Affichage des articles dont le libellé est 159 etet réflexions d'hier pour aujourd'h. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est 159 etet réflexions d'hier pour aujourd'h. Afficher tous les articles

mercredi 28 septembre 2022

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 159 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

 artsdot.com








                                                                                                                               16 Février 1666

            Levé de bonne heure et à la Bourse comme convenu. Rencontrai les Houblon, les fis monter dans ma voiture et les emmenai jusqu'à Charing Cross où ils rendirent visite au colonel Norwood, afin de voir comment s'accorder avec lui. En cours de route je leur avais conseillé de ne le point brusquer, car il peut à l'avenir nous rendre service. Et il y a des chances pour qu'eux et moi nous entendions fort utilement.
            Vais chez milord Sandwich. Parlai avec lui en tête à tête de ses affaires et particulièrement de ses prises de guerre. Je le trouve las à ce propos de tous ces tracas. Il renonce à s'en occuper activement pour laisser les choses suivre leur cours, quoi qu'il arrive, le roi le tenant quitte du partage effectué. Pour le reste il tient qu'on ne pourra prouver qu'il possède quoi que ce soit de plus.
            Allé à l'Echiquier et ensuite, en voiture, à la Bourse accompagné de Mr Moore qui me narre de très étonnants incidents qui témoignent de l'imprudence de milord dans le gouvernement de sa famille, de sa négligence, etc.Ce qui me tracasse, mais je me réjouis de tout mon coeur de m'être débarrassé de cette caution de 1 000 £, car ce m'eût été un coup cruel. Allé avec Moore au café, ma première visite en ce lieu qui est comble. Il semble qu'il y ait eu du monde tout le temps de la peste. Puis à la Bourse, puis rentré chez moi, depuis l'épidémie. Après dîner, mise au net avec lui des comptes que j'ai avec milord, mis de la sorte tout en ordre jusqu'à ce jour. Puis au bureau. Sorti avec sir William Warren afin de converser avec lui jusqu'à Whitehall, pensant causer avec sir William Coventry, mais ne le pus, et voir la reine, mais elle ne sera que ce soir à Hampton Court.
            Retour à mon bureau où je reste tard, puis rentré chez moi souper et, au lit.
            < Me promenai un bon moment ce soir dans le jardin avec Mr Hayter, discutai d'un mari pour ma sœur, faisant le compte de tous nos commis qui travaillent auprès de nous. Aucun, pense Mr Hayter, ne convient à sa personne ni à sa dot. Au bout du compte ai pensé au jeune Gauden, et y repenserai. >


                                                                                                                         17 février

            Levé et allai au bureau où je travaillai toute la matinée. Dînai tard puis retour au bureau où je travaillai jusqu'à plus de minuit, puis rentrai chez moi, souper et, au lit.
            Nous apprenons que sir Jeremy Smith et sa flotte sont en sûreté à Cadix.


                                                                                                                           18 février              
                                                                                                            Jour du Seigneur
            Grasse matinée, eus plaisir à converser avec ma femme. Entre autre; de la venue de Pall, car il lui faut venir un peu ici pour apprendre le bon air des choses, et ma femme a l'intention de l'aller quérir, ce que je ne suis pas sans approuver. Puis me levai et à mon cabinet de travail régler diverses choses. A midi mon oncle Wight vient dîner, et amène Mrs Wight. Triste compagnie pour moi dont je retirai peu d'agrément, seulement il me faut témoigner du respect à mon oncle. Après leur départ, comme c'était une belle journée, je fus à pied à Whitehall où la reine et les dames de la Cour sont toutes arrivées. J'en pus voir quelques-unes mais point la reine, ni aucune des grandes beautés. Je tentai de voir milord Hinchingbrooke, arrivé hier en ville, mais en vain. 
            Rencontrai Creed et fîmes un ou deux tours dans le parc, sans grand contentement, car je me suis mis en tête maintenant de gagner de l'argent, je ne puis donc plus être à mon aise avec lui comme je le fus. De plus on raconte sur son compte une étrange histoire, tenue pour fort véridique : il aurait à Oxford tenté de coucher avec une femme qui n'aurait dû son salut qu'à ses clameurs. La chose étant publique j'en conçois quelque haine envers lui.
            Montai en voiture, m'arrêtant en chemin chez mon libraire pour prendre un livre écrit il y a une vingtaine d'années et prophétisant ce qui se passait cette année, en 1666. Année dont le livre explique qu'elle porte la marque de la Bête. Retour à la maison, me mis à lire, souper et, au lit.


