15 juin 1661
Mon père vint prendre sa boisson du matin et attendit que je fusse prêt. Après nous nous occupâmes des étoffes. Je le quittai bientôt et allai dîner avec milady qui, maintenant que milord est parti, a repris un train de vie modeste. Je me rendis ensuite chez mon père. Il me dit ce qu'il a fait et nous arrêtâmes notre choix sur deux pièces de drap écarlate, deux de violet et deux de noir ainsi que sur des toiles de lin d'une valeur de 50 livres.
Retour à la maison, avec moi 300 livres reçues de l'échevin Backwell. Après avoir écrit à milord pour l'aviser de ce que j'avais fait, je me préparai à me mettre au lit. Voici qu'arrive le commissaire du yacht du roi venu demander la livraison immédiate de vivres, le duc d'York devant partir dès demain. J'obtins de lui qu'il acquitterait les frais de magasinage là-bas. Je me mis au lit après avoir demandé à Will de faire transférer ici les vivres déposés chez le roulier. On les apporta vers minuit et ils restèrent ici toute la nuit.
16 juin
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Toutefois aucun commissaire n'est venu les chercher ce matin, et j'apprends que le duc est parti la nuit dernière. Fort embarrassé je ne sais que faire. Si bien qu'aujourd'hui ( pourtant jour du Seigneur ) je ne mis pas le nez dehors, dépêchai Will à droite et à gauche pour voir ce qui se pouvait faire. Je pense par moment rester sur ma première décision, passer par le roulier qui ferait sa livraison à Deal mercredi prochain. A d'autres moment je pense les envoyer par bateau exprès, mais n'ai pas encore arrêter ma décision et me trouve dans un grand embarras et contention d'esprit sur ce qu'il convient de faire dans cette affaire. Je passai l'après-midi, Will étant sorti, à lire La Bohémienne espagnole ( de Thomas Middleton ) . La pièce n'est pas très bonne, encore qu'on la vante fort. Le soir résolus de louer un heu ( 6 livres de la Tour aux Downs ) de Margate qui partira demain matin. Ce que je fis en lui confiant tout ce qu'il y avait à transporter. Je fis faire l'embarquement vers minuit, espérant que la marchandise arriverait à destination demain soir aux Downs, avec le vent favorable qui souffle en ce moment.
Au lit, l'esprit quelque peu soulagé après avoir tout expédié.
17 juin
Reçu aujourd'hui la visite de mon vieil ami Mr Charles Carter, qui resta et m'accompagna à Westminster. Nous quittâmes là et j'allai à la Garde-Robe où je dînai avec milady. Puis retour chez moi auprès de mes peintres occupés en ce moment à peindre mon escalier. Bureau, le soir nous nous rendîmes tous chez sir William Penn où nous restâmes boire jusqu'à 11 heures. Retour chez moi, et au lit.
18 juin 1661
Chez moi toute la matinée, tracassé par le retard des peintres. Vers 4 heures de l'après-midi ma femme et moi par le fleuve chez le capitaine Lambert. Nous prîmes grand plaisir à son jardin en terrasse, aux travaux d'aiguille d'une grande finesse de sa femme, les plus beaux que j'aie jamais vus. Eûmes après cela un somptueux repas et de la bonne musique qu'elle nous joua au clavecin. Restâmes avec un plaisir extrême jusqu'à 8 heures du soir. Retour chez nous, ils avaient chez eux une jolie petite fille qui ne voulait pas nous laisser partir sans elle et qui resta en larmes sur la rive. Rentrés chez nous, rencontré Jack Cole qui resta longtemps avec moi. Il n'a pas perdu sa bonne humeur du temps où nous étions à l'école ensemble et je suis fort heureux de le voir. Lui parti nous allâmes nous coucher.
19 juin
Presque toute la matinée à la maison à voir le peintre achever mon escalier, ce dont je suis fort satisfait. Avec Mr Moore dans la Grand-Salle de Westminster, les tribunaux étaient en session, puis par le fleuve à la Garde-Robe, où passai quelque temps fort gaiment avec milady. Retour à la maison et au bureau tout l'après-midi. Le soir à la Bourse voir mon oncle Wight pour lui parler des achats que je compte faire à Brampton. Retour à la maison , et le soir, au lit.
Dieu soit loué ! me voici remis de ma dernière indisposition. Et demain espère bien être sorti de la crasse et des embarras qui me sont devenus fort pénibles.
Une observation qu'il me faut faire ici pendant que j'y pense : je suis devenu l'homme du monde le moins curieux en fait de nouvelles, au point que je n'en ai plus aucune à rapporter, ni ne me soucie d'en demander aux autres.
