dimanche 19 novembre 2017

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 82 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )


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                                                                                              16 Novembre 1662
                                                                                                 Jour du Seigneur
            Vers 3 heures du matin je fus éveillé par les grossièretés des domestiques de sir John Mennes, pas encore arrivé, et qui sont les gens les plus grossiers, à l'exception des précédents, les gens d'un certain Mr Davis.
            Me rendormis et, après avoir parlé longtemps et agréablement avec ma femme, je me levai et allai à l'église où Mrs Goodyear maintenant Mrs Bluckworth faisait ses relevailles. J'aime cette femme pour son sérieux inégalé dans la paroisse. Puis rentrai dîner avec ma femme, avec grand plaisir. Parcourus ensuite ma maison qui est presque finie, ne reste que le travail du vitrier, et les meubles à mettre en place. Au bout d'un moment arrive Tom, causons un moment et sortons. Voyant un grand nombre d'inconnus et de voitures qui se rendent à notre église et apprenant que le proposant du sermon serait pour la Compagnie de Turquie afin d'être envoyé à Smyrne, j'y retournai. Plusieurs négociants avec la Turquie occupaient tous les meilleurs bancs, y compris le nôtre. Mais ce fut un sermon des plus lamentables sur un texte de Zacharie. Il passa un grand moment à démontrer de qui Zacharie était le fils et à prouver que Malachie fut le dernier prophète avant Jean-Baptiste.
            Rentrai voir sir William Penn qui reprend des forces mais garde toujours le lit, puis chez moi et fus à mon bureau, travaillai un peu, rentrai souper, et au lit.


                                                                                                         17 novembre

            Chez le Duc aujourd'hui, mais il est à la chasse, allai donc chez milord Sandwich et, ayant parlé un peu avec lui de ses affaires, me rendis à la Grand-Salle où je demeurai laongtemps pour beaucoup d'affaires, puis retour en passant par le Temple et beaucoup d'endroits pour la même chose.
A la maison je trouve ma femme qu'est venue habiller, comme convenu entre elles, celle qui, je crois, sera sa suivante. Egalement présents sa soeur et le frère de ma femme, j'emmenai Mr Creed, venu dîner avec moi, à une table d'hôte derrière la Bourse. Retour à la maison où je passai quelques heures, jusqu'à ce qu'il fît presque nuit. Causai avec ma femme et fis chanter Mrs Gosnell, puis, comme on ne trouvait pas de voiture, par le fleuve à Whitehall. Mais Gosnelle ne voulant pas passer sous le Pont, nous fûmes contraints de débarquer et de repartir par le fleuve, et nous les fîmes descendre, elle et sa soeur au Temple. Je suis extrêmement satisfait de son humeur et de sa voix.
            A Whitehall, comme convenu, Mr Creed nous emmena ma femme et moi au Cockpit où nous fûmes très bien placés et vîmes le roi, la reine, le duc de Monmouth son fils et milady Castlemaine et toutes les belles dames et La belle dédaigneuse bien jouée. Ils avaient fini à 11 heures, et par un beau clair de lune nous prîmes une voiture pour rentrer. Mais ne pûmes réveiller personne de la maison, il nous fallut alors faire passer le petit laquais par une des fenêtres afin qu'il nous ouvrît la porte, et nous appelâmes les servantes avant de souper et d'aller nous coucher. J'étais tracassé de ce que ma femme me dît que sa suivante ne veut pas venir avant d'avoir reçu un mot de sa mère. En effet, elle me plaît tant que je serais bien fâché maintenant de ne pas la prendre, tout en sachant que ce me sera une grande dépense que je devrais fuir. Je la compenserai autrement et, au lit.


