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dimanche 22 janvier 2017

Correspondance Proust Gallimard 9 ( Lettres France )

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ecoledesteenbecque.etab.ac-lille.fr

                                                                                                           Début janvier 1921

            Mon cher Gaston
           Je vous envoie ce pneumatique par crainte d'un dérangement inutile. En effet malgré une bronchite qui dure depuis plus de 10 jours, je me suis levé aujourd'hui pour qu'on fasse ma chambre, le peu de voix qui me restait a aussitôt disparu, je vais essayer de me coucher tantôt et si je peux m'endormir avant la fin de la journée je dirai qu'on ne me réveille pas et serais trop navré que vous fussiez venu en vain. Je ne peux aborder avec vous dans ce pneu aucun des sujets de conversation déjà vieux de plusieurs mois. Justement parce que j'avais tant de choses à vous dire, la lettre à vous écrire était plus fatigante qu'une autre et c'est celle-là que j'écartais. Mais voyant ma bronchite reprise et notre entretien vraisemblablement ajourné je me limite à 2 points purement pratiques. Le 1er concerne mon livre ( Le Côté de Guermantes 1, Sodome et Gomorrhe 1 ) ( un seul ouvrage mais qui à cause de sa longueur paraîtra en 2 volumes vendus ensemble, comme l'édition des Jeune filles en 2 volumes. Le Côté de Guermantes 2  remplira le 1er volume et environ la moitié du second. La moitié du second volume sera Sodome et Gomorrhe 1 ) Après ce volume, dont la fin du reste sera annonciatrice de la suite, nous serons définitivement débarrassés des mondanités, lenteurs etc ( dont l'utilité se comprendra d'ailleurs après coup ) et Sodome 2, Sodome 3, Sodome 4 et Le Temps retrouvé, quatre longs volumes qui se succéderont à intervalles assez espacés ( si Dieu me prête vie ) vous donneront je l'espère de ce qu'on pourra peut-être alors appeler mon talent, une idée qui ne vous fera pas regretter de m'avoir appelé parmi vos auteurs. En ce moment pour en finir au plus vite avec ces Guermantes c'est donc Guermantes 2 et Sodome 1 qui vont paraître. Mais le texte est tellement corrigé que je préfère ( puisque vous avez déjà envoyé à l'imprimerie ce dont je comptais me servir ) mettre mes dernières corrections sur de nouvelles épreuves où j'inscrirai le bon à tirer. Or tout cela est colossal de longueur et songez que Sodome 1 qui doit paraître avec n'est encore qu'en manuscrit, pas même en 1res épreuves. Il serait funeste que tout se chevauchât. Aussi je crois qu'il vaut mieux attendre pour envoyer Sodome 1que Guermantes 2 me soit revenu mais tout cela va demander un temps énorme ! Aussi faudrait-il presser l'imprimeur. Nous avions dit pour la parution : février. C'est matériellement impossible, et plutôt que de donner des dates fausses qui amèneraient des articles anticipés etc, mieux vaut fixer une date trop tardive mais que nous ne dépasserons pas d'un jour. Je vous propose donc que le livre paraisse le 1er mai, le 1er, pas le 2.
