17 Juin 1664
Levé et à mon bureau où j'ai abattu beaucoup de besogne, puis descendu par le fleuve jusqu'à Woolwich pour démasquer un fourbe qui nous fournit en fabriquant avec du chanvre poussé chez nous du cordage neuf, qu'il nous vend pour du cordage de Riga.
Ensuite chez Mr Falconner où je rencontrai sir William Batten et milady avec le capitaine Tinker et où je dînai. Puis par le fleuve à l'arsenal et à Deptford où je passe un très long moment pour m'informer en matière de pavillons et de toile à drapeaux et d'autres choses encore. Rentré donc tard et fort las, ayant fait ce jour moisson de bons renseignements. Mais je vois que les corruptions de la marine sont si variées que l'on n'en finit pas d'y veiller, notamment lorsqu'on a un sir William Batten pour décourager les honnêtes gens.
A la maison et au bureau où je reste très tard, puis souper et, au lit. L'esprit fort chagriné de savoir comme sir William Batten et sir John Mennes font ce qu'ils peuvent pour abuser le roi ou permettre à d'autres de l'abuser.
18 juin
Du matin à 11 heures du soir, à part un moment pour dîner à la maison, au bureau, fort embesogné à mettre de l'ordre dans maintes affaires, à grand-peine, mais aussi à ma grande satisfaction pour finir. Puis à la maison, souper et, au lit.
C'est merveille de voir toujours les airs importants de sir William Penn, fraîchement revenu de Porsmouth, la tête pleine de grands rapports sur sa mission et la condition des navires.là-bas. Quand ce sera passé il redeviendra comme tout le monde, ou pire. Mais je me demande pourquoi Mr Coventry a tant d'égards pour lui, au point de l'envoyer chercher seulement pour s'occuper de ses affaires d'Irlande avec milord Ormond et de lui obtenir avec cet excès d'empressement la permission du Duc de revenir, alors qu'il le connaît, j'en suis sûr, aussi bien que moi, quant au peu de services qu'il rend au roi
19 juin
Jour du Seigneur
Lever et à mon bureau tout le jour, hormis le dîner à la maison, à faire beaucoup de travail, faute de temps les jours de la semaine. L'après-midi, soudain, la plus grande averse de pluie et le tonnerre le plus fort et le plus continu que j'aie de ma vie entendu, je crois. Le soir à la maison avec ma femme, et nous avons causé sérieusement de plusieurs de nos soucis familiaux. Entre autres, de faire venir Pall chez nous de la province pour essayer de lui trouver un parti, ce dont je suis très désireux et ma femme aussi. Puis souper, prières, que j'ai trop négligées ces derniers temps et, au lit.
20 juin
Comme il fit très froid la nuit dernière, j'avais pris un peu froid et je souffrais de vents.
A ce que je vois un signe précurseur infaillible de la douleur est quelques pets lâchés brusquement. Quand cela cesse, mes évacuations cessent et la douleur commence. Lever. Réglai plusieurs affaires, puis en bateau avec ma femme jusqu'à Whitehall. Elle chez son père et moi chez le Duc, où nous travaillons comme à l'accoutumée. Il racontait en riant, entre autres choses, que les Hollandais impriment dans leurs gazettes que le prince Rupert, le duc d'Albermarle et milord Sandwich seront nos amiraux et que peu après ce sera le tour du " Vieux Penn ", c'est ainsi que le Duc l'appela en plaisantant.
Ils ont, paraît-il, écrit au roi récemment pour l'assurer que leur déploiement de navires n'était destiné qu'à protéger leurs pêcheurs et de demeurer près de leurs côtes, non point à molester les sujets du roi, et pour lui demander de faire de même avec ses navires, ce qui fait rire le roi qui est, cependant, ennuyé qu'ils le prennent vraiment pour un enfant, qui les laissera rapporter leur poisson et rapatrier leurs bateaux de leur Compagnie des Indes orientales, après quoi il se soucieront de nous comme d'une guigne.
Allé à la Grand-Salle de Westminster, puisque c'est jour de terme. Rencontrant Pickering il me dit que, la semaine dernière, milady s'en fut visiter Mrs Becke mère. Et la fille arriva tantôt. Mais que milady raconte elle-même, à ce qu'il dit, que, sans qu'elle sût pourquoi, car elle ne savait aucunement qu'ils eussent une fille, ce que je ne crois pas, elle fut incommodée et son cœur se souleva sitôt que la fille parut, et elle lui sembla la femme la plus laide qu'elle eût jamais vue. Ce serait bien étrange si c'était vrai, mais je n'en crois rien.
