jeudi 11 janvier 2018

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 84 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

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                                                                                                            16 Décembre 1662

            Levé et au bureau arrivent Mr Coventry et sir George Carteret. Entre autres affaires celle de Strutt le commissaire de Marine contre le commandant Browne, beau-frère de sir William Batten. Mais grand Dieu.... quel personnage difficile que ce Strutt, jamais je n'en ai vu de pareil. Il a tant parlé, et nous aussi pour le calmer, que j'en ai eu grand mal de tête tout l'après-midi.
            Puis à dîner avec le capitaine Murford qui m'apprend ce qu'on pense de moi et que tout le monde croit que Mr Coventry, Pett et moi sommes ligués, et que dorénavant rien ne nous résiste. Et bien d'autres choses, en particulier sur moi et mon application au travail, etc, ce qui me fait grand plaisir.
            Après dîner visite de Mrs Browne à ma femme et moi, et je lui fis bon visage, et en vérité son mari a été courtois envers nous. Mais malgré mes bonnes paroles je crains de ne pouvoir faire grand chose pour son mari dans l'affaire de Strutt, car il n'y a pas de doute, il a usé abusivement de lui.
,            Rentrai en voiture à la maison, et à mon bureau. Fis quelque travail et à la maison, souper et, au lit.


                                                                                                               17 Décembre

            Ce soir sont arrivés Mr Leigh, Wade et Evett, avec l'intention de reprendre notre projet de la Tour aujourd'hui, mais comme il pleuvait et que le travail se fait en plein air, dans le jardin, nous le remîmes à vendredi prochain. Allai donc travailler au bureau, puis dînai à la maison avec ma pauvre femme avec grand plaisir, puis retour au bureau où je terminai l'examen du second des livres de Mr Hollond sur la Marine, qui me satisfait fort. Puis traitai d'autres affaires jusqu'au soir et rentrai souper. Et après avoir beaucoup joui de la compagnie de ma femme et de sa conversation, au lit.


                                                                                                               18 Décembre

            Levé et au bureau seul avec Mr Coventry. Réunion jusqu'à 2 heures, il s'invita alors chez moi à dîner, ce dont je fus fier. Mais mon dîner était un gigot de mouton et deux chapons et ils n'étaient pas assez cuits. Cela me contraria, mais nous réussîmes à le satisfaire, je crois. Mais quand il fut parti je fus très fâché contre ma femme et mes gens.                                                           bulleaemporter.fr
Image associée            Cet après-midi arrivèrent le frère de ma femme et sa femme et Mrs Lodum sa propriétaire, soeur de mon vieil ami Mr Ashwell. La femme de Balty est très petite, mais elle n'est plus jeune, elle n'est pas belle et n'a rien du tout d'agréable, mais on dit qu'elle joue extrêmement bien de la basse de viole. Ils ont dîné chez son père aujourd'hui mais, pour autant que je sache, c'est un sage qui ne donnera rien à sa fille tant qu'il ne saura pas ce que son mari se décide à faire, de sorte que je crains qu'il n'ait pas fait une bonne affaire. Mais je suis décidé à ne point m'en mêler.
            Après leur départ, allai au bureau et voir sir William Penn avec ma femme, puis voir Mr Cade le libraire pour lui donner des instructions sur mes deux exemplaires des livres de Mr Hollond qu'il doit relier, et après avoir acheté plusieurs choses je revins à mon bureau puis rentrai souper et, au lit.


                                                                                                              19 Décembre 1662

            Levé et comme prévu allai à la Tour avec Mr Leigh, Wade, Evett et des ouvriers. Avec la  permission du lieutenant je les mis au travail au jardin dans le coin qui est contre la garde principale, endroit bien inattendu. Comme il faisait froid restai avec Mr Leigh jusqu'à 3 heures au coin du feu dans le logis du gouverneur. Je lus une pièce de Fletcher " Une épouse pour un mois ", il n'y a là-dedans ni beaucoup d'esprit, ni beau langage. Puis nous allâmes retrouver les travailleurs et, comme ils étaient descendus au-dessous des fondations du mur, je leur ordonnai de renoncer. Et ce fut la fin de toutes nos espérances. Puis je rentrai emmenant Mr Leigh, après avoir bu un gobelet de vin, il partit et j'allai à mon bureau où je lus dans le livre de William Petty, et à la maison, et au lit, un peu mécontent de ma femme qui, la pauvre, souffre de sa vie solitaire, ce à quoi je ne sais pas encore, à moins d'une grande dépense, comment remédier, mais j'y réfléchirai.


                                                                                                              20 Décembre

            Levé, et  Prior de Brampton m'apporta 100 livres qui complètent le prix d'achat de la maison de Barton et quelque terre. Puis au bureau et avec Mr Coventry, dans son carrosse à St James, plein de satisfaction et de fierté de le voir me traiter avec tant d'amitié, et dînai avec lui. Puis ensemble à Whitehall où nous nous rendîmes en vertu de la commission de Tanger et discutâmes de nombreuses questions. Mais on ne fera pas grand chose avant que milord Ruthford y arrive pour ce qui est de la fortification ou de la jetée.
            Cela fait, avec milord Sandwich promenade un grand moment dans la grande galerie. Il me raconta ses récentes investigations dans l'affaire de la Garde-Robe qui lui donnent satisfaction, et il m'expose la situation, que la première année lui rapporta environ 3 000 livres et les suivantes à peu près autant. De sorte qu'aujourd'hui, s'il était payé cela lui vaudrait 7 000  livres. Mais ce qui me fait le plus grand plaisir, c'est de le voir me prendre pour confident. Je luis dis adieu, car il part lundi prochain fêter noël à la campagne.
            Rentrai en voiture, et à mon bureau car c'est soir de courrier, puis rentrai et, au lit.


                                                                                                               21 Décembre
 google.fr                                                                                            Jour du Seigneur
londres hyde park,hyde park, hyde park london            Fis la grasse matinée, puis allai à l'église et rentrai dîner seul avec ma femme, fort agréablement. Allai ensuite chez mon frère. Il me dit qu'il conserve encore quelque espoir de mener à bien son affaire avec sa maîtresse, mais je vois qu'ils s'en tiennent à des conditions auxquelles il ne lui sera ni convenable ni possible de consentir. Ses propos me déplurent donc et je lui conseillai d'y renoncer.
            Me rendis ensuite à pied à Whitehall et à la Chapelle. Je montai et parcourus le palais et les galeries dans l'aile du bâtiment où se trouvaient les appartements du roi et de la reine, puis traversant le jardin, au logis de milord. Se trouvaient là plusieurs personnes et milord Sandwich, de sorte que nous eûmes fort bonne musique. Au bout d'un moment arrive ce benêt de milord Chandos. Il se mit à chanter des psaumes de façon si ennuyeuse que j'en étais excédé. Milord Sandwich est allé se coucher après avoir discuté avec moi de ses affaires, je partageai alors avec Mr Creed et le capitaine Ferrer un pâté d'oie froid, confectionné par Mrs Sarah et, minuit passé avec Mr Creed à son logis, et avec lui, au lit et dormi jusqu'à 6 ou 7 heures. Levés, au coin du feu lûmes une bonne partie de
" Conseils à une fille " qu'un sot de freluquet a écrit en réponse à Osborne. Une absurdité imprimée. Puis chez milord qui se prépare à partir pour Hinchingbrooke. Après avoir mangé et causé, de m'avoir dit sa pensée, comme je m'informais de Sarah, mariée semble-t-il depuis peu et devenue grande ivrognesse, ce qui me fait honte, il me dit qu'il est satisfait de la façon dont elle le sert et qu'il n'aime pas de visages nouveaux, mais que son vice il ne saurait le tolérer. Il me demande de lui parler et de la conseiller si elle désire rester avec lui. Ce que je ferai.
            Milord parti, Mr Coventry au parc avec le Duc, mon petit laquais étant là avec mes affaires toutes prêtes, je mis mon habit de cheval et le suivis en traversant Whitehall, et dans le parc les gens de Mr Coventry avaient mis à ma disposition un si beau cheval que j'avais presque honte de le monter, plus de peur que de mal. Je suivis le Duc et ses gens et fis une promenade. Puis le Duc nous dit d'aller à Woolwich. Avec Mr Coventry passâmes à l'aviron à Lambeth nos chevaux arrivant par le bac. Arrivés nous mangeâmes et bûmes chez Mr Pett et conversâmes bien des affaires et décidâmes de mettre en pratique ma conception des registres de rôles qui rendent de grands services. De retour vinrent la nuit et le mauvais temps, je retrouvai mon petit laquais, oublié et qui m'a cherché tout l'après-midi, rentrai en voiture les pieds tout mouillés et glacés. Je me changeai et après la visite du barbier ma femme et moi lûmes Les Métamorphoses d'Ovide que je lui ai apportées ce soir de l'enclos de Saint-Paul, et au lit. et dormis ferme jusqu'à 8 heures ce matin. Levé et au bureau où je trouvai sir John Mennes et sir William Batten arrivés inopinément hier soir de Portsmouth, ayant terminé la paie. Réunion toute la matinée, à midi dînai seul avec ma femme, puis après au coin du feu je fis mes comptes avec elle et je trouve que mes dépenses ordinaires du ménage sont de 7 livres par mois, ce qui est beaucoup. Puis arrive le Dr Pearse qui me dit que l'influence de Mrs Castlemaine à la Cour s'accroît et est plus importante que celle de la reine, qu'elle a introduit sir Henry Bennet et sir Charles Berkeley, mais que la reine est une excellente personne et prend les choses avec toute la douceur possible. Il me dit aussi que Mr Edward Montagu est tout à fait perdu à la Cour, de réputation et d'argent, qu'il eut récemment une querelle avec milord Chesterfield, calmé par le roi qui est d'ailleurs fort malheureux de la maladie du chancelier toujours aussi puissant auprès du roi.
            Il me dit aussi que tout le monde dit que Mr Coventry et moi faisons presque tout le travail du bureau, ce dont je suis bien fier.
            Lui parti je me mis au travail, il y en avait beaucoup mais je l'avais terminé avant 9 heures du soir et je rentra. Après souper, au lit.


