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jeudi 25 juin 2020

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 122 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

Top 10 des plus belles petites villes de Royaume-Uni
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                                                                                                                           1er Août 1664

            Levé, l'esprit léger grâce à mes comptes d'hier soir. Levé donc et rendu avec sir John Mennes, sir William Batten et sir William Penn à St James où, avec quelque diligence, ayant préparé chacun en particulier ce matin, et pas avant de peur qu'il n'y réfléchisse ou n'en discute avec les autres. Mr Coventry proposa et obtint que l'un des clercs du secrétariat du Conseil de la Marine reçût 30£ de plus par an, comme Mr Turner, ce dont je suis bien aise de pouvoir donner 20 £  à Thomas Hayter et d'en garder 10 pour l'entretien d'un petit valet.
            Allé avec Mr Coventry au cabinet du procureur au Temple, mais comme il n'était pas là nous nous quittâmes et je rentrai à la maison. Dis avec grande joie à Thomas Hayter ce que j'avais fait, ce dont le malheureux fut bien aise, ce que sa discrétion ne lui permit guère de dire.
            Puis au café où toute la salle n'est pleine que de la victoire du général de Souches, français, soldat de fortune, commandant une partie de l'armée allemande, contre le Turc, en lui tuant 4 000 hommes et en s'emparant d'un butin des plus extraordinaires. 
            Prenant au passage Harman et sa femme les emmenai chez Anthony Joyce où on nous servit ma venaison en pâté, bien cuisiné. Mais, mon Dieu ! il fallait voir le cas qu'ils en firent, comme s'ils n'en avaient jamais mangé auparavant, et nous fûmes très gais, mais Will d'une manière fort embarrassante. Je vois que lui et sa femme mènent une vie misérable. Mais nous n'y prîmes point garde et fûmes aussi gais que je pouvais l'être en pareille compagnie. Madame Harman est une mâtine d'humeur charmante que je pourrais aimer de tout mon cœur, tant elle est de bonne et d'innocente compagnie. 
            Parti à Westminster chez Mr Blagrave et, après avoir chanté un ou deux airs je lui parlai au sujet d'une dame de compagnie pour ma femme et il me proposa sa parente, ce dont je fus bien aise mais elle est souffrante en ce moment. J'espère cependant l'avoir à mon service.
            Puis chez milord le chancelier, et ensuite, avec Mr Coventry, qui m'avait donné là rendez-vous, chez le procureur général où, avec sir Philip Warwick, nous délibérons d'un nouveau mandat à obtenir sous le grand sceau, qui nous permette d'établir ce contrat pour les subsistances de Tanger. 
            Rentré chez moi, causé longuement avec Will au sujet de cette jeune femme de sa famille dont il a parlé pour vivre avec ma femme. Mais, quoiqu'elle ait maintes qualités, comme c'est la fille d'un voisin, jeune et point encore rassise, je n'ose me risquer à la prendre, parce qu'elle pourrait rapporter n'importe quoi sur notre famille dès que nos voisin auraient quelque sujet de mécontentement.
            Je dois donc m'en remettre à Mr Blagrave. Puis à la maison, souper et, au lit.
            Hier soir, à minuit je fus réveillé parce que l'on frappait à le porte de sir William Penn. Et voilà que c'étaient des gens qui allaient et venaient  pour lui annoncer que son frère le capitaine Penn, qui était, semble-t-il, malade depuis un certain temps, est mort.


                                                                                                                     2 août

            Au bureau toute la matinée. Dîné à midi puis à la Bourse où me suis promené deux heures et plus avec sir William Warren qui, après force discours sur les procédés de sir William Batten, se mit à me dire que chacun doit vivre selon son rang, et qu'il est prêt, si je le désire, à ce que je devienne son partenaire pour tout ce dont il fait commerce. Et il reconnaît maintes et maintes fois qu'il me doit 100 livres pour le service que je lui ai rendu et pour mon amitié à son égard dans l'affaire de son gros contrat de mâts, et que d'ici Noël il sera en fonds et me les paiera. 
            Ceci me convient tout à fait, mais je n'ai nulle envie de me faire marchand, je renverrai donc cela à plus tard. Je le priai de me laisser le temps d'y songer.
            Allé au Théâtre du Roi où je vis La foire de la Saint-Barthélémy, qui me plaît toujours autant et qui, telle qu'elle est jouée est, je crois bien, la meilleure comédie du monde. J'étais par hasard assis auprès de Tom Killigrew. Il me dit qu'il monte un conservatoire, c'est-à-dire qu'il va construire un théâtre à Moorfields où il fera jouer des pièces ordinaires. Mais il y aura aussi quatre opéras par an joués six semaines d'affilée..... où tout sera aussi magnifique qu'il se peut voir en pays chrétien, et à cette fin il fait venir chanteurs, peintres et autres personnes d'Italie. 
            Pris ensuite le chemin du retour, rendu visite à milord Marlborough, et rentré chez moi et au bureau, puis chez sir William Penn et avec lui, nos collègues et les serviteurs de la maison pour toute compagnie, allé à l'église inhumer son frère, sans aucun éclat, si ce n'est qu'il l'enterre sous la sainte table dans le chœur, vers 9 heures du soir. Rentré chez moi, puis au lit.


                                                                                                                      3 août

            Levé de bonne heure et mis au travail des menuisiers pour refaire le parquet de notre garde-robe dont je veux faire un salon de musique. Sorti pour aller à Westminster et entre autres chez Mr Balgrave dont j'ai le consentement pour que sa parente vienne vivre avec ma femme comme dame de compagnie, ce qui me réjouit fort, et j'espère qu'elle donnera satisfaction.
       dans le jardin de Bodnant au pays de Galles ©National Trust Images Ian Shaw                        Rendu à Whitehall pour rencontrer sir George Carteret au sujet de la location d'un terrain pour entreposer nos mâts à Deptford. N'ai pu le voir parce que c'était matin de Conseil, mais rencontré Mr Coventry et causé avec lui de la probabilité d'une guerre contre la Hollande, que je crois désormais très probable, car les Hollandais sont en train d'armer une flotte pour nous combattre en Guinée. Lui pense que nous serons entraînés soudainement, quoique nous n'en ayons le désir ni les uns ni les autres. Pourtant la peste se répand chez eux, a atteint leur flotte, jusqu'au navire d'Obdam. Ce qui rend bien surprenant qu'ils le prennent de si haut.
            Puis à la Bourse et chez moi pour dîner. Descendu ensuite le fleuve jusqu'à la corderie jusqu'à Woolwich. Rendu visite à Mrs Falconer. Elle me raconte de curieuses histoires sur la montre en or que sir William Penn a reçu de son mari. Mais elle ne paraît pas sûre de ce que m'a dit sir William Batten au sujet de sa fille qui recevrait en viager 80 £ par an, en reconnaissance de l'avoir aidé à obtenir sa place qui pourtant lui coûta, en outre, 150 £ données à Mr Coventry............
            Allé au chantier et vu le nouveau navire fort avancé. Rentré à la maison pour souper, et au bureau. Resté tard, causant avec Mr Bland des affaires de Tanger. Rentré chez moi et, au lit.


                                                                                                                        4 août

            Levé de bonne heure et au bureau me préparer pour un grand débat sur la Compagnie des Indes orientales, qui nous a pris ensuite toute la matinée. A midi, dîné avec sir William Penn de seulement un morceau de bœuf et simulai une amitié et une gaieté que je ne puis avoir avec lui. Sorti cependant avec lui dans son carrosse et il m'emmena au Théâtre du Roi, payant pour moi, voir Les Rivales, fort jolie pièce, innocente et spirituelle, qui me plut beaucoup. Et puisqu'elle m'était offerte je ne vois pas une violation de mon serment.
            C'est là que nous apprenons que Clun, l'un de leurs meilleurs acteurs, quittant la ville hier soir, après avoir joué L'Alchimiste, l'un de ses meilleurs rôles, pour aller à sa campagne, fut attaqué et assassiné. L'un des gredins a été pris, un Irlandais. Massacré et ligoté, paraît-il, de la plus barbare façon. Il manquera beaucoup à son théâtre.Labyritnthe de laurier à Glendurgan, ©National Trust Images Andrew Butler
            Puis rendu visite à milady qui me dit que milord Fitzharding sera fait marquis.
            Rentré à mon bureau, resté tard, puis souper et, au lit.