            Autre question au mois de Juin dernier notre ami Tronche m'a dit qu'il allait m'envoyer un acompte sur mes droits et que le reste suivrait bientôt. Il m'envoya en effet cet acompte. Je lui demandais ensuite pour savoir à quoi m'en tenir et régler mon budget qui est formidable avec une apparence modeste : " Dîtes-moi quand vous me donnerez le reste. Je ne vous presse nullement. C'est pour savoir, mais dîtes-moi une date exacte. " Il m'a dit comme date extrême la mi-septembre. Nous sommes en Janvier et je n'ai toujours rien reçu. Je n'ai pas voulu le tourmenter parce que j'ai pensé qu'il était l'exécuteur de vos décisions et qu'il valait mieux vous en parler. Mais je vois de nombreux inconvénients à ce que cet état de choses se prolonge                             artscen.fr  
            1° - les comptes se chevauchent déjà ( ce qui fait casse-tête ) car aux sommes dues, sont venues s'ajouter ce que je dois recevoir ( selon notre traité ) sur les tirages de Guermantes. L'édition de luxe s'ajoute aussi. Or je n'ai pas reçu un centime depuis le fameux acompte de Juin. Si ces complications avaient encore une raison d'être. Mais me dit un ami assez indiscret pour me demander si j'avais touché les tirages de Guermantes et à qui j'ai été assez bête pour répondre que non, n'était-il pas plus simple que M.Gallimard payât ses auteurs avant de fonder une librairie nouvelle etc, dont ils font en somme les frais. Cela donne l'impression de gâchis. Autre inconvénient, nécessité pour moi de vendre de nouvelles valeurs. Il y a mille choses dont j'aimerais vous parler sans ma complète extinction de voix, le comique des inventions faites pour me détacher de vous jusqu'à me dire que vous circuliez en Normandie pendant la guerre avec de fausses barbes. Vous pensez avec hilarité et fureur j'ai pris cela ! Malgré tout comme il vaut toujours mieux ne pas répéter même à une seule personne, une calomnie si imbécile qu'elle soit, je n'ai parlé de cela pas même au cher Jacques Rivière, qui pourtant vous adore et en eût fait le même cas que moi. Mais je préférais que vous seul connaissiez les formes incroyables de la perfidie humaine. Et vous voyez que la plus gde partie de ma conversation, je finis en somme malgré ma fatigue et par plaisir de causer avec vous par vous l'écrire. - . Écrire ! hélas à plus de 1000 personnes je dois des lettres. Et je n'ai même pas encore écrit à Grasset pour votre refus des morceaux choisis. Naturellement je ne donne pas l'ombre de suite à sa proposition puisqu'elle vous déplaît. Cela va sans dire. Il vaudra peut-être mieux le lui dire tout de même. Mais ma résolution est formelle de me ranger à vos côtés. - Ne trouvez-vous pas que les petits journaux abusent du mensonge. Je ne rectifie jamais et cette fois encore je préfère pour cent raisons ne pas rectifier  mais n'est-il pas inouï que le journal Aux Écoutes, publiât presque chaque semaine un écho toujours insensé sur moi ( pas forcément malveillant, mais toujours le contraire de la vérité )ayant par exemple parlé de ma présence hebdomadaire aux soirées de M; René Boylesve chez lequel je n'ai jamais mis les pieds, on arrive cette fois-ci à dire que tout un théâtre de Montmartre est décoré par moi. Or je ne sais même pas dessiner et ne connaît pas le Théâtre en question. Mais bien que ce soit invention et pure folie, je préfère ne pas rectifier ni me plaindre ( à moins que vous ne jugiez qu'une plainte en justice fût utile, ce qui nous débarrasserait peut-être de celles qu'ils rendraient peut-être nécessaires qd  paraîtront Sodome et Gomorrhe ) Cher ami la fatigue m'arrête surtout pardonnez-moi ce papier déchiré je m'en suis aperçu trop tard et n'ai pas eu dans mon état de fatigue le courage de recommencer
            De tout coeur à vous

