nouvelobs.com
16 Février 1665
Levé et à Whitehall avec Mr Andrews pour une séance de la commission de Tanger où, pour régler les affaires de notre entrepreneur des subsistances, j'obtins un crédit supplémentaire, ce dont j'espère quelque bénéfice, et m'en réjouis. Mais Seigneur ! C'est merveille de voir dans quel abîme de mépris, que dis-je, de déshonneur, Mr Povey est tombé du fait de ses comptes et de sa prodigieuse bêtise. A tel point que s'il ne se montre homme de grande influence il sera congédié comme un sot, et ce sera bien mérité, car nul autre que lui n'a autant pratiqué la comptabilité en y entendant aussi peu. Ce qui ne l'empêche pas de s'y déshonorer avec la plus grande quiétude. Puisse Dieu me délivrer de ses attentions, concernant mon billet à ordre ! Et je veux bien être maudit plutôt que de me salir encore les mains avec lui. Retourné à la Bourse, puis chez moi dîner en compagnie de Mrs Hunt et de la pauvre Mrs Batters qui amena sa petite fille avec elle ainsi qu'une lettre de son mari dans laquelle, en guise d'hommage, le sot m'offre très sérieusement sa fille et me confie le soin de l'éduquer à sa place et de l'adopter. Mais, sans faire le moindre cas de la substance de cette lettre, je détournai la conversation et m'en fus, à mon bureau tout l'après-midi et jusqu'à presque une heure du matin. Puis chez moi et, au lit.
17 février
Levé et, voyant le froid, la gelée et la neige qui, croyais-je, ne retomberait plus cette année, chez Povey en voiture. Il me raconte, ce que je savais déjà, comment il avait été traité l'autre jour et l'est toujours, par milord Berkeley, et m'apprend d'autre part, ce que j'ignorais, que milord raconte à qui veut l'entendre qu'il a combattu dans plus de duels que quiconque en Angleterre. Réglé mes affaires avec lui : me faire payer une modique somme, puis chez moi avec Mr Andrews et à mon bureau. A midi chez moi avec Llewellyn, ce qui me contraria dans un accès de vieille jalousie. Puis à mon bureau et ce jusqu'à minuit, après une brève visite à midi chez sir William Batten où j'eus quelques mots avec sir John Mennes au sujet de sir William Warren qu'il traitait de fieffé fourbe, mais je l'ai apaisé. Le soir chez sir William Penn qui doit partir pour Chatham demain. Puis chez moi, souper et, au lit.
18 février
Levé et à mon bureau où je suis resté toute la matinée. A midi à la Bourse puis à la taverne du Chêne Royal dans Lombard Street où sir William Petty et les propriétaires du bateau à deux quilles, l'Experiment, nous régalèrent, milord Brouncker, sir Robert Mora et moi et quelques autres, d'os à moelle et d'une échine de boeuf provenant des provisions du navire. La compagnie était excellente et la conversation plaisante. Mais par-dessus tout j'admire sir William Petty. Puis chez moi, pris le dessin du port de Portsmouth appartenant à milord Sandwich et le portai à Ratcliff chez un dénommé Burston, afin qu'il en fit une estampe pour le roi, une pour le Duc et une autre pour lui-même, ce sera fort beau. Chez moi et à mon bureau jusqu'à près d'une heure du matin. Rentré souper et, au lit. Milord Sandwich et sa flotte de 25 dans la rade des Downs ont cessé de croiser, ils sont de retour sans avoir pu se mesurer à aucun vaisseau hollandais.