                                                                                                          18 novembre
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Résultat de recherche d'images pour "turner peintre portrait"            Levé et au bureau, réunion et l'avocat Mr Philips est venu mais j'ai remis la visite à l'après-midi. A midi dînai chez sir William Batten, était présent sir John Mennes. Lui et moi fort aimables l'un envers l'autre, mais je m'attends de jour en jour à une dispute au sujet de nos logements. Je suis tracassé par Gosnell et par mes procès. Après dîner au cabinet de Mr Phillips. Il exige une réduction de l'argent de Pigott, ce qui me contrarie aussi, mais je ne l'accorderai pas sans l'agrément de mon père. Je veux lui écrire pour cela ce soir. Ce que j'ai fait. Trouvant mon oncle Thomas nous allâmes au cabinet de mon cousin Roger et je donnai là à mon oncle son nom et celui de Mr Philips comme étant mes deux arbitres contre Mr Cole et Punt. Mais je n'en espère pas grand chose.
            Retour à pied, puis ma femme rentra, après avoir dépensé plus de 12 livres en linge et pour un chaudron et une marmite et un châlit et d'autres objets pour la maison, ce qui me tracasse aussi, de sorte que ce soir je suis tout abattu et ne sais que penser.
            Tard au bureau à rédiger pour milord le trésorier une lettre pour laquelle nous avons tardé. Et rentrai et, plein de tracas, au lit.


                                                                                                       19 novembre 1662

            A la maison toute la matinée, rangeai une partie de mes affaires et, après dîner la même chose l'après-midi. Dans la soirée à mon bureau jusqu'à 11 heures dur soir encore occupé à la lettre pour milord le trésorier, et rentrai et au lit.


                                                                                                       20 novemtre

            Toute la matinée réunion au bureau. A midi avec Mr Coventry au Temple consulter pour l'affaire de Field. Mais nos avocats étant inaccessibles nous nous rendîmes à St James et dînâmes dans son cabinet, et je l'aime toujours de plus en plus pour ce qu'il est. Je lui ai confié mon désir, pour le frère de ma femme, de l'envoyer naviguer comme cadet, ce qu'il est disposé à accorder, et il le fera quand je voudrai. Après dîner au Temple voir Mr Thurland, puis milord le grand juge de l'Echiquier, sir Edward Hales, et retour avec Mr Thurloe à son cabinet. Il me dit que Field l'emportera sur nous et le Duc qu'il faut nous ingénier à arranger l'affaire de notre mieux, ce qui nous contrarie et nous tracasse beaucoup. Mais je suis heureux que le Duc s'y intéresse. Puis rentrai en voiture, m'arrêtant dans une taverne guidé par l'officier de police pour parler de cette affaire avec Mr Smith notre officier de police et à la maison où je vois que ma femme a fort proprement meublé mon cabinet de travail avec les anciennes tentures de salle à manger. Cela fera à l'occasion un salon élégant. Puis un moment à mon bureau et rentrai, passai la soirée à m'occuper de ma maison, puis souper et au lit.


                                                                                                      21 novembre

            Resté à la maison toute la journée à aider à accrocher mes tentures dans la chambre de ma femme, à ma grande satisfaction. Dans l'après-midi j'allai parler à sir John Mennes dans son logement où je trouvai de nombreuses grandes dames et son logement vraiment très élégant.
            Le soir, souper et au lit. Ayant, ce soir commencé à installer un drap à cracher, ce que je trouve très commode.   
            Aujourd'hui sont arrivés de Calais les bateaux de plaisance du roi avec l'argent de Dunkerque, soit 40 000 pistoles.


