mardi 29 août 2017

L'homme est un dieu en ruine Kate Atkinson ( Roman Grande Bretagne )


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                                               L'homme est un dieu en ruine 

            Des cinq enfants Teddy était le dernier et le préféré de Sylvie, sa mort pouvait la tuer. Mais fort habile elle multiplie les couvées et autres cultures maraîchères et défend la propriété pendant les années de disette, alors que le rationnement et les tickets sont le quotidien des citadins. Teddy s'est engagé, attend son ordre de route, et l'auteur raconte dans ce second volume la vie des Anglais qui bombardent l'Allemagne. Les avions descendus en flammes, les sauts en parachute en toute extrémité. Pages de guerre. Revenu à la vie civile Teddy élève son petit-fils, il est journaliste et travaille pour une petite revue du côté de York. Après les destructions de Brême, Berlin et ailleurs, de jolies lignes décrivent la flore. Beaucoup de jacinthes, des bois et des jardins. Deux femmes obtiennent un succès facile en littérature enfantine, Izzie, soeur de Hugh dans Une vie après l'autre et la maman de Sunny qu'elle abandonne sans sentiment à son grand-père, le père Dominic, fils de famille, punk, drogué dangereux, ne subvient pas aux besoins de l'enfant, il peint de grandes toiles inabouties. Ursula apparaît, mais le principal du livre sont la guerre et les séquences bucoliques.
" L'alouette est connue pour son chant, dit-il, il est très beau...... Le but de l'Art est d'exprimer la vérité et pas d'être la vérité en soi....... " Au retour de la guerre Teddy et son épouse Nancy marquent leur désaccord lorsqu'il s'agit de l'achat d'un article fabriqué hors d'Angleterre " Alors tu as acheté un moulin à café Philips ? Et tu vas me dire qu'ils ne se sont pas salis les mains eux ? Tout le monde se salit les mains dans une guerre. - Pas Philips. Frits Philips a été déclaré " Juste parmi les Nations " après la guerre...... " Teddy a des souvenirs pleins la tête " A quatre cents pieds les jauges de carburant indiquaient zéro...... Teddy ordonna à tout le monde de prendre la position amerrisage...... Ils touchèrent l'eau à une vitesse de 95 Noeuds......... " Viola est-elle enfin prête à écouter la voie de la sagesse qu'enseigne le professeur de yoga son fils " Dharma... D'après une légende hindoue, autrefois tous les hommes étaient des dieux mais ils abusèrent de leur divinité............ Je sais où nous allons cacher la divinité de l'homme. Nous allons la cacher en lui. Il fouillera le monde entier mais il ne regardera pas au fond de lui......... " 

Une vie après l'autre Kate Atkinson ( Roman Grande Bretagne )

Une vie après l'autre
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                                                               Une vie après l'autre

            Sylvie Todd enfouie dans ses coussins bordés de dentelles souffre. Près d'elle seule un petite servante trop jeune pour la circonstance, Bridget, s'affole, apporte l'eau chaude, les linges que sa maîtresse lui commande entre des douleurs de plus en plus aigües. C'est un 11 février 1910, bien qu'assez proche de Londres le futur père ne peut rentrer assez tôt, bloqué par la neige, de même le médecin. L'auteur a deux alternatives, Ursula naît et meurt étranglée par le cordon ombilical, où sauver celle qui sera l'une des héroïnes du roman et que découlerait-il, quel serait le destin des autres personnages tous bien vivants. Ursula vit, Maurice, l'aîné n'a pas cessé de jouer aux Indiens, et le Dr Fellowes se fait servir un solide petit déjeuner par la gouvernante habituellement assez médiocre cuisinière, pour ses côtes de veau à la russe entre autres. Trois enfants suivront la naissance d'Ursula. Ursula qui développe une intuition très forte assez longtemps. Arrive 1914 et la guerre, Hugh est mobilisé, à Fox House les femmes tricotent. Beaucoup d'hommes sont morts, ceux qui reviennent sont blessés, défigurés. Bridget annonce à son entourage que son fiancé est sauvé, ils vont fêter la victoire à Paris. Sylvie et Mrs Glover s'inquiètent à juste raison. 24 heures après leur retour à la propriété le jeune homme meurt, victime de la grippe espagnole. Hugh garde secrets ses souvenirs de guerre. La vie reprend son cours, il retourne à la banque, sa soeur attend un enfant. Izzie est éloignée, l'enfant adopté par un couple allemand. La vie sentimentale d'Ursula est entâchée, sa mère ne l'aide guère. L'auteur décrit un milieu très puritain. Entre celle que l'on appela la Grande Guerre 14/18 et la seconde du siècle dernier la famille Todd voit s'éloigner les enfants. Mais Paméla revient, mariée à un médecin à Leeds, mère d'enfants jeunes elle trouve un abri dans la maison familiale lorsque commencent les bombardements sur l'Angleterre. Et là Kate Atkinson atteint son but. Elle dit avoir voulu décrire la guerre, et c'est réussi. Des dizaines de bombes tombent chaque nuit sur le sud du pays. Londres en ruines. Ursula travaille le jour et le soir devient bénévole, apprend son rôle :
" Patrouiller et surveiller, telle était la devise de Miss Wolf  ".Les garçons survivront-ils militaires engagés ? Chapitres courts, il faut entrer dans le jeu de l'auteur, avancer, reculer, et retrouver les personnages nombreux, les jacinthes, les prés et les landes et l'habileté de Sylvie dans la suite
" L'homme est un Dieu en ruine ".









   

            


            

samedi 26 août 2017

Journal secret Alexandre Pouchkine extraits ( Roman Russie )

Résultat de recherche d'images pour "peintres russes 1900"

                                                                         JOURNAL SECRET
                                                                            (1836 / 1837 )

                                                                                                                A ma femme

            La prédiction se réalise. J'ai provoqué d'Anthès en duel. L'Allemande ne m'avait-elle pas annoncé une mort violente par la main d'un homme blond ? Je sens la puissance du destin, je vois comment il commence à se réaliser, mais je ne peux pas l'éviter car le déshonneur est plus terrible que la mort.
            Le déshonneur est une graine que j'ai plantée moi-même. A présent ses branches m'étranglent. D'Anthès est devenu la punition du destin pour ma faiblesse de caractère. Défiant d'Anthès je deviens comme Jacob aux prises avec l'Ange.
            Si je triomphe je réfuterai les lois de Dieu......
             Mes contemporains ne doivent pas me connaître aussi intimement que je le permettrai aux futures générations. Je devrai veiller sur l'honneur de N. et sur celui de mes enfants tant qu'ils seront en vie. Mais je ne peux pas m'empêcher de coucher mon âme sur le papier. .
            C'est la maladie incurable de l'écrivain.
             Cette maladie est souvent fatale. Mes contemporains me tueraient pour ces révélations à coeur ouvert, ces vraies révélations,  s'ils les apprenaient. Mais les générations futures ne pourront rien nous faire, ni à moi ni à mes arrières petits-enfants........
            À l'inverse du présent, l'histoire n'est ni dangereuse,  ni offensante, seulement amusante et didactique.
            Je ne veux pas emporter dans le tombeau mes péchés, erreurs et tourments.
            Ils sont trop considérables pour ne pas être intégrés à mon monument.
            Dans environ deux cents ans, quand en Russie la censure sera sûrement abolie, on publiera d'abord Barkov et ensuite ces notes, bien que je ne puisse imaginer la Russie sans la censure. Cela signifie que ces textes seront publiés en Europe, mais plus probablement dans la lointaine Amérique.
            C'est affreux de penser qu'à ce moment-là je ne serai plus vivant, et que même mes os seront tombés en poussière.
             Je regarde ma main tandis qu'elle écrit ces lignes et j'essaie de l'imaginer morte..... J'ai de la peine à croire ce destin, pourtant irréfutable...... La mort est la réalité la plus difficile à comprendre, alors que nous acceptons sans sourciller et sans réfléchir les mensonges les plus divers.
          
   Anton Tchekov -by Levitan                                     ************************           
            
            L'ultime volet de la prédiction de la voyante allemande s'accomplissant, la mort de Delvig était un signe effrayant. À l'époque je n'en étais pas conscient,  mais aujourd'hui tout m'apparaît tellement évident et rempli de signification. La chute de la bague lors de la cérémonie nuptiale, la flamme vacillante de la bougie qui s'est éteinte toute seule, m'ont irrévocablement convaincu qu'il ne pouvait rien advenir d'heureux dans ce mariage. En fait nous prédisons nous-mêmes notre avenir.
             Pour ne pas perdre le reste de courage, je me suis consolé en songeant à la nuit de noces qui m'attendait : la joie de posséder enfin N. prié Dieu pour que cette joie perdure ma vie entière d'homme marié. 
             Une soif de bonheur absolu me poussa à me marier. Oui le mariage me paraissait le remède magique à ma débauché et à mon ennui. Il s'agissait de tenter de me fuir moi-même, étant incapable de changer et de devenir un autre. 
Résultat de recherche d'images pour "peintres russes 1900"             N. fut ma chance fatale. Dans ma négociation pour soustraire N. à sa mère j'ai sacrifié toute dot et je me suis beaucoup endetté pour payer les festivités des épousailles. En attendant le jour du mariage, après les fiançailles, j'ai pensé..... comment ma vie allait être bouleversé après mon serment de fidélité, car je comptais sincèrement le respecter.
            Auparavant il m'arrivait fréquemment de posséder cinq femmes par jour. Je me suis habitué à une grande variété.... de tempéraments féminins et à tout ce qui différencie une femme d'une autre. Un tel renouvellement ne permettait pas à mes passions de s'engourdir et la poursuite constante de cette diversité était la substance même de ma vie.
            Quand j'ai vu N. pour la première fois j'ai compris qu'il se produisait quelque chose d'irréversible. Le désir de la posséder fut immédiatement si puissant qu'il s'est instantanément transformé en désir de l'épouser. Cela m'était déjà arrivé mais jamais avec une telle force. Je n'avais jamais ressenti une telle admiration pour l'élue de mon coeur.
            Lorsque ma proposition fut finalement acceptée, je me suis arrangé, profitant de ma position de futur gendre, pour rester seul avec elle. Je l'ai attirée à moi et embrassée et, laissant ma main remonter jusqu'à son sein, j'ai commencé à gratter avec l'ongle l'endroit où était supposé se trouver le téton. Très vite mon ongle a trébuché dessus. N. rougit mais ne me repoussa pas et chuchota seulement :
            - Arrêtez, maman pourrait vous voir.
             Sa mère est une vraie salope.......... Elle opprimait ses filles de mille et une manière et les cloîtrait comme au couvent. J'ai regardé les soeurs de N. et songé à faire de ce couvent mon harem.
            En bon futur marié je me reprochais ces pensées pécheresses, bien qu'il me fût impossible de m'en débarrasser.
            J'adorais ma novice et envisageais de la métamorphoser pas à pas en amante experte. Mais il était écrit que mes plans ne se réaliseraient pas, et voilà sans doute pourquoi je suis toujours amoureux d'elle.
            Je ne vis pas passer la lune de miel tant son éducation m'était agréable. J'appris la langue que parlait son corps et N.apprit à réagir à ma langue,  et pas seulement à elle. Mon obstination et son adresse la conduisaient de plus en plus souvent à des hurlements déchirants qui, à mes oreilles sonnaient comme de la musique.
            Posséder une telle beauté idéale, et de surcroît vierge, est le plus grand bonheur de l'homme.
            L'intensité qui s'en dégage est si forte qu'elle ne peut pas durer. Quand je m'enfouissais dans mon épouse fraîchement cueillie, l'enlaçant avec passion, sentant ses mouvements timides réprimés par sa honte et son immaturité, sentant sa respiration chaude au creux de mon oreille, mon état d'exaltation était comparable à celui de la création artistique.