Allé ensuite aux appartements de milord où bien ri avec les jeunes filles qui content plaisamment leur comparution devant leur mère le lendemain matin après que nous les eûmes ramenées chez elles si tard la semaine dernière. Et que leur mère le prit fort bien, à tout le moins sans colère.
C'est là que j'appris le mariage de la riche veuve, milady Gould avec un certain Neale, après qu'il fut souffleté à la porte par le frère de la dame, qui restait là en sentinelle pour servir quelque courtisan. Mais il lui fit tirer l'épée et le blessa. Elle fit monter Neale auprès d'elle et envoya quérir un prêtre. Ils s'épousèrent sur-le-champ et s'en furent au lit. Le frère fit appel à la Cour et obtint qu'un sergent fût envoyé chercher Neale. Mais Neale le fit monter pour le voir au lit et elle le reconnut pour son époux. Donc, l'affaire est close. Il paraît que sir Henry Bennet avait des vues sur elle.
Milady très affable. Après dîner entrèrent sir Thomas Crew et Mr Sidney, récemment rentré de France. Il a un peu grandi et est, certes, joliment fait, quoiqu'il n'ait pas progressé autant qu'on le disait. C'est encore un enfant, toutefois je peux voir qu'il a de l'esprit et de bonnes inclinaisons.
Reparti avec Creed qui a dîné ici, vers Westminster pour mettre la main sur Mr Hawley. Le trouvai, mais il n'accepte pas mon offre de commis aux vivres en mer, de milord.
Allé seul à divers endroits pour mes affaires en justice, avec bon succès. Enfin, vu Mr Townshend à la Garde-Robe, et reçu de lui des paroles aimables, qu'il me serait fidèle et s'opposerait aux efforts du capitaine Ferrer pour enlever à mon père la place que milord lui a promise.
C'est là que je rencontrai Will Howe et il sortit avec moi pour revenir à Whitehall par le fleuve et présenter nos devoirs à milord, qui est de retour de Hinchingbrook, où il a passé quatre ou cinq jours. Mais je n'ai jamais été aussi contrarié de voir comment est reçue une visite par trop empressée, car il me reçut avec aussi peut d'intérêt que lorsqu'il était mécontent, et je suis un sot d'être d'humeur si servile. Contrarié par cette réflexion je pris une voiture pour rentrer chez moi et ne pus me sortir cela de l'esprit de toute la nuit.
Souper et, au lit, ma femme se plaignant de Bess parce qu'elle a rendu visite à Jane qui habitait chez nous, et les a entendues, ainsi que Mrs Harper, médire de nous et qu'elle ne nous en a rien dit, ce dont je suis contrarié moi aussi, et je le lui fis savoir si fortement que la pauvre fille se mit à pleurer, sans feindre, je l'espère, bien que je ne saurais le dire. Je fus satisfait, cependant, de voir comment elle le prenait. Sur ce, dormons.
21 juin 1664
Fatigué d'avoir trop marché hier, je fais la grâce matinée. Je me lève enfin et vais au bureau, toute la matinée. Rentré dîner avec Mr Deane, après à Whitehall, déposant ma femme en chemin. Réunion de la commission de Tanger où, à ce que je vois, le duc d'York suit très bien les affaires, beaucoup mieux que tous les autres, ou que la plupart. Et j'ai l'esprit un peu soulagé de la crainte que j'avais qu'il eût mauvaise opinion de moi à cause du mauvais succès de l'envoi des troupes à Tanger.
Sorti avec Mr Creed nous promener dans le parc, puis jusqu'à la nouvelle Bourse où nous rencontrons Mr Moore qui nous accompagne. Je ne lui fis pas bon visage mais il ne me dit rien de l'affaire de la Garde-Robe, ce qui me contrarie. Par lui, je me rends bien compte que les affaires de la famille et de la fortune de milord vont très mal et qu'il s'endette prodigieusement. Plût à Dieu que je n'y fusse point mêlé, à la fois pour ce qui est de mes propres deniers et du billet de 1 000 livres pour lequel je suis son garant envers mon cousin Thomas Pepys. Rentré à la maison en voiture et un moment au bureau. Puis souper et, au lit.
22 juin
Lever. Je trouve Mr Creed en bas, resta un moment avec moi, puis au travail toute la matinée. A midi à la Bourse et au café où il n'est bruit que de la flotte de 60 voiles qu'arment les Hollandais. La peste s'étend beaucoup chez eux, à la fois en mer et sur terre.