19 février
Resté tard au lit puisque c'est dimanche, à deviser avec ma femme, tour à tour content et fâché, puis lever et dîner. Chez moi tout l'après-midi et chez sir William Batten. Le soir vint Mr Andrews et nous avons chanté. Ensuite souper, il n'est point resté. Et là j'apprends par hasard que mes domestiques ont introduit une va-nu-pieds, une Ecossaise, qui rôde à l'office et jusqu'à une heure tardive pour les aider à laver et récurer la maison. Pris de fureur je donnai l'ordre à ma femme de battre notre petite servante, ce qui fit grand remue-ménage chez nous et chez les voisins. On enferma la servante à la cave où elle passa la nuit, puis nous sommes allés au lit.
nouvelobs.com
Levé puis avec sir John Mennes chez le Duc. De retour chez moi nous avons pénétré sur le chantier de la nouvelle maison de milord le chancelier près de l'église St James, maison déjà baptisée hôtel de Dunkerque par le petit peuple qui pense qu'il a reçu un fort pot-de-vin en remerciement de ce qu'il a vendu la ville. Je crois qu'elle sera fort belle. Milord Berkeley en fait édifier une autre, voisine de celle-ci et sir John Denham une qui jouxte l'autre côté. De là à la Chambre des Lords où je parlai à milord Belasyse, puis à la Bourse où j'eus à faire, et à la taverne du Soleil, après avoir eu ce matin des mots avec sir John Lawson au sujet de son projet d'envoyer des balles de marchandises à Tanger ce pour quoi, à vrai dire, il n'eut guère mes faveurs. Mais, à certains termes qu'il employa je vis que j'en pourrais tirer quelque avantage et, pour être conciliant, lui donnai mon accord. Nous dînâmes gaiement mais mon repas au cercle et autres frais se montent à 7 shillings et 6 pence, ce qui est trop.
Après quoi à mon bureau où je trouvai la femme de Bagwell à qui j'enjoignis de rentrer chez elle lui disant que je ferais ce qu'elle m'a demandé, à savoir écrire à milord Sandwich afin que son mari soit promu à un meilleur navire dès que l'occasion se présenterait, ce que je fis. Puis je descendis par eau jusqu'aux Docks de Deptford, puis descendis encore un peu et accostai en aval de la ville et, comme il faisait sombre je pus secrètement entrer dans la maison de la femme de Bagwell et là jouir de sa compagnie, encore qu'à grand-peine. Néanmoins, enfin, je avais ma volonté d'elle. Mon envie satisfaite je rentrai à pied jusqu'à Redriffe. Il était près de neuf heures. Je pris quelque spiritueux et mangeai du pain et du fromage, puis chez moi, à mon cabinet de travail et là ma femme vient me dire qu'elle a engagé une femme de chambre, une des plus jolies servantes qu'elle ait jamais vues et qu'elle est jalouse de moi à son sujet, mais qu'elle a pris le risque de l'engager au mois. Je crois qu'elle plaisante. Ensuite souper et, au lit.
21 février
Levé et au bureau affligé d'une vive douleur au majeur de ma main gauche que je me suis foulé en me débattant avec la femme que je mentionnai hier. J'eus à faire jusqu'à midi. Puis ma femme ayant décidé de se rendre avec sa dame de compagnie aux étuves pour s'y baignée, après être restée longtemps confinée à la maison dans la poussière, et bien qu'elle prétend avoir pris la résolution de rester propre désormais, mais j'imagine déjà le peu de temps qu'elle s'y tiendra. Je dînai en compagnie de sir William Batten et milady qui, à présent, m'apprécie fort.
Puis à la Bourse et en sortant avec Mr Waith chez un traiteur où j'ai dîné à nouveau, pour m'entretenir avec lui au sujet des hamacs. Des abus en matière de solde maintenant fréquents et en passe de le devenir de plus en plus, et des bénéfices considérables que Mr Fenn retire de son poste car, bien qu'il ne s'adjuge qu'un demi pour cent de chaque somme qu'il verse, ce qui est d'un calcul aisé, il se montre mécontent de quiconque ne lui consent point davantage.
A mon bureau, après quoi Mr Brouncker m'emmena en voiture à Lincoln's Inn Fields où je restai jusqu'à plus de dix heures du soir à deviser innocemment avec milady Sandwich, la bonne dame, de ce qui fait une bonne épouse, de qui ferait un bon mari pour ses filles, du luxe et de la licence propres à notre époque, entre autres sujets. Puis en voiture chez moi où j'ai un peu travaillé, souper et, au lit.
Milady me dit que milord Castlemaine est de retour de France afin de, dit-on, se réconcilier avec milady.