                                                                                                                  5 août 1664

            Levé de très bonne heure et mis au travail mon plâtrier pour blanchir et mettre en couleurs mon salon de musique. Vu terminé avec grand plaisir, je m'habillai vers 10 heures et montai une fort belle jument envoyée par sir William Warren, comme il l'avait promis hier. Je traversai ainsi la Cité, et Dieu sait si je n'étais pas peu fier d'être vu sur une aussi jolie bête. Allé chez mon cousin W. Joyce qui tantôt monta en selle lui aussi et nous partons vers Highgate. Chemin faisant , à Kentish Town, il me montre où et comment Clun fut tué et laissé dans un fossé. Il ne mourut pas de ses blessures mais d'avoir perdu son sang en se débattant. Il me raconta aussi comment c'était arrivé, rentrant chez lui si tard, après avoir bu en compagnie de sa catin, et comment on avait découvert le corps.
            Continué jusqu'à Barnet où nous bûmes, puis de nuit jusqu'à Stevenage, sous un peu de pluie mais pas trop. C'est là, qu'à mon grand chagrin, je vois que ma femme n'était pas arrivée, non plus qu'aucun coche de Stamford n'était descendu cette semaine, si bien qu'elle ne peut pas revenir. 
            Fâché et las et point guéri tout à fait de mes vieilles douleurs, après souper je vais au lit. Après un court sommeil William Joyce vient en chemise dans ma chambre avec un message et un billet de ma femme disant qu'elle était arrivée à Biggleswade par le coche d'York et nous rejoindrait demain matin. Ravi qu'elle ait été si avisée dans cette affaire, je me rendormis en paix jusqu'au...


                                                                                                                             6 aoüt

            .. matin. Puis lever, et voilà que le doyen Honywood a couché ici la nuit dernière. Je le rencontrai et devisai avec lui ce matin. C'est un prêtre un peu simple, quoique brave homme et bien intentionné.
            William Joyce et moi jouons aux boules sur la pelouse jusqu'à 8 heures. Arrive ma femme dans le coche, un coche plein de femmes, un seul homme chevauchant à côté, allé hier soir à la rencontre d'une sœur venant à la ville.
            Nous bûmes là fort gaiement, sans descendre de voiture, puis en selle et en route avec elles vers Welwyn où nous descendons pour un très bon dîner. Réjoui et content de voir ma pauvre femme. Aussi joyeux ici que je puis l'être malgré ma fatigue, et après dîner repartis pour Londres. Jamais tant ri de ma vie tout le long du chemin que de voir deux jeunes messieurs venus à la rencontre de la même dame et William Joyce en rit aussi. L'un d'eux monté sur un alezan au trot dur, et tous les deux épuisés et vexés à l'extrême. Mais on ne saurait dire à quel point nous fûmes en joie tout le long du chemin.
            Nous descendons à Holborn puis, dans une autre voiture ma femme et sa servante rentrent à la maison, et moi à cheval. Trouvé toute la maison bien rangée, nette et propre. Après avoir accueilli ma femme, un peu au bureau, puis rentré à la maison, souper et, las, ne me sentant pas très bien, au lit.


                                                                                                                         7 août
                                                                                                   Jour du Seigneur
            Grasse matinée à caresser ma femme et à causer. Elle me fait une triste description de l'imprévoyance, de l'agitation et de la malpropreté dans lesquels vivent à la campagne mon père, ma mère et Pall. Ce qui m'inquiète fort et il faudra que je cherche remède.
            Levé et habillé, ma femme aussi, puis en bas. Et je montrai à ma femme, pour son émerveillement et sa grande joie, les pièces d'argenterie offertes par Mr Gauden, les deux brocs qui, en vérité, sont si splendides que je ne puis me résoudre à croire qu'ils m'appartiennent.
            En bénissant Dieu nous descendons dîner, fort agréablement. Remontés un moment puis à Whitehall, à pied, ayant trouvé chez moi une lettre du capitaine Cooke, avec laquelle il m'avait envoyé, pour que je le voie, un jeune garçon qu'il entendait me recommander.
            J'y allai donc, le rencontrai et parlai avec lui. Il me donne à espérer beaucoup de ce garçon, ce dont je suis bien aise. Et à la chapelle rencontrai Mr Blagrave qui me décrit ce garçon. Il me le présenta, je lui parlai et ce garçon semble plein de bonne volonté pour entrer à mon  service. J'espère qu'il donnera satisfaction. Il faut que je dise à Mr Townshend de lui faire faire ses habits promptement, puis il viendra chez moi. 
            Je pris le chemin de la maison, rencontrai Mr Spong qui m'accompagna jusqu'à l'ancienne Bourse, causant de maintes choses. ingénieuses, de musique et enfin de verres optiques, et je vois qu'il est resté aussi habile homme qu'il a toujours été. Entre autres choses, il me dit avoir découvert, grâce à un microscope de sa fabrication, que les ailes d'un papillon de nuit sont faites tout juste comme les plumes sur l'aile d'un oiseau, et ceci de la manière la plus claire et la plus certaine.
            Tandis que nous causions passèrent plusieurs pauvres gens, emmenés par des gardes pour être allés à un conventicule. Ils se laissent conduire comme des agneaux, sans la moindre résistance. Plût à Dieu qu'ils voulussent bien faire acte de conforlité ou être plus avisés et ne point se faire prendre. 
            Pris congé de lui, fort satisfait de sa compagnie et partis vers la maison, m'arrêtant chez Dan Rawlinson où je soupai avec mon oncle Wight, puis rentré chez moi et mangé de nouveau pour la forme avec elle, et puis prières et, au lit.


                                                                                                                  8 août

            Levé et sorti en voiture avec sir William Batten jusqu'à St James. En chemin il me dit que sir John Mennes s'arroge souvent le mérite, à lui seul, de ce qui est l'oeuvre à parts égales du Conseil tout entier. Et qui pis est, de ce en quoi il n'est pour rien, en particulier ce papier qu'il remit au Duc récemment, traduction d'une feuille hollandaise au sujet de la querelle entre eux et nous, qu'il donna pour sienne alors qu'elle était entièrement de sir Richard Ford. Il me dit aussi que sir William Penn, comme nous venions à parler de Mrs Falconer, encouragea d'abord beaucoup Mr Coventry à lui présenter des candidats à des places, et ceci avec des commissions élevées. Il fut très franc avec moi à ce propos.
            Après avoir, avec le Duc, vaqué à nos affaires, je vais au café puis rentre dîner. Pendu ensuite mes beaux tableaux dans ma salle à manger, ce qui la rend très jolie. Puis nous sortons, ma femme et moi, pour nous rendre au Théâtre du Roi. Elle me cède son tour du mois dernier, puisqu'elle n'y est pas allée, de sorte que je n'enfreigne pas du tout mon vœu, car cela ne me coûte pas plus que je n'aurais dépensé pour elle si elle y était allée les deux fois qui lui revenaient. Cette fois-ci nous vîmes Les Caprices de Flora. Je n'avais jamais vu cette pièce mais, grâce au jeu fort habile de cette petite friponne de Flora elle me parut aussi plaisante que la plus jolie que j'aie vue de ma vie.
            Rentré souper puis resté tard au bureau, Mr Andrews et moi devant discuter de notre contrat de subsistances. Lui parti je mets au net mes Mémoires et mes dépenses des quatre derniers jours, puis chez moi et, au lit.