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Résultat de recherche d'images pour "peintres russes 1900"               Quelle joie de conduire N. dans les allées sinueuses du jardin des plaisirs..........
                ........... Malheureusement,  elle n'est pas douée au lit....... Elle n'a qu'un orgasme par nuit et après avoir joui ne veut plus en entendre parler. Chez une épouse c'est une qualité de grande valeur,  elle ne vous importune pas avec son désir lorsque vous voulez dormir. Mais au début je la chatouillais beaucoup.                                                                                                   

            J'avais tout le temps la sensation de tricher avec la nature. Moi, un nain avec le visage d'un singe, possédant une déesse. Et elle n'est pas apte à apprécier mes qualités d'amant parce que pour ce faire il lui faudrait un point de comparaison,  Dieu l'en préserve.
            Au cours de ces premières journées nous avions décidé de ne nous cacher aucune de nos pensées,  d'un commun accord,  si intime fût-elle. Je me rendais compte que je serais bien incapable de respecter cet accord mais voulais faire naître en N. l'impression de vouloir partager ses pensées et désirs avec moi. Le plus important était de ne pas s'énerver quoi qu'elle pût me raconter. Obéissant à cette règle je faisais de mon mieux pour ne pas lui laisser voir la tempête d'indignation ou de jalousie à l'écoute de ses histoires.
            N. avait pris notre accord au sérieux. Je lui ai demandé si elle avait déjà eu, de quelque manière, une affaire de coeur,  et elle s'est confessée.
            Lorsqu'elle avait dans les quatorze ans, elle avait été invitée, avec sa mère et ses soeurs au palais du Tsar. A un moment elle s'est trouvée perdue parmi les invités. Une très belle demoiselle d'honneur s'est avancée vers elle et a dit que Sa Majesté voulait qu'on la lui présentât. Ma petite fille a tremblé de peur et a humblement suivi la demoiselle d'honneur. Celle ci a conduit N. au petit salon. Le Tsar était là, assis dans un fauteuil. La demoiselle a annoncé N. et l'a laissée debout au milieu de la pièce lugubre. Le Tsar s'est levé, est allé jusqu'au sofa et l'a fait asseoir près de lui. Il l'a questionnée tout en remontant sa jupe de plus en plus haut. N. n'osait pas bouger et essayait de répondre de manière détaillée. Quand l'impérial a écarté ses jambes N. a senti " des vagues de chaleur la balayer ". C'est ainsi qu'elle m'a décrit ce qu'elle avait ressenti.
            Soudan quelqu'un a frappé à la porte. Le Tsar s'est levé,  a rajusté sa robe, et a quitté le petit salon. Dans la minute la demoiselle d'honneur est revenue et a raccompagnée N. jusqu'à la salle de bal où dansaient les autres invités.
            La mère de N. commençait à s'inquiéter de sa disparition, mais quand la demoiselle d'honneur lui a dit qu'elle avait été présentée au Tsar, elle s'est calmée et s'est contentée de regarder N. avec suspicion.
            N. semblait si excitée par cette aventure qu'à leur retour à la maison sa mère l'a convoquée dans ses appartements et lui a demandé si elle était restée seule avec le Tsar. N. a répondu qu'il n'y avait personne dans le petit salon, à part eux, qu'on était venu chercher le Tsar et qu'ils n'avaient pas eu le temps de beaucoup parler.
            - Espèce de... menteuse ! ai-je dit aussi calmement que possible, effrayé à l'idée qu'elle pourrait entendre grincer mes dents.
             Ma femme a répondu qu'elle n'aimait pas mentir, que tout ce qu'elle avait dit à sa mère était vrai et que celle-ci n'avait pas posé d'autres questions.
Image associée            Quand Koko est devenue demoiselle d'honneur je lui ai interdit d'habiter le palais, ce qui a rendu le Tsar encore plus furieux contre moi.
            N. se montra fort gênée de l'argent que le Tsar lui a donné en cadeau de mariage. Je l'ai bien remarqué. Lorsque nous avons déménagé à Tsarskoie Selo, elle a tenté par tous les moyens d'éviter le chemin du Tsar, choisissant des endroits isolés pour nos promenades. Mais un jour,  lors d'une sortie paisible autour du lac, nous avons rencontré le couple impérial, et l'impératrice a confié N. au palais.
             De retour à la maison N. s'est lamentée, elle ne voulait plus se montrer en société. Cela m'a paru suspect,  et je lui ai soutiré la confession que je viens de rapporter.
            J'avais appris, il y a bien longtemps,  de la bouche d'une demoiselle d'honneur que  j'ai guérie de ses crises de nerfs en la baisant, la passion que nourrissait l'empereur pour ses petits pêchés innocents. Ainsi donc la confession de N. ne m'étonna pas. Je savais d'avance ce qu'elle allait me raconter. Je ne voulais simplement pas découvrir que ma femme était une de ces " images vivantes ". Le Tsar a fait un grand serment de fidélité à l'impératrice et, en conséquence ne baise personne à part elle. Cependant pour profiter de l'essaim de jeunes filles qui l'entoure il leur ordonne de se déshabiller....... Ses yeux se délectent....... s'en va sans les toucher.
            L'Impératrice sait tout cela,  mais estime qu'il ne rompt pas son serment en agissant de la sorte.
            De nombreuses demoiselles d'honneur souffrent de ces rapports bénins avec le Tsar, mais N. était contente que pour elle ils fussent restés de nature innocente.
            Que le Tsar essayât à nouveau de l'approcher l'inquiétait. Je l'ai consolée et lui ai conseillé, au cas où le Tsar tenterait encore de badiner ainsi, de me décrire comme un mari jaloux au point de promettre la mort à quiconque essaierait de seulement regarder son minon. Plus tard elle m'a appris que peu après cette conversation, un jour qu'il tentait de la retenir elle avait eu l'occasion de le lui dire. Depuis il n'a plus osé recommencer. Je sais qu'il a peur de moi.
            Comme il sera heureux si je meurs. Enfant de putain !
            Je regrettais déjà à ce moment - là d'avoir imposé à N. un accord de sincérité, mais je me suis préparé à accepter toutes les conséquences agréables et désagréables qu'entraînait son adhésion. Un mari qui ignore les pensées de son épouse risque de devenir cocu. Et être cocu est dégoûtant et insupportable.  Nul n'a autant tiré parti que moi de l'inconsciente ignorance des maris, et combien j'ai pris plaisir à regarder leurs cornes grandir, invisibles à tous sauf à moi.



                                                                             à suivre...............


vendredi 4 août 2017

Françoise Dolto Marie Pierre Farkas Marianne Ratier ( BD France )



                                                  Françoise Dolto

                                                     L'heure juste 

            Françoise née Marette ne devait pas devenir médecin, et dû même lutter pour se présenter au bac. En 1908, année de naissance à Paris dans le l6è arrondissement, les jeunes filles se préparent à devenir de bonnes épouses. Sa mère préférait sa soeur aînée, et le drame qui frappe la famille creuse le fossé entre Françoise et madame Marette. Elle s'obstine et passe tous les examens avec l'appui de son père " ....... Papa..... il aime jouer aux échecs avec maman, matin et soir. Le reste du temps il calcule, par exemple quelle serait la courbe dessinée par la cuillère accrochée à la queue du chat...... " Enfant curieuse elle pose des questions "......  Au ciel c'est quoi, c'est comment, c'est où au ciel ?...... " Elle apprend à lire, mais déçue, veut " désapprendre ". Elle préfère les histoires qu'elle se raconte. Elle s'occupe toujours, mademoiselle l'a compris, " ....... un vieux carton pour que je confectionne un lit pour ma poupée..... " et elle tricote. Sa mère ne lui fait guère de compliments. Et les années de guerre, 14/18, crainte pour les proches. Et Françoise a des idées précises sur Judas mais Madame Marette semonce la fillette " .....  Françoise, Françoise..... demande donc au Bon Dieu de t'empêcher de penser...... " Après le drame, cette maladie inguérissable, Madame Marette s'attache à déjouer les projets de Françoise. Elle dissimule l'enveloppe qui convoque la jeune fille au bac. Et Françoise obstinée, obligée de quitter le domicile familiale tant la tension entre sa mère et elle est forte, pousse les portes et pratique le métier qu'elle s'était choisi, elle est pédiatre et s'est attachée à soigner les conflits entre mère et enfants, entre autres. Elle-même a, plusieurs années, suivi une analyse. Texte et dessins agréables, joli roman-biographie graphique. Une approche pour poursuivre la lecture des ouvrages de Dolto.

lundi 31 juillet 2017

Premier arrêt après la mort Jacques Attali ( Roman policier France )



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                                                 Premier arrêt après la mort

            2018, 16 juillet 2018. la France épargnée par des attentats terroristes, alors que les pays voisins comptent leurs morts, la France apprend le 1er assassinat, affreusement mutilé, difficilement identifiable, seul maigre indice un vers d'un poète quasi inconnu hors des pays anglo-saxons. Et une course contre la montre débute, le ou les meurtrier donne une date limite à qui doit se reconnaître dans ces quelques mots et avouer un passé sulfureux. Dans le cas contraire le pays sera l'objet de grands drames. Parallèlement, Jacques Attali fait le point chaque jour sur les événements mondiaux, La Chine et la Corée, le Japon qui accepte de ne pas avoir de bombe nucléaire, Poutine et son désintérêt pour la Syrie, et d'autres informations que nous recevons aujourd'hui chaque jour. Car l'enquête semble inquiéter le chef de l'Etat et certains de ses ministres. Efficace l'histoire, car l'enquête est bien conduite, par des policiers en plein déménagement : ils quittent le mythique quai des Orfèvres pour les Batignolles mais il faut avouer que le malaise vient des personnages. Fatima l'enquêtrice principale est tellement préoccupée par ses problèmes sentimentaux et sa vie personnelle, qu'elle semble hors jeu, pourtant elle tient entre les les mains un livre, sur le conseil de son père libraire : " Un roi sans divertissement ", Giono, explicatif peu-être " ...... Il racontait parfaitement combien chaque être humain peut être fasciné par le mal....... " Léo, on ne sait trop. Zemmour, adjoint de la commissaire, semble plus probable, modèle selon l'auteur, de Colombo. L'histoire parce que bien menée se termine dans la nuit du 4 août, 20 jours plus tard.