                                                                                                                24 Décembre

            Restai au lit à causer agréablement avec ma femme jusqu'à 8 heures. Levé et allai chez sir William Batten, sir George Carteret et sir John Mennes partis en voiture faire la paie à Chatham. Je rentrai et mis de l'argent dans ma poche pour payer aujourd'hui de nombreuses factures, en ville, celle de mon libraire, et dans une autre boutique 4 livres et 10 shillings pour le Thesaurus Graecae Linguae d'Estienne, que j'ai donné au Collège Saint-Paul. Puis chez mon frère et mon bottier, puis dîner chez milord Crew, causâmes seuls de bien des sujets. Je comprends qu'il y a de grandes factions à la Cour. , il a eu une parole qui impliquait un désaccord probable dans l'avenir entre le roi et le Duc au cas où la reine ne serait pas engrossée, je veux parler de ce bâtard, il dit aussi qu'un certain grand personnage sera pris à partie quand le Parlement viendra à siéger de nouveau, je suppose que c'est le chancelier. Et qu'un projet de loi va être déposé rendant inapte à toute charge quiconque aura porté les armes pour le Parlement, que la Cour est lasse de milord Albemarle et du chambellan. Il voudrait que milord Sandwich ait quelque bonne occasion d'être hors du pays l'été qui vient., et que milord Hinchingbrooke fasse un bon mariage et que Sidney ait une place à la Cour. Il a compassion des pasteurs chassés, que c'est à eux que le roi doit son retour, il parla aussi de l'instruction des jeunes gens de bonne famille comme marins, et je m'en fus.
            Rencontrai Mr Creed chez mon libraire. Il prend ma lettre d'hier soir à Mr Povey où je l'accuse d'incurie à propos des navires pour Tanger. J'avoue ne pas avoir agi tout à fait en ami. Mais c'était la vérité, quand même je me brouillerai avec lui.
            Au bureau où je travaillai seul......... Rentrai, souper et au lit. Ma femme n'est pas bien ayant ses menstrues.
            Dans la soirée reçus de Mr Gauden, pour Noël, une grande échine de boeuf et trois douzaines de langues. Donné 5 shillings à celui qui me l'apporta et une demi-couronne aux porteurs. Aujourd'hui le clerc de paroisse a apporté la table générale de mortalité qui m'a encore coûté une demi-couronne.


                                                                                                                25 Décembre 1662
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Résultat de recherche d'images pour "londres hiver froid"            Levé de bonne heure, laissé ma femme indisposée au lit. Je sortis avec mon petit laquais car il faisait un très beau temps, gel et froid, et je fis une très agréable promenade jusqu'à Whitehall. J'avais l'intention d'y communier avec la famille, mais j'arrivai un peu trop tard. J'entrai donc dans le palais et passai mon temps à regarder des tableaux, en particulier les navires qui amenèrent le roi Henry VIII à Boulogne, et remarquai la grande différence entre la construction de leur époque et celle d'aujourd'hui. Puis je redescendis à la Chapelle où l'évêque Morley prêchait sur le cantique des anges   ( Gloire à Dieu au plus haut des cieux...... ) Le sermon m'a semblé misérable, réprouvant les réjouissances de la Cour, confondues avec la vraie joie qui est et doit être en ces jours. Il a détaillé leur passion excessive du théâtre et du jeu, disant que celui dont la charge est de maintenir la discipline et des limites décentes parmi les joueurs préfère servir de second dans les duels, voulant parler du maître des jeux. On était loin de prendre au sérieux les réprobations d'un évêque, tout le monde riait dans la chapelle, ce qui était remarquable.
            Il nous exhorta fortement à la joie en ces jours de joie publique et à l'hospitalité. Mais quelqu'un à côté de moi me chuchota que l'évêque pour sa part ne dépense pas un sou pour les pauvres.
            Un beau motet suivit le sermon, accompagné de violes, puis le roi s'approcha pour recevoir le sacrement, mais je ne restai pas. Pris mon petit laquais à la maison de milord, donnai de bons conseils à Sarah, selon l'ordre de milord de ne pas s'enivrer et de s'occuper de la maison, et rentrai encore à pied, avec grand plaisir. Je dînai au chevet de ma femme avec beaucoup de satisfaction, d'un plat d'excellente bouillie aux raisins et d'un poulet rôti. J'envoyai au-dehors chercher un pâté, ma femme n'étant pas encore assez bien pour en faire elle-même. Je restai un bon moment à causer avec elle moins souffrante, puis j'allai chez William Penn et à mon bureau à faire seul des exercices d'arithmétique et terminer le livre d'hier soir, avec grande satisfaction, jusqu'à onze heures du soir.
Et rentrai, et soupai, et au lit.


                                                                                                   26 Décembre

            Levé. Ma femme occupée toute la journée à faire des pâtés de Noël. Moi je sortis pour de petites affaires, achetai, entre autres, un plat à four au marché de Newgate et le fis porter à la maison. Il me coûta 16 shillings. Puis chez le docteur William, absent. Puis Mr Moore à la Garde-Robe, encore souffrant. Arriva Mr Battersby et, comme nous causions d'un nouveau livre de bouffonnerie en vers, Hudibras, je voulus à toute force aller le chercher. Et je le trouvai au Temple. Il me coûta 2 shillings 6 pence. Mais quand je me mis à le lire, c'est une si sotte invective contre le chevalier presbytérien, que cela me fit honte et, un peu plus tard, rencontrant Mr Townshend au dîner, je le lui vendis pour 18 pence. Nous dînâmes avec de nombreux commerçants qui appartiennent à la Garde-Robe, mais je me fatiguai vite de leur compagnie, et partis, avec réticence, et allai au logis du Duc voir Le Maraud, ce que je ne devrais pas faire sans ma femme, si ce n'est que la période pour laquelle j'avais pris mes résolutions est maintenant terminée. Mais, grand Dieu ! de voir comme mon inclination naturelle est au plaisir. Dieu soit loué de m'avoir accordé, par mes serments, de la refréner aussi bien, et je les renouvellerai, après encore deux ou trois pièces de théâtre. Cette fois la pièce me plut davantage, je la compris mieux. J'aperçus Gosnell et sa soeur. J'aurais bien eu envie de les accoster mais cela ne me parut pas prudent. J'observai leur départ et vis qu'elles étaient venues avec une autre femme, et qu'elles allaient à pied à travers champs. J'éprouve en moi le désir de la voir revenir, bien que ce soit contre mon intérêt, qu'il s'agisse d'argent ou de la paix de l'esprit, sauf pour son chant.      les5duvin.wordpress.com
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            Rentrai à pied en m'arrêtant chez Mr Rawlinson ne prenant qu'une chope de bière. Me dit que mon oncle a terminé son acquisition, 4 500 livres, et qu'il parle de ses difficultés avec la famille de sa femme. Mais je sais que ses véritables intentions sont de favoriser les Wright qui s'attachent à lui et lui ont conseillé l'achat de ce domaine. . Rentrai et trouvai ma femme à ses pâtés, mais fâchées de quelques paroles impertinentes de sa servante Jane. Ce que je ne permets pas, je vais donc lui donner son congé. Nous sommes aussi tous deux mécontents de quelques paroles méprisantes que Sarah, maintenant chez sir William Penn, a dites sur nous. Mais cela n'a pas d'importance, nous allons tâcher de joindre la peau du lion à la queue du renard.
            Puis à mon bureau, seul un moment, et rentrai dans mon cabinet d'étude, souper et au lit. contrarié aussi par mon petit laquais qui s'attarde dehors à jouer quand on l'envoie faire une course, de sorte que je l'ai envoyé ce soir voir si le roulier de son pays est à Londres, car je suis décidé à le renvoyer.


                                                                                                               27 Décembre 1662

            Levé et tout en m'habillant je fis appeler le frère de mon petit laquais, William qui demeure ici à Londres où il est garçon d'écurie. Je lui dis, de même qu'à leur soeur Jane, ma décision de ne plus le garder. Tout bien considéré ils demandent qu'il reste encore une semaine. Allai au bureau et travaillai avec Mr Coventry jusqu'à midi. J'allai faire un tour à la Bourse et je rentrai dîner. J'allai ensuite avec ma femme au Théâtre du Duc voir la seconde partie de Rhodes, jouée par la nouvelle Roxalana, plutôt meilleure sous tous les rapports, beauté, diction et intelligence, que la première. Rentrai très content avec ma femme mais moins satisfait de la compagnie qu'il y avait. Des bourgeois, presque aucun gentilhomme ou dame dans la salle, sauf deux jolies dames à côté de nous.bousculées par des apprentis, et qui s'en amusèrent. Retour à la maison et dans mon cabinet d'étude faire mes comptes du mois, et mon avoir est maintenant retombé à 630 livres ou à peu près, alors qu'il était de 680 livres il y a peu de temps, ce que je regrette, mais j'espère bien que Dieu me les fera recouvrer, et en attendant je veux vivre frugalement. Rentrai souper et au lit.


                                                                                                          28 Décembre
                                                                                             Jour du Seigneur
            Levé et à l'église avec ma femme. En sortant passâmes devant milady Batten, lui n'y était pas
( je crois que cela la vexera ). Après le dîner ma femme retourna à l'église et moi à l'église française où j'entendis un vieillard faire un sermon long et ennuyeux, si long qu'on fût obligé d'allumer des candélabres afin d'y voir pour baptiser des enfants. Au retour rencontrai mon frère Tom, sans guère lui parler, et passai aussi chez mon oncle Wight, mais il sortait. Je rentrai aussitôt et me mis à renouveler mes serments de l'an dernier. Il a plu à Dieu de me faire faire de tels progrès dans ma disposition d'esprit et dans ma conduite, puis descendis souper, puis la prière et au lit.


                                                                                                            29 Décembre

Résultat de recherche d'images pour "londres hiver froid"            Levé et à pied à Whitehall. Le Duc et Mr Coventry sortis j'allai à la Grand-Salle où je restai à lire dans la boutique de Mrs Mitchell et envoyai chercher une demi-pinte de xérès pour elle. Elle me raconta, ce que je ne savais pas, l'étrange façon dont ont brûlé la maison de Mr Delaune négociant dans Lothbury et sa femme, fille de sir Thomas Allen, et toute sa famille. Rien, pas un chien, pas un chat n'en a réchappé, et presque aucun des voisins n'a rien entendu avant que la maison fût complètement effondrée et consumée. Comment cela a pu se produire, Dieu seul le sait, mais c'est parfaitement étrange. Jack Spicer est venu me voir et je l'emmenai au Cygne où Mr Herbert me donna mon déjeuner d'échine de porc froide, et je m'entretins des affaires de l'Echiquier avec Spicer, et de ce que le lord Trésorier a donné l'ordre que tous les fonds fussent versés à l'Echiquier, a fixé le revenu du roi et a donné à chaque grande catégorie de dépense son affectation propre : à la Marine 200 000 livres et quelques. Il m'a raconté aussi l'immense trafic que font les orfèvres en fournissant de l'argent au roi à un taux élevé.                                                                                       Puis à Whitehall et montai dans la tribune supérieure de la salle des banquets pour voir la réception de l'ambassadeur de Russie. Une longue attente et la crainte que la tribune ne s'effondrât.......... Cela fut fort beau. Après leur entrée traversai la foule presque jusqu'au roi et des ambassadeurs, où je vis tous leurs présent : de riches fourrures, des faucons, tapis, drap d'or et d'argent et dents de chevaux de mer. Le roi prit deux ou trois faucons sur son poing, portant un gant ouvré d'or, donné à cette fin. Le fils d'un des envoyés portait l'habit le plus riche, par ses perles et son drap d'or. Après qu'ils eurent tous baisé la main du roi, les trois ambassadeurs et le fils, seuls, baisèrent la main de la reine. J'ai encore remarqué que le principal ambassadeur portait les lettres de son maître en grande cérémonie, devant lui, en l'air, et dès qu'il les eût remises il se jeta à terre, resta prosterné un grand moment. Puis la compagnie se dispersa, et je me promenai dans la tribune, à voir les dames, les deux reines et le duc de Montmouth avec sa petite maîtresse....... Puis avec Mr Creed à la Harpe et la Balle où se trouvaient Mr Howe, Goodroome et le jeune Coleman. Nous avons bu et causé. Et j'ai presque trouvé une jeune femme, de bonne famille, bien élevée qui me convienne pour servir ma femme, et sachant chanter. Je partis, pris une voiture et rentrai à la maison et restai jusque tard à parler avec ma femme de la proche visite de la femme du Dr Clarke et Mrs Pearse, fort soucieux de ce que ma femme n'a pas une seule robe d'hiver, presque honteux qu'elle doive se montrer en robe de taffetas quand tout le monde porte de la moire. Puis la prière et au lit. Mais nous n'avons pas pu décider que faire là-dessus, sinon qu'elle porte ce qu'elle a.