Le Bouffon au luth" de Hals Frans, l'Ancien. Paris, musée du Louvre - Photo  (C) RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Franck Raux | Musée du louvre,  Bouffon, Luth                                            Frans Hals as a modern idol - AndBloom
                                                                                                                   9 août

            Levé, au bureau réunion toute la matinée. Rentré à midi où comme convenu Mr Belgrave vint dîner, amenant un de ses amis de la Chapelle. Dîner très gai, puis monté à mon cabinet où chanté un ou deux psaumes de Lawes. Puis nous causons un moment seuls, lui et moi, de sa parente qui doit venir vivre avec ma femme, dans une dizaine de jours, et j'espère qu'elle donnera satisfaction. Eux partis, à mon bureau et là, la tête me tournant un peu d'avoir bu quelque vin, bien que mêlé de bière, mais peut-être un peu plus que je n'en avais l'accoutumée, je ne saurais pourtant le dire, je rentrai à la maison et passai l'après-midi avec ma femme à causer. Le soir un moment au bureau, et à la maison, souper et, au lit.
            La nouvelle est arrivée aujourd'hui, l'Empereur a battu le Turc. Tué le grand vizir et plusieurs grands pachas, une armée de 80 000 hommes tués et mis en déroute. Avec de son côté des pertes considérables, puisqu'il a perdu trois généraux et que les forces françaises sont presque anéanties, ce qui, croit on, sert l'Empereur presque autant que d'avoir battu le Turc car, s'ils avaient vaincu, ils lui auraient été tout aussi importuns.


                                                                                                                      10 août

            Lever. Une fois prêt sortis pour plusieurs petites affaires, entre autres afin de dénicher quelqu'un pour graver mes tables sur ma nouvelle règle à calcul gravée d'argent, car elle est si petite que Brown qui l'a fabriquée ne trouve personne pour cela. J'allai donc voir Cocker, le célèbre maître d'écriture, et je le lui fis faire. Je restai une heure près de lui pour le voir dessiner le tout, et c'est merveille de le voir ciseler si fin du premier coup à l’œil nu, et tout relire sans qu'il manque rien, alors que pour tout l'or du monde je n'aurais su, en faisant de mon mieux, en lire un mot ni une lettre. C'est l'habitude, mais sur sa vie il dit que la meilleure lumière pour un travail minutieux, contrairement à l'adresse de Chaucer au soleil, qu'il devrait prêter sa lumière à ceux qui gravent de petits sceaux, est la lumière artificielle d'une chandelle judicieusement placée. A entendre ses discours c'est un fort habile homme et, entre autres, un grand admirateur de tous nos poètes anglais, qu'il connaît bien et dont il se mêle de juger, non sans esprit.c
            Fort aise de sa compagnie et plus encore de ce qu'il ait commencé le travail sur ma règle, je le quittai pour rentrer à la maison où, comme convenu, Mr Deane vint dîner avec moi et, par rencontre, avec la femme du canonnier Batters.
            Après dîner grande conversation entre Deane et moi au sujet du bois de milord le chancelier, affaire dont je voudrais bien me tirer sans dommage.
            Reparti chez Cocker et devisai avec lui agréablement pendant une une heure ou deux, puis le quittai et, comme convenu, avec le capitaine Silas Taylor, ma vieille connaissance de l'Echiquier, allai à la poste écouter de la musique instrumentale de Mr Birchensha devant milord Brouncker et sir Robert Moray. Je dois l'avouer, que ce soit parce que je l'écoute rarement ou parce que la voix est vraiment plus belle, il est de fait que je n'y trouve aucun plaisir et selon moi deux valent vingt instruments.
            Rentré à la maison et au bureau un moment, puis souper et, au lit.


                                                                                                               11 août 1664

            Levé et, à cause de la douleur, à mon grand chagrin, obligé de porter mon manteau pour tenir mes jambes au chaud. Toute la matinée au bureau, où grande dispute à nouveau contre sir William Batten et sir William Penn sur la largeur de toile, eux en faveur de laizes étroites, et Mr Coventry, sir John Mennes et moi pour les garder plus larges.
            Rentré dîner et arrive Mr Creed fraîchement revenu des Downs et dîna avec moi. Je lui fais bon visage quoique je ne l'aime point à cause de sa basse ingratitude à mon égard. Sorti cependant, emmené ma femme faire quelques emplettes à la nouvelle Bourse et allé chez milady Sandwich, où causé gaiement avec elle, un long moment. Puis rentré à la maison où arrive Cocker avec ma règle qu'il a gravée à merveille, tant pour la beauté que pour la petitesse de son travail. Il m'en coûta 14 shillings, et j'en suis fort satisfait.
            Lui parti tantôt arrive Mr Moore, il demeura avec moi un long moment à causer des affaires de milord qui, j'en ai bien peur, seront en mauvaise passe pour sa famille s'il advient malheur à milord en mer. Lui parti resté tard au bureau, et je ne puis m'empêcher d'admirer et de consulter ma nouvelle règle à calcul. A la maison, souper et, au lit.
            Aujourd'hui, pour tenir un pari fait devant le roi, milord Castlehaven et milord Aram, fils de milord Ormond, eux deux tout seuls, ont chassé à courre et tué un fort chevreuil dans le parc de St James.


                                                                                                                  12 août

            Levé, affairé toute la matinée au bureau avec sir William Warren sur un important marché de mâts de Nouvelle-Angleterre. Je marchandai dur avec lui, au point de le mettre en colère. Mais il me paraît bon et juste de le faire dans l'intérêt du roi. A midi à la Bourse un moment, puis dîné et sorti en voiture, déposé ma femme et sa servante chez Stephens, l'orfèvre, pour échanger de vieilles dentelles d'argent et aller acheter de la dentelle de soie neuve pour un jupon.
            Allé à Whitehall et abattu grande besogne à la commission de Tanger où, s'agissant entre autres de la propriété des maisons de là-bas et de ce que nous devrions avoir égard aux droits des Portugais, de ceux qui restent en possession des maisons ou les ont vendues lorsque Tanger leur appartenait, et encore quelque chose de plus en leur faveur, le Duc dans une colère que je ne lui avais jamais vue s'écria :
            " - Le monde entier nous maltraite, mais je crois que nous, nous ne maltraiterions jamais personne. "
            Rentré à la maison. Quoiqu'il fût tard, Pedro étant là, chanta une chanson et s'en fut. Je lui donnai 5 shillings, mais cela m'est importun et je mettrai un terme à ces rencontres. Le soir, on nous ramène notre pauvre Francy qui, à mon grand chagrin, boite toujours, de sorte que j'aurais préféré qu'on ne nous la remmenât jamais, car cela fait de la peine de la voir.

          Fichier:Frans Hals - Singing Boy with Flute - Google Art Project.jpg —  Wikipédia                                artnet.com   Laughing man with a jug, probably Pekelharing par Frans Hals sur artnet   

                                                                                                                            13 août

            Levé. Avant que j'aille au bureau arrive mon tailleur avec une veste que je lui commandai pour porter à la maison, tout exprès, ne descendant pas au-delà du genou, car c'est à force de porter un manteau à la maison que j'ai les jambes si sensibles. Vient aussi Mr Reeves avec un microscope et un scotoscope. Du premier je lui donnai 5 £ et 10 shillings, un prix élevé, mais c'est un bibelot fort curieux et, me dit-il, aussi bon - oui-da, le meilleur qu'il connaisse en Angleterre, et il fait les meilleurs du monde. Le second, qui est de valeur, il me le donne. C'est une curieuse curiosité qui sert à voir des objets dans une pièce obscure. Fort satisfait de cela, allé au bureau où resté toute la matinée.. 
            Là, sir William Penn m'offrant son carrosse pour aller à Epsom avec ma femme, je sortis et dis à ma femme de se préparer. Mais ne me sentant pas bien, et d'autres raisons me dissuadant, je renonçai à y aller. Et Mr Creed dînant avec moi, je fis en sorte qu'il nous offrît le théâtre cet après-midi, en lui prêtant l'argent pour ce faire, ce qui est un subterfuge que je viens de trouver pour tourner mon vœu, mais que je ne renouvellerai jamais, je le jure. Nous allons voir la nouvelle pièce au Théâtre du Duc, Henry V, pièce fort belle, écrite par milord Orrery, où les rôles de Betterton, de Harris et de Ianthe, sont incomparablement écrits et joués et toute la pièce remplie de sublimités et la mieux faite pour le ravissement de l'esprit et du jugement que j'aie jamais entendue. ne s'y trouvant qu'une incongruité ou qu'une chose qui me déplut, à savoir que le roi Henry promet d'intercédé en faveur des Tudor auprès de leur maîtresse, la princesse Catherine de France, avec plus de zèle qu'il ne semble mettre à le faire le moment venu, et elle refuse Tudor d'une manière quelque peu outrageante et pas avec l'embarras et les égards qui lui auraient été dus.
             Rentré chez moi et à mon bureau. Écrivis par la poste, puis me mis à lire un peu du livre du docteur Power sur la manière de découvrir grâce au microscope, afin d'apprendre un peu à me servir de mon instrument et ce que je puis en attendre.
            Souper et, au lit.