                                                                                                    Marcel Proust



                                              Extrait de la Réponse de Gaston Gallimard

                                                                                                         Le 14 janvier 1921

Monsieur Marcel Proust
      44 rue Hamelin
             Paris

            Cher ami,
            ......................... ( Réponse sur les différents points : édition, droits d'auteur ) Puis........
            Je sais que votre amitié est en garde contre toutes les perfidies d'amis bien intentionnés à notre égard............ C'est pourquoi à votre confiance, à toutes les marques d'attachement que vous m'avez données, je vous demande d'ajouter une indifférence absolue à toutes attaques injustifiées. Vous me parlez de potins stupides vous concernant, publiés dans différents journaux ; je ne saurais que vous conseiller la même indifférence. Il me paraît inutile de chercher à rétablir la vérité ; j'ai fait l'expérience de ce genre de rectification  ; le journaliste ne veut jamais avoir tort ; il fera suivre notre réplique d'un commentaire aussi désobligeant, et l'on n'en finirait pas si l'on usait jusqu'au bout de son droit de réponse............ parce que mon bureau d
            ....... Vous m'écrivez qu'on a été jusqu'à vous raconter que je me promenais en Normandie pendant la guerre avec de fausses barbes. Le terrible de ces sortes de calomnies c'est qu'elles contiennent toujours une part de vérité - Je suis bien allé en Normandie au début de la guerre parce que mon bureau de recrutement était Lisieux - mais je n'avais pas plus de barbe qu'aujourd'hui. J'ai bien porté une barbe par la suite, mais pas fausse, mais c'était à Paris, à la suite de ma maladie. Que n'a-t-on pas raconté encore, que ne raconte-t-on pas toujours !.............
            Votre ami

                                                                                     Gaston Gallimard
                                                           
                                                         A Gaston Gallimard

                                                                                                                                                                                                         Peu avant le 14 janvier 1921
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Delaunay croquis            Mon cher Gaston

            Bien incapable d'écrire, je tiens cependant à vous dire des choses très importantes.
            Avant cela je vous accuse réception des 7 500 f. de Guermantes mais tiens à vous dire que si vous êtes gêné en ce moment, je peux très bien dès que je les aurai touchés, vous prêter ( sur 7 500 )
 3 000 f. Je ne suis pas un auteur cherchant à ennuyer un éditeur qu'au contraire, j'aime vivement. Loin de chercher à tirer sur la corde, vous avez vu que quand j'ai eu le prix Goncourt, je n'ai nullement demandé d'améliorer mes conditions de Grasset. et si je vous parle qqfois du tort qu'involontairement vous vous faites, c'est uniquement par affection et parce que je sais que ce que j'entends peut vous être utile, et que vous ne le sauriez pas sans cela. Ne pensez pas que j'aie songé une seconde, comme vous semblez le croire à vous parler question " maîtresse " ! Je ne suis pas si idiot ni si indiscret que de me mêler de la vie privée de mes amis ! Si j'ai parlé de la fausse barbe c'est pour vous montrer jusqu'où peut aller l'imbécillité des gens, et au milieu de quelles vipères on vit. J'ajoute que Dieu merci il n'y a pas que des vipères. Je vous sais beaucoup de grands et fidèles amis. Jacques Rivière vous adore comme un frère. Je crois Tronche un collaborateur d'une loyauté absolue. Et bien d'autres. Puisque je viens de prononcer le nom de Jacques Rivière, permettez-moi de me mêler un instant ( malgré un épuisement et un tremblement de la main qui doivent me rendre bien peu lisible ) d'une chose qui ne me regarde en rien. Rivière m'a parlé d'une lettre de Gide qu'il va publier. Je n'ai pas lu cette lettre. Mais autant que j'en puis juger, je trouve son insertion déplorable. J'aime beaucoup Gide, j'ai une grade admiration pour lui ; de vous tous, c'est lui que je connais le plus ( trop peu hélas ) et le plus anciennement. Mais véritablement, qu'au moment où Rivière se tue littéralement à sa Revue, au moment aussi où des revues nouvelles, comme la Revue Universelle etc, font à la N.R.F. une concurrence d'ailleurs fort loyale, qu'à ce moment-là on publie en pleine N.R.F. une déclaration que la N.R.F. est ennuyeuse à lire, l'est depuis que Rivière la dirige, et que cette déclaration s'aggrave du prestige même et de l'autorité du nom de Gide, cela me peine extrêmement. Pense-t-on rendre la Revue plus attrayante en proclamant qu'elle est ennuyeuse ? La fatigue m'empêche de finir au moment où je commence, et je ne vous ai rien dit de ce que je voulais vous dire. Mais puisque Rivière me défend d'écrire à Gide et ne veut pas que j'aie l'air vis-à-vis de Gide même de rien savoir, il me semble que vous, directeur de toute l'affaire, avez le droit de demander à Gide la suppression de ce désaveu. Ne croyez pas qu'il y ait là-dedans l'ombre d'un sentiment hostile à l'égard de Gide ! J'irai même entre nous jusqu'à vous dire ( comme je le dirais à Rivière ) que je ne suis pas un N.R.Fiste fanatique. Mais c'est trop bête de se manger les uns les autres. Je ne suis suspect d'aucun intérêt en vous disant cela. Je n'écris jamais à la N.R.F. ; je pense à vous trois et à votre intérêt commun. Pardon de me mêler de ce qui ne me regarde pas, j'ajourne à un soir de santé la suite de cette conversation.
            Votre bien affectueux
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                                                             Marcel Proust