                                                                                                                                          19 février

            Levé et en voiture chez milord Sandwich, mais il était sorti. A Whitehall où je présentai mes respects au duc d'York en compagnie de quelques autres de nos collègues. Puis retour chez milord pou voir milord Hinchingbrooke. Le vis donc et ne suis pas peu décontenancé, moi qui, sur la foi de ce que d'autres m'avaient dit, fondais sur lui de grands espoirs. C'est, il est vrai, un agréable gentilhomme mais, à ce qu'il me semble, je n'ai rien découvert en lui qui correspondît à ce que j'attendais, tant en fait d'apparence physique que de conversation. Mais il faudra que je le mette encore à l'épreuve avant de le trop censurer. Puis à l'Echiquier où je passe de bureau en bureau, afin que l'on se mette au travail en cette affaire de tailles me concernant. Passe la matinée entière.                    wikimedia.org  
            A midi à l'enclos de Saint-Paul chez mon libraire, commandai quelques volumes supplémentaires, pour que la somme de mes achats récents se monte à 10 livres........ De là rapportai deux livres d'Ogilby, son Esope et son Couronnement qui m'échurent dans sa loterie. J'en eus pour 4 £ en plus de la reliure. Puis à la maison
            Je vois que ma femme est sortie et est allée chez Hayls, son peintre. Après un rapide dîner je la suis et là le trouve au travail. Je suis bien aise de voir que ce sera un superbe tableau. La laissai chez Hayls et m'en fus chez milord le trésorier général où je rencontrai sir George Carteret et sir John Mennes. En présence de milord le trésorier général et du duc d'Albemarle, on exposa l'état de nos dettes relatives à la marine qui sont fort importantes. On affirma ouvertement qu'ils manquaient d'argent pour en répondre, car il n'y a que 1 500 000 de livres pour faire face aux dépenses inévitables et à une dette de 2 300 000 £. 
            Avec Fenn fus à pied à Whitehall où vs la reine qui jouait aux cartes avec maintes dames, mais il n'y avait là aucune de nos beautés. Ce fut un plaisir pour moi de voir la reine en si bon état, avec un tel air de joliesse, et elle me paraît avoir plus de vigueur qu'elle n'en eut ces derniers temps, car on avoue de toutes parts qu'elle a fait récemment une fausse-couche. Le Dr Clarke me disait hier à Whitehall qu'il avait eu entre les mains les membranes et autres matières qu'elle avait évacuées, et qu'elles étaient parfaitement conformes à celles d'une femme qui attend un enfant
            Espérant trouver milord Sandwich, partis en voiture chez milord le chancelier, mais le manquai. Et donc retour au bureau, puis souper, mon journal et, au lit.