20 juin
A la maison pendant le plus clair de la journée pour assister à l'achèvement des travaux, ce qui fut fait le soir, à ma grande satisfaction.
21 juin
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Ce matin rencontrai en chemin mon père chez qui je me rendais, nous allâmes prendre notre boisson du matin au Samson dans l'enclos de Saint-Paul, et manger du lard fumé, puis nous nous quittâmes après avoir acheté de la serge verte pour les rideaux de mon salon. Chez moi, puis à la Bourse où je rencontrai mon oncle Wight, et nous allâmes dîner chez lui. Là, ma tante absente de Londres, se trouvait Mr Norberu, entre autres, avec qui nous discutâmes, mon oncle et moi, de la maison et du domaine que sa femme possède à Brampton, et qui est au-dessus de ce que je puis acheter.
Chez moi et au bureau l'après-midi, et fort aise le soir de voir ma maison retrouver sa propreté, après tout ce temps passé dans la crasse.
22 juin 1661
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Sorti toute la matinée, vaqué à plusieurs affaires. A midi allai dîner avec milord Crew. Sa femme et lui fort empressés auprès de moi. Puis au Théâtre, l'Alchimiste ( de Ben Johnson ), pièce incomparable à tous égards. Rencontrai plus tard le petit Llewellyn et Burton qui m'emmenèrent chez un de leurs amis, un certain Mr Hodges dans les jardins de Lincoln's Inn. Bûmes force vin du Rhin et fûmes fort gais. Retour chez moi, trouve ma maison très propre, ce dont je fus bien aise.
23 juin
Jour du Seigneur
Le matin à l'église. Ma femme étant souffrante, j'accompagnai sir William Batten chez lui pour dîner, milady n'étant pas en ville. S'y trouvaient sir William Penn, le capitaine Allen et sa fille Rebecca, ainsi que Mr Hemson et sa femme. Tous à l'église après dîner, entendîmes un bon sermon d'un inconnu. Parti ensuite me promener avec les plus jeunes, d'abord dans le jardin de Gray's Inn, où se pressait une foule d'élégants, mais de toutes les dames que je vis ce jour-là, ou même que j'aie jamais vues, la plus belle est Mrs Francis Butler, soeur de Monsieur l'Impertinent. Allâmes ensuite à Islington. Les régalai de mon mieux à la Grande Auberge. Puis les raccompagnai chez eux avant de rentrer chez moi, et au lit. Pall est allée aujourd'hui au baptême d'un enfant de Kate Joyce, a passé la nuit chez mon père, car elle ne se sentait pas bien.
24 juin
Jour de la Saint-Jean
Nous étions aujourd'hui en congé et ne mîmes pas le pied au bureau de toute la journée. A la maison toute la matinée. A midi mon père vint visiter ma maison, les travaux étant achevés. Elle est maintenant fort coquette. Tous deux ainsi que le Dr Williams venu voir ma femme qui pense que ses douleurs de ventre sont inquiétantes, à la table d'hôte en face de la Bourse. Eûmes des mots très vifs avec le propriétaire lorsqu'on nous apporta la note, car il compte pour tout des prix exorbitants. Retour chez moi, puis chez sir William Batten un long moment, puis chez moi.
25 juin
Levé ce matin pour mettre de l'ordre dans mes papiers qui ont été transférés de chez milord. Je n'ai ainsi plus rien là-bas qui m'appartienne.
Visite ce matin de Mr Goodgroome recommandé par Mr Madge. Nous eûmes tôt fait de nous mettre d'accord : je lui donnai 20 shillings par mois pour qu'il m'apprît le chant. Nous commençâmes et j'espère que ses leçons me seront profitables. La première chanson est La cruda la bella. Lui parti arrive mon frère Tom à qui je réglai ce que je devais à mon père et aux deux drapiers pour les étoffes que j'expédiai récemment à la mer.
Toute la journée chez moi, l'après-midi vinrent le capitaine Allen, sa fille Rebecca et Mr Hempson, peu après les deux sirs William, ils restèrent avec moi jusque tard. Je leur offris une collation des plus élégantes.
Le soir au lit.
26 juin
A Westminster pour plusieurs affaires. Puis dînai avec milady à la Garde-Robe accompagné du doyen Fuller. Ensuite chez moi où l'on me dit que mon père était passé pour une affaire particulière. Je pris donc une voiture et me rendis chez lui, apprends par une lettre que lui envoie ma tante que mon oncle Robert est pris d'étourdissements. Aussi désirent-ils que mon père se rendent chez eux pour s'occuper de ses affaires. Nous devinons qu'il est fort mal. Mon père pense donc s'y rendre demain. Qu'il en soit fait selon la volonté de Dieu !