                                                                                                         22 novembre
                                                                                                   Samedi
            Ce matin, à la suite d'une querelle entre ma femme et sa servante Sarah, ma femme et moi nous sommes sérieusement disputés, à ma grande tristesse. Mais je la vois si pleine d'animosité envers cette fille, qui me semble une servante tout à fait hors ligne, que j'ai été obligé, dans l'intérêt même de cette fille, de lui dire de trouver une autre place. Il n'en coûtera néanmoins quelque tracas à ma femme avant que je permette ce départ.
            Puis réunion au bureau toute la matinée et dîner avec Mr Moore à la maison, ma femme occupée à ranger ses meubles. Puis nous nous séparons, lui rentre chez lui, moi en route vers la maison de mon cousin Roger Pepys, pour nous consulter sur une transaction avec mon oncle Thomas. De là à la Garde-Robe retrouver Mr Moore et rentrai. Après avoir beaucoup travaillé à mon bureau à la maison et fis poser sur ma porte un marteau d'un genre nouveau et continuai à ranger ma maison, fis peindre aussi ma porte d'entrée et son arcade.
            Aujourd'hui j'ai acheté le livre des danses anglaises en prévision de la venue de Gosnell, la suivante de ma femme qui danse avec force élégance et, trouvant là Mr Playford, celui-ci m'a donné les chants latins de Mr Deering qu'il a récemment imprimés.
            Mr Moore m'a dit aujourd'hui aussi, comme une chose certaine, que la reine mère a épousé milord St Albans, et que celui-ce sera sans douté nommé lord trésorier général.
            On apprend que sir John Lawson a maintenant fait la paix avec Tunis et Tripoli comme avec Alger. Il reviendra donc de ce fait couvert d'honneurs.


                                                                                                        23 novembre
                                                                                        Jour du Seigneur
            Levé après avoir calmement causé avec ma femme de notre différend d'hier et, réconciliés été à l'église entendre Mr Milles, puis rentrai et dîner avec Mr Moore et mon frère.. Ma femme étant indisposée aujourd'hui ne s'est pas levée. L'après-midi de nouveau à l'église entendre le somnolent Mr Graves, puis visite à sir William Penn, toujours malade. Restai un moment et appris que la fille de sir Richard Ford s'est mariée sans le consentement de sa famille et que l'affaire s'est engagée et s'est conclue chez Will Griffith notre portier. Puis à mon bureau où j'ai un peu travaillé, puis retour chez moi et au lit.
            J'ai aujourd'hui parlé à mon frère. Il me demande la permission de continuer à s'occuper de sa maîtresse sans que j'en aie aucun tracas ou obligation, ce à quoi j'ai consenti.
            J'apprends aujourd'hui que ce vieux richard d'Audley est mort  il y a peu, laissant une grande fortune dont il a enrichi nombre de familles pauvres, sans tout laisser à une seulee. Entre autres  mon ancien camarade de Saint Paul, un certain Davis, devenu libraire dans l'enclos de Saint-Paul. Il paraît qu'il fait remise de 60 000 livres à quelqu'un qui l'avait escroqué, mais sans donner son nom, mais tout le monde sait que c'est le copiste de Fleet Sreet chez qui il logeait, mort aussi cette semaine un marchand de volailles de Gracious Street, qu'on croyait riche mais pas aussi riche, il a laissé 800 livres de rente annuelle mises au nom d'autres personnes et 40 000 jacobus en or.