                                                                                                                                      20 février

                Levé et allai au bureau Où, parmi d'autres affaires, le projet de Mr Evelyn relatif à des hôpitaux publics fut lu et accepté en sa présence. Et à midi je l'amenai avec moi à la maison pour le dîner, désireux de rester en relation avec lui, et il m'apparaît encore comme un homme d'excellent caractère, et fort sage. Après dîner je l'emmenai en voiture à Whitehall et nous nous séparâmes. Je m'en fus chez milord Sandwich, et là, entrant précipitamment dans la sale à manger, je trouvai le capitaine Ferrer sur le point de baptiser un enfant à lui né hier. J'arrivai à point nommé pour être parrain avec milord Hinchington et de Mrs Pearse, ma valentine ce qui, pour cette raison, m'agréa fort, encore que je sois un peu contrarié de me voir ainsi assailli par les gens et contraint de dépenser mon argent à savoir, Mrs Pearse comme valentine, la petite Mrs Tooker arrivée chez moi aujourd'hui de Greenwich et qui me coûtera 20 shillings, ma femme sortant avec elle cet après- midi, et maintenant ce baptême.
            Quoiqu'il en soit voilà qu'on apporte tantôt l'enfant, qu'on baptise du nom de Katharine. Et moi aujourd'hui, en cette occasion, de boire un verre de vin, ce que je n'avais censément fait depuis deux ans, si ce n'est un petit peu à l'époque de l'épidémie. Cela étant fait, après avoir embrassé la mère alitée,  vais à la Grand-Salle et apprends l'arrivée à Londres de Mrs Lane. Aussi restai-je à musarder en l'attendant. Elle arrive bientôt et nous décidâmes de nous retrouver chez Swayn. M'y rendis et elle arriva, mais ne restâmes que peu de temps, l'endroit étant trop public. Je ne l'ai pas vue depuis avant la peste. Quittâmes ces lieux et rencontrai à son dernier logis et là même hazer ce que je tend envie para faire con elle. Pour finir elle souhaita m'emprunter de l'argent, 5 livres, et voulut me laisser de l'or en gage, ce que j'acceptai, promettant de lui remettre l'argent dans un jour ou deux. 
            Retour au bureau, puis chez moi. La petite Mrs Tooker passa la nuit avec nous, belle enfant qui se trouve être la nièce de ma beauté qui est morte et qui vivait à la taverne du Vaurien à Cheapside. Puis au lit, un peu tracassé d'avoir été cet après-midi avec Mrs Lane en deux maisons naguère fermées pour cause de peste.


                                                                                                                               21 février

            Levé et avec sir John Mennes à Whitehall, dans sa voiture, causant en chemin de mon frère John et de la façon de lui obtenir une place dans l'Eglise, ce à quoi je vais maintenant m'employer, car il va bientôt devenir maître ès arts, et qu'il m'a écrit cette semaine une lettre en latin m'apprenant qu'il va entrer dans les ordres ce carême.
            A Whitehall vais à la chambre du Duc où je trouve mes collègues s'entretenant de nos affaires, aussi fus-je marri de mon retard, mais nul dommage ne s'en suivit. Là le Duc, entre autres, présenta un livre très ancien, traitant de certaines coutumes de la marine il y a une centaine d'années. Il nous le prêta pour que nous le lisions.
            Allai à l'Echiquier où je fis mes tailles de Tanger pour un terme et les rapportai avec moi à la maison. Puis à Trinihambty House où j'étais invité à un banquet des frères aînés et rencontrai Mr Prynne. Eûmes une conversation intéressante à propos des privilèges du Parlement, dont il dit que peu concernent la Chambre des communes, et encore n'est-ce pas à celle-ci qu'il revient d'en connaître, mais à la seule Chambre des lords.
            A Gresham College avec milord Brouncker. C'était la première fois que je m'y rendais depuis l'épidémie, et la deuxième qu'il y avait une réunion. Entendîmes une belle conférence de Mr Hooke au sujet de la fabrication du feutre, très intéressant. Peu après, seul avec moi, milord m'entretint de l'art de dessiner à l'aide de la règle et de la machine du prince Rupert ainsi qu'avec celle du Dr Wren. Mais il tient que rien n'est aussi efficace que le quadrillage ni, ce qui est mieux, que la chambre noire. Ce qui m'agréa au plus haut point.
            Retour chez moi avec Povey. Fis mes comptes avec lui jusqu'à une heure tardive, chose qui me fut fort à charge. A son départ vis Mr Hill en bas. Nous restâmes longtemps à causer, puis il s'en fut et nous allâmes, au lit.