Elle me narra aussi les folles extravagances auxquelles se sont livrées les demoiselles d'honneur à la Cour, Mrs Jennings, l'une des demoiselles de la Duchesse, se déguisa l'autre jour en marchande d'oranges et s'en alla crier ses oranges alentour, tant qu'à la fin elle glissa, ou que sais-je, et qu'on pût entrevoir, malgré la nuit tombée, ses beaux souliers, ce dont elle eut grand honte.
Elle ajoute que des tours comme celui-ci et d'autres pires leur sont coutumiers et que par conséquent il est peu d'hommes qui s'aventureront à les prendre pour épouses, si bien que milady Castlemaine raconte en manière de plaisanterie que la première de ces demoiselles de la Cour à être mariée sera sa propre fille, qui n'a pas plus d'un an ou deux.
Aujourd'hui milord Sandwich me fait savoir par lettre des Downs qu'il sera probablement de retour en ville dans la semaine.
22 février
Ai dormi seul cette nuit car ma femme, après son étuve, a dormi dans un autre lit. J'ai eu froid toute la nuit. Levé puis au bureau et travaillai toute la matinée. A midi à la Bourse, très occupé. La nouvelle va bon train qu'un navire hollandais aurait été ramené à la côte, au nord, et pris par un escadron. Rentré dîner avec Creed, puis à Gresham College où savants discours. Chez moi, travaillai jusqu'à plus de minuit, rentrai souper puis, au lit. Mrs Bland est venue dans la soirée nous faire ses adieux avant son départ pour Tanger.
pinterest,fr
23 février
A ce jour, par la grâce de Dieu tout-puissant, voilà trente-deux ans que je suis de ce monde et que je jouis à cette heure de la plus belle santé que j'aie jamais connue toute ma vie durant, et du degré de fortune le plus élevé qui soit. Puisse le Seigneur m'en rendre reconnaissant !
Levé puis à mon bureau, travaillai toute la matinée. A midi à la Bourse où j'apprends la nouvelle la plus terrible et la plus étonnante que de mémoire d'homme on ait entendue, à savoir que de Ruyter a entrepris avec sa flotte de Guinée de s'emparer de tout ce qui nous appartient, forts, marchandises, vaisseaux et hommes, et qu'il a ligoté nos concitoyens dos à dos avant de les jeter à la mer, femmes et enfants compris, chose qu'un Suédois ou Hambourgeois arrivé par la Tamise raconte avoir de ses yeux vu. Grand Dieu, il est frappant de constater à quel point la consternation s'est emparée de nos négociants, et avec quelle fureur et esprit de vengeance ils en parlent. Mais je crois que cette rumeur, comme d'autres, se dissipera d'ici quelques jours. Mais ce que je redoute le plus est d'apprendre la raison qui a conduit de Ruyter, d'abord plein d'égards envers nos hommes, à se montrer ensuite si cruel envers eux, après leur avoir laissé la liberté. Je crains qu'il n'ait été informé de la manière dont Holmes a traité ses compatriotes, ce qu'il ignorait auparavant, ce qui a suscité chez lui pareille fureur. Mais Dieu fasse qu'il n'en soit rien !
Jamais on n'a vu les Anglais subir pareil déshonneur, ni homme infliger traitement d'une telle barbarie, comme celui dont nous fûmes les victimes.
Rentré dîner puis à mon bureau. Sommes restés tout l'après-midi. Le soir pris mon ultime congé de Mrs Bland qui s'embarque demain pour Tanger. Retourné à mon bureau jusqu'à plus de minuit, puis rentré souper et, au lit.
24 février
Levé et à mon bureau toute la matinée afin d'aviser à nouveau avec quelques pêcheurs et le bailli du port de la Cité, à la demande de Mr Coventry au sujet des exemptions dont les pêcheurs du fleuve souhaitent bénéficier. Je suis heureux que l'occasion me soit offerte d'y entendre quelque chose. Rentré dîner et tout l'après-midi dans ma chambre jusqu'à neuf heures du soir, en compagnie de Mr Hayter, et ce afin de n'être point dérangé à mon bureau, pour compléter mon livre de contrats que, par manque de temps et depuis trop longtemps, je n'ai point mis à jour, comme j'avais coutume de le faire chaque mois.
