On a envie de lui demander pardon ! Ment-il ? On ne peut le croire. Vous berne-t-il indéfiniment par des promesses toujours fausses ? On lui sait gré des promesses seules autant que s'il avait remué le monde pour vous rendre service.
            Quand.il admire quelque chose, il s'extasie avec des expressions tellement senties qu'il vous jette à l'âme ses convictions. Il a adoré Victor Hugo qu'il traite aujourd'hui de bédole. Il se serait battu pour Zola qu'il abandonne pour Barbey d'Aurevilly. Et quand il admire il n'admire point les restrictions, et il vous   soufflèterait pour un mot. Mais quand il se met â mépriser il ne connait plus de bornes dans son dédain et n'accepte pas qu'on proteste.
            En somme il ne comprend rien.
            Écoutez causer deux filles :
            - Alors tu es fâchée avec Julia ?
            - Je te crois, je lui ai passé la main par la figure.
            - Qu'est-ce qu'elle t'avait fait ?
            - Elle avait dit à Pauline que je battais la dèche treize mois sur douze. Et Pauline l'a redit à Gontran. Tu comprends ?
            - Vous habitiez ensemble, rue Clauzel ?
            - Nous avons habité ensemble voilà quatre ans,  rue Bréda, puis nous nous sommes fâchées pour une paire de bas qu'elle pretendait que j'avais mis, c'était pas vrai,  des bas de soie  qu'elle avait achetés chez la mère Martin. Alors j'y ai fichu une tripotée. Et elle m'a quittée là-dessus. Je l'ai retrouvée voilà six mois et elle m'avait demandé de venir chez elle, vu qu' elle avait loué une boite deux fois trop grandes.
            On n'entend pas le reste, on passe
            Mais comme on va le dimanche suivant à Saint-Germain, deux jeunes femmes montent dans le même wagon. On en reconnaît une tout de suite, l'ennemie de Julia.
            - L'autre ... ? C'est Julia !
            Et ce sont des mamours, des tendresses, des projets.
            - Dis donc Julia... Écoutes Julia. ..
            L'homme-fille a des amitiés de cette nature.  Pendant trois mois il ne peut quitter son vieux Jacques,  son cher Jacques.  Il n'y a que Jacques au monde. Lui seul a de l'esprit,  du bon sens, du talent. Lui seul est quelqu'un dans Paris.  On les rencontre  partout ensemble, ils dinent ensemble, vont ensemble par les rues et chaque soir se reconduisent dix fois de la porte de l'un à la porte de l'autre sans se décider à la séparation.               Trois mois plus tard si on parle de Jacques :
            - En voilà une crapule, une rosse, un gredin. J'ai appris à le connaître, allez... Et pas même honnête,  et mal élevé,  etc... etc...
            Encore trois mois après et ils logent ensemble. Mais un matin on apprend qu'ils se sont battus en duel,  puis embrassés en pleurant sur le terrain.
            Ils sont au demeurant les meilleurs amis du monde, fâchés à mort la moitié de l'année se calomniant.et se chérissant tour à tour à profusion se serrant les mains à se briser les os et prêts à se crever le ventre pour un mot mal entendu.                                                                               
            Car les relations des hommes-filles sont incertaines, leur humeur est à secousses, leur exaltation à surprises, leur tendresse à volte-face, leur enthousiasme à éclipses. Un jour ils vous cherissent, le lendemain ils vous regardent à peine, parce qu'ils ont en somme une nature de filles un charme de filles, un tempérament de filles, et que tous leurs sentiments ressemblent à l'amour des filles.
            Ils traitent leurs amis comme les drôlesses leurs petits chiens.
           C'est le petit toutou adoré qu'on embrasse éperdument, qu' on nourrit de sucre, qu'on couche sur l'oreiller du lit mais qu'on jettera aussitôt par la fenêtre dans un mouvement d'impatience, qu'on fait tourner comme une fronde en le tenant par la queue, qu'on serre dans ses bras â l'étrangler et qu'on plonge sans raison dans un seau d'eau froide.
            Aussi quel étrange spectacle que les tendresses d'une vraie fille et d'un homme-fille. Il la bat et elle le griffe. Ils s'exècrent, ne peuvent se voir et ne peuvent se quitter, accrochés l'un à l'autre par le sentiment exalté de l'honneur on ne sait quels liens mystérieux du coeur.  Elle le trompe et il le sait, sanglotte et pardonne. Il accepte le lit que paye un autre et se croit de bonne foi irréprochable. Il la méprise et l'adore sans distinguer qu'elle aurait le droit de lui rendre son mépris. Ils souffrent tous deux atrocement l'un par l'autre sans pouvoir se désunir. Ils se jettent du matin au soir à la tête des hottes d'injures et de reproches, des accusations abominables,  puis énervés à l'excès, vibrants de rage et de haine, ils tombent aux bras l'un de l'autre et s'étreignent éperdument, mêlant leurs bouches frémissantes et leurs âmes de drôlesses.
            L'homme-filles est brave et lâche en même temps. Il a, plus que tout autre, le sentiment exalté de l'honneur, mais le sentiment de la simple honnêteté lui manque et les circonstances aidant il aura des défaillances et commettra des infamies dont il ne se rendra nul compte, car il obéit sans discernement, aux oscillations de sa pensée toujours entraînée.
         *   Tromper un fournisseur lui semblera chose permise et presque ordonnée. Pour lui, ne point payer ses dettes est honorable, à moins qu'elle ne soit de jeu, c'est-à-dire un peu suspectes. Il fera des dupes en certaines conditions que la loi du monde admet, s'il se trouve à court d'argent il empruntera par tous moyens, ne se faisant nul scrupule de jouer quelque peu les prêteurs, mais il tuerait d'un coup d'épée, avec une indignation sincère, l'homme qui le suspecterait seulement de manquer de délicatesse.



                                                                                                               Guy de Maupassant
                                                                                           ( Mauvigneux dans Gil Blas 1883 )


* balzac aux tuileries