 hackneygazette.co.uk                                                                                                           22 février 1666

      Levé puis au bureau, siégeai toute la matinée. A midi rentré déjeuner puis en voiture avec ma femme pour prendre l'air, surtout pour elle. Je m'arrêtai seul chez Hayls. Là, au plus haut point, m'agrée le portrait de ma femme, ainsi que celui de Mr Hill. Maintenant que le visage est fini je dois avouer qu'il m'agréait tout autant lorsque j'assistai à la deuxième séance de pose. 
            Chez milord Sandwich, mais il n'est point là et part demain. Ma femme chez Mrs Hunt arrivée récemment à Londres et a acquis un prodigieux embonpoint. Je l'y allai quérir, puis retour, resté tard au bureau, rentré chez moi, souper et, au lit.
            Nous nous tracassons fort de ce que le nombre de morts pour maladie en général, alors que la ville est tellement pleine, ait cru de 3 tandis que pour la seule peste l'augmentation soit de 10.


                                                                                                               23 février 1666

            Levé de bonne heure et sorti à 6 heures, allai à pied avec Will Howe chez milord Sandwich qui a bien passé la nuit dernière dans sa maison de Lincoln's Inn Fields. Il fait bon aller à pied le matin et les rues sont derechef pleines de gens venus prendre congé de milord qui, aujourd'hui, quitte Londres pour son ambassade en Espagne. Et je me réjouis de voir arriver sir William Coventry, bien que je sache qu'il ne s'agit que d'une politesse. Je m'entretins longuement avec milord, il me dit à quel point il quitte le roi en bonne intelligence, quel long entretien il eut l'autre jour avec lui, qu'il a souhaité que l'affaire des prises de guerre fut examinée avant son départ, que le roi a accepté, et que milords les membres de la commission des prises de guerre ont blâmé les informateurs pour ce qui touchait milord, ce dont je me réjouis à plus d'un titre. Cette conversation n'en finissait pas, aussi promis-je de lui présenter mes respects à Cranborne, et pris congé.
            Chez Mr Hayls, avec Mr Hill et deux des Houblon, vis le portrait de ma femme qui m'agrée fort, mais point autant celui de Mr Hill, il s'en faut de beaucoup, qu'avant son achèvement, ce qui me tracassa, et je commence à me demander si le portrait de milady Petre, dont ma femme a pris la pose pour le sien, et qui est un excellent portrait, est bien de sa main, tant il semble l'oeuvre d'un maître.
            Je les dépose à la Bourse et retourne au bureau. A midi dînai chez moi et retour au bureau. Arrive tantôt Mrs Knepp pour voir ma femme qui est sortie, aussi suis-je contraint de m'occuper d'elle. Je la pris avec moi en voiture pour aller chercher ma femme chez Mrs Pearse et Mrs Unthank, mais ne la trouve point. Retour puis arrive ma femme qui faisait des achats. Et chez moi je passai toute la soirée à parler à cette coquine, lui enseignant mon chant " Beauté éloignez-vous ", qu'elle chante d'une manière exquise. Elle me divertit aussi en répétant de nombreuses parties qu'elle-même ou d'autres chantent au théâtre, ce qu'elle fait excellement. Et de me parler en détail des usages du théâtre et des acteurs. Elle est à tous égards d'un commerce agréable. Puis je soupai et m'égayai chez moi toute la soirée, d'autant plus que c'était mon anniversaire, 33 ans. Dieu soit loué que ma santé soit aussi bonne, ainsi que ma situation , et tout le reste..... Puis Mrs Knepp va coucher chez Mrs Turner, et nous allons au lit, trouvant fort agréable que mon état me permette d'avoir tous ces gens autour de moi, d'être en mesure de les recevoir et d'avoir le plaisir de goûter leurs qualités. Et nul ne peut espérer davantage.