                                                                                                         24 novembre 1662

            Allant vers Whitehall, sir John Mennes, sir William Batten et moi apprenons que le roi et le Duc se sont rendus ce matin à la Tour pour voir l'argent de Dunkerque. Nous allâmes donc les retrouver et parcourûmes les magasins avec eux. Mais il me parut que c'étaient de propos bien pauvres et bien superficiels que ceux que tenaient les compagnons du roi, le jeune Killigrew, entre autres sujets des braguettes de certaines armures d'hommes. Nous n'avons pas aperçu l'argent, mais Mr Singsby a montré au roi, et j'ai pu voir aussi, les coins de la nouvelle monnaie qu'on va frapper selon la méthode de Blondeau, fort bien gravés et le roi très ressemblant. Puis le roi se rendit à Woolwich, bien qu'il fît très froid et le Duc à Whitehall en nous ordonnant de le suivre en voiture, et dans son cabinet en présence de milord Sandwich, nous nous entretînmes de la possibilité d'obtenir une partie de cet argent pour payer les escadres, et d'autres sujets. Partis à l'heure du dîner allai donc chez Mr Crew. Nous eûmes une conversation fort intéressante et il paraissait très content de ma visite.
Puis chez Mr Phillips et au Temple où nous retrouvâmes mon cousin Roger Pepys et son frère le Dr John, mes arbitres contre Mr Cole et Mr John Bernard qui sont ceux de mon oncle Thomas.Ils commencèrent par des exigences extrêmes et les membres de ma famille, en partie parce qu'ils connaissaient mal le testament et en partie, je le crains, parce qu'ils ne sont pas aussi malins que les autres, ce pourquoi je m'en veux d'avoir choisi des parents ( engagés en outre à le représenter autant que moi ) j'en fus fort tracassé et, saisissant l'occasion de refuser, sans le consentement de mon père, de m'engager par une caution de 2 000 livres qui leur seraient remises, je rompis les négociations pour le présent en attendant d'en savoir davantage d'y avoir réfléchie. Puis en voiture avec mon cousin Pepys m'attendant tout le temps dans une chambre voisine, je le déposai en chemin. Mais bon Dieu ! quels efforts il fit pour trouver une pièce de neuf pence pour partager avec moi le prix de la course, et faute d'en trouver fut obliger de donner un shilling. Et comme il s'écrie encore " gad " et parle du retour du papisme, comme tous les fanatiques, j'avais honte de tout cela. Rentrai, trouvai ma pauvre femme fort occupée à ranger, et au lit fort tracassé et presque sans dormir de la nuit, me demandant ce qui se passera pour Brampton et à m'en vouloir de vivre sur un grand pied, alors que, pour autant que je sache, il se peut que mes parents viennent vivre à nos frais en fin de compte.


                                                                                                      25 novembre

Résultat de recherche d'images pour "construire des bûches"            Levé et au bureau toute la matinée. A midi avec les autres sur l'invitation de Mr Foley le quincaillier, au Dauphin pour manger un pâté de chevreuil, et excellent et chose rare en cette saison. Puis en voiture avec Mr Coventry jusqu'au Temple, puis chez Greatorex, où je restai à bavarder tout en lui faisant réparer ma règle de poche, puis en voiture au logis de milord, où je travaillai, comme prévu, à faire les comptes de milord Sandwich. Cela fait, avec lui, le capitaine Ferrer et William Howe nous divertîmes fort gaiement un bon moment dans la grande salle à manger. Puis, comme il était tard et que milord n'arrivait pas, allai en voiture au Temple et rentrai à pied. Puis à mon cabinet pour travailler un peu, puis à la maison, et au lit.
            On fait grand bruit de ce que certains fanatiques affirment que la fin du monde est imminente et doit se produire mardi prochain. Que Dieu, à quelque moment qu'elle se produise, nous y prépare tous.


                                                                                                      26 novembre


            Le matin au Temple avec mon cousin Roger qui veut maintenant que je le dispense du rôle d'arbitre, car il ne pourrait pas me représenter comme il le voudrait sans être hostile à mon oncle Thomas, ce qui soulèverait ses protestations. Ce dont je suis bien satisfait, car c'est ce que je oulais et je vais choisir un autre avocat.
            Puis rentrai car il était occupé. Et toute la journée jusqu'à minuit j'ai rangé ma maison. Ma femme mettait les tentures et le lit rouge dans la chambre de sa suivante et moi et mes livres et d'autres affaires dans ma chambre et mon cabinet qui est maintenant fort joli. Et au lit.


