Italici Brass
22 nov. 1915
Mon amour, j'ai reçu aujourd'hui tes lettres du 13 et du 14. C'est un lieu-dit, il n'est pas sur les cartes mais c'est un trou fameux on en a beaucoup parlé dans les communiqués des 25, 26 et 27 septembre. On y a pris tout un état-major, c'est sur la gauche d'où on était . Mon amour, j'aime nos caresses à nos oreilles et j'adore tes pieds qui se crispent et que je caresse très longuement des doigts, de la bouche des dents de la langue de ma virilité. Oui je crois que chaque partie de ton corps a une âme. Mais non, amour, tu ne seras pas confuse de ta volupté tu en seras fière et tu donneras hardiment les coups de reins qu'il faut, n'est-ce pas mon amour. Je connais tous les renseignements pour la perm. Mais dis-moi puisque les permissionnaires doivent reprendre le même bateau, y a-t-l un laps de 6 jours entre leur arrivée et leur départ, déduction faite du jour d'arrivée qui ne compte pas. En quelle classe voyagent les permissionnaires ( sous-off ? ). Mon amour, ta photo en mauresque avec Jean, m'a bien amusé. Tu étais enfant une vraie petite moricaude adorable. Je comprends qu'on ait fêté ta fête et que vous vous soyez bien amusés. Oui, tu avais deviné tes jambes autour de mes reins, amour et je te sens tout contre moi. Ton coucher est le plus voluptueux et le plus chaste tableau qui soit, je l'adore. Tu m'en fais un récit exquis. Tu dois être bien jolie aussi en chemise et je te prends sauvagement dans ton vêtement de nuit que je retrousse. L'eau de Cologne sur ton parvis te fait le même effet qu'à moi sur ma virilité et sous les (... ? ) surtout. Ça sent très très fort. Il faut avant de te laver à l'eau froide mon amour faire quelques mouvement pr faire circuler le sang et après te frapper de ta main ouverte pr amener le sang à fleur de peau.
Amour, parle-moi un peu de toi et de tout ton joli corps.
Nous sommes très bombardés en ce moment mais nous sommes bien abrités dans nos abris boches, cependant les pièces ne sont pas abritées. Toute la journée les obus sifflent éclatent, les éclats roulent partout.
Mon amour, je te prends passionnément sois un peu panthère après avoir reçu cette lettre. C'est quand tu es panthère que je peux inventer pour notre amour et je t'adore follement suprêmement.
Exercice
Vers un village de l'arrière
S'en allaient quatre bombardiers
Ils étaient couverts de poussière
Depuis la tête jusqu'aux pieds
Ils regardaient la vaste plaine fautrier
En parlant entre eux du passé
Et ne se retournaient qu'à peine
Quand un obus avait toussé
Tous quatre de la classe seize
Parlaient d'antan non d'avenir
Ainsi se prolongeait l'ascèse
Qui les exerçait à mourir
Je prends ta bouche éperdument et ta langue chérie.
Gui
24 nov. 1915
Mon amour adoré, j'ai été deux jours sans t'écrire. Sollicité d'être officier je n'ai pu refuser. J'aurais pu le faire, mais étant donné que je suis engagé volontaire, je ne pouvais pas sans avoir l'air de mettre une restriction à mon engagement, restriction qui n'est pas en moi. D'autre part, j'en avais assez d'être sous-off et surtout ce qui prime tout, c'est que ma victoire à moi c'est toi et qu'un amour comme le nôtre exige un très grand sacrifice. Tu es la plus belle du monde, tu es mon tout et je t'adore, mon Madelon. Cet amour s'accroît sans cesse, je ne sais comment c'est possible mais c'est comme ça. Chaque jour nous unit plus. Me voilà donc officier d'infanterie, ça s'est fait avec une rapidité incroyable. µpersonne n'y croyait. Je venais de découvrir au trou où j'étais un nouveau cimetière dont je te parlerai quand on m'a apporté du grand quartier général mon brevet de sous-lieutenant, aussitôt on m'a compté les 400 francs d'indemnité de mise en campagne et je suis parti à la recherche de mon régiment. J'ai mis deux jours à le trouver. Le colonel m'a reçu d'une façon charmante et m'a donné une permission pr Châlons où je vais aller tout à l'heure m'équiper. Je tâcherai de te télégraphier de là-bas ma nouvelle adresse. Le commandant m'a inviter à dîner hier soir homme charmant. Et j'ai passé la soirée avec le lt comdt la 6è Cie qui est mon chef direct et le sous-lieutnt mon collègue. Nous vivrons en popote à 3. Mes collègues sont charmants surtout le lieutenant, un Parisien propre neveu de notre général. La 6è Cie s'est particulièrement distinguée aux attaques de septembre où elle est entrée la 1è à Tahure et a fait beaucoup de prisonniers. La vie des officiers d'infanterie autant que j'ai pu en juger par cette 1è nuit, est extrêmement précaire. Les officiers couchent par terre. Il est vrai que nos ordonnances nous couvrent. Mais un sous-off d'Arti vit beaucoup plus confortablement à la guerre qu'un officier supérieur de fantassins. L'esprit est très différent et je goûte beaucoup cet esprit des officiers d'infanterie beaucoup plus crâne.
