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1662
1er Janvier 1662
En m'éveillant brusquement, ce matin, je donnai un grand coup de coude à ma femme dans la figure et le nez, et la douleur l'éveilla, ce dont j'eus chagrin. Je me rendormis.
Je me levai et partis en voiture avec sir William Penn pour aller à Westminster. En route, voyant qu'on jouait aujourd'hui Le Vicaire espagnol, je descendis et le laissai continuer seul, et je rentrai, envoyai un message chez le jeune Mr Penn et sa soeur pour les inviter tantôt avec ma femme et moi au Théâtre.
Cela fait, Mr W. Penn vint me retrouver, et nous sortîmes ensemble à pied, allâmes chez le libraire et examinâmes quelques gravures et cartes pour ma maison. Puis nous rentrâmes dîner. Bientôt arrivèrent les deux jeunes Penn et, après avoir mangé une bourriche d'huîtres, nous allâmes en voiture à la comédie. Fort bien jouée, c'est une bonne pièce. Seulement , Diego, le fossoyeur chargeait excessivement son rôle.
De retour ils restèrent avec nous jusque tard dans la soirée à jouer aux cartes, fort joyeusement
mais le plus plaisant fut que Mr Penn avait laissé son épée dans la voiture, de sorte que mon petit laquais et lui allèrent à la poursuite de la voiture et, par le plus grand des hasards, la retrouvèrent à la Bourse. Il reprit son épée.
Et au lit.
2 Janvier
Reçu une invitation avant de nous lever de la part de milady Sandwich pour venir dîner avec elle. Puis au bureau toute la matinée et à midi nous allâmes là-bas dîner. Ce fut un bon et grand dîner, et la société, Mr William Montagu et sa femme, qui me parut très loin de la beauté à laquelle je m'attendais après ce que milady m'avait dit, que je fus de mauvaise humeur toute la journée pour avoir vu mon attente si déçue, Mr Rumbold et Townshend et leurs épouses. Après le dîner retour par le fleuve et au bureau jusqu'au soir. Puis je partis, comme convenu, retrouver Mr Gaunt qui avait promis de me rencontrer au café pour me présenter Cooper, le grand miniaturiste, mais ils m'avaient fait faux bond, et je rentrai chez moi et restai à mon luth et à chanter jusqu'à presque minuit, et au lit.
Sir Richard Fanshaw est arrivé inopinément du Portugal, mais personne ne sait pourquoi.
3 Janvier
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Fait la grasse matinée. Puis levé et sorti pour aller en plusieurs endroits pour de menues affaires. Entre autres, chez Tom qui m'a donné de grands espoirs, il fera son chemin. Ce dont je me réjouis, et ne suis donc plus si pressé de lui trouver une femme. Puis dîner chez Mr Crew et sa femme. Après le dîner chez Faithorne, je lui achetai quelques gravures. A ce moment sont passés les gardes du corps du roi, celui-ci étant allé Lincoln's Inn cet après-midi pour voir les divertissements. Il y avait, selon une vieille coutume, un prince et toute sa noblesse, et d'autres occasions de réjouissance et de dépenses.
Puis rentrai et montai dans ma chambre pour examiner des papiers et d'autres choses, fort troublé depuis quatre ou cinq jours par les grandes dépenses que je fais actuellement, et je le resterai tant que je n'aurai pas fait les comptes pour voir où en est ma fortune. Et c'est à quoi je répugne, par peur d'avoir trop dépensé, et je repousse, afin de pouvoir payer mon portrait et celui de ma femme, et le livre que j'achète pour le collège Saint-Paul, avant de faire mes comptes.
4 Janvier
Chez moi presque toute la matinée. Accrochai des gravures pour voir quel effet mes candélabres d'étain que j'ai achetés feront dans mon atelier et mon vestibule. Allai ensuite, avec ma femme, par le fleuve à Westminster. Elle alla chez son père et moi à la Grand-Salle. Je fis quelques pas avec Mr Symons et Mr Chetwind qui avait un chien qu'un autre homme revendiqua comme étant le sien, mais Mr Chetwind appela le chien et le chien le suivit, et non son ancien maître, de sorte que c'est Chetwind qui a gardé le chien. De là allai retrouver ma femme chez milord. Nous allâmes dîner chez Wilkinson, accompagné du vieil East. On nous servit du mauvais boeuf rôti, un pâté de mouton et une tourte. Je ne trouvai rien de bon. Nous rentrâmes en voiture et j'allai au bureau jusque tard. Puis avec ma femme chez sir William Penn pour jouer aux cartes et souper, joyeusement. Il y a eu grand commerce entre nos deux familles tout ce temps de Noël. Puis rentrai, et au lit.