vendredi 28 juillet 2017

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 80 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

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                                                                                                               17 octobre 1662

            Ce matin visite de Tom, il me demande de le conseiller sur la façon d'agir avec la mère de sa maîtresse pour ce qui est de lui assigner un douaire. Mais j'entends lui parler sous peu et lui dire mon opinion.. 
            Puis par le fleuve chez milord Sandwich à qui je racontai comme les choses se sont bien passées à la campagne, ce dont il a été très content et il paraît s'intéresser fort à moi. Puis à la Grand-Salle avec Mr Creed et ensuite le capitaine Ferrer que j'avais fait appeler. Nous allâmes tous trois dans la chambre de Creed où nous restâmes un bon moment à boire du chocolat. On me raconte les événements de la Cour : que les jeunes gens ont le dessus et que les vieux seigneurs graves sont mal en cour. Que sir Henry Bennet ayant pris la place de sir Edward Nicholas sir Charles Berkeley est nommé à la Bourse privée. C'est un homme fort vicieux et dont Mr Pearse, le chirurgien ce qui m'amuse, m'a raconté qu'il offrait à son épouse 300 livres par an pour être sa catin. Il m'a dit aussi que personne à la Cour n'avait davantage l'oreille du roi. L'influence de milady est plus grande que jamais. Et que Mrs Haslerigge, célèbre beauté, a été engrossée et est couchée. Il me dit aussi que c'est milord St Albans qui sera le probable trésorier général. Toutes choses qui m'affligent fort.
            Restai à causer un bon moment. Puis par le fleuve chez Mr Moore qui n'est plus alité et est convalescent. Puis à la maison et avec le commissaire Pett par le fleuve voir les mâts que Wood propose de vendre, nous les trouvons mauvais. Puis à Deptford pour certaines affaires et rentrai et allai à mon bureau. Nous n'avons parlé que de la vile conduite que sir John Mennes et sir William Batten ont eue à son égard quand ils furent, il y a peu, à Chatham. Ce que je suis fâché d'apprendre. Mais je ne doute pas que nous terrassions sir William Batten avant longtemps.
            A mon bureau. Apprenant que sir William Penn n'était pas bien je fus le voir et restai avec lui, puis à la maison, et au lit.


                                                                                                    18 octobre
Résultat de recherche d'images pour "samuel PEPYS"            Ce matin, ayant décidé que mon frère recevrait la mère de sa maîtresse demain, j'ai envoyé ma femme coucher chez eux ce soir pour le conseiller en cette affaire. Et moi au bureau toute la matinée et l'après-midi attentif à mes ouvriers, particulièrement mes menuisiers qui vont embellir ma salle à manger. Le soir à mon bureau puis allai voir sir William Penn qui continue à beaucoup souffrir, puis rentrai et, seul, au lit. Mais préoccupé par mes affaires et celles de Tom je ne dormis guère, non parce que j'étais tracassé mais parce qu'une foule de pensées m'obsédait.

                                                                                                     19 octobre
                                                                                 Jour du Seigneur
            Fis ma toilette le matin et mis ma première cravate de dentelle neuve. Et celle-ci est si élégante que je suis résolu à faire ma principale dépense de cravates de dentelle ce qui mettra tout le reste d'autant plus en valeur. Puis à pied chez mon frère où je trouvai Mr Cooke et, en parlant, je m'aperçois que lui et Tom ont promis un douaire de 50 livres à sa maîtresse et disent que j'ai donné mon accord à ce qu'elle reçut un douaire de 30 livres par an sur Stirtloe et le reste pris sur sa dot. Ce qui me rendit fou furieux et très courroucé de ce que cette affaire soit conduite si sottement, contre mon opinion et contre toute raison. Mais je voulus bien me retenir de le manifester et je reçus Mrs Butler sa mère et Mr Lull et sa femme, gens fort polis, très aimablement sans trace de mécontentement. Tom nous fit servir un bon et élégant dîner. Nous parlâmes peu affaires, laissant cela à un certain Mr Smith pour son compte et à moi pour le nôtre. Je pris congé pour aller voir Mr Moore qui se remet bien. Son médecin, un certain Dr Merrett, vient le voir. Il nous entretient fort bien un moment d'anatomie entre autres, très agréablement. Puis allai me promener au jardin avec Mr Townshend. Leur demandai conseil sur l'affaire de Tom. Il me dit qu'il parlera à Smith et dit que mon offre de lui donner un douaire de 30 livres par an et non davantage est raisonnable.
            Puis Tom m'attendant nous prîmes le chemin de ma maison en causant et le grondant de sa sottise et en lui disant clairement à quoi il doit s'attendre s'il continue de cette façon, car jamais il n'aura cette femme aux conditions qu'ils exigent, 50 livres.
            Il me laissa et je fus chez mon oncle Wight où je soupai. Il y avait la jolie Mrs Margaret Wight que je juge très jolie et que j'ai grand plaisir à regarder. Nous fûmes très gais et je plaisantai. Mais je suis fâché d'apprendre que la nouvelle vente de Dunkerque est si généralement mal prise, ce qui, je le vois, est le cas chez les négociants. Et d'autres choses, comme la révocation d'officiers à la Cour, gens de bien mal remplacés, et tout le reste rendu bien pire dans la rumeur publique que dans la réalité. Et ce soir, pour je ne sais quelles raisons, ordre de fermer les portes de la Cité et de doubler la garde partout. Puis rentrai et après avoir préparé ma visite au Duc demain, au lit.
            En vérité je trouve que tout le monde a l'esprit très agité et que ce que font la Cour et le Conseil est très mal pris, ce qui est très fâcheux s'il y a un début de troubles, ce qu'à Dieu ne plaise.


                                                                                                             20 octobre
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Résultat de recherche d'images pour "samuel PEPYS"            Levé et dans le carrosse de sir John Mennes, et avec sir William Batten à Whitehall où le Duc est maintenant revenu loger et dans la nouvelle petite chambre de Mr Coventry. Au bout d'un moment montai voir le Duc qui était à sa toilette. Là, le jeune Killigrew fit un tel éloge du Maraud, nouvelle pièce de Tom Porter jouée seulement samedi chez le Duc qu'on aurait cru que jamais pareille pièce n'avait été vue sur scène. C'est aussi ce que me dit hier le capitaine Ferrer, et plus tard ce matin le Dr Clarke qui l'a vue. A tel point qu'après en avoir terminé avec le Duc puis être allé avec le commissaire Pett chez Mr Lely le grand peintre qui sortit pour nous recevoir, mais s'imaginant que je venais lui commander un tableau prit les devants en nous disant qu'il n'aurait pas le temps durant trois semaines, ce qui me paraît exceptionnel et puis de voir avec quel faste sa table était dressée pour dîner seul. Entre autres tableaux j'ai vu le portrait de milady Castlemaine que je désirais tellement voir, tableau ravissant et dont il me faut une copie. Puis chez mon frère où je mangeai quelque chose et emmenai ma femme au Théâtre du Duc. La salle était pleine de monde mais, soit que nous en ayons trop attendu ou pour une autre raison, je ne sais, je n'ai jamais été moins content d'une pièce de théâtre, bien qu'il y eût des chants et des danses de qualité, mais pas d'invention. Et ce qui la rendait moins satisfaisante, c'était ma conscience qui me disait que je n'aurais pas du venir à cause de mon  voeu, qu'en outre mon travail me réclamait. Mais enfin, quand je rentrai je versai ma pièce d'une couronne dans le tronc des pauvres selon mon voeu. Il n'y a donc pas de mal, que du travail et de l'argent perdus et ma vieille habitude des plaisirs réveillée que je réprimerai plus soigneusement par la suite car, Dieu merci ! ces plaisirs perdent leur charme au moment même où je m'y livre. Retour en voiture après avoir un peu travaillé à mon bureau et avoir vu sir William Penn toujours malade et je fus au lit.
             Dunkerque, me confirme-t-on est définitivement vendu. Ce dont je suis bien fâché.


                                                                                                         21 octobre

            Levé et m'habillai devant mon frère Tom. Je le grondai pour être assez sot pour s'être laissé berner en contractant ce mariage. Je vois qu'il fait tout ce qu'il peut pour obtenir cette femme et qu'elle et les siens auront plus que ne mérite sa dot passée maintenant de 6 ou 700 livres à 450; Je montrai petit à petit à Tom qu'il ne gagnerait pas 100 livres à l'épouser à sa façon de lui constituer un douaire. Ayant terminé avec lui au bureau toute la matinée. Au milieu de notre réunion comme mes ouvriers posaient ma balustrade sur ma terrasse, sir John Mennes les aperçut et se mit à jurer. Je ne fis pas attention mais fus contrarié, et le suis encore au vif par crainte que cela ne le décide à prendre le cabinet et ma chambre, ce dont, je l'affirme, j'ai maintenant peur. Mais c'est mon immense sottise que d'être tant tracassé par ces vétilles plus que par la perte de 100 livres ou par des événements de plus grande conséquence. J'oublie la leçon que je prêche aux autres " ce qui dépend de nous et ce qui  ne dépend pas de nous " ( Epictète ).
            Après dîner à mon bureau la tête et le coeur tout pleins d'affaires difficiles, puis par le fleuve avec Mr Smith voir Mr Lechmere, l'avocat, au Temple pour l'affaire Field. Il me dit nettement que puisqu'il y a verdict du jury contre nous on ne peut empêcher que l'affaire ne vienne en jugement. Il m'en coûtera 30 livres de dommages-intérêts pour avoir, avec les autres, fait emprisonner Field sans que nous soyons juges de paix pour la Cité, bien que nous le soyons pour le Middlesex. Ceci me tracasse, mais j'espère que le roi nous remboursera  .  botterman-empire.blogspot.fr
Image associée            Puis allai à Ludgate Hill voir Mr Smith le notaire à qui Mrs Butler confie son affaire concernant sa fille et mon frère. Il me dit que la dot n'est que de 400 livres, ce qui me tracasse plus que jamais. Ils se plaignent, trouvent que la maison de mon frère est trop petite. Aussi après lui avoir nettement dit mon opinion je partis. Nous devons nous revoir demain, mais je crois que l'affaire sera rompue, ce dont je suis désolé pour Tom, mais cela ne se peut empêcher sans causer sa perte. De là chez Mr Moore assez bien remis. Nous examinâmes l'affaire de Mrs Goldsborough, et le fils de celle-ci arrivant, comme convenu, je lui dis notre décision de lui faire rétrocéder la propriété.
            Mon frère est aussi venu et en présence de Mr Moore je l'ai avisé et conseillé sur son mariage et lui exposai comme nous avons tous été trompés par la sottise de Mr Cooke. Puis à mon bureau, réglai maintes affaires, rentrai et souper et au lit. Sir William Penn toujours très souffrant.