                                                                                                                          14 août
                                                                                                        Jour du Seigneur
            Après une grasse matinée à causer avec ma femme, lever. Mr Hollier vient me voir, il s'accorde avec moi : mes douleurs ne sont rien d'autre que le froid dans mes jambes qui provoque des vents, et dues seulement à mon habitude de porter un manteau. Et que je ne suis affligé d'aucun ulcère, mais que l'épaisseur de mes urines provient d'avoir trop chaud dans le dos.
            Lui parti arrive Mr Herbert, domestique de Mr Honywood. Il dîna avec moi, je le crois fort honnête, sincère, bien intentionné et, à sa façon de parler et de vivre, l'exemple même du vieux serviteur modèle. 
            Après dîner monté dans mon cabinet pour finir le livre du Dr Powell sur le microscope, très beau et à mon grand contentement. Puis, ma femme et moi, avec beaucoup de plaisir, mais aussi beaucoup de difficulté avant de parvenir à trouver comment voir quoi que ce soit dans mon microscope, nous y parvînmes enfin avec satisfaction, mais pas autant que je l'espère quand je saurai mieux m'en servir.
            Tantôt arrive William Joyce, en costume de soie et cape doublée de velours. Il resta causer avec moi et sa vue me met en gaieté. Il soupa avec moi, mais c'est un homme plein de ruse et de cautèle, et il est dangereux de lui déplaire, car sa langue n'épargne personne.
            Après souper je monte lire un peu puis, au lit.


                                                                                                                            15 août

            Levé et en voiture avec sir John Mennes jusqu'à St James où nous vaquons à nos affaires avec le Duc qui nous annonce de plus en plus de signes de guerre avec la Hollande, et dit qu'il faut envoyer sans retard une flotte en Guinée, car c'est ce que font les Hollandais et je crois bien que c'est là que commencera la guerre. Rentré à la maison de nouveau avec lui et, chemin faisant, il me parle des maladies qu'il guérit quand il accompagne le roi en exil en tant que docteur. Et mieux que quiconque, la vérole. Parmi d'autres, il me dit avoir guéri sir John Dunham à miracle, après que c'était devenu un ulcère qui lui couvrait tout le visage.
            Allé au café, puis un moment à la Bourse et à la maison pour dîner avec Creed que j'ai rencontré au café. Après dîner, je le dépose en voiture au Temple et ma femme et moi chez Mr Blagrave. Comme il n'y a personne chez eux je me rends à la Grand-Salle où je la laisse, puis à la Taverne de la Trompette, où arriva Mrs Lane, et elle commence une triste histoire sur son mari qui, comme je le craignais, ne vaut pas un liard, et voilà qu'elle est grosse et qu'elle est perdue si je ne lui trouve, à lui, une place. Je pris là mon plaisir avec elle, et elle, comme une impudente drôlesse, compte sur ma bonté envers son mari. Mais je ne veux plus avoir affaire avec elle, qu'elle se couche où elle a fait son lit, puisqu'elle n'a pas voulu suivre mon conseil au sujet de Hawley.
            Après avoir bu nous prîmes congé et je m'en fus chez Blagrave. Je causai avec Mrs Blagrave de sa parente qui, semble-t-il, se languit parfois jusqu'à la folie, entre autres, et surtout d'amour et de mélancolie à cause de la mort de son prétendant. De telle sorte que, puisqu'elle nous conte tout cela avec tant de simplicité et d'innocence, je crains qu'elle ne puisse venir chez nous avec plaisir. Ce dont je suis fâché, car je crois qu'elle nous aurait bien plu. Blagrave rentre et nous chantons, sa nièce avec nous, mais elle chante fort médiocrement.
            Puis repasse par la Grand-Salle et chez nous en voiture, nous arrêtant en chemin à Charing Cross, où nous vîmes le géant hollandais juste arrivé de son pays, sous le bras de qui je passai avec mon chapeau sur la tête. Je ne pus atteindre plus haut que ses sourcils du bout des doigts, aussi haut que je tendisse la main. C'est un homme de bonne mine, bien tourné et sa femme une Hollandaise toute petite mais mignonne et avenante. Il est vrai qu'il porte des souliers avec des talons, assez hauts, mais pas très hauts, et qu'il porte habituellement un turban, ce qui le fait paraître encore plus grand, quoiqu'il soit très grand, comme j'ai dit.
            Rentré à mon bureau, puis souper, puis derechef au bureau, resté tard et à la maison et, au lit. Ma femme et moi chagrinés de ne point avoir un meilleur succès dans l'affaire de la dame de compagnie.


                                                                        à suivre...................

                                                                                                                16 août 1664

            Réveillé ce..........                 
            

            











dimanche 7 juin 2020

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 120 Samuel Pepy fait fais ( Journal Angleterre )


Jeune femme jouant du virginal — Wikipédia
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                                                                                                                        1er Juillet 1664

            Levé et chez moi toute la matinée. D'abord descendu mon virginal dans mon cabinet de travail où j'ai fait faire un châssis neuf pour le mettre dessus. Tantôt arrive le Dr Burnet. Il m'assure que j'ai un ulcère, soit dans les reins, soit dans la vessie car dans mon urine, qu'il a vue hier, il est sûr que le sédiment n'est pas une boue formée par la chaleur, mais directement du pus. Il me composa une prescription pour y remédier, sans que j'en fusse aussi content que je pensais l'être. Je lui donnai une pièce, espérant toutefois que son conseil me sera utile, quoiqu'il soit étrange que Mr Hollier ne m'ait de sa vie jamais dit mot de cet
ulcère.
            Lui parti, à la Bourse, puis rentré dîner. Ensuite à mon bureau à travailler jusqu'au soir. Puis, comme convenu, arrivèrent Mr Hill, Andrews et un certain Cheswick, un musicien qui joue fort bien de l'épinette, pour chanter des psaumes jusqu'à 9 heures du soir, puis on se sépara avec grand plaisir. Ce sont de très bons compagnons et j'espère avoir de temps en temps leur compagnie. Eux partis au bureau jusque vers minuit et rentré chez moi et, au lit.
            A la Bourse, aujourd'hui, j'ai vu combien l'humeur du peuple est inconstante. Parce que nous avons débarqué quelque 200 hommes qui demeuraient oisifs, leur travail fini sur certains des navires qui devaient être équipés pour le service, on dit en ville que le roi débarque tous ses hommes : 200 hier et 800 aujourd'hui, et que maintenant qu'il a 100 000 livres à sa disposition il se soucie peu de faire la guerre aux Hollandais. Mais j'en détrompe un grand nombre en leur disant ce qu'il en est.