                                                                                                                        24 février

            Toute la matinée au bureau, jusqu'à plus de 3 heures. Retour chez moi où je mange un morceau, seul ma femme étant sortie. Parti en voiture avec Mr Hill qui m'attendait pour parler de travail. Chez Hayls où je trouve ma femme et sa dame de compagnie, ainsi que Mrs Pearse et Mrs Knepp, et de chanter et de m'égayer fort. Je ressentis de la joie, encore que fusse contrarié de voir que le portrait de ma femme est moins bon que je ne m'y attendais, mais cela tenait au fait qu'il eût fini une partie du visage et point l'autre...... Chez Hayls nous prîmes de la bière et des gâteaux. Force gaieté et nous chantâmes mon chant, qu'elle chante désormais à la perfection, ce qui m'emplit- de fierté. 
            Laissai ma femme rentrer avec Mrs Pearse tandis que je retournai au bureau jusque fort tard puis, au lit, après m'être préparé pour le voyage de demain.


                                                                                                                          25 février
                                                                                                         Jour du Seigneur
            Ma femme debout entre 3 et 4 heures du matin pour s'habiller, et moi autour de 5 heures, et nous étions tous prêts à monter à voiture, avec Mrs Mercer, peu après. Mais nous fûmes contrariés, le carrosse n'arrivant pas avant 6 heures. Puis avec notre carrosse à quatre chevaux que je louai pour la circonstance, et avec Lashmore qui chevauchait à nos côtés, traversons la Cité, le temps étant clair. Gagnons Brentford puis Windsor, le capitaine Ferrer nous rejoignant à Kensington, et là nous bûmes, et ensuite sans arrêt jusqu'à Cranborne où nous arrivons vers 11 heures. Nous trouvons milord et ces dames écoutant un sermon dans la maison. Le sermon terminé, allâmes jusqu'à eux, et toute la compagnie se réjouit de nous voir, et avec force gaieté passons à table pour le dîner. Il y avait lord Hinchingbrooke et Mr Sidney...... milady Jemima et lady Slaning. Après le dîner conversation où l'on soutient le pour et le contre, promenade dans le parc, milord seul avec moi.  Nous devisons des sujets :
            En 1er il laisse son affaire de prises de guerre dans un état qui lui est aussi favorable que possible, s'étant disculpé devant la commission sur l'ordre du roi..... Il part, me dit-il, entièrement assuré de la faveur du roi. Je désirai connaître auquel de ses amis je pouvais faire confiance. Il me dit que bien qu'il ne soit point encore en Angleterre mais reste cet été en Irlande, milord Orrery est presque un père pour lui. Il me dit que milord de Suffolk, lord Arlington, l'archevêque de Cantorbéry..... et quelques autres dont je ne me souviens présentement, sont des amis sur lesquels je puis compter en son nom.