                                                                                                                    30 Décembre

            Levé, au bureau arrive sir William Penn, remis  et sorti pour la première fois de son attaque de goutte, et avec Mr Coventry réunion jusqu'à midi. Puis j'allai à la Bourse voir quelles pièces se jouent, mais aucune ne me plaisait et rentrai m'arrêtant chez Mr Rawlinson qui me retint à dîner avec deux officiers commandants de navires des Indes Orientales et Howell notre tourneur. Excellente conversation avec les officiers en particulier sur les habitants de Bonne-Espérance. Par expérience personnelle ils me racontent que à l'âge adulte les hommes se coupent les un aux autres un testicule ce qui, pensent-ils les aide à mieux engendrer les enfants et à engraisser, qu'ils ne se couchent jamais pour dormir mais se tiennent toujours assis par terre, que leur langage est moins articulé que le nôtre mais qu'ils se comprennent bien entre eux, qu'ils se peignent tout le corps avec la graisse que leur vendent les Hollandais, qui y possèdent un fort, et de la suie. Après cinq ou six verres de vin ( liberté que je prends avant de recommencer mon serment ) je rentrai et emmenai ma femme en voiture à Westminster. Nous rendîmes visite à Mrs Ferrer, causâmes un bon moment. Il y avait là une dame petite, fière, laide et bavarde qui faisait grand éloge de la Cour que tient la reine mère à Somerset House, la mettant bien au-dessus de celle de notre reine où on ne permet pas le rire et la gaieté. C'est donc là la Cour la plus importante. Puis à Whitehall j'emmenai ma femme voir la reine dans sa salle d'audience et les demoiselles d'honneur et le jeune duc de Monmouth qui jouait aux cartes.
            Peu étaient jolies bien que toutes vêtues de robes de velours. Puis chez milord où Mrs Sarah a fait pour nous le lit de milord. Mr Creed appelé nous jouâmes aux cartes jusque tard, et bonsoir, et au lit avec grand plaisir.


                                                                                                               31 Décembre 1662
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Résultat de recherche d'images pour "londres hiver froid"            Restai assez longtemps au lit, puis levé et à la Grand-Salle puis au Cygne. Envoyai chercher Mr Bowyer et bus ma boisson du matin en écoutant ses simples propos............
            De là chez le barbier, puis retrouvai ma femme et la menai chez Mrs Pearse où nous étions invités à dîner, arrivèrent aussi le Dr Clarke, sa femme et sa soeur et Mr Knight premier chirurgien du roi et sa femme. Ce fut assez gai, ces deux hommes étant d'excellente compagnie. J'avoue m'être libéré de l'opinion que j'avais de la beauté de Mrs Pearse en apercevant aujourd'hui son cou nu, car elle était en négligé quand nous arrivâmes et du génie de Mrs Clarke, la trouvant si recherchée et affectée dans sa toilette et son attitude, mais elle ne manque pas d'esprit.
            Non sans peine, après le dîner, le Dr et moi partîmes travailler un peu, moi à la commission de Tanger où était le duc d'York, puis après un bon moment, partis afin d'organiser le départ des bateaux et des provisions pour Tanger......... Mr Povey et moi à Whitehall où il m'emmena à dessein de m'introduire au bal qui a lieu ce soir en présence du roi....... Je vois que c'est un homme du monde et un homme qui aime vivre avec noblesse et élégance comme cela se reconnaît à ce qu'il dit de sa demeure, de ses tableaux et de ses chevaux.
            Il me conduisit d'abord aux appartements du Duc où je le vis ainsi que la Duchesse, à leur souper, puis me fit entrer dans la salle de bal, bondée de dames élégantes, les plus grandes dames de la Cour. Arrivent le roi et la reine, le Duc et la Duchesse et tous les grands. Quand ils se furent assis le roi donne la main à la duchesse d'York, et le duc à la duchesse de Buckingham, le duc de Monmouth à milady Castemaine et d'autres seigneurs à d'autres dames. Et ils dansèrent le branle. Après cela le roi fit danser une courante à deux à une dame, et puis le reste des seigneurs et d'autres dames. Tout cela fort noble et un grand plaisir pour les yeux. Puis des danses rustiques. Le roi demanda la première c'était, dit-il, " Les Cocus tous en rang ", la vieille danse anglaise........ L'usage, quand le roi danse, est que toutes les dames, y compris la reine, se tiennent debout et en vérité il danse remarquablement....... Après être resté aussi longtemps que je le jugeai convenable, à ma satisfaction infinie....... je sortis, les laissant à leurs danses et me rendis chez Mrs Pearse. Tous étaient partis, après avoir attendu très longtemps mon retour, sauf ma femme. Je la ramenai donc en voiture et retournai chez milord où, après un léger souper, allai au lit, très fatigué et ayant un peu mal à la suite de ma course un peu pénible ( à cause de mes testicules ) de ce soir en voiture.
            Ainsi se termine cette année, fort joyeusement, pour moi et ma femme. Notre situation est la suivante : nous passons actuellement une nuit ou deux chez milord à Whitehall. Notre bureau de la Marine en bon état achevé et fort commode. Ma bourse contient environ 650 livres outre mes biens de différentes sortes, ce qui aurait pu être davantage n'étaient les dépenses pour ma maison et l'impôt public, ce qui aurait pu être moins si je n'avais eu une vie très réglée, en vertu des serments que Dieu m'a incité à faire pour éviter le vin, la comédie et autres dépenses.... et que je vais renouveler, car c'est à eux que je dois, après Dieu, mon contentement....... Depuis le commencement jusqu'à aujourd'hui nous sommes en bonne santé, Dieu soit loué.
            Nous avons eu ces derniers temps la pensée à laquelle j'ai du mal à m'arracher depuis que Mrs Gosnell ne peut être chez nous, d'en trouver une autre qui tienne le rôle de suivante de ma femme, qui sache danser ou chanter. Pourtant avec le mal que j'ai à économiser, je crois que je ne ferai pas cette folie tant que je n'aurai pas la bourse mieux garnie. Sans compter mon serment, tant que je n'aurai pas 1 000 livres.
            Par mon application à mon travail au cours de l'année écoulée, Dieu en soit loué, je suis arrivé à un heureux degré de compétence, c'est quelque chose que tout le monde reconnaît..........
            La seule chose qui me pèse, c'est la fin de l'affaire de mon oncle Thomas..... qui va fort mal pour nous. Et je crains en fin de compte d'être obligé de subvenir moi-même aux besoins de mon père. Mais il faut que je m'en satisfasse et que j'arrive à une solution dans un sens ou dans l'autre.
            Voici l'état des affaires publiques. Le roi, dit-on, commence à réduire les dépenses de sa maison, de la Marine et de toutes les autres charges. En attendant lui-même se livre à ses plaisirs plus que la prudence ne le voudrait, ou le laisser voir à tout le monde, tel son attachement à lady Castlemaine et aux confidents de ses plaisirs....... Dieu veuille lui inspirer de s'amender,......
            Le duc de Monmouth brille d'un tel éclat à la Cour et est tant mignardé par le roi que certains redoutent que, si le roi n'avait pas d'enfant de la reine ( aucun signe dans ce sens ) il pourrait bien être reconnu pour fils légitime. Il s'ensuivrait une querelle entre le duc d'York et lui, ce qu'à Dieu ne plaise !........
            On accuse la reine-mère de tenir une cour trop somptueuse et l'on répand le bruit qu'elle est mariées à milord St Albans et qu'ils ont une fille en France. Ce qu'il y a de vrai, Dieu seul le sait !
            Les évêques sont pleins d'arrogance....... et les presbytériens semblent ne rien dire, ou se conforment, ou démissionnent....... on a récemment découvert un complot pour lequel quatre personnes ont passé en jugement à l'Old Bailey et ont été pendues.
            Milord Sandwich est toujours bien considéré et passe Noël à la campagne......
            Mr Moore est fort malade.......
            En somme pour l'heureuse situation où nous sommes, moi, ma femme, ma famille et ma fortune, à ce haut degré qu'elle atteint, et pour l'état de la nation, dans sa tranquillité, que le Seigneur soit loué  !


                                                                    à suivre................

                                                                                                      1er Janvier 1663

            Couché avec.........
                        
         
     

lundi 8 janvier 2018

Betty la Grisette Jonathan Swift ( Poème Irlande )

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chartsinfrance.net   Poupée de cire Poupée de son youtube


                                           Betty la Grisette

            Reine d'esprit et de beauté, Betty,
            Puisse ma Muse chanter sans trêve
            Ton minois moucheté de léopard
            Qui enchante toute l'Arcadie,
            Et ton cou, envie des filles d'Eve
            Dont tu déploies les tâches rousses,                                                          univers-poupees.com
Résultat de recherche d'images pour "irlandaise rousse"            Tel un suif gâté par les mouches
            Un parchemin à l'encre jaunie
            Ou une pomme criblée de points fauves,
            Toute ridée, à la fin de l'hiver.

            Bien - Ta beauté a eu son compte ?
            Chantons ton esprit sans pareil !

            Phrases en série - " prêt à porter "
            Que ta langue débite à toute heure.
            Et ta mémoire est surchargée
            De débris de vaudevilles hors d'usage ;
            Monceau de répliques et de plaisanteries
            Où chacun peut trouver ce qu'il cherche :
            Bons mots éculés, rimes idiotes
            Dégoisées pour la millième fois.
            Pourquoi te montrerais-tu chiche ?
            Ce que tu prêtes ne s'use jamais.
            Ton esprit se nourrit au contact
            Des étudiants, au poulailler.
            Pour dix-huit sous, les Irlandaises
            Apprennent là le " sel  " Irlandais.                                                               ebay.fr
Image associée            Mais ton talent vient de ton vice même :
            Chez toi le sel devient sanie.

            Ainsi, tu possèdes à fond l'art
            D'être grossière et indécente :
            Quand ton insolent museau se dresse,
            Et ricane, raille, déchire, salit
            Tous ces gros idiots d'Hiberniens
            Crient à l'esprit et à l'humour.
            Cette bonne Chloé aussi est dupe :
            Elle jure que tu as de l'esprit en diable.