                                                                                                                 22 octobre 1662

            Levé et emmenai ma femme et son frère à Covent Garden près du nouveau logis de son père, en voiture. J'allai chez milord Sandwich qui me reçoit avec de plus en plus de bonté, maintenant qu'il voit que le monde me respecte, et il est mon très noble protecteur.
            Parlons beaucoup avec milord et Mr Povey des affaires de Tanger.
            De là, rencontrai Mr Cooke à qui j'ai parlé de la dot de Mrs Butler. Il persiste à dire qu'elle s'élèvera certainement à 600 livres, alors qu'il sait aussi bien que moi qu'elle n'est que de 400 livres. Mais c'est un sot et il s'est payé notre tête. Puis par le fleuve chez mon frère, de là chez Mr Smith avec qui je m'entretins franchement, et elle avec moi. Je constate qu'elle ne donnera que 400 livres et pas davantage et qu'elle ne veut pas donner cela sans douaire auquel elle s'attend et que je ne veux pas accorder pour cette dot. Je constate que Cooke a fait des promesses tout à fait inconsidérées des deux côtés et nous a donc trompés, mais je ne vois pas ce qu'on peut faire car je constate qu'elle avait une beaucoup plus haute idée de la maison et de la situation de Tom. Enfin nous rompîmes l'affaire complètement, mais avec beaucoup d'amitié et d'amabilité. Nous aurions été contents de savoir à quoi nous en tenir plus tôt, sans être égarés par cet individu, à notre honte et pour notre embarras. Car je la trouve discrète et sérieuse, sa fille, me dit-on et je le crois, est femme de bien, et si leurs fortunes étaient en proportion, bien qu'elle critique la maison de Tom et ses défauts de parole, je crois que nous nous serions mis d'accord sur le reste. Après nous être dit adieu aimablement je fus chez Tom et lui fis un compte rendu complet de cette triste nouvelle. Je vois bien qu'il en est grandement agité, mais paraît disposé à se laisser guider, et qu'agir autrement ne serait pas dans son intérêt. Je le persuade de se remettre à son travail et espère que c'est ce qu'il fera. Mais pour ce qui est du rôle qu'ont joué Cooke et le Dr Pepys je saurai une autre fois que ce sont deux sots.
            Puis, comme il pleuvait à verse, rentrai en voiture après m'être fait raser par Benier qui connaît tous les acteurs et me dit que Betterton n'est pas marié avec Ianthe, comme on le prétend, mais aussi que c'est un homme posé et sérieux, travailleur et modeste et déjà riche de ce qu'il gagne et met de côté. Et jusque tard à mon bureau, réglai de nombreuses affaires et mis de l'ordre dans mes pensées pour mes affaires fort nombreuses en ce moment. Puis rentrai et au lit.
            Ce soir, comme me l'apprend le son des cloches de l'église de Barking, on a enterré ma pauvre Morena dont la maladie sans espoir a tué son pauvre père. Lui mort de chagrin elle dit qu'elle ne saurait guérir ni avoir envie de vivre et, à partir de ce moment, elle fut de plus en plus languissante, et la voilà morte et enterrée.


                                                                                                          23 octobre

            Levé et au milieu de mes ouvriers puis au bureau en réunion toute la matinée. Nous rendîmes tous visite à sir William Batten qui, paraît-il, n'a pas été bien du tout de tout hier, mais on l'a saigné et va maintenant assez bien. Après le bureau j'allai voir sir William Penn, mais il souffre toujours beaucoup de la goutte et est au lit, il ne peut faire aucun mouvement sans beaucoup souffrir. A mon bureau toute la soirée, réglai des affaires publiques et privées. Le soir à la maison, souper et au lit. Depuis que je me suis remis au travail, rempli de contentement. Que Dieu ne m'en prive point !

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Résultat de recherche d'images pour "chocolat boisson 17è siecle"                                                                                                                                                                              24 octobre

            Après être, avec grand plaisir, resté couché avec ma femme à causer et à folâtrer au lit ( cela fait plusieurs années que nous sommes, et maintenant de plus en plus, un couple très heureux, Dieu soit loué ! ) je me levai et allai à mon bureau, puis par le fleuve et à pied à Deptford pour m'entretenir avec Mr Crowley et Davies du dessein que j'ai eu ces temps-ci de tenir des rôles des différents travaux effectués dans les arsenaux, ce contre quoi ils n'ont point d'objection que leur ignorance et leur répugnance à faire ce qui est pénible et qui n'est pas leur routine. Mais cela me plaît et je veux persévérer. Puis à la maison où je dînai avec ma femme d'un excellent plat de tripes selon ma recette, couvert de moutarde, comme je l'ai déjà vu chez milord Crew. Somptueux repas et je me fis apporter un verre de vin. Puis allai voir sir William Penn toujours alité et qui souffre beaucoup. Puis au Trésor voir sir John Mennes qui payait des soldes de marins, et le soir rentrai et dans mon bureau ayant vu sir William Batten toujours malade, je commençai à rédiger mon projet sur les rôles que tiendraient dans les arsenaux les vérificateurs des rôles, selon les différents travaux qui s'y font, projet qui me satisfait tout à fait et je suis sûr qu'il rendra de grands services. A 9 heures du soir rentrai et souper et au lit.
            Ce midi visite de Mr Pearse, le chirurgien. Il me raconte le fâcheux état de la Cour, que le roi fait grise mine à quiconque est acquis à la reine, et en particulier aux Anglais qu'elle a amenés ou qu'elle a depuis ici, de crainte qu'ils n'aillent lui conter comment il se comportement avec Mrs Palmer, de sorte que, bien qu'il ait promesse et qu'il doive sans faute être nommé chirurgien de la reine il ne sait que faire, s'il doit accepter ou non, puisque le roi est si changé. Et elle n'accorde rien à tous ses protégés qu'elle laisse repartir pour le Portugal, bien qu'elle les eût fait venir en les arrachant à leur famille contre leur gré, par des promesses d'avancement, sans rien faire pour eux. Mais il me dit que c'est le propre médecin de la reine qui lui a dit, il y a moins de trois jours, que la reine sait ce que fait le roi et comment il se comporte envers milady Castlemaine et envers d'autres, comme tout un chacun. Mais bien qu'elle ne manque pas de caractère, comme il ne lui servirait de rien d'y prêter attention pour le moment elle se fixe pour règle la patience. Ce dont je suis très heureux. Mais je prie Dieu de nous garder en paix, car ceci et d'autres choses causent un mécontentement général.


                                                                                                                 25 octobre 1662

            Levé et au bureau en réunion avec Mr Coventry, nous deux seulement les autres étant absents ou malades. Dînai à la maison avec ma femme d'un bon plat de pieds de boeuf à la moutarde. Tout l'après-midi seul à mon bureau et au milieu de mes ouvriers qui ont terminé ma salle à manger, tout à fait belle et complètement à mon goût.
            Dans la soirée à mon bureau pour différentes affaires puis à la maison et au lit, l'esprit chaque jour plus serein depuis que je m'applique à mon travail et je serai bien heureux quand les tracas que causent ma maison seront achevés.


                                                                                                                   26 octobre
                                                                                                Jour du Seigneur
            Levé et mis ma nouvelle cravate de dentelle qui est très élégante. A l'église où j'ai vu pour la première fois Mr Milles en surplis. Mais il était ridicule qu'il l'ôtât en le faisant passer pardessus la tête, au pupitre après avoir fini, devant tous les fidèles pour monter dans la chaire prêcher sans surplis.
            A la maison et dînai avec Mr Simpson, mon menuisier et mon frère Tom, d'un excellent cochon bien gras. Tom est fort affecté par sa déception, mais tout cela s'arrangera bientôt. Puis de nouveau à l'église où j'entendis un Écossais peu futé faire un sermon très ennuyeux. Puis rentrai et allai voir sir William Batten à peu près remis, puis chez mon oncle Wight pour montrer ma belle cravate et voir Mrs Margaret Wight, mais elle n'y était pas. Toute la journée des soldats ont parcouru la ville, car il y avait une alerte et de nombreux quakers et d'autres ont été emprisonnés. Mais je crois que c'est sans raison. Seulement on dit que dans le comté de Dorset on a découvert un soulèvement. Rentrai après souper et puis dans mon cabinet de travail et faisant mes comptes du mois je me trouve un peu moins en fonds que le mois dernier, à la suite de mes dépenses de cravates et de vêtements. J'ai encore 679 livres, ce dont Dieu soit loué. Puis rentré et au lit, l'esprit en paix, Dieu soit béni, mais craignant que ma chandelle ne s'éteigne, d'où ce griffonnage.