Puis à mon bureau jusqu'à minuit ou presque, puis chez moi et, au lit.
25 février
Levé et à mon bureau toute la matinée. A midi à la Bourse où, juste avant mon arrivée, on chassait à coups de fouet ce Suédois qui avait fait au roi et au Duc ce mensonge effronté, disant que les Hollandais jetaient nos hommes dos à dos à la mer en Guinée, non sans force détails et avec une belle assurance, et confessant à présent son mensonge commis, disait-il, afin d'obtenir quelque récompense. Les juges, dit-on, une fois sollicités, firent cette réponse : ils opinaient qu'il serait condamné à la flagellation de par la loi, à avoir les oreilles coupées ou le nez fendu mais, à ce que je crois, ne lui sera rien fait d'autre. On prétend qu'il sera remis entre les mains de l'ambassadeur de Hollande qui en disposera comme il voudra. Mais on persiste à croire qu'il se trouve là-dessous quelque manigance d'un côté ou bien de l'autre, de la part des Hollandais ou des Français, car il n'est guère probable qu'on puisse inventer pareil mensonge pour de l'argent, alors même que l'homme aurait pu espérer meilleure récompense en nous confiant quelque renseignement pour nous plaire.
De là à la taverne du Soleil, dînai avec sir William Warren et Mr Gifford, le marchand. J'apprends que Nicholas Colborne qui, naguère, habitait ici et avait une belle fortune, est parti pour la campagne et mène un train de prince, et que le dénommé Wadlow pareillement loti, de la taverne du Diable près de St Dustan est également parti pour la campagne où il a dépensé tout son avoir ou presque et escroqué ce Coborne de son domaine, qu'il s'est approprié, si bien que celui-ci n'a plus eu qu'à revenir à son ancien métier. Mais Seigneur ! la maison est bougrement pleine, si bien qu'on y peut à peine entrer. Puis chez moi et à mon bureau. Expédiai bon nombre d'affaires, rentrai tard le soir où j'ai fait toilette avec de l'eau chaude. Ma femme me l'a demandé car elle se lave aussi et, au lit.
blogmrdiapart.com
Levé puis à l'église. Rentré dîner puis à mon bureau. Travaillai tout l'après-midi jusqu'à la visite le soir de Mr Andrews et de Hill, puis chez moi où nous avons chanté. Hill resta souper et me parla fort bien de l'Italie, où il avait été, ce qui m'est toujours fort agréable. Après le souper, lui parti, avons fait nos prières et, au lit.
27 février 1665
Levé et au palais de St James où nous nous sommes mis, comme à l'accoutumée, au service du Duc. Je fus ce matin fort surpris et contrarié de lire une lettre de Mrs Bland qui me dit qu'elle n'est pas partie. Et il m'en a coûté aujourd'hui toutes les peines du monde pour trouver quelque moyen de lui assurer son transport, une fois les navires partis, jusqu'à Plymouth. Mais j'espère y être parvenu. A midi à la Bourse afin de m'enquérir du montant de la solde allouée par les Hollandais sur leurs bâtiments de guerre à ce jour, et j'apprends de source sûre qu'elle ne se monte qu'à 12 florins tout au plus, ce ne fait pas même 24 shillings, ce dont je m'étonne. Rentré dîner, puis sortîmes dans la voiture de sir John Mennes, avec ma femme et Mercer. A Whitehall lui et moi, et il insista pour laisser à ma femme l'usage de sa voiture pour ses visites du jour, car c'était la première sortie qu'elle faisait depuis plusieurs semaines, son bain de l'autre jour mis à part.