                                                                   Jonathan Swift
                                                                                       1730
                                                                                ( in Oeuvres )
             

vendredi 5 janvier 2018

Little brother ( Raphaël Enthoven ( Document Fra


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                                        Little brother

            " Philosophe du petit objet " ainsi que se définit Rafaël Enthoven, ce court ouvrage nous incite à faire le point sur nos croyances moutonnières, après avoir lu ou non les Mythologies de Roland Barthes, comme l'auteur assez tôt. Ainsi donc il suffit de lire, et de faire le point sur nos relations avec ce que la société nous offre aujourd'hui, sans ordre :
            - L'esthétique du nain de jardin - "....... Etre simultanément le sujet et l'objet...... " et accepter de proposer de soi une image généralement un peu épaissie.
            - La langue des signes - Ou l'art des SMS ainsi " ....... :-)?........ l'émoticone apparaît souvent au milieu d'une phrase...... Simultanément réductrice et significative......
            - La langue de bois, quand dire c'est taire - Ainsi pour Charlie Hebdo "....... il faut savoir éviter le blasphème...... Jet de brume...... Parler pour ne rien dire est, à dire vrai, une façon d'en revenir à la vocation même du langage, et au déni dont il est né....... "
            - Uber la barbarie à visage urbain - Raphaël Enthoven apprécie le service, la bouteille d'eau proposée, etc., même trop d'offres parfois "...... De cet accouplement du dépit et de l'inventivité est né un géant qui pète le feu sous ses habits noirs......... C'est dire que la haine des taxis pour Uber ne vient pas seulement de la guerre sans merci du village global contre le village gaulois...... "
            -  Poupée Barbie, le défi de la désincarnation - La poupée Barbie est-elle vraiment inimitable, les jeunes filles qui s'y essaient, emplies de rêves ( ........ En réalité Barbie n'a pas de corps........ Les humains sont des boyaux fagotés autour d'un rêve......... C'est le défi de la désincarnation.La poupée est d'une étoffe qu'aucune chair ne peut singer....... "
            - Vivre ensemble : le pire du bien - " ......... Le vivre ensemble est partout......... " Pas vraiment convaincant.
            - Le vintage, matière et mémoire - " .......... A quelle faveur collective et arbitraire le vintage doit-il d'être à la mode tout en étant d'un autre temps ?............. " Sentimentalité, nostalgie du passé
"......... Le rôle du vintage n'est pas de figer le temps mais, à l'inverse, de préserver autant que possible l'époque où le temps passait encore.........."
            Près de trente chapitres courts, sur " Les poils de Barbouille ou Comment pisser droit sans qu'on nous le suggère " ces Mythologies s'emportent partout s'offrent à tous.

            

            

jeudi 4 janvier 2018

Frappe-toi le coeur Amélie Nothomb ( Roman Belgique )


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                                             Frappe-toi le coeur

            Une enfant grandie dans une ville de province perçoit sa beauté et rêve d'un prince, d'une vie de rêve. Mais elle a vingt ans et de son premier amant elle attend un enfant. Le fils du pharmacien, très amoureux veut l'enfant, le mariage. Le pharmacien est un notable dans la petite ville, mais ce ne sera pas le faste qu'elle souhaitait, cela à cause de l'enfant imprévu. Après une grossesse pénible où les oeufs mollets préparés avec soin ( 6 mn 1/2 ) par un mari amoureux tiennent leur place, Marie donne naissance à une petite fille, Diane ne sera pas l'enfant de coeur de sa mère, Diane ne connaîtra que très brièvement l'amour d'une mère, et encore accidentellement, et plus elle grandira, adorée par son père et ses grands-parents maternels, plus sa beauté s'affirmera plus sa mère mortifiée de n'être plus le centre de l'admiration générale l'écartera. Une jalousie féroce la ronge devant cet état de fait. Pourtant elle accepte la nouvelle naissance, un garçon, ce qui la satisfait. La petite fille réfléchit avec ses mots d'enfant, et pense que le fait d'être un garçon aide beaucoup à obtenir l'amour de maman. Pourtant c'est au troisième enfant, une fille, que Marie qui manifeste un tel désintérêt et une si évidente jalousie envers Diane que les grands-parents lucides s'inquiètent, et donc la troisième, petite fille capricieuse, recevra un amour invraisemblable de la mère. Diane, belle jeune fille réfléchie, après divers rebondissements familiaux, toujours très aimée de son père inconscient de la jalousie de son épouse, entreprend des études de médecine. En cardiologie, qui sera sa spécialité, elle rencontre une conférencière de l'âge de sa mère, qu'elle admire. Diane, submergée de travail décide néanmoins d'apporter son aide à sa nouvelle amie pour obtenir une qualification difficile  "....... Je suis consternée par les approximations que d'aucuns se permettent dans notre spécialité....... " Son mari  est chercheur en mathématiques. "......... - Vous l'avez vu couché sur son lit, les yeux grands ouverts sur le plafond ? C'est ainsi qu'il pratique la recherche en topologie. Quatre minutes par jour, il se lève pour noter ses réflexions sur un bout de papier....... " Les rebondissements conviennent au style d'Amélie Nothomb qui ne se soucie pas d'entretenir les lecteurs de petits faits et propos propres au sujet. Elle avance, le sujet c'est la jalousie, que Diane retrouve chez celle qu'elle crut son amie, la jalousie maternelle en particulier. Amélie Nothomb emporte son lecteur dès les premières pages, à travers des rebondissements amenés naturellement, parce que ainsi va la vie cruelle à certains par manque d'amour. Cette jalousie familiale que l'on retrouve aussi dans d'autres romans de la rentrée. Très bonne lecture.

            

mardi 2 janvier 2018

Lettre sur les aveugles 2 Denis Diderot ( Lettres France )


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                                                 Lettre sur les aveugles