                                                                                                            27 octobre
                                                                                                                  lasultanemag.com 
Image associée            Levé et après avoir donné ordre au plâtrier de commencer le dernier enduit de ma maison allai par le fleuve présenter mes respects au Duc et, pendant que je déambulais dans la grande galerie arrivent Mr Coventry et sir John Mennes. Nous nous rendons chez le Duc et, après que celui-ci eut fait sa toilette, dans son cabinet, où je lui ai rendu compte de la situation. Ensuite, comme sir John Mennes demandait à avoir quelqu'un qui l'assurât dans sa charge, sir William Penn est désigné pour l'aider et Mr Pett assistant de l'intendant de la Marine. Mr Coventry demanda à en être exempté, de sorte que j'espère, c'est du moins ce qu'il me semble, qu'on ne m'adjoindra personne. Seulement Mr Coventry désire que je trouve du travail pour un de ses commis, ce que je ne lui ai pas refusé. Enfin j'y songerai pour savoir si je puis le faire sans porter tort à mes commis.
            Puis chez milord Sandwich qui, maintenant, m'appelle dans son cabinet et s'est entretenu seul avec moi des craintes de la Cour d'un soulèvement populaire. Il ne lui plaît pas du tout que Mr Monck soit si acharné contre une bande de pauvres hères qu'il harcèle dans les rues. Il voudrait qu'il s'emparât des principaux meneurs et les châtiât, alors que cela ne fait que marquer les hésitations du roi. Quant à Dunkerque, il ne comprend pas que les gens avisés s'en souviennent et ne fait aucun cas de ce qu'on dit, car il déclare que ce n'était pas Dunkerque mais les autres ports qui nous inquiétaient et continueraient de le faire. Tout se passait en effet comme si nous ne l'avions pas. Il m'a aussi parlé des nouveaux ministres d'Etat, sir Henry Bennet et sir Charles Berkeley, de leur nomination et du gros jeu que joue milady Castlemaine à la Cour, que je pris l'occasion de mentionner car on en parle beaucoup.Il me parla ensuite du pauvre Mr Spong qui, interrogé avec d'autres devant le Roi et le Conseil ( ils avaient été arrêtés comme suspects et il me semble que Spong est considéré comme assez coupable pour lui infliger le supplice du chevalet ou autre ), remarque milord Sandwich et dit qu'il était bien connu de Mr Pepys. Mais milord savait que les seules relations qu'il eût avec moi concernaient la musique et la flûte à bec, que je le croyais quelqu'un de tout à fait innocent, et en vérité j'ai grande pitié de lui. A la fin de notre entretien particulier nous sortîmes et avec les commandants Cuttance et Bunn j'examinai leur dessin d'un pont pour Tanger, qu'ils apporteront demain au bureau à ma demande.
            A la Grand-Salle de Westminster où je me promenai longtemps avec Mr Creed puis à la grande table d'hôte à une demi-couronne de la Tête du Roi près de Charing Cross. Fort excellent et élégant dîner et compagnie fort distinguée et très bien servi.
            Après dîner nous allâmes dans une autre pièce causer en buvant une cruche de bière. Il m'a montré notre commision où le duc d'York, le prince Rupert, le duc d'Albermarle, milord Peterborough, milord Sandwich...... moi-même et le commandant Cuttance, sont associés pour assurer le service de Tanger, ce qui, à mes yeux est un grand honneur qu'on me fait.
            Il m'a dit quelle grande faction il y a à la Cour et par-dessus tout on murmure que le jeune Crofts est le fils légitime du roi qui avait épousé sa mère. Ce qu'il y a de vrai là-dedans, Dieu le sait. Mais je crois que le duc d'York ne se laissera pas ainsi escamoter trois couronnes.
            Puis longue promenade à Whitehall dans les galeries jusqu'à ce que, comme ils en ont ordre à l'égard de tous les inconnus, un homme s'approcha pour nous dire que, puisque nous n'étions pas connus et qu'on nous avait vus déambuler quatre ou cinq heures, ce qui était faux à moins de compter le matin, on lui ordonnait de nous demander qui nous étions. Nous le lui dîmes il s'excusa alors de sa question et se trouva satisfait. Ces façons témoignent d'une grande crainte et inquiétude. Pensant assister à toute la pièce qu'on doit jouer devant le roi ce soir nous restâmes, mais comme c'était Le Maraud et que ma femme n'était pas là, je n'en eus pas envie.
            Allâmes donc à la Bourse où nous nous promenâmes longtemps. Remarquai entre autres une jeune et très jolie vendeuse, le visage couvert de mouches, ce qui était étrange à voir. Nous nous séparâmes et j'allai en voiture voir Mr Moore, restai une heure. Je le trouve en assez bonne sante, il veut sortir demain. Comme il pleuvait fort je rentrai en voiture et ayant fait visite aux deux sirs William, tous deux malades, mais qui promettent d'être bientôt guéris, j'allai travailler un peu au bureau et rentrai et au lit.
            Chez sir William Batten rencontrai Mr Milles qui me dit qu'il n'a rien pu tirer de la jeune voisine, qui a pris du poison, avant sa mort, qu'elle lui seulement dit que c'était parce qu'elle ne s'aimait pas, depuis très longtemps, elle ne s'aimait pas ni rien de ce qu'elle faisait. Il paraît qu'elle était assez jolie, mais difforme, et c'est tout ce qu'il put lui faire dire, ce qui est fort étrange.


                                                                                                      28 octobre
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Image associée            Au bureau en réunion toute la matinée, puis dîner à la maison avec ma femme. Nous passâmes ensuite une ou deux heures en conversations innocente et à mon bureau jusqu'à 9 heures du soir, puis rentrai et souper et au lit.
            Il n'y aura bientôt plus de saleté dans ma maison, je l'espère, le plâtrier et le peintre mettent fin à tous mes tracas, je pense, tout à fait d'ici une quinzaine.


                                                                                                           29 octobre
                                                                                          Jour du Seigneur
            Je voulais me faire beau et sur invitation aller dîner avec milord le maire aujourd'hui. Mais allant voir William Batten je trouve sir George Carteret et sir John Mennes, et nous allons tous les quatre examiner les comptes de sir George Carteret pour l'année dernière. Nous avons travaillé toute la journée, sauf une pause pour le dîner que sir George nous offrit. Comptes terminés le soir nous nous séparâmes et allai à mon bureau où je mis de l'ordre dans mes papiers et des affaires pour demain. J'ai reçu une lettre aujourd'hui de mon père qui m'annonce d'autres ennuis à propos de mon oncle Thomas, son affaire et la nôtre. Il revendique Brampton et tout l'héritage de mon oncle, parce qu'il est donné sous condition que nous payions les legs, ce que nous n'avons pas encore fait, mais j'espère que cela ne nous portera pas tort. Dieu nous soit en aide si cela se produit, mais cela m'inquiète. J'ai aussi une lettre de milord Sandwich qui veut pour une question importante que j'aille le trouver de bonne heure demain matin. Je me demande ce que cela peut être. L'esprit occupé par une foule de pensées et quelques tracas, rentrai le soir et au lit.
            Sir George Carteret qui avait été présent à l'interrogatoire de la plupart des gens récemment incarcérés, dit qu'il ne croit pas qu'il y ait grand complot parmi eux, toute bonne envie qu'ils en auraient. Mais ils sont si pauvres, si stupides et de condition si basse qu'il ne les craint pas du tout.


                                                                                                                    30 octobre 1662

            Guère dormi cette nuit à force de penser à mes affaires. Levé à la chandelle et par le fleuve à Whitehall, chez milord Sandwich levé dans sa chambre. En tête à tête m'a appris son affaire, qui est que notre vieille connaissance Mr Wade, d'Axe Yard, lui a révélé que 7 000 livres étaient cachées dans la Tour, dont il devait avoir 2 pour le prix de sa découverte, milord lui-même 2 et le roi les 3 autres quand on les aurait trouvées. Et que l'autorisation du roi est à mon nom pour le compte de milord et au nom d'un certain Mr Leigh pour le compte de sir Henry Bennet pour demander au lieutenant de la Tour l'autorisation de faire des fouilles. Lorsqu'il m'eut exposé toute l'affaire je pris congé et me hâtai de revenir à mon bureau pensant qu'une lettre de milord viendrait me dire de me mettre à cette affaire. Réunion toute la matinée avec les officiers. Quand ce fut fini arrive Mr Wade avec la lettre de milord et il m'expose toute l'affaire. Nous décidâmes que j'irai d'abord trouver sir Henry Bennet actuellement, avec de nombreux membres du Conseil privé, à la Tour occupé à interroger leurs prisonniers pour voir quand commencer.
            J'y fus donc, et la garde de la porte sur le fleuve m'obligeant à laisser mon épée, je fus forcé d'attendre si longtemps dans la taverne voisine que mon petit laquais s'en allât chez moi chercher mon manteau que l'actuel lord-maire, sir John Robinson lieutenant de la Tour, et toute sa compagnie étaient repartis dans leurs voitures pour sa demeure de Minching Lane. Mon manteau arrivé j'y allai à pied. Et là, grâce à sir George Carteret je parlai bientôt à sir Henry Bennet qui me montra et me remit l'autorisation du roi ainsi qu'à Mr Leigh, et une autre à lui de verser 2 000 livres à milord et 2 autres aux inventeurs. Après un moment d'entretien on apporta le dîner et je dînai avec eux, étions nombreux, un beau dîner. Ensuite sir Henry Bennet nous prit à part lord-maire et moi, et il l'informa de notre affaire. Il ne parut pas et n'osa pas paraître le moins du monde hostile et promit d'apporter sur le champ toute l'assistance possible. Mr Leigh et moi à mon bureau où nous attendîmes l'arrivée de Mr Wade et d'un certain Evett qui le guidait dans cette affaire, ainsi que William Griffith et d'un portier avec des pioches, etc. Ils vinrent avec nous à la Tour et sir Henry Bennet et le lord-maire nous donnèrent pleine autorisation pour nous mettre à la tâche. Notre guide demande une chandelle et descend dans les caves en demandant si c'était celles qu'avait toujours eues Barkestead. Nous pénétrâmes dans plusieurs petites caves et ressortîmes à l'air libre. Et puis à Coleharbour, mais rien ne répondait si bien aux repères qui lui avaient été donnés pour le trouver qu'une certaine cave voûtée. Après avoir longuement délibéré si nous allions nous mettre à l'oeuvre maintenant ou attendre de meilleurs renseignements et plus complets, nous commençâmes. Et on creusa jusqu'à près de 8 heures du soir, sans rien trouver. Nos guides ne paraissaient cependant pas du tout découragés car ils sont sûrs que l'argent qu'ils cherchent s'y trouve, mais n'étant jamais entrés dans les caves ils ne pouvaient être certains de l'endroit et, par conséquent, veulent s'informer plus complètement maintenant qu'ils y ont été, auprès de ceux qui les renseignent. Aussi, refermant la porte à clé, nous arrêtâmes le travail pour ce soir, et nous rendîmes chez le sous-gouverneur, milord le maire et tous les autres étaient partis une heure avant, et il s'engagea à garder la clef de la cave de façon que personne n'y pût entrer à son insu. Mais grand Dieu ! de voir quel jeune petit-maître sot et extravagant on a fait sous-gouverneur, c'est à devenir fou. Et comment il réclame sa robe de chambre de soie à seule fin de nous la faire voir. Et pourtant pendant une demi-heure, ne pensant pas que c'était là le sous-gouverneur, je ne lui parlai de rien et attendis qu'un autre vînt. A la fin je lui dis un mot de notre affaire. Il promit d'y veiller et nous partîmes. Avec Mr Leigh à Whitehall où je rendis compte à milord Sandwich de ce que nous avions fait et qu'il y avait quelque raison d'espérer quelque chose, et je lui dis adieu. Et rentrai en voiture à la maison où, à mon grand ennui, je découvre que le peintre n'est pas venu travailler aujourd'hui, ce qui me contrarie beaucoup. Puis à mon bureau pour écrire mon journal et rentrai et au lit.                                                                                        pinterest.com      
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            Ce matin me promenant avec Mr Coventry au jardin, il me raconte que sir George Carteret a réussi à obtenir l'autorisation de payer lui-même la somme due à l'entrepreneur des subsistances contrairement à l'ancienne pratique. Je vois bien qu'il en est irrité, mais je ne crois pas qu'il lui veuille du mal, mais seulement qu'on procède comme il se doit. Il s'attend à ce que sir George se venge en le salissant en privé, non en public, à quoi il est prêt à répondre en le traînant dans la boue, jurant qu'il le fera en remontant aux origines, depuis Jersey jusqu'à maintenant. Pour ce qui est des droits qu'il a lui-même touchés et des gratifications excessives pour des places qu'il a vendues, il a l'intention de prouver qu'il était incité par sir George Carteret, entre autres. Et en même temps il rend justice à George Carteret, disant que c'est un homme qui s'applique et se donne à son travail plus que tout autre à la Cour, et ne cherche aucunement les plaisirs ou les divertissements. Ce qui est tout à fait vrai. Mais ce qui m'a fait un immense plaisir, c'est qu'il m'a dit, en propres termes, qu'il était décidé, quoiqu'il pût lui en coûter, à faire l'expérience, voir si on pouvait se maintenir à la Cour en agissant ouvertement et en marchant la tête haute, sans jouer aucun jeu particulier. En agissant de la sorte, si le sol lui manque il se résignera. Mais il est décidé à ne jamais fermer les yeux sur quoi que ce soit qui fasse tort au roi, où que ce soit, ce qui est une décision bien courageuse. Il fut très confiant avec moi et, par ma foi, je trouve en lui plus de vraie valeur qu'en presque aucun homme que je connaisse.
            Je ne veux pas oublier deux anecdotes qu'a racontées sir John Mennes hier au dîner. L'une, comment il se fait qu'on ne voit pas de verrats à Londres, mais seulement des pourceaux et des truies, à cela on répondit que le lieutenant de police s'en saisit la nuit. L'autre, la façon dont Thomas Killigrew réussissait à voir des pièces de théâtre quand il était enfant. Il allait au Taureau Rouge et quand l'homme criait aux enfants : " - Qui veut faire le diable, et il verra la pièce pour rien ? " alors il allait faire le diable et il voyait la pièce.