De la Bourse à Trinity House pour dîner avec sir William Rider et Cutler, très bon dîner. Dîna aussi avec nous George Ascue qui, à ce que je vois, cherche à se faire connaître comme marin.
Retour à la maison où vient me voir l'avoué de milord Peterborough, porteur d'une lettre demandant le prompt règlement de son affaire de fret, et me promet 50 livres, ce qui est bien venu, et j'espère arranger son affaire sans délai. Ceci me réjouit fort. Tout l'après-midi sur son affaire et son avoué revient tard dans la soirée. Avec lui à 9 heures chez Mr Povey que je mis au courant. Il ne veut rien payer sans autorisation, mais ce sera fait dans quelques jours. Rentré en voiture et, au lit.
23 juin
Levé et au bureau où réunion toute la matinée. Puis à la Bourse, rentré dîner et au bureau où très occupé jusqu'à 10 heures du soir, puis à la maison, souper et, au lit.
Je vis hier mon cousin Thomas Pepys et je saisis l'occasion de lui parler du billet par lequel je suis engagé envers lui pour milord Sandwich pour la somme de 1 000 livres. Je lui dis très franchement, en exigeant le secret, quelle est la situation, que je suis le serviteur de milord et résolu à m'engager pour lui à tout ce qu'il voudra. Mais je serais bien aise qu'il eût quelque autre caution. Mr Moore me laissa entendre aujourd'hui qu'il a vu milord. Et milord comment il le prend je ne sais pas, mais il s'est mis à chercher une autre caution et j'en suis fort aise.
Will Howe vint me voir cet après-midi afin de demander que l'on fît certains préparatifs pour milord pour quand il rejoindra son navire, ce qui ne saurait tarder, car il semble que le roi et les deux reines veuillent le visiter. Dieu sait comment milord se tirera de cette dépense, car Mr Moore me dit aujourd'hui que ses dettes se montent à 10 000 livres. Et ceci avec bien d'autres fantaisies qui le prennent chaque jour, tant qu'il veillera à ses plaisirs, va lui coûter encore davantage.
Mais il était savoureux, cet après-midi, d'entendre Will Howe en parler avec délicatesse et dire qu'il croyait que les dettes de milord atteignent 2 ou 3 000 livres et puis il se corrigea pour dire :
" Non pas ! mais je crains qu'elles ne se montent à 1 000 livres. "
Je prie Dieu qu'il me délivre de Sa Seigneurie quant à sa dette, pour le reste peu me chaut.
24 juin
Levé et parti à nouveau avec le capitaine Witham chercher de l'avoine en divers endroits pour Tanger. Entre autres, les greniers de la Cité, où il semble que chaque corporation ait son propre grenier et soit tenue de garder constamment une certaine quantité de grain ou en temps de disette d'en fournir telle quantité à tant le boisseau. Et c'est merveille de voir les entrepôts de toutes sortes qui font comme des piles de pont et des futailles, ce que je n'avais encore jamais vu.
Au bureau affairé toute la matinée. A midi chez mon oncle Wight, dîner, ma femme y étant depuis le matin. Après dîner à Whitehall, rencontrai Mr Pearse. Il me montra la chambre de la reine et son cabinet où elle n'avait rien d'autre que de jolies images de piété et des livres de dévotion. Et aussi l'eau bénite à son chevet quand elle dort, avec une pendule auprès de son lit où brûle une lampe pour lui dire l'heure à tout moment de la nuit. Puis avec lui dans le parc où nous rencontrâmes la reine revenant de la chapelle avec ses filles d'honneur toutes de nouveau parées de robes de dentelles d'argent, ce qui est neuf pour moi et dont je ne pensais pas que cela reviendrait à la mode.
Puis il m'emmena au cabinet du roi où il y avait telle diversité de tableaux et d'autres choses rares et précieuses que j'en fus tout confondu et ne tirai aucun plaisir de leur vue. C'est la première fois de ma vie que j'ai été si empêché d'avoir du plaisir devant la plus grande abondance d'objets qui eussent dû m'en donner.
Retour à la maison en rendant maintes visites et en faisant nombre de commissions, à ma grande satisfaction.Et le soir, bien las, à la maison où Mr Creed m'attendait. Promenade avec lui dans le jardin. Il me dit qu'en ce moment il se prépare en toute hâte à partir en mer, et qu'il lui reste à se comporter avec droiture envers moi dans l'affaire que je sais, ce qu'il fera avant son départ. Mais je vois bien qu'il veut que je lui rende maint service d'abord, à la fois pour les traites qui arrivent dans ce bureau à son intention et pour son absence de la commission de Tanger. Ce que je promets et ferai dans la mesure où il s'acquittera envers moi. Je voudrais bien avoir le coeur net sur ses intentions, de telle sorte que je puisse, ou bien cesser d'avoir commerce avec lui, ou bien continuer à lui témoigner de la bonté.