N'oubliez pas mes Ed originales dont je suis pressé.



                                      A Gaston Gallimard

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                   expointhecity.com                                                                          Peu avant le 9 avril 1921

            Cher Gaston
            Je vous écris en gros parce que je viens d'être re-mourant. Mais bien qu'écrit en gros, ma lettre doit être lue par vous, si vous le voulez bien, en détail. Je commence par un détail absolument accessoire et insignifiant. Les 400 f. que vous trouverez dans cette lettre sont pour que vous ayez la gentillesse de les remettre de ma part, comme j'ignore son nom, à votre dactylographe pour les peines qu'elle a, fort maladroitement d'ailleurs, prises pour moi. Naturellement cet argent n'est pas un salaire puisque vous vous m'avez dit que la N.R.F. payait pour cela. C'est un simple remerciement. Si comme je le crois j'avais remis un peu moins à Mlle Ralley, vous pourriez ne donner que 300 f. à votre dactylo pour ne pas faire de jalouses, et 100 fr. aux employés qui prennent la peine de me faire suivre mes lettres
            Je vous envoie ci-joint Sodome 2, dactylographié au complet, précisément par votre dactylogr
Il avait été convenu que vous lui feriez dactylographier seulement les ajoutages et que vous enverriez ainsi le tout à l'imprimeur, car les blancs qu'elle a l'habitude de laisser sont si incompréhensibles que je préfère travailler sur épreuves et que je n'ai rien relu de sa dactylogr. Je crois que malgré ce parti que nous avions pris, le mieux serait de ne rien lui faire dactylographier du tout et d'envoyer sa dactylogr, avec mes ajoutés à l'imprimeur. Je travaillerai sur les placards. Et Sodome 3 qui n'est pas dactylographié, mais d'autant plus clair, sera tout prêt ( l'est déjà ) quand nous aurons le bon à tirer de Sodome 2
            Chose plus urgente, je suppose que Guermantes 2, Sodome 1, est en cours de fabrication
( le bon à tirer ayant été donné par vous ) chez l'imprimeur. Mais ce qui m'effraie c'est que vous ne m'avez pas dit où vous comptiez finir le 1er volume puisque ce tome ( Guermantes 2 Sodome 1 ) va paraître le 1er Mai. Or il me semble que la coupure doit se faire dans Guermantes 2, vers ce qui était dans l'ancienne pagination le placard ( approximativement 37 ) par exemple à l'endroit où je dis que des gens sont contents d'aimer dans Richard Strauss de vulgaires mélodies qu'il leur était interdit de goûter dans les Diamants de la Couronne. Voilà une fin possible pour le 1er volume ( qui ne contient que du Guermantes 2 mais qui s'appelle tout de même : Le Côté de Guermantes 2 Sodome et Gomorrhe 1 ). Autre fin peut-être meilleure pour le 1er volume ( c'est à vous d'ailleurs de voir si les 2 volumes sont de longueur à peu près égale ) : à peu près vers les mêmes placards quand je dis qu'il n'est pas certain que la politesse disparaîtrait d'un état démocratique etc et que si la monarchie existait, la Princesse de Parme ne serait guère plus qu'un Président de la République c'est-à-dire que je n'aurais pas eu l'idée d'en parler. Voilà qui me semble encore une fin possible pour le 1er volume. Vous avez fait mettre l'en-tête du chapitre 2 tel que je vous l'ai écrit et suis prêt à vous le récrire si vous avez oublié.