            Il me dit que milord le chancelier paraît être un excellent ami, mais qu'il se demande s'il se montre aussi dévoué au duc d'York qu'il le souhaiterait. Et milord me dit en effet qu'il s'emploie depuis peu à cultiver la faveur du roi, et non du Duc, et que du roi dépend son maintien ou sa disgrâce, car il y a bel et bien des factions, me dit-il, et Dieu sait l'importance qu'elles peuvent prendre.
            La position du duc d'Albemarle est si haute, lui à qui revient l'honneur du retour du roi, qu'il a des chances de rester en place...... 
            La fin de cette année inspire les plus vives inquiétudes à milord Sandwich, et il a peur que ne se produisent quelques grands bouleversements avant son retour..
            Il craint qu'il ne soit nécessaire d'obtenir des lettres de pardon pour les actes qu'il a commis l'an passé, tous été de son propre chef, avec tout au plus l'autorisation secrète du roi dans l'affaire de Bergen....... si le pardon était refusé les conséquences seraient fort funestes.
            Il dit aussi qu'au cas où la vente de Dunkerque ferait l'objet d'une enquête au Parlement, bien que ce fût le chancelier qui voulût vendre cette ville à la France, disant que le roi d'Espagne n'avait point d'argent à donner à cet effet, on en découvrirait pas moins qu'il en était, lui, le plus chaud partisan et il a quelque crainte que l'on invite le Parlement actuel à agir en ce sens......................
            Quant à la proposition de mariage entre Mrs Malet et milord Hinchingbrooke, il me dit que l'on en parlait plus ces derniers temps, mais que les amis de Mrs Malet reviennent à la charge. Des ouvertures lui ont été faites par l'intermédiaire de l'un de ses serviteurs, afin d'aboutir sans le consentement de sa famille, elle-même étant liée à la famille de milord. Mais milord ne veut pas en entendre parler, si la chose ne se fait point selon les règles de l'honneur. 
            Cela fait une ou deux semaines que le Duc lui témoigne une grande aménité.... et d'autres agissent de même. Il pense que l'horizon s'éclaircit derechef.
            Il dit que l'archevêque de Cantorbéry lui montre grande bienveillance et lui a déclaré, tout net, qu'il savait, comme tout un chacun, faire la différence entre son jugement et son intelligence et ceux du duc d'Albemarle, disant ensuit que milady la duchesse était le type même de la souillon et de la femme de charge, et d'user à son propos d'un mot qui est presque le plus grossier qu'on puisse employer à propos d'une femme.
            Après que milord se fut promené une heure avec moi, s'exprimant ainsi, lui rentré, comme milady Carteret ne souffrait point que je repartisse ce soir, milord de se promener derechef avec moi et de m'entretenir de telle ou telle chose. Puis dans la maison, lui en privé avec milady Carteret, et moi avec les jeunes filles et les jeunes gens qui jouent de la guitare. Force gaieté et bientôt souper. Milord se retirant pour écrire, les jeunes gens se mettent à lancer des coussins et s'adonnent à d'autres jeux débridés. Et cela fort tard, jusqu'aux alentours de minuit, puis ayant sommeil, ma femme et moi allons au lit, dans un vestibule. Dormîmes médiocrement à cause du bruit.