                                                                 à l'usage de ceux qui voient

            Il juge de la beauté par le toucher ; cela se comprend : mais ce qui n'est pas si facile à saisir, c'est qu'il fait entrer dans ce jugement la prononciation et le son de la voix. C'est aux anatomistes à nous apprendre s'il y a quelque rapport entre les parties de la bouche et du palais, et la forme extérieure du visage. Il fait de petits ouvrages au tour et à l'aiguille ; il nivelle à l'équerre ; il monte et démonte les machines ordinaires ; il sait assez de musique pour exécuter un morceau dont on lui dit les notes et leurs valeurs. Il estime avec beaucoup plus de précision que nous la durée du temps, par la succession des actions et des pensées. La beauté de la peau, l'embonpoint, la fermeté des chairs, les avantages de la conformation, la douceur de l'haleine, les charmes de la voix, ceux de la prononciation sont des qualités dont il fait grand cas dans les autres.
            Il s'est marié pour avoir des yeux qui lui appartinssent. Auparavant, il avait eu le dessein de s'associer un sourd qui lui prêterait des yeux, et à qui il apporterait en échange des oreilles. Rien ne m'a tant étonné que son aptitude singulière à un grand nombre de choses ; et lorsque nous lui témoignâmes notre surprise :
            - Je m'aperçois bien, messieurs, nous dit-il, que vous n'êtes pas aveugles : vous êtes surpris de ce que je fais ; et pourquoi ne vous étonnez-vous pas aussi de ce que je parle ?
            Il y a, je crois, plus de philosophie dans cette réponse qu'il ne prétendait y en mettre lui-même. C'est une chose assez surprenante que la facilité avec laquelle on apprend à parler. Nous ne parvenons à attacher une idée à quantité de termes qui ne peuvent être représentés par des objets sensibles, et qui, pour ainsi dire, n'ont point de corps, que par une suite de combinaisons fines et profondes des analogies que nous remarquons entre ces objets non sensibles et les idée qu'ils excitent ; et il faut avouer conséquemment qu'un aveugle-né doit apprendre à parler plus difficilement qu'un autre, puisque le nombre des objets non sensibles étant beaucoup plus grand pour lui, il a bien moins de champ que nous pour comparer et pour combiner. Comment veut-on, par exemple, que le mot physionomie se fixe dans sa mémoire ? C'est une espèce d'agrément qui consiste en des objets si peu sensibles pour un aveugle, que, faute de l'être assez pour nous-mêmes qui voyons, nous serions fort embarrassés de dire bien précisément ce que c'est que d'avoir de la physionomie. Si c'est principalement dans les yeux qu'elle réside, le toucher n'y peut rien ; et puis, qu'est-ce pour un aveugle que des yeux morts, des yeux vifs, des yeux d'esprit, etc.
            Je conclus de là que nous tirons sans doute du concours de nos sens et de nos organes de grands services. Mais ce serait tout autre chose encore si nous les exercions séparément, et si nous n'employions jamais deux dans les occasions où le secours d'un seul nous suffirait. Ajouter le toucher à la vue, quand on a assez de ses yeux, c'est à deux chevaux, qui sont déjà vifs, en atteler un troisième en arbalète qui tire d'un côté, tandis que les autres tirent de l'autre.
            Comme je n'ai jamais douté que l'état de nos organes et de nos sens n'ait beaucoup d'influence sur notre métaphysique et sur notre morale, et que nos idées les plus purement intellectuelles, si je puis parler ainsi, ne tiennent de fort près à la conformation de notre corps, je me mis à questionner notre aveugle sur les vices et les vertus. Je m'aperçus d'abord qu'il avait une aversion prodigieuse pour le vol ; elle naissait en lui de deux causes : de la facilité qu'on avait de le voler sans qu'il s'en aperçût ; et plus encore, peut-être, de celle qu'on avait de l'apercevoir quand il volait. Ce n'est pas qu'il ne sache très bien se mettre en garde contre le sens qu'il nous connaît de plus qu'à lui, et qu'il
ignore la manière de bien cacher un vol. Il ne fait pas grand cas de la pudeur : sans les injures de l'air,
dont les vêtements le garantissent, il n'en comprendrait guère l'usage ; et il avoue franchement qu'il ne devine pas pourquoi l'on couvre plutôt une partie du corps qu'une autre, et moins encore par quelle bizarrerie on donne entre ces parties la préférence à certaines, que leur usage et les indispositions auxquelles elles sont sujettes demanderaient que l'on tînt libres. Quoique nous soyons dans un siècle où l'esprit philosophique nous a débarrassés d'un grand nombre de préjugés, je ne crois pas que nous en venions jamais jusqu'à méconnaître les prérogatives de la pudeur aussi parfaitement que mon aveugle. Diogène n'aurait point été pour lui un philosophe.                                 pinterest.fr
Résultat de recherche d'images pour "peinture sur drap de laine hollande 187 siècl"            Comme de toutes les manifestations extérieures qui réveillent en     nous la commisération et les idées de la douleur, les aveugles ne sont affectés que par la plainte, je les soupçonne, en général, d'inhumanité. Quelle différence y a-t-il pour un aveugle, entre un homme qui urine et un homme qui, sans se plaindre, verse son sang ? Nous-mêmes, ne cessons-nous pas de compatir lorsque la distance ou la petitesse des objets produit le même effet sur nous que la privation de la vue sur les aveugles ? tant nos vertus dépendent de notre manière de sentir et du degré auquel les choses extérieures nous affectent ! Aussi je ne doute point que, sans la crainte du châtiment, bien des gens n'eussent moins de peine à tuer un homme à une distance où ils ne le verraient gros que comme une hirondelle, qu'à égorger un boeuf de leurs mains. Si nous avons de la compassion pour un cheval qui souffre, et si nous écrasons une fourmi sans aucun scrupule, n'est-ce pas le même principe qui nous détermine ?
            Ah, madame ! que la morale des aveugles est différente de la nôtre ! que celle d'un sourd différerait encore de celle d'un aveugle, et qu'un être qui aurait un sens de plus que nous trouverait notre morale imparfaite, pour ne rien dire de pis !
            Notre métaphysique ne s'accorde pas mieux avec la leur. Combien de principes pour eux qui ne sont que des absurdités pour nous, et réciproquement  ! Je pourrais entrer là-dessus dans un détail qui vous amuserait sans doute, mais que de certaines gens, qui voient du crime à tout, ne manqueraient pas d'accuser d'irréligion, comme s'il dépendait de moi de faire apercevoir aux aveugles les choses autrement qu'ils ne les aperçoivent. Je me contenterai d'observer une chose dont je crois qu'il faut que tout le monde convienne : c'est que ce grand raisonnement, qu'on tire des merveilles de la nature, est bien faible pour des aveugles. La facilité que nous avons de créer, pour ainsi dire, de nouveaux objets par le moyen d'une petite glace, est quelque chose de plus incompréhensible pour
eux que des astres qu'ils ont été condamnés à ne voir jamais. Ce globe lumineux qui s'avance d'orient en occident les étonne moins qu'un petit feu qu'ils ont la commodité d'augmenter ou de diminuer : comme ils voient la matière d'une manière beaucoup plus abstraite que nous, ils sont moins éloignés de croire qu'elle pense.
            Si un homme qui n'a vu que pendant un jour ou deux se trouvait confondu chez un peuple d'aveugles, il faudrait qu'il prît le parti de se taire, ou celui de passer pour un fou. Il leur annoncerait tous les jours quelque nouveau mystère, qui n'en serait un que pour eux, et que les esprits forts se sauraient bon gré de ne pas croire. Les défenseurs de la religion ne pourraient pas tirer un grand parti
d'une incrédulité si opiniâtre, si juste même, à certains égards, et cependant si peu fondée ? Si vous vous prêtez un instant à cette supposition, elle vous rappellera, sous des traits empruntés, l'histoire et les persécutions de ceux qui ont eu le malheur de rencontrer la vérité dans des siècles de ténèbres, et l'imprudence de la déceler à leurs aveugles contemporains, entre lesquels ils n'ont point eu d'ennemis plus cruels que ceux qui, par leur état et leur éducation, semblaient devoir être les moins éloignés de leurs sentiments.
            Je laisse donc la morale et la métaphysique des aveugles, et je passe à des choses qui sont moins importantes, mais qui tiennent de plus près au but des observations qu'on fait ici de toutes parts depuis l'arrivée du Prussien. Première question. Comment un aveugle-né se forme-t-il des idées des figures ? Je crois que les mouvement de son corps, l'existence successive de sa main en plusieurs lieux, la sensation non interrompue d'un corps qui passe entre ses doigts, lui donnent la notion de direction. S'il les glisse le long d'un fil bien tendu, il prend l'idée d'une ligne droite ; s'il suit la courbe d'un fil lâche, il prend celle d'une ligne courbe. Plus généralement, il a, par des expériences réitérées
du toucher, la mémoire de sensations éprouvées en différents points : il est maître de combiner ses sensations ou points, d'en former des figures. Une ligne droite, pour un aveugle qui n'est point géomètre, n'est autre chose que la mémoire d'une suite de sensations du toucher, rapportées à la surface de quelque corps solide, concave ou convexe. L'étude rectifie dans le géomètre la notion de ces lignes par les propriétés qu'il leur découvre. Mais géomètre ou non, l'aveugle-né rapporte tout à l'extrémité de ses doigts. Nous combinons des points colorés ; il ne combine, lui, que des points palpables, ou, pour parler plus exactement, que des sensations du toucher dont il a mémoire. Il ne se passe rien dans sa tête d'analogue à ce qui se passe dans la nôtre ; il n'imagine point ; car, pour imaginer, il faut colorer un fond et détacher de ce fond des points, en leur supposant une couleur différente de celle du fond. Restituez à ces points la même couleur qu'au fond, à l'instant ils se confondent avec lui, et la figure disparaît ; du moins, c'est ainsi que les choses s'exécutent dans mon imagination ; et je présume que les autres n'imaginent pas autrement que moi. Lors donc que je me propose d'apercevoir dans ma tête une ligne droite, autrement que par ses propriétés, je commence par la tapisser au-dedans d'une toile blanche, dont je détache une suite de points noirs placés dans la même direction. Plus les couleurs du fond et des points sont tranchantes, plus j'aperçois les points distinctement, et une figure d'une couleur fort voisine de celle du fond ne me fatigue pas moins à considérer dans mon imagination que hors de moi, et sur une toile.
"The Conversation" Paul Delvaux  *          Vous voyez donc, madame, qu'on pourrait donner des lois pour imaginer facilement à la fois plusieurs objets diversement colorés ; mais que ces lois ne seraient certainement pas à l'usage d'un aveugle-né. L'aveugle-né, ne pouvant colorer, ni par conséquent figurer comme nous l'entendons, n'a mémoire que de sensations prises par le toucher, qu'il rapporte à différents points, lieux ou distances, et dont il compose des figures. Il est si constant que l'on ne figure point dans l'imagination sans colorer, que si l'on nous donne à toucher dans les ténèbres de petits globules dont nous ne connaissions ni la matière, ni la couleur, nous les supposerons aussitôt blancs ou noirs, ou de quelque autre couleur ; ou que, si nous ne leur en attachons aucune, nous n'aurons, ainsi que l'aveugle-né, que la mémoire de petites sensations excitées à l'extrémité des doigts, et telles que de petits corps ronds peuvent les occasionner. Si cette mémoire est très fugitive en nous ; si nous n'avons guère d'idée de la manière dont un aveugle-né fixe, rappelle et combine les sensations du toucher, c'est une suite de l'habitude que nous avons prise par les yeux, de tout exécuter dans notre imagination avec des couleurs. Il m'est cependant arrivé à moi-même, dans les agitations d'une passion violente, d'éprouver un frissonnement dans toute une main ; de sentir l'impression de corps que j'avais touchés il y avait longtemps s'y réveiller aussi vivement que s'ils eussent encore été présents à mon attouchement, et de m'apercevoir très distinctement que les limites de la sensation coïncidaient précisément avec celles de ces corps absents. Quoique la sensation soit indivisible par elle-même, elle occupe, si on peut se servir de ce terme, un espace étendu auquel l'aveugle-né a la faculté d'ajouter ou de retrancher par la  pensée, en grossissant ou en diminuant la partie affectée. Il compose, par ce moyen, des points, des surfaces, des solides ; il aura même un solide gros comme le globe terrestre, s'il se suppose le bout du doigt gros comme le globe, et occupé par la sensation en longueur et profondeur.
            Je ne connaissais rien qui démontre mieux la réalité  du sens interne que cette faculté faible en nous, mais forte dans les aveugles-nés, de sentir ou de se rappeler la sensation des corps, lors même qu'ils sont absents et qu'ils n'agissent plus pour eux. Nous ne pouvons faire entendre à un aveugle-né comment l'imagination nous peint les objets absents comme s'ils étaient présents ; mais nous pouvons très bien reconnaître en nous la faculté de sentir à l'extrémité d'un doigt un corps qui n'y est plus, telle qu'elle est dans l'aveugle-né. Pour cet effet, serrez l'index contre le pouce ; fermez les yeux ; séparez vos doigts ; examinez immédiatement après cette séparation ce qui se passe en vous, et dites-moi si la sensation ne dure pas longtemps après que la compression a cessé ; si, pendant que la compression dure, votre âme vous paraît plus dans votre tête qu'à l'extrémité de vos doigts ; et si cette compression ne vous donne pas la notion d'une surface, par l'espace qu'occupe la sensation. Nous ne distinguons la présence des êtres hors de nous, de leur représentation dans notre imagination, que par la force et la faiblesse de l'impression : pareillement, l'aveugle-né ne discerne la sensation d'avec la présence réelle d'un objet à l'extrémité de son doigt, que par la force ou la faiblesse de la sensation même.
            Si jamais un philosophe aveugle et sourd de naissance fait un homme à l'imitation de celui de Descartes, j'ose vous assurer, madame, qu'il placera l'âme au bout des doigts ; car c'est de là que lui viennent ses principales sensations, et tous ses con naissances. Et qui l'avertirait que sa tête est le siège de ses pensées ? Si les travaux de l'imagination épuisent la nôtre, c'est que l'effort que nous faisons pour imaginer est assez semblable à celui que nous faisons pour apercevoir des objets très proches ou très petits. Mais il n'en sera pas de même de l'aveugle et sourd de naissance ; les sensations qu'il aura prises par le toucher seront, pour ainsi dire, le moule de toutes ses idées ; et je ne serais pas surpris qu'après une profonde méditation, il eût les doigts aussi fatigués que nous avons la tête. Je ne craindrais point qu'un philosophe lui objectât que les nerfs sont les causes de nos sensations, et qu'ils partent tous du cerveau  : quand ces deux propositions seraient aussi démontrées qu'elles le sont peu, surtout la première, il lui suffirait de se faire expliquer tout ce que les physiciens ont rêvé là-dessus, pour persister dans son sentiment.
            Mais si l'imagination d'un aveugle n'est autre chose que la faculté de se rappeler et de combiner des sensations de points palpables, et celle d'un homme qui voit, la faculté de se rappeler et de combiner des points visibles ou colorés, il s'ensuit que l'aveugle-né aperçoit les choses d'une manière beaucoup plus abstraite que nous ; et que dans les questions de pure spéculation, il est peut-être moins sujet à se tromper ; car l'abstraction ne consiste qu'à séparer par la pensée les qualités sensibles des corps ou les unes des autres, ou corps même qui leur sert de base ; et l'erreur naît de cette séparation mal faite, ou faite mal à propos ; mal faite, dans les questions métaphysiques  ; et faites mal à propos dans les questions physico-mathématiques. Un moyen presque sûr de se tromper
en métaphysique, c'est de ne pas simplifier assez les objets dont on s'occupe ; et un secret infaillible pour arriver en physico-mathématique à des résultats défectueux, c'est de les supposer moins composés qu'ils ne le sont.                                                                                           ifalsidiautore.it/  
Résultat de recherche d'images pour "magritte"            Il y a une espèce d'abstraction dont si peu d'hommes sont capables qu'elle semble réservée aux intelligences pures ; c'est celle par laquelle tout se réduirait à des unités numériques. Il faut convenir que les résultats de cette géométrie serait bien exacts, et ses formules bien générales ; car il n'y a point d'objets, soit dans la nature, soit dans le possible, que ces unités simples ne pussent représenter, des points, des lignes, des surfaces, des solides, des pensées, des idées, des sensations, et... si, par hasard, c'était le fondement de la doctrine de Pythagore, on pourrait dire de lui qu'il échoua dans son projet, parce que cette manière de philosopher est trop au-dessus de nous, et trop approchante de celle de l'Être suprême, qui, selon l'expression ingénieuse d'un géomètre anglais, " géométrise " perpétuellement dans l'univers.
            L'unité pure et simple est un symbole trop vague et trop général pour nous. Nos sens nous ramènent à des signes plus analogues à l'étendue de notre esprit et à la conformation de nos organes. Nous avons même fait en sorte que ces signes pussent être communs entre nous, et qu'ils servissent, pour ainsi dire, d'entrepôt au commerce mutuel de nos idées. Nous en avons institué pour les yeux, ce sont les caractères ; pour l'oreille, ce sont les sons articulés ; mais nous n'en n'avons aucun pour le toucher, quoiqu'il y ait une manière propre de parler à ce sens, et d'en obtenir des réponses. Faute de cette langue, la communication est entièrement rompue entre nous et ceux qui naissent sourds, aveugles et muets. Ils croissent ; mais ils rentent dans un état d'imbécillité. Peut-être acquerraient-ils des idées, si l'on se faisait entre à eux dès l'enfance d'une manière fixe, déterminée, constante et uniforme ; en un mot, si on leur traçait sur la main les mêmes caractères que nous traçons sur le papier, et que la même signification leur demeurât invariablement attachée.
            Ce langage, madame, ne vous paraît-il pas aussi commode qu'un autre ? n'est-il pas même tout inventé ? et oseriez-vous nous assurer qu'on ne vous a jamais rien fait entendre de cette manière ? Il ne s'agit donc que de le fixer et d'en faire une grammaire et des dictionnaires, si l'on trouve que l'expression, par les caractères ordinaires de l'écriture, soit trop lente pour ce sens.
            Les connaissances ont trois portes pour entrer dans notre âme, et nous en tenons une barricadée par le défaut de signes. Si l'on eût négligé les deux autres, nous en serions réduits à la condition des animaux. De même que nous n'avons que le serré pour nous faire entendre au sens du toucher, nous n'aurions que le cri pour parler à l'oreille. Madame, il faut manquer d'un sens pour connaître les avantages des symboles destinés à ceux qui restent ; et, des gens qui auraient le malheur d'être sourds, aveugles et muets, ou qui viendraient à perdre ces trois sens par quelque accident, seraient bien charmés qu'il y eût une langue nette et précise pour le toucher.
            Il est bien plus court d'user de symboles tout inventés que d'en être inventeur, comme on y est forcé, lorsqu'on est pris au dépourvu. Quel avantage n'eût-ce pas été pour Saunderson de trouver une arithmétique palpable toute préparée à l'âge de cinq ans, au lieu d'avoir à l'imaginer à l'âge de vingt-cinq ! Ce Saunderson, madame, est un autre aveugle dont il ne sera pas hors de propos de vous entretenir. On en raconte des prodiges ; et il n'y en a aucun que ses progrès dans les belles-lettres, et son habileté dans les sciences mathématiques, ne puissent rendre croyable.
            La même machine lui servait pour les calculs algébriques et pour la description des figures rectilignes. Vous ne seriez pas fâchée qu'on vous fît l'explication, pourvu que vous fussiez en état de l'entendre ; et vous allez voir qu'elle ne suppose aucune connaissance que vous n'ayez, et qu'elle vous serait très utile, s'il vous prenait jamais envie de faire de longs calculs à tâtons.
            Imaginez un carré, tel que vous le voyez fig. 1 et 2 divisé en quatre parties égales par des lignes perpendiculaires aux côtés, en sorte qu'il vous offrît les neuf points 1, 2, 3, 4, 5 , 6, 7, 8, 9. Supposez ce carré percé de neuf tous capables de recevoir des épingles de deux espèces, toutes de même longueur et de même grosseur, mais les unes à tête un peu plus grosse que les autres.
                                              ______
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                                                                          à suivre.........
            Les épingles..........
         