25 juin
Ayant veillé tard il dormit avec moi et se leva en bavardant fort joyeusement. A la vérité, c'est un homme d'excellente compagnie et fort habile.
Lui parti je vais au bureau. Réunion toute la matinée. A midi dîner puis travail au bureau. A la maison tantôt avec Mr Deane pour une leçon sur la manière de dessiner une préceinte. Lui parti retour au bureau, arrive le capitaine Taylor et nous allâmes chez moi. J'ai fort bien réussi dans mes rapports avec lui pour ce qui est de nos récents soucis, de telle sorte que, quoiqu'il advienne, mon nom ne sera souillé par aucune déloyauté. Retour à mon bureau, resté tard puis, au lit.
26 juin 1664
Jour du Seigneur
Lever. Sir John Mennes me déposa chez milord Sandwich où j'attendis jusqu'à ce qu'il descendît
mais quand il vint il n'avait guère à me dire, seulement une ou deux questions d'ordre général et puis bonsoir. On amena sa fillette milady Katherine, fraîchement rentrée de chez mon père à Brampton pour faire soigner sa joue qui a une plaie depuis longtemps. Mais milord préfère la laisser en l'état, avec une cicatrice sur le visage, plutôt que de courir le risque que la chose empire en y touchant.
Lui parti je rentrai chez moi, un peu chagrin de voir qu'il ne prête plus attention à moi, et en compagnie de Creed j'entrai dans plusieurs églises. Dieu sait que ce sont de bien jeunes ministres qui les servent et que les églises sont bien vides.
Rentrés à la maison jeté un coup d’œil dans notre propre église et entendu prêcher un certain pasteur ramené par sir William Penn d'Irlande où il avait été son chapelain et que sir William nous pria hier de venir écouter. Un sot.
Rentrés dîner. Après fantaisie nous prit d'aller au Hope. Ma femme s'habilla donc et emportant suffisance de victuailles et de boissons, nous prîmes le bateau sur-le-champ et, portés par la marée, nous descendîmes le fleuve. Mais il faisait nuit et la marée était étale lorsque nous atteignîmes Gravesend. Aussi nous nous arrêtâmes là sans débarquer, sauf Creed qui alla chercher des cerises et envoya une lettre au Hope où la flotte est au mouillage et, comme le temps devenait pluvieux, qu'il tonnait fort et qu'il y avait des éclairs, nous prîmes le chemin du retour. Bientôt le ciel se dégagea entièrement et il y eut un beau clair de lune. Nous fûmes chez nous avec grand plaisir vers minuit, ce qui nous plut grandement. Creed raconta de bonnes histoires dans le bateau. Il dormit avec moi cette nuit.
. 27 juin
Lever. Lui et moi à pied à l'enclos de Saint-Paul où nous vîmes le livre de sir Harry Spelman que je commandai ainsi que d'autres. Puis nous prîmes une voiture, lui pour aller chez milord et moi à St James, où nous fîmes notre travail habituel. Rentré dîner, ensuite par le fleuve à Woolwich où je passai l'après-midi, jusqu'à la nuit, sous le prétexte d'acheter la maison et le terrain du capitaine Blackman. En visitant le terrain j'observai les cordages avec lesquels Clothier, à ce que je crois, pense tromper le roi. C'est fait, je rentre en bateau, la nuit tombant avant que je n'arrive. A la maison je trouve notre nouvelle servante, Jane, une cuisinière.
Au lit.
28 juin
Lever. Mis aujourd'hui pour la première fois cet été une chemise courte, car il fait très chaud. Cependant mes humeurs sont si mal tempérées que je crains de prendre froid quand le monde entier est sur le point de fondre.
- Au bureau toute la matinée. A midi dîner à la maison, puis à mon bureau jusqu'au soir, puis sorti pour diverses affaires, puis à la Bourse comme convenu et avec mon oncle Wight à la taverne où, en buvant, il se plaint amèrement de sa femme, comme de la femme la plus désagréable du monde, et me dit comme elle veut n'en faire qu'à sa tête, lui disant qu'elle lui avait apporté une dot et Dieu sait quoi. Ce qui, avec quantité d'autres circonstances, me montre qu'ils mènent ensemble bien triste vie. Puis à la Mitre où vinrent à nous le Dr Burnet et Mr Maes. Mais l'objet de la rencontre était surtout de mettre le docteur et moi en présence, et je commençai à prendre conseil au sujet de mon mal, puis je l'invitai à venir chez moi. Je suis résolu à me mettre entre ses mains. Je restai très tard mais ne bus rien, ni ne boirai, quoiqu'il me conseille de prendre garde aux boissons froides. Rentré chez moi puis, au lit.