                                                                                                                   2 juillet

            Levé et au bureau toute la matinée. A midi à la Bourse où, ce qui est surprenant, je ne rencontrai personne que je puisse inviter chez moi à goûter mon pâté de venaison, à part Mr Alsop et et Mr Lanyon que j'avais invités hier soir, et un ami qu'ils amenèrent avec eux. 
            A la maison, donc, et avec notre pâté de venaison nous eûmes d'autres bonnes viandes et une agréable conversation. Après dîner, à huis clos, causer de notre affaire de subsistances pour la garnison de Tanger. Je note les prix de toutes leurs fournitures. J'espère bien arranger les choses de sorte qu'ils y trouvent leur compte et moi aussi. Ce qui me plaît fort, car j'espère gagner noblement et honnêtement, le roi ayant son profit. 
            Eux partis arriva sir William Warren. Nous causâmes longuement de mâts. Le soir venu, au bureau où restai tard à écrire des lettres, puis à la maison pour parcourir certains papiers concernant Brampton, que j'ai fait serment d'expédier avant de passer une demi-heure à aucun plaisir ou d'aller au lit avant minuit, serment auquel, avec l'aide de Dieu je serai fidèle puis, au lit.
            Rentré chez moi je vis que, puisque c'est demain dimanche, je ne gagnerais rien à le faire ce soir et que demain ce sera mieux. J'allai donc au lit avant l'heure dite, mais bien résolu à le faire demain plus utilement.


                                                                                                                        3 juillet
                                                                                                    Jour du Seigneur
            Levé et dispos, toute la matinée dans mon cabinet de travail à parcourir et à régler quelques-unes des affaires de Brampton. A midi dîner des restes de la venaison d'hier et d'une couple de beaux oisons qu'il nous faut bien manger seuls, parce qu'ils ne se garderont pas, ce que nous trouvâmes fâcheux.
            Après dîner enfermé à mon travail. Je terminai avant le soir à ma grande satisfaction et l'esprit en paix. Puis je me levai et passai la soirée à me promener et à deviser avec ma femme. Grand fracas de tonnerre et d'éclairs toute la soirée. Il y a eu plus de tonnerre et d'éclairs cette année, à ce qu'on dit, qu'en aucune autre de mémoire d'homme. Et il en est de même, paraît-il, en France et partout ailleurs. Sur ce, prières et, au lit.                                      
                                                                                               4 juillet               
  Actualités - Les Sorbonne Scholars                       pinterest.fr Les Créations de L'épinette (lauramaudef) sur Pinterest
     Levé et beaucoup de monde autour de moi pour affaires. Sorti ensuite, allé en plusieurs endroits et à midi chez milord Crew, où je dînai, milord Crew se montrant tout à fait aimable. Il offrit de me vendre une de ses terres dans le Cambridgeshire, un achat de quelque 1 000 livres que, si j'en trouve le moyen, je ferai. Après dîner je rentrai chez moi à pied, faisant encore quelques courses en chemin.
             A la maison je trouve ma femme qui a aujourd'hui, de son propre chef dépensé 23 shillings pour s'acheter une paire de pendants d'oreilles. Ce qui me contraria et nous échauffa l'un contre l'autre très fort, elle m'adressant des paroles très grossières, telles qu'il me chagrine de penser qu'elles puissent sortir de sa bouche, et rappelant notre vieille querelle, dont je déteste qu'on me fasse me ressouvenir.
( note de l'éd. :  " Le couple se sépara quelque temps avant le début du Journal qu'entreprit Samuel Pepys en 1661 ). Je jurai de les briser à moins qu'elle ne les revende pour ce qu'elle pourrait en tirer.
            Sur cette résolution je sortis. La pauvre femme, un moment plus tard, envoya sa servante les rendre et reprendre son argent. Je suivis Bess; sa messagère, à la Bourse et là, après considération, je la renvoyai. Je ne voulus pas qu'elles fussent rendues, étant satisfait que ma femme eût cédé. Rentré donc et, réconciliés, mais les paroles je ne pus les chasser de mon esprit et m'en fus donc au lit le soir, mécontent. Elle vint se coucher avec moi, mais rien ne put me radoucir. Je dormis et me réveillai le matin en colère.
            Aujourd'hui le roi et les reines ont visité milord Sandwich et la flotte à l'appareillage, dans le Hope.


                                                                                                                      5 juillet

            Levé et au bureau toute la matinée. A midi un moment à la Bourse. Puis rentré avec Will Howe et dîné. Ensuite à mon bureau où restai tard travailler dans la soirée, ayant eu, entre autres, une longue conversation avec Gregory le jeune au sujet de l'affaire de la Caisse des Invalides, dans laquelle sir William Batten se montre si grand scélérat. Aussi, avec Alsop et Lanyon à propos des subsistances pour Tanger, dont j'espère tirer quelque profit.
            Rentré tard, souper et, au lit. L'esprit tout rempli d'une résolution aujourd'hui prise à la Bourse, de descendre demain jusqu'au Hope.


                                                                                                               6 juillet 1664

            Levé très tôt, ma femme aussi, et nous nous préparons. Vers 8 heures, ayant pris quelques bouteilles de vin et de bière, et des langues de boeuf, nous rejoignîmes notre barque à la Tour où Mr Pearse, sa soeur, sa femme et une parente, avec Mr Clerke, sa soeur et sa cousine, devaient nous attendre. Nous voilà partis vers le Hope, jouant tout le long du chemin aux cartes et à d'autres jeux, passant le temps assez joyeusement. Arrivés à Hope vers une heure, je leur montrai tous les navires et nous prîmes une collation d'anchois, de lard fumé, etc.
            Après être restés une heure ou plus, embarquement pour rentrer et jeux de cartes et autres jusqu'à l'arrivée à Greenwich où Mrs Clerke, ma femme et moi descendons dans une taverne pour faire leur commission, puis nous remontons dans la barque après que je leur ai montré le bateau de plaisance du roi.
            Retour donc au pont où nous amenons la nuit avec nous, et il pleut à averse, mais nous les conduisons à pied à la taverne de l'Ours où nous les mettons dans un bateau. Je retrouvai ma femme dans la barque et nous revenons à l'appontement de la Tour, et puis chez nous, fort content aujourd'hui de la compagnie et surtout de Mrs Pearse, qui garde un teint aussi beau que jamais, et possède, à ce jour je crois, le plus joli teint que j'aie jamais vu de ma vie, à une femme jeune, vieille ou enfant. La parente de Mrs Clerke chante très joliment, mais elle a trop d'assurance. Mrs Clerke elle-même a de l'esprit, mais le gâte à être si affectée et à papillonner de la sorte, avec quelques jolis atours et des ornements de pacotille qu'elle porte avec.
            Mais la location de la barque est bien lourde pour moi, ce qui me contrarie. Mais ce n'est que pour une fois et je puis inciter Pearse à me rendre la politesse.
            Rentré à la maison très las, au lit, restant assis un moment. Le Dr Clerke était absent parce que le roi était malade hier soir et dut être saigné et n'osa donc pas s'éloigner aujourd'hui.


                                                                                                                                                                                                                                                                   7 juillet

            Levé. Pour la première fois cette année, j'enlève aujourd'hui mon gilet de toile, mais comme c'était une journée fraîche, j'eus peur d'attraper froid, ce qui me chagrine et qui est ce qui m'afflige le plus au monde, de songer au mauvais état de ma santé.
            Au bureau toute la matinée. Dîner à la maison. A mon bureau afin de prendre quelques dispositions pour la réunion de la commission de Tanger cet après-midi. Puis à Whitehall où je trouvai le Duc et vingt autres lisant leur mandat pour les Pêcheries royales, j'en suis et on m'a aussi envoyé quérir. Il est fort étendu et c'est une charte fort sérieuse. et je crains bien que cela n'aboutisse qu'à peu de chose.
            Après quoi, incapable de rien entreprendre, faute d'un serment à faire prêter au gouverneur et à ses assistants, nous levâmes la séance.
            Puis notre commission des subsistances de Tanger se réunit mais ne fit pas grand chose. On se leva et Mr Coventry et moi nous promenâmes une demi-heure dans le jardin, conversâmes au sujet de nos mâts, puis je partis et me promenai une demi-heure ou plus dans le parc avec Creed. Ensuite à la nouvelle Bourse pour boire de la crème, mais il n'y en avait plus. Nous prenons congé et je rentre à la maison, prenant, chemin faisant, les livres que j'avais commandés, à savoir, le glossaire complet de sir Henry Spelman, le Lexicon de et les pièces de Shakespeare, que je paie grâce à un rabais que j'ai obtenu sur mes notes de libraires. Rentré chez moi, au bureau quelque temps, puis à la maison et, au lit, me sentant assez bien quoique j'ai ôté mon gilet aujourd'hui.
            Le roi va assez bien aujourd'hui, quoique saigné avant-hier soir.