Afficher l'image d'origine            Vous avez peut-être vu dans l'Opinion l'annonce du livre avec une citation de l'article de Mauriac. Ne faites surtout pas rectifier cette note, car l'Opinion est très bien disposée, mais comme dans une intention excellente elle a gaffé en disant que plusieurs fragments du livre avaient déjà paru en revue, la " note de l'Editeur " que je vous conseillais de mettre dans l'exemplaire du livre, devient encore plus utile pour faire savoir que même les rares fragments qui ont paru en revue sont tout différents dans le volume. Et nous ne mentons pas en disant cela. Quel rapport y a-t-il entre " une Agonie " et tout le grand morceau de la maladie de ma g-mère mêlée à celle de Bergotte ( qui est t nouvelle etc ). J'ai encore cent mille choses à vous dire mais mes forces me trahissent et sans doute aussi votre patience se lasse. Si vous avez des bandes à faire pour le livre, n'attendez pas la dernière minute. On annonce le livre pour le 1er Mai. Ne recommençons pas nos retards d'antan où les " bandes " furent pour beaucoup.
            Chose très utile dans les dernières pages de Guermantes 2, avant Sodome et Gomorrhe 1, la D de Guermantes dit ( je crois ) que si on dit : " Voilà le Roi de Suède " tout le monde court sur le Pont Neuf tandis que si on dit voilà voilà le Prince de Guermantes on reste chez soi. Il faudrait mettre là tout le monde court sur la Place de la Concorde, ( au lieu du Pt Neuf ) car qq pages plus loin dans les dernières lignes du Côté de Guermantes le Duc dit ; Vous vous portez comme le Pont Neuf.  Il vaut mieux qu'il n'y ait qu'une fois le Pont Neuf. C'est très simple à changer. Ce qui serait plus compliqué mais bien utile c'est que dans Sodome 1 le vasistas vers lequel je monte sur l'échelle pour voir Jupien et Charlus ensemble soit ( non pas aveuglé, il est indispensable de laisser voir ) mais condamné. Si c'est trop difficile, ne retardez pas d'un jour pour cela. Tronche m'a remis 2500 f. il y a environ 15 jours. Dois-je vous en donner un reçu ? Je n'ai pu encore songer à faire toucher ce chèque, ayant eu tout le temps 40 à cause d'un froid rhumatismal que j'ai pris. Ma fièvre n'est tombée qu'aujourd'hui vous voyez que je suis énergique dans l'état de prostration où je suis de vous écrire tout cela. - . Chaque fois que je veux vous voir, vous n'êtes jamais libre. C'est un peu navrant. - . Cher ami vous me dîtes souvent des choses très gentilles sur vos sentiments de confiance et d'estime à mon égard. Je vous dirai que les miens pour vous qui sont pareils, n'ont pas cessé de grandir depuis quelque temps. Je me suis rendu compte qu'en diverses circonstances ( notamment vis-à-vis de Jacques ) vous aviez montré une intelligence, un coeur exceptionnels, et que votre " capacité " comme éditeur est sans rivale. De cela je serais heureux de parler avec vous parce que peut-être me serait-il donné de vous en faire avoir témoignage. - . Pour finir je ne pense à aucune rosserie de votre part en m'ayant signalé parmi tant d'articles charmants sur ma Préface pour Morand, le désagréable, c'est-à-dire celui de Souday. Mais je ne le prends pas en mal. C'est bien le 4è article qu'il fasse sur mon étude sur le Style ( jusque dans Paris-Midi ). Je vois par là que ma pensée a une certaine " prise ". Et je suis très heureux que ( sauf dans ce cas où il avait de parler de Morand une raison tout humaine et féminine ) on parle qqfois à cause de moi de Morand. Ma préface n'avait pas d'autre but. Pourtant si vous voulez mon avis, j'aimerais mieux qu'on parle un peu moins de la préface et un peu plus des nouvelles qui la suivent. Cette fois-ci je suis à bout de force
            Tout à vous

                                                                             
                                                                                    Marcel Proust