5 Janvier
Jour du Seigneur
Laissai ma femme au lit, indisposée, ayant ses " mois ". Pour ma part j'allai à l'église, puis rentrai dîner, et dînai seul de quelques os à moelle, et il y avait un beau morceau de boeuf rôti, mais étant seul je n'en pris point. Ensuite arrive mon frère Tom. Il me raconte qu'il a vu les parents de la jeune fille que mes cousins Joyce voudraient lui voir épouser, et qu'ils y sont très favorables. Mais nous sommes très embarrassés dans cette affaire, car 200 livres c'est peu d'argent, et j'espère que s'il continue comme il a commencé il pourra en chercher une qui ait davantage.
A l'église et avant le sermon on chanta un long psaume et la moitié d'un autre pendant que le sacristain quêtait ce que les paroissiens voulaient bien lui donner pour l'année écoulée. Je lui donnai 3 shillings et la semaine dernière j'ai donné 2 shillings au clerc, ce que j'inscris pour savoir que faire l'année prochaine, s'il plaît au Seigneur que je vive jusque-là. Mais le comique c'est que le clerc commence le psaume 25 qui a son air à lui, et puis le 116 qui ne peut se chanter sur cet air-là, ce qui parut fort risible.
Après le service allai chez sir William Batten. Je l'ai volontairement évité depuis quinze jours, et je suis décidé à me tenir un peu plus sur la réserve pour éviter de me déprécier, ce qui autrement serait nécessairement le cas. Puis rentrai et restai bavarder avec ma femme, puis montai pour la prière et pour me coucher, ayant écrit ce soir une lettre à sir John Mennes qui est dans les Downs pour avoir son avis sur l'affaire du salut des pavillons.
6 Janvier
Jour des Rois
Ce matin j'ai envoyé mon luth chez le peintre et suis resté en sa compagnie toute la matinée à le regarder peindre le collet de mon luth dans mon portrait, qui ne me plut guère une fois fini. De là j'allai dîner chez sir William Penn, car c'était un jour de fête solennelle pour lui, l'anniversaire de son mariage, et on nous donna, outre une belle échine de boeuf et d'autres bonnes choses, dix-huit petits pâtés dans un plat, ceci étant le nombre d'années de mariage. Il y avait sir William Batten avec sa femme et sa fille le colonel Treswell et le major Holmes. Je vois bien qu'il aimerait prendre des libertés et se lier d'amitié avec ma femme, mais je l'en empêcherai, et elle aussi se défie de lui. Après dîner ils se mirent à boire, ce qui m'empêcha de rester et je rentrai chez moi. Le capitaine Cocke qui était tout à fait ivre me suivit et resta un moment, puis s'en alla. Je retournai après le départ de la compagnie et restai jouer aux cartes avec sir William Penn et ses enfants, après souper je rentrai. Et là on me dit que mon commis Gul était allé se coucher. Comme je demandais pourquoi on me dit qu'il avait vomi avant d'aller se coucher et qu'il se plaignait d'un mal de tête. Là-dessus, bien qu'il fût endormi, je lui fis dire de se lever. Ce qu'il fit et vint me trouver, et j'eus l'air d'être fort en colère et je l'accusai d'être ivre. Il me dit qu'il avait été en compagnie de Mr Southerne et de Homewood au Dauphin et qu'il avait bu une quarte de xérès, mais qu'il avait mal à la tête avant de sortir. Mais je crois en fait qu'il avait trop bu, aussi je le menaçai de de dire à son oncle de lui trouver quelque autre place. Et je le renvoyai se coucher, et je suis bien décidé à continuer d'être fâché. Alors au lit avec ma femme et lui racontai ce qui s'était passé.
7 Janvier 1662
Grasse matinée. Puis levé et allai avec Mr William Penn jusqu'à Stepney chez Mrs Chappel, celle qui a pour fils ce joli enfant, et trouvai là ma femme et tous les enfants de sir Willaim Penn, Mrs Poole et son jeune fils, et nous dînâmes fort gaiement, puis je rentrai en voiture et allai au bureau dans l'après-midi. Le soir chez sir William Penn, soupai, jouai aux cartes gaiement. Les enfants retournent tous au collège demain. Puis à la maison et au lit.