Allâmes à une réunion du Conseil privé afin d'aviser au sujet de l'enrôlement des hommes. Mais, Dieu du Ciel ! quelles réunions que les leurs ! On ne s'assoit guère, on entre, on sort, l'un se plaint que rien n'est fait, l'autre qu'il attend depuis deux heures et que personne ne vient. Voilà enfin ce que nous conclûmes : milord Annesley dit :
" - M'est avis que nous devons mander au roi d'être présent à chacune de nos séances, car je perçois que rien n'est fait hors sa présence. "
Sans doute a-t-il dit vrai et le roi est fort assidu au Conseil les jours où il se tient, ce qu'on ne peut guère dire de ses prédécesseurs. Mais, à ce que je vois il semble que nous ayons à ce jour la direction des plus plus grandes affaires du monde. Mais entendre milord Berkeley et d'autres vanter la discipline qui régnait en ce pays lors d'un passé récent ainsi qu'au cours de la précédente guerre contre la Hollande, est fort singulier, d'autant qu'ils souhaitent de tout cœur que les affaires de religion ne soient point menées avec une sévérité de nature à décourager les gens raisonnables de se joindre à nous, et que par ailleurs souhaitent faire usage des mêmes lois et de la même sévérité que jadis à l'encontre des intempérants, et prétendent que nos mauvaises mœurs attireront de nouveau sur nous la main de Dieu. Me promenai ensuite dans le parc de St James, avec Mr Coventry qui, je le vois, est quelque peu mélancolique, mécontent du tour, si désordonné, que prennent les choses.
De là en voiture pour la grand-route de Ratcliff, chez mon graveur qui a fait une belle ébauche pour milord Sandwich. Revins et sur le chemin du retour rencontrai le colonel Atkins qui s'était engagé, lors d'une précédente discussion, à me donner une pièce d'or contre vingt qu'il recevrait de moi, s'il parvenait à prouver que les Hollandais noyaient nos hommes en Guinée. A vrai dire, je crains que l'ensemble du monde n'y voie quelque vérité, ce que je redoute.
Retour en voiture chez sir Philip Warwick qui contracta avec moi une sorte de pacte d'amitié et de franchise selon lequel il s'engage à m'aider à comprendre toutes les affaires du trésorier général de la Marine, afin que je sache aussi clairement que sir George Carteret de quel argent il dispose. Il tient à me voir lui rendre visite de temps à autre, ou à venir lui-même afin de s'entretenir avec moi dans le but de servir le roi.
Retour à mon bureau, quelque peu las et mal en point, puis souper et, au lit.
28 février
A mon bureau toute la matinée. Dînai chez moi à midi. Me rendis ensuite avec ma femme chez milady Batten. C'est la première fois en deux ans que ma femme s'y rend, je crois. J'avais à cœur de venir à bout de cet éloignement, et ainsi fut fait. L'entrevue fut fort quiète et plaisante.
Revins. Entrepris de vérifier les comptes de cuisine de ma femme pour la fin du mois dernier, où je pus constater qu'il manquait 7 shillings, ce qui fut l'occasion d'une vive querelle entre nous. A vrai dire j'attachai peu d'importance à cette bagatelle, et me laissai aller à des paroles injurieuses, la traitant de " gueuse " lui reprochant ses fréquentations. Ce qu'elle encaissa avec beaucoup de sang-froid et me reprocha, à juste titre, les miennes et, je l'avoue, me connaissant, je ne crois pas qu'elle les ait exagérées d'aucune façon. Je la crois très futée, et elle a le plus d'esprit lorsqu'elle en montre le moins. Mais c'est un esprit pervers, encore qu'il ne le soit pas au point que je ne puisse m'en accommoder en sachant m'y prendre. A dire vrai, je constate que mon excès d'attention, ma jalousie, mon humeur grincheuse et mon inclination à la réprimander ne font qu'aggraver les choses. Néanmoins, je crois qu'un léger différend, de temps à autre, ne nuit pas, mais qu'il risque, s'il est trop grave, de lui faire prendre conscience de sa force. Nous nous quittâmes fort courroucés, après de vives paroles. Allai mon bureau faire les comptes du mois. Ma fortune s'élève à 1 270livres. Que le Seigneur en soit remercié !
Puis, à presque deux heures du matin, rentrai, souper et, au lit.
Ainsi s'achève ce mois, dans l'attente d'une expédition des Hollandais qui, semble-t-il, sont en position de force et, mieux préparés que nous, Dieu fasse que l'issue en soit heureuse !
à suivre..........
1er Mars 1665
Lever. Comme.........