                                                                                                                  31 octobre

            Fis assez longtemps la grasse matinée puis levai et allai au milieu de mes ouvriers. Les charpentiers posent aujourd'hui le plancher dans ma salle à mange, et je restai avec eux un bon moment. Puis un peu à mon bureau et je rentrai dîner. Et tout l'après-midi avec mes charpentiers, à leur faire poser toutes mes planches sauf une dans ma salle à manger aujourd'hui, ce qui, j'en suis sûr leur aurait pris deux bonnes journées de travail si je n'avais pas été présent. Et elle sera très agréable. Le soir à mon bureau où je restai tard, et rentrai souper et au lit.
             Ainsi se termine ce mois. Moi et ma famille sommes en bonne santé mais excédés de la saleté, mais nous espérons en être débarrassés en deux ou trois semaines. Je suis tracassé par la quantité d'affaires, mais particulièrement par la crainte que sir John Mennes me réclame ma chambre. Mais j'espère que maintenant ce danger est presque passé, car je vois qu'il prépare son installation pour emménager la semaine prochaine. Puis mon procès au sujet de Brampton me rend presque fou par manque de temps pour m'en occuper. Mais il ne faut absolument pas que je le néglige. Je rends grâce à Dieu de ce que je mets de l'argent de côté, même si ce n'est qu'un peu. Mais j'espère trouver quelque tâche qui me rapportera de quoi assurer ma position.
            Je suis aussi à découvrir pour milord Sandwich et sir Henry Bennet, grâce à Mr Wade, une partie de l'argent que Barkstead a caché dans une des caves de la Tour. Si nous le trouvons cela peut me valoir 10 ou 20 livres.
            Je rends grâce à Dieu de ne pas avoir d'ennuis mais seulement force travail qui me préoccupe. En tout le reste je suis aussi heureux qu'on peut l'être, car le monde entier semble me faire bon visage et, si ma maison était terminée, que je puisse m'appliquer à mon travail, je ne doute pas de bien servir Dieu et le roi et moi-même. Et tout cela je l'attribue presque entièrement à la tempérance que je me suis imposée récemment, depuis que j'ai pris mes résolutions concernant le vin et le théâtre, ce qui me fait, avec beaucoup de bonheur et de contentement, m'appliquer à mon travail. En quoi Dieu me fasse persévérer.
            Les affaires publiques sont causes de mécontentement, avec la vente de Dunkerque et milady Castlemaine et sa faction à la Cour. Mais je ne sais pas ce qu'ils veulent, outre le fait de débaucher le roi, que Dieu l'en préserve. Et puis on parle de la découverte de grands complots et on dit que toutes les prison de la ville sont pleines de gens du commun arrachés à leurs lieux de culte dimanche dernier. Ce qui est certain, c'est qu'il y eût quelque complot, mais qu'il avorta.


                                                                               à suivre.....

                                                                                                      1er novembre 1662

            Levé et après.......
         
            

mercredi 26 juillet 2017

Robespierre Gabella Meli Leuwers ( BD France )

Robespierre
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                                                  Robespierre

            5 dernières années de la vie de l'un des révolutionnaires les plus connus, au côté de Danton et Camille Desmoulins entre autres, ses amis proches. Avril 1789, Maximilien Robespierre né à Arras le 6 mai 1758 devient avocat, comme son père, il fait ses études à Louis le Grand ainsi que ses études de droit à Paris. Il défend des causes célèbres et défend surtout ses idées, pour l'école laïque, contre la peine de mort, cependant il votera la mort de Louis XVI, nommé par les révolutionnaires le tyran, Devenu député d'Artois, fort de ses idées et de sa volonté de tuer la royauté, il est critiqué, on le dit vouloir devenir roi à la place du roi. A l'Assemblée nationale c'est la lutte entre Montagne et Gironde. Il plaide pour que le peuple ait les mêmes droits que les membres du royaume. Mais le peuple a faim. Il se plaît place de Grève, les exécutions sont si nombreuses. La Terreur et ses pendaisons, Danton mort, Robespierre est arrêté, il ne verra pas installée durablement la République, il est guillotiné le 9 thermidor ( 27 juillet 1794 ). Son frère Augustin demanda à l'accompagner. "...... J'aime l'idée de la République, mais parfois je me demande si elle vaut ces sacrifices. Retenez que mon frère disait que la République se mérite. Mais j'ajouterai qu'elle ne se choisit pas. Elle nait d'elle-même....... " Dans la série "Ils ont fait l'histoire ", plein d'intérêt, basique, pour tous. En attendant le prochain présenté ici, Clémenceau, quelques dizaines d'années à peine les séparent.                                                                                                                                                                                                                                                                                                                        
         








                                

mardi 25 juillet 2017

Sonnets 8 - 12 Shakespeare ( Poèmes Angleterre )


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                                                   Sonnet 8

            Musique que tu es, pourquoi écoutes-tu
            Tristement la musique ? La joie cherche la joie,
             Pourquoi aimer ce qui te fait souffrir ?
             Pourquoi prendre plaisir à ce qui t'ennuie ?

            Mais si cette harmonie des sons bien réglés
            Et justement conjoints offense ton oreille,
            C'est que, doucement certes, elle te gronde
            De gâter, en la chantant seule, la partition.

            Ecoute ! Cette corde, épouse d'une autre,
            Vibre quand celle-ci a vibré, lui répond,
            Et pareils sont le père et l'heureuse mère :
           Avec l'enfant, ensemble, une seule note, leur vie !

            Un chant sans mots, de l'Un dans le multiple,
            Qui chante, et c'est pour toi, que le seul n'est personne.


                                           ***************


                                      Sonnet 12                                                           pinterest.com 
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            Quand j'écoute l'horloge égrener le temps
            Et vois sombrer le jour dans l'affreuse nuit,
            Et ces violettes qui se fanent, et ces cheveux
            Blancs, qui argentent ces tresses naguère brunes,

            Et dégarnis de feuilles ces grands arbres
            Qui abritaient des chaleurs les troupeaux,
             Et le vert de l'été ficelé en gerbe, emporté
             Sur des brancards, désordre de barbes blanches,

            Alors, de beauté à toi, je me soucie,
            Qui est promise à la voirie du temps
            Puisque toute beauté doit se renoncer
            Et mourir, aussi vite qu'ailleurs renaître,

            Je m'en soucie car rien, sinon un fils,
            Au jour dit, pour suspendre la faux du temps.

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                                                                                                     Shakespeare



                                 

            


lundi 24 juillet 2017

Les Macron Caroline Derrien Candice Nedelec ( Document France )

Les Macron
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                                                   Les Macron

              Voyage au sein d'une famille bouleversée par l'extrême volonté d'un homme assez exceptionnel pour avoir décidé à dix-sept ans d'épouser celle qui fut son guide sur scène, il n'était pas l'élève de Brigitte Auzière née Trogneux, famille de chocolatiers connue à Amiens où ils sont nés tous deux, professeur de français latin, mais le condisciple de Laurence sa fille. Maman de trois enfants, la lutte fut rude pour la femme catholique et enseignante chez les jésuites, pour faire admettre divorce et départ pour Paris où déjà Emmanuel Macron vit, élève à Henry IV, aidé et protégé par sa grand-mère. Les auteurs détaillent les manques, moyen en mathématiques mais brillant en lettres, son échec à l'entrée à l'Ecole Normale Supérieure, mais sa réussite à l'ENA, une certaine errance dans ses discours qu'il rattrape grâce pour une part sans doute à son éducation dans une institution religieuse, jésuites. Banquier il réunit les familles à leur mariage au Touquet, où Brigitte devenue Macron possède une propriété. Les auteurs font souvent référence au reportage de Hurel. Pense-t-il dès lors à la politique ?  " ....... Ce risque presque organique chez lui, quitte à embrasser un peu tout, un peu trop vite...... s'approprier les célèbres mots de ce René Char tant admiré !
            " Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. A te regarder ils s'habitueront...... "
Après seulement 4 ans à la banque Rothschild il entre à l'Elysée. Le pouvoir, la politique toujours avides de nouveaux talents médiatiques, Emmanuel Macron sera ministre de l'Economie aux côtés des ministres socialistes. "....... Son image internationale doit être identifiée, travaillée..... " Un groupe se forme, déjà ses initiales sont le début d'un mouvement EM, En Marche. Le vent soufflait dans le bon sens. Ministre à Bercy les Macron reçurent beaucoup, ceux que l'on appelle les " people "
L'entourage craint les interviews de Brigitte Macron qui ne connaît pas ou ne veut pas s'embarrasser des codes journalistiques "..... On ne badine pas avec la com ..... " Le ministre quitte Bercy "..... sait déjà au kilomètre près la grande " marche " qu'il veut entreprendre hors les murs. Toujours ce coup d'avance des " risk takers ", comme disent ses amis financiers....... " Trop de couvertures de presse, Brigitte épouse Macron est omniprésente, trop disent certains, dans les meetings à Paris, Lille ou Marseille. L'histoire s'arrête avant l'élection à la Présidence de la République, sur ces quelques lignes de Rimbaud : " Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,  
                                   Par la nature, heureux comme avec une femme. "                         

jeudi 20 juillet 2017

Au Sud de la Fente 2 fin Jack London ( Nouvelle EtatsUnis )

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television.telerama.fr


                                                   Au Sud de la Fente ( 2  fin )