Retour au bureau par le fleuve, restai jusqu'au soir, retour à la maison, musique, puis au lit.
27 juin
Chez mon père et avec lui à la taverne de Mr Standing pour notre boisson du matin. Je lui dis, là, que j'aimerais qu'il parlât à mon oncle Robert de mon projet d'achat de terre lorsqu'il ira le voir, que je serais prêt à verser 600 livres comptant et le reste en annuité de 150 livres, assez pour me payer une rente annuelle de 50 livres. Je fais cette proposition bien que je n'aie pas plus de 500 livres comptant, pour qu'il me croie plus capable d'économies que je ne le suis. Sur ce je quittai mon père qui se rend auprès de mon oncle à la suite d'une lettre de ma tante.......
A midi chez moi, puis avec milady Batten, Mrs Rebecca Allen, Mrs Hempson etc., dans deux voitures. Nous allâmes voir La foire de la Saint-Barthémémy, fort bien jouée. Rentrai chez moi et restai tard chez sir William Batten. Puis chez moi, et au lit. Aujourd'hui Mr Holden m'envoya une toque en fourrure qui me coûta 4 livres et 5 shillings.
28 juin
handgemalt24.de
Chez moi toute la matinée à m'exercer au chant qui est devenu ma grande occupation. Et à midi chez milady avec qui je dînai. Retour chez moi puis au bureau. Restai en réunion jusqu'à 7 heures du soir, puis sir William Penn m'emmena dans son carrosse à Moorfields où nous fîmes une promenade à pied. Nous nous arrêtâmes pour regarder les combats de lutteurs, je n'en avais jamais tant vus, hommes du nord contre hommes de l'ouest.
Retour chez moi. Cette nuit fîmes installer notre lit dans la chambre dite " chambre d'enfant ", et y couchâmes. Je suis fort satisfait de cette chambre.
29 juin
Suite à une lettre du Duc qui se plaignait du retard dans la préparation des navires, les deux sirs William et moi nous rendîmes à Deptford, nous nous renseignâmes sur les raisons de ce retard. Une explication satisfaisante nous fut donnée. Retour à la maison où je restai jusqu'à l'après-midi, puis je me rendis à pied à la taverne des Cloches près du mai, dans le Strand. Mr Chetwind, Gregory et Hartlib, tous membres de notre ancien club, et Mr Kipps nous rejoignirent comme convenu. Nous restâmes à boire et à causer jusque tard le soir. Rentrai chez moi à pied, et au lit.
Mr Chetwind, à force de chiquer est devenu fort gras et vigoureux, lui qui souffrait autrefois de langueur. Au cours de la conversation il se mit à louer La Politique Ecclésiastique de Hooker, à son avis le meilleur livre et le seul qui ait fait de lui un chrétien. Cela me donne envie de l'acheter, ce que je ferai bientôt.
30 juin 1661
Jour du Seigneur
A l'église où nous constatons que la pratique des quêtes est devenue si constante le dimanche que nous décidons de ne plus rien donner. Bon sermon. Retour à la maison pour dîner, ma femme et moi seuls.
Après dîner me rends avec les deux sirs William par le fleuve, à Whitehall. Après avoir fait les cent pas, nous rencontrons enfin le duc d'York qui nous avait hier donné l'ordre de venir lui expliquer pourquoi les navires n'étaient pas encore partis. La seule raison que nous trouvions est le vent contraire qui les empêche de sortir du fleuve. Me rendis ensuite seul dans le jardin de Gray's Inn. Vis avec grand plaisir des élégantes à la promenade, tandis que je fredonnais un " trillo ". C'est un exercice que je pratique constamment ces temps-ci depuis que je prends des leçons de chant. Je trouve qu'à force de pratique il commence à venir. A la maison fort las, et au lit.. Trouvai ma femme non pas malade, mais mal en point, si bien que je crains qu'elle ne tombe malade. Aujourd'hui l'ambassadeur du Portugal s'est rendu à Whitehall pour prendre congé du roi. Il part régler les derniers détails auprès de la reine avant qu'elle n'entreprenne le voyage.
Temps beau et agréable mais fort chaud. Mon père parti à Brampton voir mon oncle Robert, ne sachant s'il le trouverait vivant ou mort. Pour ma part, ai beaucoup dépensé en habits pour moi et d'autres achats, dernièrement, mais j'espère me rattraper cet été, avec ce qu'il me faudra faire pour préparer la prochaine flotte qui sera chargée d'aller chercher la reine.
Personnellement en bonne santé, mais fort sujet à prendre froid aussi, par cette chaleur, je suis contraint de m'envelopper le ventre d'une flanelle.
à suivre...../
1er juillet 1661
lundi
Ce matin,.......