         
            

dimanche 31 décembre 2017

GOÛTS ROYAUX Verlaine ( Poème France )

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                                                 GOÛTS ROYAUX

            Louis XV aimait peu les parfums. Je l'imite
            Et je leur acquiesce en la juste limite.
            Ni flacons, s'il vous plaît, ni sachets en amour
            Mais, ô qu'un air naïf et piquant flotte autour
            D'un corps, pourvu que l'art de m'exciter s'y trouve ;
            Et mon désir chérit, et ma science approuve
            Dans la chair convoitée, à chaque nudité,
            L'odeur de la vaillance et de la puberté
            Ou le relent très bon des belles femmes mûres,
            Même j'adore - tais, morale, tes murmures -
            Comment dirai-je ? ces fumets, qu'on tient secrets,
            Du sexe et des entours, dès avant comme après
            La divine accolade et pendant la caresse,
            Quelle qu'elle puisse être, ou doive, ou le paraisse.
            Puis, quand sur l'oreiller mon odorat lassé,
            Comme les autres sens, du plaisir ressassé,
            Somnole et que mes yeux meurent vers un visage
            S'éteignant presque aussi, souvenir et présage
            De l'entrelacement des jambes et des bras,
            Des pieds doux se baisant dans la moiteur des draps,                     dailygeekshow.com
            De cette langueur mieux voluptueuse monte
            Un goût d'humanité qui ne va pas sans honte,
            Mais si bon, mais si bon qu'on croirait en manger !
            Dès lors, voudrais-je encor du poison étranger,
            D'une fragrance prise à la plante, à la bête,
            Qui vous tourne le coeur et vous brûle la tête   
             Puisque j'ai, pour magnifier la volupté,
             Proprement la quintessence de la beauté !


                                                                                  Verlaine
                                                                                              in Parallèlement
             

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 83 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

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                     .

                                                              Décembre

                                                                                      1er Décembre 1662

            Levé et en voiture avec sir John Mennes et sir William Batten à Whitehall, dans la chambre du Duc où celui-ci parachevait sa toilette. Nous nous rendîmes, ainsi que milord Sandwich, alors dans son cabinet parler des affaires de la Marine. Mr Coventry eut là la très grande bonté à mon égard de parler au Duc de la peine que j'avais eue à faire un recueil de tous les contrats pour les mâts, recueil bien utile. De là chez milord Sandwich avec Mr Moore parler affaires. Ensuite, traversant le parc, vis pour la première fois, car il gelait à pierre-fendre, des gens faire des glissades sur leurs patins. C'est un art très élégant. Me rendis aux appartements de Mr Coventry, au palais St James, où on nous servit un pâté de chevreuil et nous fûmes fort gais. Nous plaisantâmes le major Norwood d'avoir livré Dunkerque.
            Restâmes 3 ou 4 heures puis à la chambre du Conseil où se réunirent le du d'York, le prince Rupert et d'autres comme membres de la Commission de Tanger. Mr Creed, futur secrétaire, nous lut notre commission et nous nous mîmes à discuter les questions telles que, pour commencer, la fourniture immédiate de vivres puis leur diminution afin de fournir l'argent qui, en conséquence, servira à construire la jetée. D'autres questions seront à l'ordre du jour de la prochaine réunion.
            Cela fait j'allai au Cockpit où il y avait foule et longue attente. Je vis jouer Le vaillant Cid, pièce que j'ai lue avec délectation, mais jouée est fort ennuyeuse, car il n'y a point là de plaisir, bien que jouée par Betterton, ma chère Ianthe et une autre belle personne qui remplace Roxalana. Ni le roi, ni la reine n'ont souri une seule fois de toute la représentation, et personne n'a paru trouver d'autre plaisir que celui que procuraient le haut rang et l'élégance de l'assistance
.            Puis chez milord, mais je ne restai pas, Mr Moore étant couché, et rentrai à pied avec un porteur de torche. J'arrivai à minuit, réveillai mon petit laquais et me mis au lit.


                                                                                             2 Décembre

            Avant mon départ pour le bureau eus une nouvelle querelle avec ma femme au sujet de Sarah pour qui elle a une haine mortelle, je ne sais pour quelle raison, et qui me paraît une excellente servante. Puis réunion au bureau toute la matinée, puis dînai avec ma femme, à la maison, et après dîner fis très sérieusement la leçon à Jane, avant de la prendre comme femme de chambre. Je le lui dis de telle façon que la pauvre fille pleura et promit d'être dévouée et soigneuse. Puis au bureau où nous avons siégé en réunion de la commission de la Caisse. La séance levée, je restai tard à mon bureau à préparer des affaires, puis à la maison, ayant froid. Ce soir pour la première fois j'ai mis un gilet. Et au lit.

                                                                                                 3 Décembre        pinterest.com
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            Appelé par le commissaire Pett et allons par le fleuve, bien malgré moi à Deptford, après avoir pris une boisson du matin chaude, fûmes occupés avec Mr Wood et nos officiers toute la matinée à mesurer ses mâts de la Nouvelle-Angleterre, ce que je vis avec grande satisfaction tout en m'instruisant, bien que je voie grande négligence et indifférence chez les officiers du roi.
            Cela fait dînai au Globe avec Mr Wood, puis rentrai par le fleuve avec Mr Pett, lisant pendant tout le trajet ses comptes pour la Caisse. J'ai vu des choses qui ne me plaisent point, par exemple, qu'il s'accorde 300 livres pour s'être occupé pendant une certaine année de la Caisse et 150 livres par an les autres années. Je ne le lui ai pas reproché directement, mais le ferai quand ils seront lus au Conseil.
         Nous nous arrêtâmes aussi à Limehouse pour voir deux bûches en construction, c'est là une chose à laquelle nous attachons grand prix. Nous voulions voir leur gabarit, qui est de 50 pieds à la quille et ils jaugent environ 60 tonneaux.
            Rentré et travaillai un peu, puis, prenant Mr Pett en chemin à pied jusqu'au Temple, voyons passer des carrosses de l'ambassadeur de Russie, les laquais non point en livrée mais en costume de leur pays, l'un d'une couleur, l'autre d'une autre. C'était fort étrange.
            Au Temple parlai avec Mr Turner et Calthrope, puis rentrai à pied, souffrant un peu à cause du froid que j'ai pris aujourd'hui sur le fleuve, ce qui m'inquiète.
            A mon bureau travaillai un bon moment, puis rentrai et pris un posset ( boisson ), puis au lit.   


                                                                                                        4 Décembre

            Réglai des affaires au bureau toute la matinée, et de nouveau après dîner jusqu'au soir, puis rentrai examiner mon dossier de Brampton pour demain. Nous devons nous rencontrer avec nos avocats en vue d'un arbitrage, ce qui m'a occupé très tard. Et, au lit.