                                                                                                    27 novembre

            En m'éveillant je vois les toits des maisons couverts de neige, spectacle rare et que je n'ai pas vu depuis trois ans.
            Levé et mis mes gens à parachever le nettoyage puis au bureau, réunion toute la matinée jusqu'à midi et puis nous allâmes tous dans la maison voisine sur la colline de la Tour voir passer l'ambassadeur de Russie. Pour le recevoir toutes les milices de la Cité sont dans les rues et les gardes du corps du roi et la plupart des riches bourgeois avec leurs manteaux de velours noir et leurs chaînes d'or, restes  de leur tenue d'apparat lors de l'arrivée du roi. Mais il se faisait tant attendre que nous redescendîmes à la maison pour dîner. A la fin j'entendis annoncer qu'ils arrivaient, de sorte que j'allai à pied jusqu'à la Fontaine du carrefour, au bout de Gracious Street et de Cornhill et à la fontaine dont les becs coulaient, tout près de moi, sur tous ceux qui se tenaient dessous, je les vis asses bien passer. Je ne vis pas l'ambassadeur dans son carrosse, mais sa suite avec leurs vêtements et leur bonnet de fourrure, de beaux hommes très bien faits, la plupart d'entre eux ayant sur le poing un faucon dont ils allaient faire présent au roi. Mais grand Dieu ! combien ridicules sont, par nature, les Anglais qui ne peuvent s'empêcher de rire et de se moquer de tout ce qui leur paraît étrange !

          
   Puis retour et au bureau, et réunion jusqu'à 7 heures, occupés à conclure un marché avec Mr Wood pour ses mâts de Nouvelle - Angleterre. Puis dans la voiture de Mr Coventry au Temple. Mais mon cousin Roger Pepys n'était pas disponible pour me parler de mon affaire. Je revins aussitôt à la maison et fus à mon bureau jusque très tard à travailler. Ensuite à la maison que je trouve plus propre et mieux rangée, et j'espère que dans quelques jours tout sera bien et tout à fait selon mon coeur, ce que Dieu veuille. Puis soupai, et au lit.


                                                                                                     28 novembre

            Il gèle à pierre fendre, ce qui est tout nouveau pour nous et ne s'est pas produit depuis presque trois ans . Levé et allai à l'hôtel des quincailliers à dix heures pour les funérailles de sir Richard Stayner. Etions présents tous les fonctionnaires de la Marine et milord Sandwich qui s'entretint avec nous de la Pêcherie, nous disant la décision de Sa Majesté de donner 200 livres à quiconque équipera une bûche, et nous consulta sur l'effet de cette incitation certainement très importante. On nous donna de belles bagues et au bout d'un moment allions monter en voiture, et comme j'étais monté dans une voiture à quatre chevaux, on vint nous dire que ce n'était que pour les gens du convoi. Je descendis et en profitai pour revenir à la maison où je restai toute la journée, attendant l'arrivée de Gosnell, mais elle adressa ses excuses, disant qu'elle n'avait rien reçu de sa mère, mais qu'elle viendrait la semaine prochaine. Je l'espère, et puisqu'il faut que j'aie quelqu'un, que ce soit quelqu'un qui puisse me donner quelque plaisir.
            A mon bureau jusque tard, à recopier le testament de mon oncle. Puis rentrai, et au lit.


                                                                                                        29 novembre

            Visite du frère de ma femme avant mon départ pour le bureau et nous l'avons chargé d'aller voir Gosnell pour savoir la vraie raison pour laquelle elle n'est pas venue et si elle a ou non l'intention de venir. Puis au bureau. Ce matin sir George Carteret est venu nous voir, première fois depuis qu'il est arrivé de France. Il nous dit que la monnaie d'argent qu'il a reçue pour Dunkerque pesait 120 000 livres.                                                                                          fineartamerica.com
Image associée            Travaillai toute la matinée et à midi, sans rentrer dîner ( bien qu'on m'eût dit que Will Joyce était là, lui que je n'ai pas vu chez moi ni ailleurs depuis trois ou quatre mois ), avec Mr Coventry dans sa voiture jusqu'à Fleet Street, où j'entrai chez Madame Turner et où on m'avait dit que je trouverais mon cousin Roger Pepys. Allâmes ensemble au Temple, mais sans avoir le temps de rien faire, je me dirigeai vers la maison de lord Sandwich ( en route je montai dans la voiture du commandant Cuttance, et allai avec lui chez milord ). Mais les autres n'étaient pas prêts, je descendis à Wilkinson et, n'ayant rien mangé de la journée, je mangeai un pâté de mouton et je bus. Puis j'allai chez milord où étaient présents quelques personnages importants, réunis pour exposer l'affaire de la Pêcherie et la façon dont le roi donnera ces 200 livres à quiconque lancera une bûche neuve et de fabrication anglaise avant la prochaine mi-juin. J'entendis en cette affaire nombre d'excellents propos et j'ai bien vu le grand plaisir qu'il y a à s'entretenir de questions publiques avec des personnes qui connaissent spécialement telle ou telle affaire. Etant arrivés à une conclusion où une proposition que j'avais faite fut bien reçue, d'envoyer des invitations du roi à pratiquement tous les ports de pêche, en fixant une limite au nombre de bûches de chaque port tant que nous ne connaîtrons par le nombre des contractants. Nous nous quittâmes et je rentrai et fis tout le chemin à pied, m'arrêtant chez mon cousin Turner et chez Mr Carlthrop au Temple pour leur demander de consentir à être mes arbitres, ce qu'ils acceptent. Ma femme et moi fûmes au lit de bonne heure, de bonne humeur parce que son frère annonce que Gosnell, que ma femme et moi appelon plaisamment notre " marmotte ", viendra à coup sûr la semaine prochaine, Dieu veuille que cela tourne bien !