            - Eh ! qu'est-ce que ça peut vous faire ? rétorqua-t-il. Filez et sortez de mon chemin. Je veux pouvoir me retourner.
            L'instant d'après, malgré son imposante carrure, quelqu'un le poussait à faire demi-tour et l'envoyer vaciller, la malle lui faisant perdre l'équilibre, jusqu'à ce qu'il tombât contre le mur derrière lui. Il se mit à jurer mais se rendit soudain compte qu'il avait devant lui Mary Condon, dont les yeux furieux lançaient des flammes.
            - Bien sûr que j'appartiens au syndicat, dit-il. Je vous faisais marcher.
            - Où est votre carte ? demanda-t-elle sur un ton péremptoire.
            - Dans ma poche. Mais je peux pas la sortir maintenant. Cette foutue malle est trop lourde. Venez jusqu'à ma wagonnette et je vous la montrerai.
            - Posez cette malle, ordonna-t-elle.
            - Pourquoi donc ? J'ai une carte, je vous dis.
            - Posez-la, c'est tout. Je ne vais pas laisser un jaune manipuler cette malle. Vous devriez avoir honte, espèce de lâche, vous qui trahissez des travailleurs honnêtes. Comportez-vous comme un homme et rejoignez le syndicat.
            Le visage de Mary Condon était blême. Elle était, à l'évidence, en rage.
            - Penser qu'un homme fort comme vous devient un traître à sa classe ! J'imagine que vous n'attendez que de vous joindre à la milice pour tirer sur des syndicalistes lors de la prochaine grève ! Peut-être même que vous appartenez déjà à la milice. Vous êtes bien du genre...
            - Oh là, ça suffit !
            Bill laissa tomber la malle par terre dans un grand fracas, se redressa et enfonça la main dans la poche intérieure de son manteau.
            - Je vous ai dit que je vous faisais marcher. Tenez, regardez ça.
            C'était une carte syndicale parfaitement en règle.
            - D'accord, allez-y, dit Mary Condon. Et la prochaine fois ne plaisantez pas.
            Son visage se détendit quand elle vit l'aisance avec laquelle il mit la lourde malle sur ses épaules et ses yeux brillèrent en observant l'élégante carrure de cet homme. Toutefois, Bill n'en vit rien, trop occupé à déplacer la malle.                                                                        pressdemocrat.com
Image associée            L'occasion suivante où il vit Mary Condon ce fut pendant la grève des blanchisseurs. Ceux-ci, organisés en syndicat depuis peu, manquaient d'expérience dans la conduite des grèves et avaient demandé à Mary Condon de les aider. Ayant eu vent de ce qui se préparait, Freddie avait envoyé Bill se joindre au syndicat pour mener l'enquête. Le travail de Bill avait lieu dans la salle des lessives. Les hommes avaient été appelés en premier, ce matin-là, afin de donner du courage aux filles, et le hasasd voulut que Bill se trouvât près de la porte de l'atelier de calendrage quand Mary Condon apparut. Le directeur, homme grand et corpulent, lui barrait le passage. Il n'allait pas ses filles se faire enrôler par les grévistes et il apprendrait à cette Mary Condon à se mêler de ses affaires. Alors que Mary essayait de le cntourner; il abattit sa grosse main sur son épaule et la ramena en arrière. Elle regarda autour d'elle et vit Bill.                                                                                      
            - Eh, vous ! Mr Totts, dit-elle. Aidez-moi, je veux entrer.
            Bill sursauta, agréablement surpris. Elle se rappelait son nom pour l'avoir lu sur sa carte syndicale. L'instant d'après, le directeur avait été écarté de la porte et déblatérait sur le respect de la loi, tandis que les filles désertaient leurs machines. Pendant le reste de cette courte grève couronnée de succès, Bill agit en tant qu'homme de main et messager de Mary Condon. Puis, quand tout fut terminé, il retourna à l'université, redevint Freddie Drummond et se demanda ce que Bill Totts pouvait trouver à une telle femme.
            Freddie n'avait pas été atteint, mais Bill était tombé amoureux. Il était inutile de le nier et c'était ce qui, pour Freddie Drummond, représentait le danger. Eh bien, il avait accompli son travail. Ses aventures pouvaient maintenant cesser. Il n'avait plus besoin de franchir la Fente. Il ne manquait que trois chapitres à son dernier ouvrage, Tactiques et Stratégies des syndicats, et disposait de suffisamment de données pour les écrire convenablement.
            Il parvint également à la conclusion que s'il voulait affermir et ancrer son identité en tant que Freddie Drummond il lui fallait nouer des liens plus intimes au sein de son propre milieu social. Il était temps pour lui de se marier, et il se rendait bien compte que si Freddie ne le faisait pas, Bill ne manquerait pas de s'en charger, ce qui entraîneraient des complications épouvantables auxquelles il ne voulait même pas songer. C'est ainsi que Catheriene Van Vorst fit son entrée. Elle travaillait aussi à l'université, et son père, le seul qui disposât d'une fortune personnelle, dirigeait le département de philosophie. Lorsque les fiançailles furent annoncées officiellement, Freddie pensa que c'était en tous points un mariage avisé. D'apparence froide et réservée, Catherine était aristocrate et sainement conservatrice. Bien qu'elle fût chaleureuse à sa manière, elle possédait une forme de retenue égale à celle de Freddie.
            Tout semblait réussir à Freddie Drummond, mais il ne pouvait se défaire totalement des bas-fonds, de l'attrait de la liberté et de la vie sans entraves ni responsabilités qu'il avait menée au sud de la Fente. Alors que le jour de son mariage approchait, il s'aperçut qu'il avait bel et bien pris du bon temps et de plus et, de plus, qu'il lui serait extrêmement agréable d'effectuer une nouvelle escapade, de jouer au bon vivant et au panier percé une dernière fois, avant de retourner définitivement à ses amphithéâtres sévères et à son austère future épouse. Comme pour le tenter le tout dernier chapitre de Tactiques et Stratégies des Syndicats demeurait à écrire faute de quelques données essentielles qu'il avait négligé de collecter.
   *         C'est ainsi que Freddie Drummond se transforma une dernière fois en Bill Totts, réunit les informations dont il avait besoin et, malheureusement, rencontra sur sa route Mary Condon.
            De retour dans son bureau il n'aimait pas penser à cet épisode. Ce souvenir ne rendait que plus oppressant le sentiment de danger qu'il avait éprouvé. Bill Totts s'était comporté de manière abominable. Non seulement il avait rencontré Mary Condon au conseil central du travail, mais il s'était arrêté avec elle dans un restaurant sur le chemin du retour et lui avait offert des huîtres. Pis encore, avant de la quitter devant sa porte, il l'avait prise dans ses bras et l'avait embrassée sur les lèvres à plusieurs reprises. Les derniers mots de Mary restaient dans son oreille, des mots prononcés doucement, avec un touchant sanglot dans la gorge qui n'était autre qu'un cri d'amour :
            - O Bill, mon cher Bill, mon très cher Bill.
            Freddie Drummond frissonnait à ce souvenir, il voyait s'ouvrir un gouffre sous ses pieds. N'étant pas, par nature, polygame, il était épouvanté par les possibilités qu'offrait la situation.
           Celle-ci allait devoir prendre fin et pour cela il ne voyait que deux possibilités : soit devenir entièrement Bill Totts et épouser Mary Condon, soit rester entièrement Freddie Drummond et épouser Catherine Van Vost, faute de quoi son comportement deviendrait pire que méprisable, abject.
            Au cours des mois qui suivirent San Francisco fut déchiré par des conflits sociaux. Les syndicats et les associations du patronat s'étaient engagés dans le combat avec une détermination qui donnait à penser qu'ils comptaient régler leur différend dans un sens ou dans l'autre, une fois pour toutes. Cependant Freddie corrigeait les épreuves de son livre et donnait des cours, et ne bougea pas d'un pouce. Il se consacrait à Catherine Van Vost et, jour après jour, trouvait plus de raison de l'admirer et de la respecter, voire de l'aimer. La grève des conducteurs de tramway le tenta, mais pas aussi fortement qu'il ne l'aurait imaginé, et la grande grève des bouchers le laissa froid. Le fantôme de Bill Totts avait été éliminé et Freddie Drummond s'attaqua avec une ardeur renouvelée à la rédaction d'un opuscule qu'il projetait d'écrire depuis longtemps sur les rendements décroissants.
            Il n'était qu'à deux semaines de son mariage quand, un après-midi, Catherine Van Vorst vint le chercher et l'arracha à ses occupations pour l'emmener voir une maison des enfants récemment créée dans le cadre de l'oeuvre de bienfaisance à laquelle elle participait. La voiture appartenait à son frère, mais ils étaient seuls avec le chauffeur. Au point où elles croisent Kearny Street, Market Street et Geary Street se rejoignent comme les branches d'un V à angle aigu. Dans leur automobile, Frederick et Catherine descendaient Market Street et s'approchaient du virage en tête d'épingle pour prendre Geary Street. Néanmoins ils ignoraient ce qui arrivait par Geary Street à ce moment-là, programmé par le destin pour les rencontrer dans le virage. Bien qu'il fût informé par les journaux que la grève des bouchers faisait rage, Freddie Drummond n'y pensait pas le moins du monde. N'était-il pas assis à côté de Catherine ? En route il était occupé à lui exposer son point de vue sur l'activité des oeuvres de bienfaisance, point de vue que les aventures de Bill Totts avaient contribué à nourrir.
            Par Geary Street arrivaient six chariots à viande. A côté de chaque jaune qui conduisait était assis un policier. A l'avant, à l'arrière et de part et d'autre de cette procession défilait une escorte d'une centaine d'agents. Suivant l'arrière-garde policière, à une distance respectueuse, une foule avançait tranquillement mais vociférant des slogans, occupant la rue sur toute la longueur et sur une longueur de plusieurs pâtés de maisons. Le consortium des bouchers tentait de fournir de la viande aux hôteliers et, incidemment, de commencer à briser la grève. L'hôtel St Francis avait déjà été livré, au pris de maintes fenêtres brisquées et de nombreux coups sur la tête, et l'expédition avançait à présent pour apporter des vivres au Palace Hôtel.                                                 shc.stanford.edu
Image associée            Inconscient de tout cela Drummond parlait d'oeuvres de bienfaisance à Catherine alors que l'automobile, klaxonnant méthodiquement pour éviter les noeuds de la circulation, s'engageait dans une grande trajectoire courbe pour passer d'une branche du V à l'autre. Un grand chariot chargé de morceaux de charbon et tiré par quatre énormes chevaux arrivait de Kearny Street comme pour prendre Market Street, leur bloquant le passage. Le conducteur du chariot semblait indécis et le chauffeur de l'automobile qui roulait lentement mais n'écoutait pas les avertissements que lui criaient les policiers, vira à gauche, bien que ce fût interdit, afin de doubler le chariot.
            A cet instant Freddie Drummond interrompit la conversation. Il ne la reprit pas car la situation évoluait avec la rapidité d'un changement à vure au théâtre. Il entendit le rugissement de la foule à l'arrière et aperçut les policiers casqués et les chariots à viande qui vacillaient. Au même instant, reprenant son rôle et donnant du fouet le conducteur du chariot à charbon fit avancer ses chevaux et son véhicule jusque devant le défilé, puis tira brusquement sur les rênes et mit le frein, puis attacha fermement ses cordes sur le levier du frein et s'assit, visiblement décidé à ne plus bouger. L'automobile s'était arrêtée, elle aussi, Les gros chevaux haletants lui étant rentrés dedans.