8 Janvier
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Je me levai et allai à la Grand-Salle que je parcourus en m'occupant de diverses affaires. Rencontrai sir William Penn. Il me dit avoir entendu ce matin que sir George Carteret était fort courroucé contre mon commis Will, qu'il était un jour sur deux en compagnie des commissaires du Parlement à Westminster et que son oncle était un gredin à qui il rapportait tout ce qui se passe au bureau. Et sir William, bien qu'il aime beaucoup ce jeune homme, me conseilla de m'en séparer, ce qui me prit au dépourvu et me troubla grandement, bien que je fusse déjà fâché contre lui. Puis allai à la Garde-Robe par le fleuve. Pendant tout le trajet j'interrogeai Will sur cette affaire, mais sans lui dire le pourquoi. Mais je vois que le pauvre garçon se doute de quelque chose. Dînai avec milady et ensuite parlai longuement avec elle. Puis à la maison et chez sir William Batten, restai causer avec lui. Rentrai malheureux. Montai dans mon cabinet et lus les deux traités qui sont avant le Mare Clausum de Mr Selden. Puis au lit. Ce soir m'arrivèrent environ 100 livres de Brampton par porteur, dans ses fontes, de la part de mon père, ce qui me fit rire.
9 Janvier
Au bureau toute la matinée, en réunion particulière avec sir George Carteret. J'attendais qu'il me dît quelque chose de l'affaire d'hier, mais il n'en fut rien. Présents également les sirs William Batten et Penn, pour rédiger une réponse à plusieurs demandes de milors le trésorier. Nous travaillâmes jusqu'à 2 heures. Puis allai dîner et retrouver ma femme chez sir William Penn. Retour au bureau où je restai tard. Retour à la maison, je trouve Mr Armiger en bas, causant avec ma femme, mais comme j'étais froissé de ce qu'il avait quitté mon frère Tom, au lieu de lui faire bon visage je le lui manifestai ouvertement. Je crois qu'il en fut marri, mais je suis content de le lui avoir dit. Quand il fut parti je montai écrire plusieurs lettres à envoyer par la poste. Mis mes papiers et mes affaires en ordre, et allai au lit. Ce matin nous convînmes de certaines réponses à faire au Duc à propos du salut au pavillon, ce qui va me pousser à réaliser mon projet d'écrire quelque chose sur ce sujet.
10 janvier 1662
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A Whitehall, je parlai là avec Sir Paul Neale d'une question de mathématiques que milord voulait lui poser. Je la lui communiquai et il promit une réponse par quelqu'un. Il s'agissait d'une observation de la Lune et des étoiles, mais quoi, je n'y prêtai pas attention. Je rencontrai là Mr Moore qui me dit qu'une injonction est accordée en chancellerie contre Thomas Trice. Ce dont je fus fort content, ayant eu des inquiétudes. J'allai avec lui à la Grand-Salle où je déambulai jusqu'à midi en causant avec les uns et les autres, puis j'allai dîner à la Garde-Robe. Là fatigué de la compagnie de Mr Pickering, je revins à Westminster pour retrouver ma femme chez Mrs Hunt, pour bavarder avec elle. Ce que nous fîmes entre nous très gaiement. Je lui fis cadeau d'une tasse et d'une cuillère pour le filleul de ma femme. Puis rentrai en voiture et lus tard dans mon cabiner. Au lit, ma femme fâchée que je tienne la maison éveillée si tard.
11 janvier
Mon frère Tom est venu me voir. Nous allâmes chez Mr Turner le marchand de drap payer 15 livres que mon père lui devait pour du drap pour le deuil de mon oncle. Puis chez lui et là j'invitai tous les Honywood à dîner lundi prochain. Puis à la Bourse. Et là on ne parle que d'une alliance des Français et des Hollandais contre nous, mais je ne crois pas que ce soit déjà fait. Rentrai dîner et l'après-midi au bureau, puis chez sir William Batten où, au cours de la conversation, j'appris comment se passe l'élection du doge de Gênes qui, pendant deux ans, est accompagné tous les jours avec la plus grande pompe et 4 ou 500 hommes l'escortent toujours comme un roi. Quand les deux années sont passées et qu'un autre doge est élu, on lui envoie un messager qui se tient au pied de l'escalier, lui étant en haut, et dit " Vostra Illustrissima Serenidad sta finita et puede andar en casa ". Il se couvre de son chapeau et l'ancien doge, après avoir selon la coutume envoyé ses biens chez lui à l'avance, part à pied sans rien de plus peu-être qu'un seul homme sur ses talons, et le nouveau doge est aussitôt installé à sa place avec toute la pompe du monde. On nous raconta aussi comment dans le duché de Raguse sur l'Adriatique, petit état mais plus ancien que Venise et qu'on appelle la mère de Venise, et tout environné par les Turcs, comment ils changent les officiers de la garde, par crainte de conjuration, toutes les 24 heures, de sorte que personne ne sait qui va être capitaine de la garde ce soir-là. Mais deux hommes viennent en trouver un, s'en saisissent comme d'un prisonnier et l'emmènent sur place. Et là on lui remet les clefs de la garnison, et aussitôt il donne ses ordres pour le guet de cette nuit-là. Et il en va toujours ainsi, soir après soir. Sir William Rider raconta la première histoire qu'il connaît personnellement. Lui et sir William Batten confirment la seconde.