                                                                                                     30 novembre 1662
                                                                                         Jour du Seigneur
            A l'église le matin, Mr Milles a fait un assez bon sermon. Il gèle à pierre fendre aujourd'hui Dînai seul avec ma femme, avec satisfaction, ma maison étant propre de fond en comble. L'après-midi allai à l'église française ici dans la Cité, et restai dans le bas-côté tout le temps du sermon, prenant un immense plaisir à entendre un fort admirable sermon d'un tout jeune homme, sur l'article de notre credo, dans l'ordre du catéchisme, sur la résurrection. Puis à la maison et rendis visite à sir William Penn toujours alité. Il y avait sir William Batten et sa femme et Mrs Turner. J'y fus de joyeuse humeur, parlai de l'assurance de la fille nouvellement mariée de sir Richard Ford, malgré l'étrangeté de son récent mariage, elle a, à l'église, l'air le plus guilleret du monde et prend le pas sur sa soeur aînée, célibataire.
            Rentrai souper et puis, malgré le froid, à mon bureau pour faire mon bilan mensuel, et je vois qu'avec l'aménagement de ma maison ce mois-ci, j'ai dépensé 50 livres pour aussi la cuisine. De sorte que je ne possède plus que 660 livres ou à peu près. Cela fait et m'étant préparé pour le Duc demain, je rentrai, fis la prière, et au lit.
             Aujourd'hui portai pour la première fois un manchon, qui est le manchon de ma femme de l'année dernière, et maintenant que je lui en ai acheté un neuf, celui-ci fait très bien mon affaire. 

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            Ainsi se termine ce mois par un grand gel.
            Moi et ma femme sommes très bien, mais je suis très troublé par le procès avec mon oncle en passe maintenant d'être réglé par arbitration entre nous, et plût à Dieu que ce fût déjà fait !
            Je ne sais non plus trop que penser de ma décision de prendre une servante dans ma maison en qualité de suivante pour ma femme. Ma femme me promet qu'elle ne me coûtera rien que sa nourriture et ses gages et que cela n'entraînera aucune autre dépense. A ces conditions j'accepte la chose, car j'espère que cela m'économisera de l'argent en sorties pour ma femme et en autres plaisirs. J'espère que tout ira bien, mais je suis résolu à changer ma décision si les choses vont autrement que je ne le veux.
            En ce qui concerne les affaires publiques il y a un fâcheux état de mécontentement contre l'arrogance et la vanité de la Cour et parce que la Cour est mauvais payeur. Mais ce qui me tracasse le plus c'est le clergé qui ne plaira jamais à la Cité, laquelle ne se résignera pas aux évêques. Il est bien dommage qu'il y ait encore des conflits.
            Dunkerque nouvellement vendu et l'argent ramené en Angleterre, dont nous espérons recevoir une partie pour payer la Marine, ce qui, sir John Lawson ayant réglé l'affaire de la Méditerranée en faisant la paix avec Alger, Tunis et Tripoli, de sorte que sa flotte va aussi bientôt rentrer, va diminuer de jour en jour, de sorte que la dépense du roi va être réduite, ce que Dieu veuille.
 