                                                                                                                           26 février

            Réveillés autour de 5 heures, milord était levé et parti en carrosse peu après 6 heures, très amène en prenant congé de moi et de tout le monde. Puis rentré, ma femme levée. Visite à milady Carteret, causons. Heureux de la satisfaire en lui disant à propos de sir George Carteret que tout ira bien. Elle en est fort satisfaite, après ces grands bruits et alarmes à propos de sa fortune, elle a craint, j'en ai peur que je ne fusse de ses amis, mais elle vitupère milady Castlemaine pour qui le roi néglige de faire son métier et paraît craindre fort que tout n'aille à la ruine, non sans grande raison, j'en ai peur. Et de se récrier contre le duc d'Albemarle et plus encore contre la duchesse qu'elle traite de femme répugnante, ce qui est bien le cas.
            Resté jusqu'à presque 9 heures, puis monté en carrosse avec tant d'affection et de gentillesse de la part de milady Carteret, de lady Jemima et de lady Slaning, que cela me réjouit le cœur tout le monde pouvant voir que nous étions là, tandis que nous pouvions donner à chacun pour sa peine, puis rentrant chez nous, le tout par beau temps..... je pense qu'il faut bien que je me tienne pour heureux...... Alors que nous nous donnons beaucoup de mal à attendre de l'avenir bien-être et aisance, j'ai su apprendre à voir mon bonheur dans l'instant présent ainsi qu'à jouir de cette observation, au lieu de ne me complaire que dans la pensée de la richesse à venir, oubliant ainsi les plaisirs dont nous jouissons à l'instant présent.
            En carrosse donc, à Windsor, à la Jarretière, où nous fîmes quérir le Dr Child. Il nous conduisit à la chapelle St George et nous plaça dans les stalles des chevaliers. C'est chose curieuse que seule une femme et non un homme ait le droit de s'asseoir à un emplacement prévu pour un chevalier s'il est marqué d'une plaque de cuivre. Voici que l'on nous apporte des coussins et un petit chanteur nous apporte un exemplaire du motet. Et là, pour tous, furent exceptionnellement chantés ce motet et le grand office, pour notre seul divertissement....... Tout le monde de se prosterner fort devant l'autel, en particulier les Chevaliers Pauvres.
            Après les prières fûmes voir l'orfèvrerie de la chapelle et les robes des chevaliers. Quelqu'un nous montra les bannières des différents chevaliers en titre suspendues au-dessus des stalles. Puis entendîmes d'autres propos fort intéressants au sujet de cet ordre. On me montra où le feu roi était enterré, ainsi que le roi Henri VIII et milady Seymour ( n(e de l'éd. 3è épouse du roi ) Après à la résidence pour observer la belle ordonnance.... C'est le chateau le plus romantique qui soit au monde. Mais, grands dieux ! quelle vue depuis les appartements de la reine ! La terrasse et la promenade ont de quoi étonner lorsqu'on les considère, ce sont à coup sûr les plus belles du monde.
            Infiniment satisfait, ainsi que ma femme, de tout cela. Elle trouvait toutes choses fort agréables, ce qui ajouta à mon propre plaisir. Puis, donnant force argent à tel ou tel, homme ou femme, gagnâmes notre taverne et dînâmes, avec le docteur, puis ne parvins point à la faire rester avec nous, étant en compagnie.   st-clementdanes.westminster.sch.uk
            A Eton je laissai ma femme dans le carrosse, lui et moi fûmes au collège. Trouvons toutes choses fort belles. L'école est bien ordonnée et la jolie coutume qui veut que les élèves gravent leur nom sur les volets de la fenêtre lorsqu'ils vont à Cambridge, ainsi plus d'un est devenu principal du collège ou fellow. Puis au réfectoire où nous voyons les poèmes composés par le élèves De peste, car ils ont l'habitude d'écrire des poèmes à l'occasion de carême-prenant. J'en lus plusieurs très bons, meilleurs, me semble-t-il, que tous ceux que j'écrivis étant élève, sur des rouleaux de papier qui couvraient toute la longueur du réfectoire, et même beaucoup plus. On a accroché à cet endroit un tableau de Venise donné au collège par sir Henry Wotton, ainsi qu'une inscription.
            Chez le portier, en l'absence du maître d'hôtel, bûmes de la bière du collège, très bonne, et fûmes sur les terrains à l'arrière du collège voir jouer les élèves. Puis à la chapelle où vîmes, entre autres, la stèles funéraire de sir Henry Wotton avec cette épitaphe :

                                         Hic Jacet primus hujus Sententiae Author.
                                            Disputandi pruritus fit ecclesiae scabies.

            Mais malheureusement le mot " Author " ( auctor  )avait été mal orthographié et l'on a fait une correction si vile que la pierre s'en trouve déparée.
            ( nte de l'éd. Ci-gît l'auteur de l'adage : " La démangeaison de la controverse est la plaie des Eglises " Cherchez son nom ailleurs )
            Pris congé du docteur, montai en carrosse et, de belle humeur mais ensommeillé, pris le chemin de la maison où j'arrivai autour de 8 heures du soir et, après avoir passé un moment dans mon bureau, au lit.
            Et une heure plus tard fus réveillé par ma femme qui se querellait avec Mrs Mercer, ce dont je fus colère, et ma femme et moi de nous fâcher, mais, au milieu d'un grand tapage, me rendormis, car je commence à mieux me modérer et à lui céder.