                                                                                                        5 Décembre 1662

            Levé, il y a de la neige et il gèle à pierre-fendre. J'appelai Sarah qui part aujourd'hui ou demain. Je lui payai ses gages et lui donnai 10 shillings moi-même et à ma femme 5 shillings pour qu'elle les lui remît. Pour ma part, je pense que jamais servante et maîtresse ne se sont séparées pour d'aussi sottes raisons. Tout simplement parce que ma femme pense qu'elle est désagréable, pour tout le reste c'est une bonne servante. Cette fille pleura et j'étais prêt à pleurer moi aussi, mais pour avoir la paix je consens qu'elle parte, et d'autant plus, quoique je n'en dise rien, que c'est Jane qui va sans doute la remplacer. 
            Ensuite, allai à pied, vers l'Hôtel de Ville où j'étais convoqué par les commissaires de la lieutenance, mais ils ne siégeaient pas ce matin-là. Rencontrant en chemin Will Swan je l'emmenai dans une maison voisine et lui donnai une boisson du matin de bière au beurre. Il continue à me raconter nombre de ses histoires de fanatique fieffé gredin. Mais j'agis ainsi pour le faire parler pour savoir ce que lui et son parti pensent. Je vois qu'ils sont convaincus que Dieu ne va bénir ni la Cour ni l'Eglise telles qu'elles sont établies, mais qu'elles doivent être purifiées. La plus mauvaise nouvelle est la mort de Mr Chetwind, mon vieil et intelligent ami. Il a laissé 3 000 livres en mourant, ce que je n'aurais pas cru, tant il a toujours vécu richement et élégamment. Il a légué à la femme de Symons 300 livres et a fait de Will un de ses exécuteurs testamentaires.
            De là au Temple voir mon avocat puis à Grey's Inn pour rencontrer Mr Cole, mais ce ne fut pas possible, je fis donc un tour de promenade dans le jardin que la neige et le gel rendaient fort agréable. De là chez mon frère où je mangeai quelque chose pour dîner et fis quelques copies de l'état préparé hier soir des propriétés de mon oncle. Puis à l'église du Temple où je me promenai tout seul jusqu'à 4 ou 5 heures, et au cabinet de mon cousin Turner, et restai allant et venant entre celui-ci et les cabinets de Calthrope et de Bernard jusque si tard que, comme Mr Cole n'arrivait pas nous renonçâmes à notre réunion. Emmenai en voiture mon oncle Thomas à sa maison, parlant de notre désir de faire la paix, je le déposai à l'extrémité de Gracious Street. Et à la maison où je trouve Gosnell arrivée. Ma femme me dit qu'elle a tout l'air d'une bonne dame de compagnie, ce dont je me réjouis. Et à mon bureau, je travaillai un peu, et rentrai, extraordinairement tracassé et soucieux pour mon père, car il semble tout à fait possible que mon oncle réussira à obtenir la plus grande partie des propriétés. Mais dans la soirée je chasse ces pensées pour me divertir avec ma femme et grâce à Gosnell. Elle chante extrêmement bien et j'aurai bien grand agrément de sa présence. Puis joyeusement au lit.


                                                                                                                    6 Décembre

            Levé et réunion au bureau toute la matinée. Seul avec Mr Coventry, les autres occupés à payer la solde des équipages et désarmer les navires. Dînai à la maison avec ma femme et Gosnell, très content d'elle. Restai avec elles un bon moment jusqu'à ce que ma femme parût remarquer que j'étais maintenant davantage à la maison que je ne l'étais en d'autres moments. J'allai au bureau travailler jusque tard et à 9 heures allai à pied chez Mr Rawlinson pensant trouver mon oncle Wight. Il y était mais aussi quantité de parentes de sa femme et je ne sais qui. Mr Rawlinson me parut fort bien remarqué que sa femme le mène par le bout du nez. Je repartis pour mon bureau et ayant fait mon travail je rentrai. Et après une chanson de Gosnell, nous fûmes au lit.


                                                                                                                    7 Décembre
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Résultat de recherche d'images pour "patinage 18è siècle peinture"            Beaucoup de neige. A l'église ce matin avec ma femme ( c'est la 1è fois depuis son séjour à Brampton ) et Gosnell l'accompagnait, ce qui était fort gracieux à voir. Puis de retour nous dînâmes en haut dans la salle à manger pour la première fois depuis qu'elle a été restaurée. Dans l'après-midi je pensais aller à l'église française, mais trouvant les paroissiens hollandais et le sermon pour les paroissiens français commencé en hollandais, je revins à la maison et allai dans notre tribune où je trouvai ma femme et Gosnell et après un sermon somnolent nous allâmes tous trois chez ma tante Wight, où il y avait abondance de sa compagnie habituelle. Nous restâmes assez longtemps à causer, et je me trouvai en désaccord, comme d'ordinaire, avec ma tante, sur la beauté de la reine, ce que je conteste vigoureusement, disant que si j'ai un beau nez alors le sien est beau, et ainsi de suite. Et après une longue conversation, voyant la salle pleine et peu désireux que nous restions tous les trois, je pris congé, et avec seulement ma femme, j'allai voir sir William Penn qui a maintenant quitté son lit et se tient assis au coin du feu. Après quelques propos, à la maison, souper et après la prière, au lit.
Ce soir est venu le frère de ma femme. Il a parlé à ma femme et à Gosnell de sa femme. Elles m'en parlèrent ensuite, et je subodore que, je le crains, il se trompe croyant avoir trouvé une riche épouse, et je redoute qu'elle ne se réveille autre. Et au lit.


                                                                                                              8 Décembre

            Levé et emmenant Gosnell en voiture je la déposai à Temple Bar, où elle avait des affaires personnelles à régler aujourd'hui. En chemin elle me dit que Balty lui avait raconté que ma femme      allait chaque jour de la semaine à la Cour et au théâtre et qu'elle serait libre de sortir autant qu'elle le voudrait, et quantité d'autres choses fausses, ce qui me contrarie, et je crains que cette fille ne soit venue dans cette espérance, ce qui me tracasse.
            Puis allai voir le Duc et Mr Coventry, seul, les autres étant occupés à la paie et ailleurs. Avec seul Mr Coventry j'ai relu notre lettre à milord le trésorier, qui est maintenant, aussi bien qu'elle peut l'être. Puis chez milord Sandwich où j'ai fait les comptes de milord avec  Mr Moore, puis dînai avec lui et Battersby son ami, fort bien et gaiement et bonne conversation. Puis au parc voir les gens glisser avec leurs patins, ce qui est un joli spectacle, puis chez le Duc où la commission de Tanger se réunissait. Là, tous assis autour d'une table nous avons eu une bonne discussion sur cette affaire, à ma grande satisfaction. Cela terminé et apprenant le titre de la pièce jouée ce soir devant le roi, je ne voulus pas rester et revins en voiture à la maison, où je trouvai ma femme tourmentée parce que Gosnell vient dire que son oncle, le juge Jegon, exige qu'elle vienne chez lui trois fois par semaine pour s'occuper d'une affaire à elle confiée par sa mère, et qui si on ne lui donne pas ce temps de libre il ne lui permettra de prendre aucune place, ce qui nous tourmente tous les deux, mais nous n'y pouvons rien. Et, comme je crois que c'est une intervention providentielle de Dieu pour m'empêcher de dépenser plus que je ne puis me le permettre, je n'en suis pas mécontent et ferai partager ce sentiment à ma femme, je sais qu'elle y prêtera attention, la pauvre, bien que pour tout de bon la solitude de son existence ne puisse pas ne pas lui peser. Je fis donc chanter Gosnell et nous restâmes à regarder le livre de danses jusqu'à minuit, sans remarquer que le temps passait. Et la prière et, au lit.


                                                                                                           9 Décembre

            Restai longtemps couché avec ma femme, à la faire s'accommoder du départ de Gosnell, et je vois qu'elle s'en accommodera comme moi. Au bureau en réunion toute la matinée, espérais dîner avec Mr Coventry, mais il se trouva forcé de se rendre à Whitehall. Je dînai donc tout seul, emmenant Mr Hayter à la maison, mais lui, le pauvre, n'était pas très bien et ne put rien manger. Je restai chez moi tout l'après-midi, contrarié par le départ cet après-midi de Sarah, qui pleurait à chaudes larmes, ce dont j'étais bien prêt moi aussi, et Jane aussi. Et puis bientôt ce fut le départ de Gosnell, ce qui m'affligea aussi, quoique, pour bien des raisons, il vaille mieux que je sois exempt de cette dépense. Tout cela me fait paraître ma maison bien solitaire, ce qui m'afflige beaucoup, et c'est d'humeur mélancolique que je partis pour le bureau, où je restai travailler jusqu'à ce que je fusse appelé par sir George Carteret au bureau du Trésor à propos de la lettre de milord le trésorier, qu'à cause de lui je dois me donner à nouveau le mal de réécrire entièrement. Rentrai et tard au bureau avec sir John Mennes examinai les comptes de Mr Creed. Rentrai souper; et ma femme et moi allâmes mélancoliquement nous coucher.


                                                                                                       10 Décembre
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Image associée            Me levai ce matin recevant un message de sir George Carteret et une lettre de Mr Coventry, l'une contredisant l'autre, au sujet de notre lettre à milord le trésorier, ce qui me tracasse, mais j'allai voir sir George Carteret et désirant satisfaire l'un et l'autre je crois que j'en ai trouvé le moyen. Revins au bureau avec sir George Mennes dans sa voiture, mais il y avait tellement de neige que c'est à peine si on pouvait passer dans les rues. Au bureau discussion avec sir William Batten, nous avons discuté les comptes de Mr Creed. Je crains qu'il ne s'écoule un bon moment avant que nous ayons fini, et que nous ne rencontrions de grandes difficultés.
            Puis au Dauphin où nous avons tous trois invité les commissaires aux comptes de l'Echiquier, Wood et Beale. Sir George Carteret vint nous retrouver. Nous fîmes un bon dîner qui nous coûta 5 livres 6 shillings ( 26 shillings pour moi ), et ensuite nous discutâmes de nos salaires, je crois qu'ils vont maintenant en autoriser le paiement, et d'autres affaires.
            Rentrai à la maison où je trouve notre nouvelle cuisinière, Susan, recommandée par le frère de ma femme, ce qui ne me la fait pas estimer davantage, mais comme elle a bon air et qu'elle est jolie, je veux bien faire l'essai. Et Jane commence son travail de femme de chambre
            Puis au bureau, je restai tard à ranger des papiers et mes registres et des affaires. Il faisait très froid. Et rentrai souper.


                                                                                                            11 Décembre 1662

            Levé, la neige fortement gelée, en réunion toute la matinée au sujet des comptes de Mr Creed. Je l'ai en partie servi, en partie desservi. Il dîna avec moi et resta tout l'après-midi à discuter des façons d'obtenir de l'argent, tâche à laquelle je m'attache maintenant entièrement. Il partit dans la soirée et j'allai à mon bureau, achevant tout ce qui a trait à notre fameuse lettre, si longue à faire, à milord le trésorier, jusqu'à presque une heure du matin. Rentrai l'esprit fort tranquillisé, et au lit.