29 juin
Lever. Mr Shypley vient d'arriver à Londres, vint me voir. Entre autres, j'apprends que l'on envoie quérir les enfants chez mon père mais, dit-il, sans que l'on soit fort mécontent. Je suis fâché de ce sujet de différend, mais content qu'elles s'en aillent, de crainte que cela n'empire.
Il me dit que ce beau chien que je lui avais donné, un matin qu'il partait de bonne heure pour Huntington, fut attaqué par cinq autres chiens et mis en pièces, ce dont je suis un peu chagrin, et lui plus que je vis jamais personne l'être pour semblable cause.
Sorti et marché avec lui une bonne distance en causant, puis nous nous séparâmes et je vais au Temple et chez mon cousin Roger Pepys, puis en bateau à Westminster pour voir le doyen Honywood, que je n'avais visité de longtemps. C'est un bon homme mais très faible de caractère. Cependant il est doyen et tenu en grande estime.
Allé à pied chez milord Sandwich où je dînai, en présence de milord. A table il se montre assez affable envers moi, mais sans me parler des affaires et sans prêter attention à moi après dîner. Il se mit à jouer aux cartes et milady et moi restâmes deux heures à causer de la situation de sa famille grandement endettée avec beaucoup d'enfants qu'il va maintenant falloir établir. Je lui dis très franchement ce que j'en pensais, ce qu'elle prit bien, allant même plus loin que moi, jusqu'à se lamenter sur leur situation et rappeler comme tout était en bon ordre il y a six ans quand j'habitais avec eux et que milord partait chaque année en mer.
Rentré à la maison en faisant diverses courses en chemin, puis au bureau où je reste tard le soir, Mr Commander venant me voir pour que je signe et que je scelle la nouvelle rédaction de mon testament, car j'ai fait quelques changements à la mort de mon frère Tom. A la maison, souper et, au lit.
30 juin
Levé et au bureau, réunion toute la matinée. Rentré dîner à midi avec Mr Waith et tantôt arrivent Mr Falconnet et sa femme. Ils dînèrent avec nous, c'est la première fois qu'elle vient ici. Nous fîmes un assez bon dîner, conversation très gaie. Restés une heure ou deux après dîner. Puis descendu le fleuve jusqu'à Deptford et à Woolwich pour régler quelque affaires auxquelles j'étais lié par serment ce mois-ci. Et quoique sur certains points je n'ai pas rempli exactement mon voeu de régler toutes mes affaires en payant toutes mes menues dettes et en recevant toutes les menues sommes qu'on me doit. Je bénis Dieu cependant de ne me sentir coupable d'aucune négligence parce qu'elles ne sont pas réglées, car je n'y ai du tout consulté mon plaisir. Etant bien résolu à ne prendre aucune manière de plaisir que ce ne soit fait, je ne doute pas que Dieu me pardonne de n'avoir pas payé mon gage de 10 livres comme promis.
Revenu à pied de Woolwich à Greenwich tout seul à part un homme qui tenait un gourdin. Quoiqu'il m'ait dit qu'il travaillait dans les chantiers du roi et qu'il m'ait donné d'autres bons arguments pour montrer qu'il est honnête homme, j'ai craint, Dieu me pardonne ! qu'il ne m'assomme par-derrière avec son bâton. Mais je rentrai sain et sauf.
Puis fis mes comptes du mois, et je m'aperçois que j'ai encore gagné et que j'en suis à 951 livres, pour lesquelles Dieu soit béni.
Je finis ce mois la tête pleine d'affaires et de quelque chagrin de n'avoir pas rempli tout à fait tous mes vœux, quoique ce ne soit pas de ma faute et que j'y pourvoirai dès que j'en aurai le loisir.
On ne sait pas encore si nous aurons une guerre contre la Hollande ou non. La flotte est prête au Hope, de douze voiles. Le roi et les reines montent à bord, dit-on samedi prochain.
Les jeunes filles de milord Sandwich parties avec leurs servantes de chez ma mère, ce qui me tracasse car Mr Shipley m'apprend que c'est avec grand déplaisir, en disant que quoiqu'on achète de la bonne viande, on n'en peut jamais manger avant qu'elle ne pue, ce dont je suis fort vexé.
à suivre.................
1er Juillet 1664