            Avant que le chauffeur ne pût se dégager, une wagonnette brûlante, conduite par un vieil Irlandais qui fouettait son unique cheval pour le mettre au galop, s'était coincée dans les rue de l'automobile. Drummond reconnut l'animal et la wagonnette, car il les avait fréquemment conduits lui-même. L'Irlandais n'était autre que Pat Morrissey. De l'autre côté, une carriole transportant des tonneaux de bière rentrait dans le chariot à charbon tandis qu'un tramway qui descendait Kearny Street en actionnant furieusement sa cloche se précipitait en avant pour parachever le blocus, le conducteur lançant des insultes à l'agent de la circulation. Un véhicule après l'autre venait s'enferrer au même endroit et ajouter à la confusion. Les chariots à viande s'arrêtèrent. Les policiers étaient piégés. Le rugissement à l'arrière augmenta alors que la foule rejoignait l'attaque, tandis que les policiers de l'avant-garde fonçaient sur les véhicules qui bloquaient le passage.
           - Nous sommes cuits, remarqua Drummond calmement à l'adresse de Catherine.
           - Oui, dit-elle avec un calme égal. Quels sauvages sont ces gens-là !
           L'admiration qu'il éprouvait pour elle redoubla. Elle était bel et bien faite pour lui. Il n'aurait pas été choqué si elle avait poussé des hurlements et s'était accrochée à lui, mais une telle réaction...
C'était magnifique. Elle se tenait au milieu de cet ouragan avec la même sérénité que s'il s'était agi d'un embouteillage de calèches devant l'opéra.                                 berkeleyheritage.com
Image associée            Les policiers luttaient pour dégager un passage. Le conducteur du chariot à charbon, un homme imposant en manches de chemise, alluma une pipe qu'il commença à fumer tranquillement. Du haut de son siège il regarda complaisamment un officier de police qui lui lançait des imprécations et, pour toute réaction, se contenta de hausser les épaules. De l'arrière arrivait le bruit de coups de matraques et un concert de jurons, de hurlements et de vociférations. Une clameur soudaine retentit quand la foule brisa le barrage et fit descendre un des conducteurs de son chariot à viande. Le capitaine de police envoya des renforts de son avant-garde et la foule à l'arrière fut repoussée. Pendant ce temps de nombreuses fenêtres s'étaient ouvertes dans le grand immeuble situé sur la droite, dont les employés conscients de la lutte sociale à l'oeuvre, lançaient des fournitures de bureau sur la tête des policiers et des briseurs de grève. Corbeilles à papiers, encriers, presse-papiers, machines à écrire. Tout ce qui passait à portée de leurs mains étaient jeté par la fenêtre.
            Un agent de police, sous les ordres de son capitaine, escalada le chariot à charbon pour arrêter son conducteur. Celui-ci, se levant lentement et tranquillement comme pour lui obéir, saisit soudain l'agent dans ses bras et se jeta sur l'officier qui attendait en bas. Le conducteur était un jeune géant et, quand il monta au sommet de sa cargaison pour attraper un morceau de charbon de ses deux mains, un policier qui escaladait le chariot sur le côté lâcha prise et se laissa tomber au sol. Le capitaine ordonna à une demi-douzaine de ses hommes de prendre d'assaut le chariot. Le conducteur, passant d'un côté à l'autre de sa cargaison, les repoussait en leur lançant d'énormes morceaux de charbon sur la tête            La foule sur les trottoirs et les conducteurs des chariots bloqués rugissaient de contentement. Le conducteur du tramway fracassait des casques de policiers avec sa manette de direction, mais les agents finirent par l'assommer et le tirer de sa plate-forme. Le capitaine, furieux que ses hommes eussent été repoussés, conduisit l'assaut suivant sur le chariot à charbon. Une vingtaine d'agents commencèrent à grimper de tous les côtés de cette forteresse, mais le conducteur semblait se démultiplier. Parfois, six ou huit policiers tombaient simultanément sur le pavé et roulaient sous le chariot. Occupé à repousser une attaque à l'arrière de sa forteresse, le conducteur se retourna et vit que le capitaine s'apprêtait à monter sur le siège à l'avant du véhicule. L'officier était encore en l'air et en équilibre instable quand le conducteur lança sur lui un morceau de charbon de trente livres. Le capitaine le reçut en pleine poitrine et tomba en arrière, rebondissant sur le dos d'un charron pour atterrir sur le sol, heurtant au passage la roue arrière de l'automobile.
            Catherine crut qu'il était mort, mais il se releva et repartit à l'assaut. Elle tendit sa main gantée et flatta le flanc du cheval qui s'ébrouait en frissonnant. Cependant Drummond ne vit pas son geste. Il n'avait d'yeux que pour la bataille sur le chariot à charbon, tandis que, quelque part dans les méandres de sa psyché, un certain Bill Totts s'agitait et tentait de revenir à la vie. Drummond croyait au respect de la loi et au maintien des forces établies, mais le sauvage déchaîné qui était en lui ne voulait rien entendre. S'il y eut un moment où Freddie fit appel à sa volonté de fer pour se sauver, c'est bien celui-là. Mais il est écrit qu'une maison divisée ne peut que s'effondrer. Freddie Drummond découvrit que la moitié de sa volonté et de ses forces avaient été prises par Bill Totts et, au milieu, l'entité qui les constituait tous les deux se trouvait déchirée.
            Freddie Drummond était assis dans l'auto, tout à fait calme à côté de Catherine Van Vorst, mais celui qui regardait par les yeux de Freddie Drummond c'était Bill Totts et, quelque part derrière ces yeux, se battant pour le contrôle de leur corps commun, se trouvaient Freddie Drummond, le sociologue conservateur et raisonnable, et Bill Totts, le syndicaliste belliqueux. Ce fut Bill Totts qui, par ces yeux, pressentit ce que serait le dénouement inévitable du conflit sur le chariot. Il vit un policier parvenir au sommet de la cargaison, puis un deuxième et un troisième. Les agents chancelaient sur cette surface irrégulière mais ils faisaient tournoyer leurs longues matraques dans les airs. Le conducteur reçut un coup sur la tête. Il en esquiva un second qui atterrit sur son épaule. A l'évidence la partie était finie pour lui. Il bondit en avant, attrapa deux policiers dans ses bras et se jeta sur le trottoir pour se constituer prisonnier, sans relâcher son emprise sur ses deux adversaires.
Résultat de recherche d'images pour "jack london signature"  **        Catherine Van Vorst avait la nausée devant ce spectacle bhommerutal et sanglant. Cette sensation disparut cependant devant l'événement extraordinaire on ne peut plus inattendu qui
s'ensuivit. L'homme assis à côté d'elle poussa un hurlement d'une bestialité inouïe et se leva. Elle le vit bondir par-dessus le siège avant, sauter sur le large postérieur du charron et, de là, parvenir sur le chariot. Son assaut fut pareil à une tornade. L'agent de police stupéfait qui se tenait au sommet de la cargaison n'eut pas le temps de deviner l'intention de ce jeune homme bien habillé mais manifestement excité avant de recevoir un coup qui l'envoya valser dans les airs et retomber sur la chaussée. Un policier escaladant la cargaison reçut un coup de pied dans la figure qui lui assura le même sort. Trois autres agents montèrent au sommet et se précipitèrent sur Bill Totts qui, non content de recevoir un coup de matraque qui lui ouvrit le cuir chevelu, se vit arracher sa veste, son gilet et la moitié de sa chemise amidonnée. Il envoya, néanmoins, les trois policiers voler au loin et, faisant pleuvoir les morceaux de charbon sur ses opposants, il tint la forteresse.
            Le capitaine prit courageusement les devants de l'attaque mais fut renversé par un morceau de charbon qui lui éclata sur le front, comme pour le baptiser de noir. L'objectif de la police était de dégager le blocus avant que la foule n'arrivât depuis l'arrière. Celui de Bill Totts, au contraire, de tenir le chariot jusqu'à ce même moment. C'est ainsi que la bataille du charbon se poursuivait.
            La foule avait reconnu son champion. Big Bill, comme d'habitude, était en première ligne, et Catherine Van Vorst fut abasourdie d'entendre la foule cirer " Bill, ô Bill ! " de toute part. Pat Morrissey sur le siège de son chariot sautait en l'air et braillait d'une voix ravie :
            - Vas-y Bill ! Paie-les toi ! Tu vas en faire qu'une bouchée !
            Elle entendit une voix de femme hurler depuis le trottoir :
            - Attention, Bill, droit devant !
           Bill reçut l'avertissement et, de quelques coups de charbon bien placés, dégagea l'avant du chariot de ses assaillants. Catherine Van Vorst tourna la tête et vit, sur le bord du trottoir, une femme au teint coloré et aux yeux d'un noir profond dévorant du regard l'homme qui, quelques minutes auparavant, était encore Freddie Drummond.
            Des fenêtres de l'immeuble surgit un tonnerre d'applaudissements. Un nouveau déluge de chaises de bureau et de classeurs à tiroirs vola dans les airs. La foule avait percé sur un côté le barrage des chariots et elle avançait, chaque policier isolé devenant le centre d'un combat. Les conducteurs jaunes furent arrachés à leurs sièges, les harnais des chevaux furent coupés et les bêtes terrifiées autorisées à s'enfuir. De nombreux policiers se glissèrent en rampant sous le chariot de charbon pour se protéger, tandis que les chevaux détachés, parfois accompagnés d'un policier qui les montait ou essayait de les retenir, s'élançaient sur le trottoir opposé et s'engouffraient dans Market Street.                                                                           getyourwordsworth.com
Résultat de recherche d'images pour "jack london signature"            Catherine entendit la voix de la femme lancer un avertissement à Bill. Elle était de retour sur le bord du trottoir et criait :
            - Décampe, Bill ! C'est maintenant ou jamais  ! Fais vite !
            La police avait momentanément disparu. Bill Totts sauta sur la chaussae et s'approcha de la femme sur le trottoir. Catherine Van Vorst la vit jeter les bras autour de son cou et l'embrasser sur la bouche. Elle continua à observer l'homme d'un oeil curieux, alors qu'il poursuivait son chemin sur le trottoir, un bras autour des épaules de cette femme, parlant et riant avec elle, avec un abandon et une volubilité qu'elle n'aurait jamais imaginés possibles.
            La police était de retour pour relancer la circulation en attendant des renforts de nouveaux conducteurs et des che. Il avait toujours le bras autour des épaules de la femme. Assise dans son automobile, elle vit le couple traverser Market Street, franchir la Fente, puis disparaître dans Third Street pour rejoindre le quartier ouvrier.
         
            Dans les années qui suivirent, plus aucun cours ne fut donné à l'université de Californie par le dénommé Freddie Drummond, et plus aucun livre d'économie sur le syndicalisme ne parut sous le nom de Frederick. En revanche, on nota l'apparition d'un nouveau meneur dans le mouvement ouvrier, du nom de William Totts. C'est lui qui épousa Mary Condon, présidente de la section n° 974 de la Fédération internationale des gantiers. C'est lui, de même, qui appela à la tristement célèbre grève des cuisiniers et garçons de restaurant qui, avant son succès final, fut ralliée par des dizaines d'autres syndicats au nombre desquels figuraient, pour ne citer que les plus éloignés, ceux des plumeurs de poulets et des entrepreneurs de pompes funèbres.

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                                                                                 Jack London

                                                             ( in Saturday Evenig Post le 22 mai 1909 )