Je continue ma lettre de Châlons même où je suis allé m'équiper. Je repars ce soir. Je suis arrivé en auto, je repars en chemin de fer. - Je crois que du fait de mon passage dans l'infanterie ma permission se trouve avancée. Je répondrai demain à tes lettres adorées, je t'adore.
Ton Gui
mon adresse est :
Sous-lieutenant au 96è d'Infanterie
6è compagnie
Secteur 139.
J'ai fait la bague pour ta maman. C'est mon dernier travail dans l'arti - l'enverrai après-demain.
Gui
Deux lettres des 26 et 28 nov . Dans la 1è il informe Madeleine : " ... journée de tailleur, rangeage d'achats dans ma cantine, nous allons en 1è ligne le 28... " et de la bonne réception des colis et lui parle d'amour : " Tes progrès en nous sont exquis, amour... Ma chérie, je suis fier de ta pudeur à l'égard de tout ce qui n'est pas nous... " La lettre du 28 poursuit la description amoureuse de leurs éventuels ébats : " Tu es mon amour, une cassolette unique ... D'ailleurs mon amour, réellement, c'est l'infanterie qui est l'arme méritante... Je monte demain soir en première ligne pour neuf jours. Que ton amour me protège. Je t'ai dit que c'est ma compagnie qui a enlevé seule la Butte de Tahure... "
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29 nov 1915
Mon amour, je n'ai pas pu t'écrire hier on avait trop à faire. A 2h revue par le chef de bataillon avec discours. Pour la 1è fois j'ai pris le commnt de ma section. Le soir à 6h 1/4 on est parti le sol était gelé, les soldats glissaient et tombaient comme des mouches, moi je ne sais pas comment je ne me suis pas cassé une jambe ou foulé un pied. Je n'avais que mes chaussures de cavalier sans clous et si je suis arrivé c'est miracle. C'était fantastique dans la nuit. On a repassé au " trou " où j'étais puis en avant en avant la pâle plaine décharnée, aux veines blanches que sont les boyaux , on a pris le boyau un après l'un de temps en temps le boyau cessait et on reprenait à découvert en pressant le pas. Les balles sifflaient, puis les boyaux en zigzags infinis qui mènent en première ligne. Puis en 1è ligne, on y est maintenant pr 9 jours. Les chefs de section comme moi, y sont. En cas d'attaque on a comme seule consigne de mourir plutôt que de se replier. On est bombardé par le terrible 105. Je suis dans ma cagnat. J'ai fait allumer un brasero. C'est le seul que l'on puisse alimenter, peu de charbon. J'ai 6 heures de garde dans le boyau par 24 h. Ma cagnat est solide. J'y laisse se chauffer les hommes de section à tour de rôle quand ils ne sont pas guetteurs aux créneaux. Comme ce sont de nouvelles lignes elles ne sont pas organisées. Pas de fils de fer barbelés. Je vais les faire placer la nuit et agrandir les boyaux et creuser des cagnats pr les hommes qui n'en ont pas. Maintenant c'est la guerre, pour de bon, j'écris accroupi, sur mon genou ; cette vie va durer 9 jours. Du fond de ma cagnat, je vois le guetteur au créneau en face de moi. Il y a un joli poste d'écoute. Enfin, enfin, enfin toute la vie de tranchée. J'ai pris le quart cette nuit de 2 à 4, je le reprends de midi à 2h. J'ai reçu ta lettre du 20. Remercie ta maman de sa très grande gentillesse. Ton programme est excellent. C'est le mien de tout mon coeur mon amour. J'ai bu amour, avec une passion folle tout le fleuve de ta source secrète que tu me donnes et je prends ta bouche jusqu'à ce que tu demandes grâce ! J'ai reçu aussi ta lettre du 21. J'espère que ma permission arrivera bientôt... J'adore sucer le lait de mon amour, ô mon amour tu es divine. J'adore les effleurements de tes mains. J'adore tes coudes et tes bras. J'adore tes odeurs secrètes. J'adore ta science sur l'art des fruits. J'attends dans l'affreuse et désolée tranchée la lettre volupté.
J'ai oublié de te dire mon amour qu'à Châlons, j'ai mangé avec le lieutt comt la Batterie de 155 court dont il est question dans la fameuse chanson du Pont de Minaucourt que j'ai publiée dans le Mercure. C'est le lieutt Daurver actuellement cnt la 10è Bie du 116è Rgt. Art. lourde. Alors elle était 5è Bie du 6è Rgt. Art. à pied et on l'appelait batterie D. de l'initiale du nom du Commandant. L'auteur de la chanson est en partie le cuisinier de ce lieutt d'artil. ( très gourmand et connaisseur en vin ) ce cuisinier qui est seul resté avec son lieutt du personnel de la Bie de 155 court au moment de la chanson. Ce cuistot s'appelle Loiseau on a oublié de mentionner son nom. Détails anecdotiques sur la guerre ! Je prends ta bouche.
Gui