                                                                                                       8 juillet

      Répertoire Léonard Terry & Léopold Chaumont      Levé etLe Joueur De Luth - Patachou | Parole de Chanson NET envoyé quérir par le valet de lord Peter Borough pour me rendre chez Mr Povey afin de discuter sur comment il recevra son argent, ce qui me concerne avec l'espoir que j'ai des 50 livres que milord m'a promises mais, en pensée, je n'ose me croire certain de les avoir tant que je ne les ai pas, car on ne peut guère compter sur ces grands seigneurs, quoique je les mérite bien. J'attends Povey chez lui et je visitai ses écuries et tout le reste. Nonobstant toutes les fois que j'y ai été, je trouve encore maintes choses à admirer.
            A Whitehall un moment pour savoir comment va le roi qui a été un peu indisposé ces trois derniers jours. On me dit qu'il est assez bien rétabli. Puis à l'enclos de Saint-Paul pour mes livres et chez les relieurs où je donnai mes instructions pour la reliure de mon Chaucer, quoiqu'ils n'aient pas été assez soigneux pour moi, mais c'est assez bien, et ensuite chez le bossetier pour y mettre fermail et bosselages. A la Bourse puis à la maison pour dîner et à mon bureau jusqu'à 5 heures, puis vinrent Mr Hill et Andrews, et nous avons chanté une heure ou deux. Puis on se sépara et Mr Alsop et son compagnon vinrent consulter sur nos subsistances pour Tanger et faire bien avancer l'affaire. Ils prirent congé et j'allai souper et, au lit.


                                                                                                         9 juillet

            Levé et au bureau toute la matinée. L'après-midi en voiture à Whitehall avec sir John Mennes pour la commission des pêcheries, mais il fallait d'abord jurer fidélité à la compagnie et on nous fit tous jurer. Mais il y eut grande dispute, ce qui me parut de mauvaise augure pour la compagnie. Certains voulaient jurer fidélité dans la mesure de nos moyens, et d'autres dans la mesure de notre entendement, et c'est le dernier qui l'emporta, quoique ce soit de cette façon que nous sommes le moins capables de servir la compagnie, parce que nous ne voulions pas être tenus de vaquer à cette affaire quand nous le pouvions, mais quand il nous semblait bon. C'est une réflexion qui me parut fâcheuse, mais cela fut voté et donc passa. 
            Nous ne fîmes rien d'autre mais levâmes la séance jusqu'à ce qu'une réunion de la commission de Guinée fût finie. Puis nous nous réunîmes de nouveau pour Tanger et je fis ce qu'il fallait au sujet de l'ordre de paiement pour milord Peterborough et du mien pour mes récentes dépenses concernant la garnison.
            Rentré chez moi en passant prendre mon Chaucer et d'autres livres, et cela est fait à mon goût, ce dont je fus bien aise. A mon bureau jusqu'à une heure tardive, à écrire des lettres, puis rentré à la maison rejoindre ma femme, souper et, au lit, où nous ne couchons pas ensemble depuis un bon moment à cause du temps chaud, mais aujourd'hui nous le faisons parce qu'elle va partir pour la campagne.


                                                                                                             10 juillet
                                                                                           Jour du Seigneur
            Lever. Vers midi, par le fleuve, à Somerset House et à pied chez milord Sandwich où nous dînons avec milady et les enfants. Après avoir bavardé avec milady de choses et d'autres, nous prîmes congé, et ma femme prit congé pour aller à la campagne demain. Mais milord ne dit à aucun moment mot de mon père ou de ma mère au sujet des enfants, ce qui me surprend, mais je n'en parlerai pas le premier.
            Milady nous montra un portrait de milady Castlemaine, admirablement peint, donné à milord, et c'est un très beau portrait.
            Avec milady Jem et Mr Sidney à l'église St Giles où entendu un long et médiocre sermon. Nous les déposons et allons dans leur carrosse au baptême de Kate Joyce, où grand concours de gens et friandises en abondance. Après être restés une heure retour chez nous dans le carrosse, le somptueux carrosse, de milord, et ma femme commença à ranger en vue de son départ demain. Moi à lire et puis au lit, où je ne me sentis pas bien et n'eus donc aucun plaisir au lit, cette nuit, avec ma pauvre femme.


                                                                                                         11 juillet 

            Mais levés de bonne heure et une fois prêts en voiture jusqu'à Holborn où, à 9 heures, le coche se mit en route, et avec Will, mon valet, je l'accompagnai à cheval jusqu'à Barnet, une journée très agréable. Là dîné avec ses compagnons de voyage qui étaient aimables, une jolie femme de qualité qui ne va pas plus loin que Huntingdon et un de nos voisins de Londres. Nous demeurons là deux heures, puis nous nous séparons pour de bon. Ma pauvre femme me manquera bientôt, j'en suis sûr.
            Allé avec Will voir la Source à un quart de lieue de là. Je bus trois verres, partis marcher, puis revins en boire deux autres. La femme voulait m'en faire boire encore trois, mais je ne pus, ayant le ventre plein, mais cela eut fort bon effet. Nous rentrâmes en faisant le tour par Kingsland, Hackney et Mile-End, au point d'être très fatigués, mon eau faisant son effet au moins sept ou huit fois, ce dont je suis fort aise. Rentré fatigué, ne me sentant pas très bien au lit de bonne heure.
            Et dans la nuit, vers 11 heures, je me mets à suer furieusement puis, sachant tout l'argent que j'ai dans la maison et entendant un bruit, je commence à suer de plus en plus, au point de fondre presque tout entier. Je sonnai et ne pus pendant une demi-heure me faire entendre d'aucune des servantes, ce qui accrut ma peur qu'elles ne fussent bâillonnées. Puis je pense que c'était à dessein qu'une pierre avait été lancée contre la fenêtre au-dessus de notre escalier, ce soir, les voleurs cherchant à savoir si on leur prêterait attention et combien nous étions.
            J'eus ces pensées et ces craintes, et je conçois donc les frayeurs des hommes riches et cupides qui ont quantité d'argent chez eux. Enfin Jane se leva, et je constatai que ce n'était que le chien qui voulait rentrer et qui avait aboyé. Au lit donc, mais ne dormis guère. M'endormis enfin jusqu'au matin.


                                                                                                           12 juillet 1664
       tweeter                                                                                                                                      pinterest.fr
 Christophe Trivalle on Twitter: "C'est @NasseraMeziane et ...           Et me levai appelé par le vDecent Image Scraps: Animation | Formes de coeur, Animation et Coeuralet de milord Peterborough, afin de recevoir aujourd'hui de Mr Povey l'argent de son maître. Je pris les dispositions pour que cela fût payé, et on m'apporta mes 50 livres, ce qui me réjouit le cœur.
            En réunion au bureau toute la matinée, puis dîné seul à la maison, triste de ne pas avoir de compagnie, ne me sentant pas très bien, et puis je ne sais pas manger seul. 
            Après dîner descendu inspecter avec sir George Carteret, sir George Mennes et sir William Batten. Trouvé un endroit près du chantier de Deptford bien propre à entreposer des mâts. Mr Coventry arrive tantôt et, après un moment nous descendons tous les deux à Blackwall, car il a envie de voir ce chantier. Il y a là de beaux entrepôts et de bons bassins, mais, à ce que nous en voyons, de peu de profit pour leur propriétaire.
            Rentré chez moi en bateau avec lui, devisant fort bien, puis au bureau un moment et tard à la maison pour souper et, au lit.