De là rentrai et lus, puis au lit, mais de nouveau très tard.
12 janvier
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A l'église où un inconnu fit un fort excellent sermon. A midi sir William Penn et mon bon ami le doyen Fuller par arrangement, et le frère de ma femme par rencontre, dînèrent avec moi très gaiement et très bien. Ensuite, le doyen, ma femme et moi en carosse, prêté par sir William Penn, allâmes, lui à Whitehall et ma femme et moi rendre visite à Mrs Pearse et de là à Mrs Turner toujours fort malade. Theophilia est aussi tombée malade, ce qui m'afflige pour la pauvre mère. A la maison et lus, affligé d'entendtre ma femme tancer, bien que ce ne fût pas sans cause, sa servante Nell, qui est une paresseuse.
Puis la prière et au lit.
13 Janvier
Toute la matinée chez moi et Mr Birchensha, que je n'avais pas vu depuis très longemps, vint et parla longuement avec moi de musique. Je suis décidé à apprendre la composition avec lui, et à m'y mettre demain, car il me laisse fort espérer que j'y arriverai rapidement.
Avant 12 heures arrivent, comme convenu, Mr Peter et le doyen, le colonel Honywood, les frères, pour dîner avec moi. Mais de si bonne heure que j'en fus gêné. Je les occupai pourtant par la conversation et des huïtres jusqu'à une heure. Nous nous mîmes alors à table, sans attendre mon oncle et ma tante Wight, ce qui me gêna, mais ils arrivèrent au bout d'un moment, et fûmes très gais. C'est du moins ce dont j'eus l'air, mais ce dîner ne me plut pas, et moins encore le doyen et le colonel que je trouve gens bien médiocres, quoiqu'ils aient bon coeur. Mais Mr Peter vaut mieux que les deux autres. Après le dîner celui-ci nous montra l'expérience, dont j'avais entendu parler, des perles chimiques qui se brisent et tombent en poussière quand on en brise le petit bout, ce qui m'intrigue beaucoup. Après leur départ ma tante Wight, ma femme et moi nous mîmes aux cartes. Elle nous enseigna à tous deux le jeu de gleek. C'est un joli jeu mais je n'ai pas l'esprit assez libre pour m'y intéresser vraiment. Peu après mon oncle revient, on soupe et on cause et on se remet aux cartes. Ma femme et moi nous le battons deux jeux à un, et on se dit bonsoir, et au lit.
14 Janvier
Toute la matinée à la maison. Visite prévue de Mr Birchensha. Il commença la composition musicale. Après son départ je range mes papiers et mes affaires dans mon cabinet. Après dîner, dans l'après-midi, au bureau et de là dans mon cabinet pour m'occuper de plusieurs affaires du bureau et des miennes propres, et puis souper et au lit. Aujourd'hui sont arrivées mes belles enveloppes de vélin pour y ranger mes gravures, dont je suis fort content.
15 Janvier 1662
Ce matin Mr Birchensha est revenu et, après qu'il m'eût interrogé et appris certaines choses sur le travail que j'avais fait, nous allâmes déjeuner dans mon cabinet d'un fromage de hure. Après que nous eûmes mangé il me demanda si nous n'avions pas commis un péché en mangeant aujourd'hui, me disant que c'est un jour de jeûne ordonné par le Parlement afin de prier pour un temps qui soit davantage de saison, car il y a depuis un moment un temps d'été, c'est-à-dire quant à la chaleur et à tout le reste, exactement comme au milieu de mai ou de juin, ce qui peut être cause de peste, comme tout le monde le pense, car il en a été presque de même l'hiver dernier, et toute l'année suivante a été fort malsaine, et l'est encore. Je ne suis pas sorti de chez moi de la journée, j'ai étudié ma musique, et le soir, après souper, au lit.
à suivre......./
16 Janvier 1662........
En allant à........