                                                                                                                                                                                                                                                                                             27 février 1666
                                                                                                   
            Levé et, après une ou deux paroles assez rudes, ma femme et moi fîmes la paix, levé donc et au bureau toute la matinée. Rentré tard dîner; ma femme étant allé chez Hayls pour son portrait. La suivis après dîner. J'aime extrêmement son portrait et pense qu'il sera aussi réussi que celui de milady Petre. Rentrai fort satisfait. Travaillai tard, puis retour, rédigeai mon journal pour les trois derniers jours et, au lit. Transporté de joie à l'idée du plaisir qui fut le mien dimanche et hier, et aussi de voir que je puis supporter le poids de ces plaisirs, au reste non dénués de profits, puisque j'oblige milord et que je me réconcilie avec la famille de sir George Carteret.


                                                                                                                            28 février
                                                                                                    Mercredi des Cendres
            Levé et, après avoir un peu travaillé à mon bureau, j'allai à Whitehall à pied, le temps étant très curieusement froid et sec ce matin, puis je fus au parc et, rencontrant sir Philip Warwick, fis un tour avec lui sur le mail de St James. Parlâmes de cette triste conjoncture où chacun montre les dents à son voisin et où la situation dans son ensemble paraît alarmante. Sans parler de cette nouvelle loi qui nous ôte la possibilité de nous procurer de l'argent, si bien qu'il partage mes craintes mais se garde de s'étendre sur ce thème de la confusion générale et des menaces qui pèsent sur l'Etat et sur toutes choses. Nous convînmes d'un autre rendez-vous pour parler des affaires de la marine, seuls, sérieusement. 
            Je fus à Whitehall, traitâmes nos affaires avec le duc d'York puis je m'en fus et allai à pied jusqu'à la Grand-Salle où causai longtemps avec Mr Mitchell et Mrs Howlett et sa fille devenue fort jolie femme. Au sortir de la Grand-Salle fus hélé par Mrs Martin. Je fus donc vers elle, achetai deux tours de cou puis m'en fus et la rencontrai bientôt à son logement et là fis ce que j'avais en tête. Puis retour à la maison où je trouve Mrs Knepp. Dînâmes ensemble, son commerce est le plus agréable qui soit au monde. Après le dîner je donnai de l'argent à ma femme, 20 shillings, à dépenser pour Mrs Knepp, puis je sortis pour aller à Whitehall pour rendre visite au colonel Norwood puis à sir George Carteret avec qui je suis de nouveau en bonne intelligence, et lui de me témoigner grande franchise. Est très triste, ses affaires, j'en ai peur, vont mal. Mais il semble surtout craindre une catastrophe générale arrivant à l'ensemble du royaume. Il pense, j'en ai peur, que la ruine soit totale. Puis à la cour du Palais, à la taverne du Cygne où demeurai jusqu'à la tombée de la nuit, puis chez Mrs Lane. Lui prêtai 5 £ contre 4 £ et 1 shilling d'or qu'elle me donna en gage, puis fis avec elle ce que j'avais en tête. Et il m'apparaît qu'elle en est venue à se comporter très mal et qu'elle promet n'importe quoi. Il est donc dangereux de la fréquenter, et j'ai l'intention de ne la plus voir un moment. Puis, au lit, de bonne heure, à 10 heures. Il y a bien longtemps que je ne m'étais couché aussi tôt.
            Et ainsi ce mois se termine-t-il. Je suis bien résolu à me mieux consacrer à mon travail, à partir de maintenant, que je ne l'ai fait ces six ou huit derniers jours, pour mon préjudice manifeste, qu'il s'agisse de ma tranquillité d'esprit ou du retard pris dans mon travail, dont je ne puis rendre compte aussi favorablement que je le devrais.


                                                                  à suivre...........

                                                                                                                   1 er mars 1666

            Levé puis allé...........