                                                                                                       13 juillet

            Levé et à mon bureau. A midi, après avoir discuté dans une taverne proche avec un voisin nommé Mr Tyler et un certain capitaine Saunders sur la découverte que des commissaires de bord ont vendu leur provisions de vivres, chez milord Sandwich, croyant y dîner, mais comme ils ne dînent pas chez eux, avec le capitaine Ferrer chez Mr Barwell, sellier attitré du roi où, il y a à peu près un an, j'avais dîné d'un bon pâté de venaison. Nous en eûmes cette fois-ci un semblable et une excellente compagnie, Mr Tresham et d'autres.
            Allé à Whitehall pour les Pêcheries. Je ne fis pas grand-chose. Rentré par le fleuve à la maison, je rencontrai Lanyon etc, à propos de Tanger, allai tard à mon bureau et de là à la maison et, au lit.
            Mr Moore vint me voir tard pour me prier de me rendre chez milord Sandwich demain matin. J'irai, mais je me demande de quoi il s'agit.


                                                                                                            14 juillet

            Inquiet de savoir de quoi il pouvait s'agir, je me levai peu après 4 heures, et dehors. A pied chez milord où personne n'est levé, sauf le portier qui sortit de son lit pour moi. Retourné donc dans Fleet Street où achetai un petit livre de droit puis, entendant chanter un psaume j'entrai dans l'église St Dunstan où j'entendis lire des prières, ce qui se fait ici, paraît-il, tous les matins à 6 heures, chose que de ma vie je n'ai jamais faite dans une chapelle, sauf celle du collège.
            Retourné chez milord qui, étant levé, fut envoyé quérir et lui et moi seuls : il commença par protester solennellement de la constance de son amitié et de sa confiance envers moi, puis il me dit le malheur qui nous accable moi et lui. Moi en raison du courroux dont milord le chancelier lui fit part hier soir contre moi sur le ton le plus irrité et le plus échauffé qui se puisse prendre, au point de ne rien vouloir entendre. Mais il m’assura qu'il avait dit tout ce qui se pouvait dire en faveur d'un homme sur ma loyauté et sur mon respect envers Sa Seigneurie et qu'il m'avait rendu toute la justice imaginable. Et de quoi s'agissait-il, sinon que j'avais eu le front de faire marquer pour l'abattage les arbres de Clarendon Park qu'il avait, paraît-il, achetés à milord Albemarle, alors que Dieu sait que dans tout cela je suis l'homme le plus innocent du monde et que je n'ai rien entrepris de mon propre chef, ni ne savais que cela le touchât en rien, mais n'ai fait qu'obéir aux ordres de milord le trésorier général. Il dit aussi que je m'étais conduit envers lui de la manière la plus discourtoise, que j'avais pris la défense des coquins qui avaient abattu un de ses arbres et que j'avais envoyé le plus grand fanatique d'Angleterre les marquer, tout exprès pour le narguer. Tout ceci,  assurai-je à milord était complètement faux et à mille lieues de la vérité, et je lui contai toute l'histoire.
            Milord paraît en être très profondément affecté, en partie pour moi, à ce que je crois, et en partie pour lui-même. Il me conseilla donc de me présenter sur-le-champ à milord, et de me justifier du mieux que je pouvais, en toute humilité et en l'assurant que j'étais son serviteur en ceci comme en toute chose, et que je reconnais que tout ce que je possède me vient de Sa Seigneurie par milord Sandwich. J'y fus donc, rempli d'horreur, et le trouvai occupé à rendre la justice dans sa grande salle. Comme c'était jour de session je n'osai rester et revins voir milord pour le lui dire. Il me recommanda de prendre milord chancelier au sortir du dîner. Je repartis chez moi, laissant milord fort soucieux pour moi.
            Au bureau, affaire toute la matinée. A midi à la Bourse et de là à la taverne de la Tête du Pape avec Alsop et les autres. Restai un quart d'heure pour conclure le marché suivant : si je ne leur obtiens pas plus de 3 shillings 1,5 penny par semaine chacun, je ne recevrai d'eux que 150 livres par an, mais sans investissement ni frais. Mais si je leur obtiens 3 shillings et 2 pence, alors ils me donneront 300 livres dans les mêmes conditions. Je leur recommandai donc de libeller leur soumission en une ou deux lignes pour cet après-midi et de me retrouver à Whitehall. 
            Je les quittai et chez milord le chancelier. Je l'accostai au sortir du dîner, lui disant que j'étais cet infortuné Pepys qui avait suscité son courroux et que je venais le prier de me permettre de me faire mieux comprendre de Sa Seigneurie, en l'assurant de mon respect et de mon dévouement. Il me répondit d'un ton fort amène qu'il en était sûr, grâce au portrait que fait de moi milord Sandwich, mais qu'il avait des raisons de penser ce qu'il pensait et qu'il me priait de le visiter un prochain soir. Je proposai ce soir même et il accepta.
            Le cœur léger donc, à Whitehall où, après avoir par une ruse, pris connaissance du prix de Mr Gauden, tout en feignant de ne pas vouloir le connaître quand il fit mine de me le montrer, je descendis et ajustai si bien notre soumission que tantôt, à la réunion, avec celle de Mr Gauden et celle d'Alsop qu'ils m'ont adressées dans des lettres, j'étais prêt à remettre les deux soumissions à la commission, mais comme il n'y avait là que le général Monck, Mr Coventry, Povey et moi, je ne jugeai point à propos de les montrer maintenant, remis la chose à samedi, sur ce me levai fort satisfait.
            A la Demi-Lune, près de la Bourse pour mettre Lanyon et ses amis au courant de ce que nous faisons, puis chez milord le chancelier où j'entendis plusieurs jugements qui me firent penser que milord est un homme fort capable et à l'esprit prompt.
            Ayant terminé, c'est lui qui m'appela : 
            -  Venez, Mr Pepys, vous et moi, nous allons faire un tour dans le jardin. 
            Il se fit conduire en bas, à cause de la goutte, et se promena avec moi plus d'une heure, en bavardant très amicalement, mais avec beaucoup d'adresse. Je lui dis clairement ce qu'il en était. L'ignorance où je me trouvais que Sa Seigneurie était touchée. Que je n'avais rien fait ni dit tout seul, mais que ce qui avait été fait était l'oeuvre du Conseil tout entier. Il me dit, en le nommant, qu'il était plus en colère contre George Carteret que contre moi et aussi contre l'ensemble du Conseil. Mais c'est en réfléchissant à qui dans le Conseil le connaissait le moins que ses craintes s'étaient portées sur moi. Il voit qu'il n'a de dette envers aucun de ses amis qui y siégeait. Je crois que je l'apaisai complètement, au point qu'il me remercia de mon désir de le satisfaire et de la peine que j'avais prise pour cela. Et comme je le priai de m'indiquer avec lequel de ses serviteurs je devais aviser dans cette affaire, il me répondit " aucun ", mais qu'il serait heureux d'en avoir des nouvelles par moi directement. Il me dit qu'il ne me commanderait en rien, afin que l'on ne pût dire que le lord chancelier travaille à abuser le roi, ni, comme je le lui suggérai, n'ordonne de suspendre le rapport du service de l'approvisionnement. Mais je vois ce qu'il veut dire et ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour lui rendre ce service.
            Mon Dieu ! Il faut voir comme il est irrité contre ce pauvre Deane, un fanatique, un coquin, que sais-je encore ? et ce qu'il a fait c'était par malignité envers Sa Seigneurie, parmi tous ses amis et tenanciers. Il dit fort clairement qu'il ne me commanderait en rien, parce qu'il ne voulait pas que quiconque eût pouvoir sur lui de dire qu'il avait fait ceci ou cela. Mais ses paroles signifiaient clairement qu'il serait aise que je fisse quelque chose.
            Mon Dieu ! Quelle pitié de voir que nous autres pauvres misérables n'osons bien servir le roi par crainte de ces grands seigneurs !
            Il nomma sir George Carteret et sir John Mennes et d'autres, et qu'il était aussi fâché contre eux tous que contre moi.
            Mais c'était plaisir de songer que pendant qu'il causait avec moi, sir George Carteret arrive dans le jardin et que milord évita de lui parler, et le fit attendre, lui et bien d'autres, tandis que je marchais de long en large plus d'une heure, et il me pria de rester couvert.
            Pourtant, après tout ceci, il y avait si peu de raison à cette irritation contre moi, que je crains par moments qu'il n'agisse ainsi que par politique, pour me mettre de son parti en me faisant peur, ou encore, ce qui serait pire, pour éprouver ma fidélité envers le roi. Mais je crois que c'est le premier cas.
            Je pris congé avec les plus grandes assurances que je savais bien devoir tout ce que j'avais à Sa Seigneurie, assurances qu'il ne parut point rejeter, mais prit congé avec de grandes marques de bonté et de considération.
            Rentré à la maison en voiture, m'arrêtant chez milord Sandwich, mais il n'était pas là.
            Tard à mon bureau, puis à la maison pour manger avec milord quelque chose, presque mort de faim de n'avoir point dîné aujourd'hui et, au lit, la tête pleine de nombreuses et grandes affaires qui sont pour moi de conséquence.