                                                                                                              12 Décembre

            Après le grand gel, je trouve au réveil un grand dégel, et ma maison en est toute inondée, ce qui me contraria.
            Au bureau et à la maison, travaillai toute la matinée. Dînai avec ma femme et restai causer avec elle tout l'après-midi, puis au bureau où j'examinai mon exemplaire du livre de Mr Hollond jusqu'à 10 heures du soir. Rentrai souper et, au lit.


                                                                                                            13 Décembre

            Dormis longtemps tant et si bien que John Mennes et sir William Batten étaient partis pour Portsmouth avant que j'eusse quitté mon lit et sir George Carteret était passé au bureau avant que je fusse levé. Debout donc en hâte et descendis le voir. Réunion avec Mr Coventry, et Field et Stint arrivèrent et reçurent les 41 livres que leur accordait le jugement rendu contre moi et Harry Kembe. Nous signâmes aussi des billets à ordre de 500 livres pour servir aux dommages-intérêts de Mr Porter et Smith pour le reste, mais je n'ai signé qu'après avoir obtenu que Mr Coventry fût allé avec moi trouver sir William Penn et que celui-ci eût promis en sa présence de payer sa part de ce qui serait accordé en dommages-intérêts, et tous deux ont estimé que sir William Batten ne pouvait faire moins. Nous nous quittâmes à midi et je dînai avec ma femme, puis je retournai au bureau où je terminai ma lecture d'hier soir et fis bien nettoyer et ranger mon cabinet. Puis j'écrivis par la poste différentes lettres, dont une à sir William Batten à propos de nos affaires avec Field, demandant à lui aussi son engagement. J'ai fait insérer cette lettre dans notre registre de correspondance officielle. Puis rentrai souper et, au lit.


                                                                                                                                      14 Décembre                              lesconferencesdemathilde.com                                                                Jour du Seigneur         
Image associée            Restai au lit, avec grande satisfaction, causer au lit avec ma femme, puis levés et à l'église. Retour à la maison fîmes un élégant dîner tout seuls. Après dîner j'allai à pied jusqu'à Whitehall et chez milord et marchai de long en large jusqu'à l'heure de l'office à la Chapelle et allai à la Chapelle royale où j'entendis le service, puis chez milord où se trouvaient Mr Howe et Mr Paget, l'avocat vieil amateur de musique. Nous avons chanté des psaumes de Mr Lawes et joué des symphonies jusqu'au soir où je fus appelé au logis de Mr Creed. Etaient présents le capitaine Ferrer,sa femme et William Howe. Nous avons fort bien soupé et bien divertis à converser. Après souper je fus appelé par milord et restai causer de ses affaires et des miennes et des affaires publiques, avec grand plaisir. Il me conseilla de ne pas me fier à sir Robert Bernard. Je lui dis adieu et revins chez Mr Creed. Mr Moore avec qui j'avais l'intention de coucher étant couché sans rien sur le corps, sans drap. Et après quelque entretien, au lit où je me sentis indisposé, bien que le lit fût bon, ayant toute la nuit l'estomac chargé de mon souper trop lourd.


                                                                                                             15 Décembre 1662

            Levé et allai chez milord, puis chez le Duc que je suivis dans le parc où, bien que la glace fût rompue et dangereuse, il voulait aller glisser sur ses patins. Ce qui ne me plaisait pas, mais il glisse très bien. Puis retour et dans son cabinet où arrive milord Sandwich. Avec Mr Coventry nous entretînmes longuement des affaires de la Marine. En vérité je me vois de plus en plus l'obligé de Mr Coventry qui s'applique à me faire tout le bien qu'il peut vis-à-vis du Duc. 
            Puis promenade un bon moment dans les galeries, rencontrai le Dr Clarke qui, au cours de la conversation me dit que le rang éminent de sir Charles Berkeley ne tient qu'à ce qu'il est entremetteur entre le roi et milady Castlemaine et que, malgré cela, le roi est très bon pour la reine, dont il dit que c'est une des meilleures femmes du monde. C'est étrange comme le roi est ensorcelé par cette jolie Castlemaine.
            Puis chez milord et avec Mr Creed, Moore et Howe, à la Couronne où nous dînâmes. Ensuite je me promenai dans les galeries, regardant de temps en temps les tableaux, jusqu'à la réunion du Duc et de la commission de Tanger. Le Duc ne resta pas. Le seul point était, nous entretenir avec milord Rutherford nommé aujourd'hui gouverneur de Tanger pour je ne sais quelles raisons, et milord Peterborough est rappelé en Angleterre. On a beau dire que c'est sans animosité, tout le monde voit  bien qu'il n'en est rien. Je regrette de voir un gouverneur catholique envoyé commander là-bas où presque tous les officiers le sont déjà. Mais Dieu sait la raison de tout cela, et tous peuvent voir combien instable est la situation de courtisan.
            Rentrai en voiture m'arrêtant en chemin chez sir John Birkenhead pour lui parler de mon imposition à 42 livres pour les loyaux serviteurs du roi dans l'indigence, et je vois que je n'y puis rien.. Mais il me dit que c'est sir Robert Fort qui a procédé abusivement envers moi, renseignement dont je ferai usage plus tard, au bon moment.
            De là chez le major général, sir Richard Browne, au sujet de mon imposition d'armes pour la milice, mais il était sorti. En traversant l'arrière des abattoirs du marché de Newgate ma voiture fit tomber deux quartiers de boeuf dans la boue, les bouchers arrêtèrent alors les chevaux, et suivit un grand attroupement dans la rue, l'un criant qu'on lui avait causé pour 40 shillings de dommages, l'autre pour 5 livres. Mais en descendant je vis qu'on avait quasiment rien fait, de sorte que je leur donnai 1 shilling et qu'ils en furent parfaitement satisfaits, et je rentrai., 
            Allai voir milady Batten qui me dit qu'elle vient de recevoir une lettre de sir William racontant que lui et sir John Mennes ont failli se noyer en route tant les eaux étaient hautes, mais qu'il va bien. Mais grand Dieu ! quelle mine hypocrite elle prenait en me le racontant.
            Puis je fus voir sir William Penn, restai longtemps causer, me faisant passer plus homme d'action et de résolution dans les affaires publiques que je ne le fus jusqu'à maintenant. Il écoute, mais je sais qu'au fond c'est un gredin et que cela ne lui plaît pas. Mais je vois bien que je puis lui tenir tête, et le plus sera le mieux, en m'occupant de mon travail comme avant. Ce en quoi Dieu me bénit et continue à me bénir. Rentrai et, au lit, fort satisfait, et causai et bavardai avec ma femme pendant que je soupais, à notre vif plaisir.


                                                                                     à suivre...............
                                                                                                          16 Décembre 1662
            Levé et............





















            
                   



            

jeudi 28 décembre 2017

Le Matin Jonathan Swift ( Poème Irlande )













          

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                                     Le Matin

            C'est l'heure où à peine une rare voiture
            Signale l'approche du matin rosissant.
            Du lit de Monsieur s'est échappée Bettine,
            Furtivement elle va défaire le sien.
            L'apprenti bouif, devant la porte du patron
            Désherbe l'allée, puis mouille le sol en cercles.
            Moll ayant manié le balai avec brio
            Passe au frottage de l'entrée et des marches.                                 skynetblogs.be
            Le petit balayeur recherche la rigole
            Là où les roues ont emporté le morceau                                           
Image associée            Le charbonnier lance son cri rythmé,
            Les notes aigües du ramoneur le couvrent
            La queue de fâcheux se forme devant chez le Lord.
            Moll, la souillon piaule à travers la rue
            Le geôlier retourne visiter son troupeau
            Qu'il lâche la nuit pour courir les pourboires.
            Les baillis reprennent leur faction silencieuse
            Et les écoliers flânent, cartables en main.


                                                              Jonathan Swift
                                                                                    ( 1709 )

mardi 26 décembre 2017

Un certain M. Piekielny François-Henri Deserable ( Roman France )

Un certain M. Piekielny
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                                                Un certain M. Piekielny     

            Un jour l'auteur se trouva devant le 16 de la rue Grande-Polulanka à Wilno, en Lituanie. Auparavant il était passé devant la statue d'un jeune garçon tenant une chaussure dans sa main,Roman Kacew, devenu Romain Gary au fil des ans. Jeune encore l'auteur avait lu "La Promesse de l'aube ", autobiographie de Gary, et sur trois pages, l'écrivain, diplomate, double prix Goncourt, raconte sa vie dans cet immeuble et note qu'un certain M. Piekielny leur voisin, et seul parmi les habitants crut sa mère qui  voulait, souhaitait, désirait, pour son Romulchka, il serait d'Annunzio et d'autres mais pas moins. Il le dit à l'enfant mais lui demanda en retour de toujours rappeler à ses interlocuteurs, ses amis ou des présidents, qu' " au 16 rue Grande-Polulanka habitait un certain M. Piekielny ". Romain Gary a romancé sa vie, de son père il disait qu'il fut un acteur du muet, mais Désirable fasciné par l'écrivain-diplomate parti à la recherche de M. Piekielny trouva le père un modeste fourreur juif, séparé de sa mère juive aussi. De Varsovie à Wilno où ils vécurent tous deux jusqu'en 1923, arrivés à Nice il acquit sa personnalité. Mais l'auteur nous fait parcourir les années historiques, jusqu'en ce mois de décembre 1980 et poursuit ses recherches dans les archives de Wilno détruit, cherche-t-il une ombre, difficile car sans doute "...... La petite souris grise de Wilno a depuis longtemps terminé sa minuscule existence dans les fours crématoires...... Il était juif Piekielny pas un de ces Juifs du soleil et du beau langage...... il était un juif de la neige et du silence....... " La quête est longue car les occupants, les Allemands puis les Russes ont détruit les archives. Et Désirable poursuit sa jeune aventure d'écrivain hockeyeur, rencontre ceux qui ont parlé avec Gary, Grenier, Pivot, revient sur la vie de son héros. Au cours de ses fréquents séjours à Wilno il repasse devant la statue du jeune Roman et parfois quelqu'un dépose une fleur dans la chaussure. Gary s'il est un écrivain est aussi un lecteur, notamment de Gogol. Et là notre auteur trouve une nouveau fil et en même temps déroule la carrière de Romain Gary, de ses débuts d'écrivain, de sa vie de pilote de chasse pendant la guerre, de sa vie de diplomate, de ses épouses, et de sa promenade matinale de la rue du Bac au Jardin du Luxembourg. "....... Gary écrit le nom de Piekielny sur la page. Le fait-il naître, renaître ?........ Je ne sais pas....... Il écrit. Il ne pense qu'à cela. Tenir le monde en vingt-six lettres et le faire ployer sous sa loi. " Quelques photos complètent ce livre curieusement écrit et intéressant sujet. - Voir le post du    27 / 7 " Un Mariage en douce " d'Ariane Chemin, Romain Gary et Jean Seberg.