                                                                                                      15 juillet 1664
Jean-Henry D'Anglebert – Pièces de Clavecin par Brigitte Tramier ...                         le figaro.fr
            Levé et chez milord Sandwich. Il me fit monter et je lui rendis compte de ce qui s'était passé avec milord le chancelier hier. Il en fut satisfait et me conseilla de porter tous mes soins à le servir au mieux dans cette affaire. Ensuite il me dit qu'il avait maintenant choisi le jour où il prendrait la mer, lundi prochain et qu'il voulait m'exposer sa propre situation. Il me dit que sa tâche dans le monde n'est plus désormais que de maintenir son crédit à la Cour, n'ayant que peu d'espoir de l'accroître considérablement. Il dit qu'il a maintenant environ 8 000 livres par an ( nte de l'éd. revenu moyen de la noblesse 3 200 livres ). Il est vrai, dit-il, qu'il en doit environ 10 000. Mais il a dû faire de grandes dépenses pour amener sa fortune à ce point, outre ce qu'il a construit et les biens meubles qu'il a achetés. Il me dit qu'il a ajusté ses comptes à la Garde-Robe jusqu'à la Saint-Michel passée et qu'il espère les régler jusqu'à l'Annonciation avant de partir. Il me dit qu'on lui doit à la Garde-Robe 7 000 livres. S'il savait comment se les faire payer, sans compter les 2 000 livres que lui doit Mr Montagu. Pour ce qui est de son crédit, il dit que tout le mal qui fut jamais fait à un homme par un ami qui sait tous ses secrets, lui a été fait par Mr Montagu. Mais il dit que le pire est passé et que Montagu est parti, haï personnellement par le roi et, croit-il, d'autant plus à cause de sa conduite envers lui, et que le duc d'York dit, il y a quelque temps dans son cabinet qu'il le haïssait pour son ingratitude envers milord Sandwich. Il me dit qu'il a la faveur du chancelier, autant et plus que jamais. Qu'il en est de même du roi, et me donna pour exemple que, tandis qu'il était autrefois du Conseil privé du roi avant sa dernière maladie, et qu'à cause de cette maladie il avait interrompu son service auprès de lui, le roi ne le convoquait plus régulièrement comme devant à son Conseil privé, mais seulement pour les affaires maritimes ou semblables. Mais récemment le roi lui avait envoyé un message par sir Henry Bennet, afin de présenter à milord les excuses du roi pour ne pas l'avoir fait quérir comme devant pour son Conseil privé ces derniers temps, car ce n'était pas par aversion, mais afin de ne point déplaire à d'aucuns, qu'il ne nomma point, mais milord suppose que ce pourrait être le prince Rupert, ou peut-être que le roi préfère que cela passe avec une excuse plutôt que d'être cru sans bienveillance. Mais que désormais il le priait de le suivre constamment, ce qu'il a fait ces derniers temps, et le roi jamais plus bienveillant de sa vie que maintenant. Et dans cette affaire récente où je devais parler à milord de son départ en mer, il me dit........... que le Duc lui-même a fait mettre sur son brevet qu'il serait amiral de la présente flotte et de celles, ou des navires qui s'y ajouteraient par la suite, ce qui est généreux de sa part. Il me dit que dans ces circonstances, avec Mr Montagu et tous les autres, il voit bien que le mieux est d'endurer patiemment, sans bruit ni tracas, et que les choses passent d'elles-mêmes et s'arrangent.
            -  Mais, dit-il, croyez-m'en, ne vous fiez jamais trop à aucun homme au monde, car vous vous mettez à sa merci. Et l'ami qui vous paraît le meilleur, celui qui est aujourd'hui un véritable ami, peut avoir ou trouver sujet de se brouiller avec vous, et alors tout se découvre.
            Puis il me parla de sir Henry Bennet. Quoiqu'ils aient toujours été amis, leurs relations sont maintenant devenues d'une familiarité qui sort de l'ordinaire, que ces derniers mois sir Henry n'a rien fait sans prendre conseil de milord en privé, qu'il lui promet amitié fidèle et dévouement en toutes occasions.
            Milord dit qu'il a l'avantage d'être capable, en raison de son expérience, de l'aider et de le conseiller, et il croit que c'est cela principalement qui incite sir Henry à le traiter ainsi.
            - Or, dit milord, le seul et le plus grand embarras que j'ai au monde est de savoir comment me comporter envers sir Henry et milord le chancelier au cas où quelque chose couverait encore sous la cendre à propos de milord Bristol, ce que nul ne saurait dire. Car alors, dit-il, il faudra que je prenne parti pour l'un ou pour l'autre et je perdrai tout ce que j'ai au monde plutôt que de déserter milord le chancelier......... L'amitié de sir Henry en est venue à ce point, de même que sa confiance, qu'il a donné un code secret à milord et veut l'obliger à correspondre avec lui.
            Voilà, dit-il, l'état complet de ma fortune et de mon crédit, que je vous décris parce que je ne sais pas si je vous reverrai.
             Pour ce qui est de son séjour en mer, il croit que ce sera pour lui une occasion de dépenses et non de profit, mais qu'il ne doit plus désormais veiller à s'agrandir, ni l'espérer, mais mettre ses soins à assurer ce qu'il a, que ce qu'on lui doit à la Garde-Robe ou ailleurs lui soit payé, ce qui sinon ne serait pas fait et tout ce qu'il a ne serait que piètre contentement.
            Alors nous prîmes, à ce qu'il semblait, congé l'un de l'autre, milord me priant de lui écrire pour l'informer en toute occasion de ce qui le touche. Ce qui, ajouté à son préambule, me donne à croire que milord me tient toujours vraiment en grande estime et désire se conserver mon dévouement. Dieu soit béni !
            Au milieu de notre conversation milady Crew entra pour lui annoncer qu'il avait un nouveau fils, milady venant tout juste d'accoucher. Je ne pensais pas que son terme était si proche, mais tout s'est bien passé, Dieu soit loué, et veuille pousser milord à mettre ses soins  à amasser quelque chose de plus.
            Allé à St James avec Creed. Ne trouvant pas Mr Coventry à Whitehall où, comme je l'attendais dans une des galeries, voilà que sort de la salle du Trône Mrs Stewart, plus belle que jamais, avec ses cheveux tout autour des oreilles, venant de poser pour son portrait. Le roi était là avec vingt autres, je crois, ayant assisté debout à toute la séance, et dans cette robe elle paraissait une fort aimable personne.
            A la Bourse en voiture, puis à la maison pour dîner, puis à mon bureau. Le soir, Mr Hill, Andrews et moi dans mon cabinet de travail pour chanter fort agréablement, puis encore à mon bureau où je reste très tard, et à la maison, avec, Dieu soit béni, l'esprit à l'aise et le corps en bonne santé, si ce n'est qu'en ces circonstances j'ai la tête tout occupée à trouver comment obtenir quelque chose, entre autres, que fera ce coquin de Creed avant de prendre la mer ? J'aimerais bien être débarrassé de lui et voir ce qu'il entend faire, car alors je me déclarerai son ami fidèle ou son ennemi.


                                                        à suivre................
                                                                                          
                                                                                                     16 juille 1664

            Levé le matin............