                                                                                    à suivre...............

                                                                Décembre
            


            

jeudi 16 novembre 2017

Les fées de France Alphonse Daudet ( Nouvelle France )

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                                                               Les Fées

                                           Conte fantastique

            - Accusée, levez-vous, dit le président.
            Un mouvement se fit au banc hideux des pétroleuses, et quelque chose d'informe et de grelottant vint s'appuyer contre la barre. C'était un paquet de haillons, de trous,de pièces, de ficelles, de vieilles fleurs, de vieux panaches et là-dessous une pauvre figure fanée, tannée, ridée, crevassée, où la malice de deux petits yeux noirs frétillait au milieu des rides comme un lézard à la fente d'un vieux mur.
            - Comment vous appelez-vous ? lui demanda-t-on.
            - Mélusine.
            - Vous dites ?...
           Elle répéta gravement :
            - Mélusine.
            Sous sa forte moustache de colonel de dragons, le président eut un sourire, mais il continua sans sourciller :
            - Votre âge ?                                                                                    giphy.com
Image associée            - Je ne sais plus.
            - Votre profession ?
            - Je suis fée !...
            Pour le coup l'auditoire, le conseil, le commissaire du gouvernement lui-même, tout le monde partit d'un grand éclat de rire ; mais cela ne la troubla point, et de sa petite voix claire et chevrotante, qui montait haut dans la salle et planait comme une voix de rêve, la vieille reprit :
            - Ah ! les fées de France, où sont-elles ? Toutes mortes, mes bons messieurs. Je suis la dernière ; il ne reste plus que moi... En vérité, c'est grand dommage, car la France était bien plus belle quand elle avait encore ses fées. Nous étions la poésie du pays, sa foi, sa candeur, sa jeunesse. Tous les endroits que nous hantions, les fonds de parcs embroussaillés, les pierres des fontaines, les tourelles des vieux châteaux, les brumes d'étangs, les grandes landes marécageuses, recevaient de notre présence je ne sais quoi de magique et d'agrandi. A la clarté fantastique des légendes, on nous voyait passer un peu partout, traînant nos jupes dans un rayon de lune, ou courant sur les prés à la pointe des herbes. Les paysans nous aimaient, nous vénéraient.
            Dans les imaginations naïves, nos fronts couronnés de perles, nos baguettes, nos quenouilles enchantées, mêlaient un peu de crainte à l'adoration. Aussi nos sources restaient toujours claires. Les charrues s'arrêtaient aux chemins que nous gardions ; et comme nous donnions le respect de ce qui est vieux, nous, les plus vieilles du monde, d'un bout de la France à l'autre on laissait les forêts grandir, les pierres crouler d'elles-mêmes.
Résultat de recherche d'images pour "drak lutin"*            Mais le siècle a marché. Les chemins de fer sont venus. On a creusé des tunnels, comblé les étangs, et fait tant de coupes d'arbres, que bientôt nous n'avons plus su où nous mettre. Peu à peu les paysans n'ont plus cru en nous. Le soir, quand nous frappions à ses volets, Robin disait : " C'est le vent " et se rendormait. Les femmes venaient faire leurs lessives dans nos étangs. Dès lors c'a été fini pour nous. Comme nous ne vivions que de la croyance populaire, en la perdant, nous avons tout perdu. La vertu de nos baguettes s'est évanouie, et de puissantes reines que nous étions, nous nous sommes trouvées de vieilles femmes, ridées, méchantes comme des fées qu'on oublie ; avec cela notre pain à gagner et des mains qui ne savaient rien faire. Pendant quelque temps, on nous a rencontrées dans les forêts traînant des charges de bois mort, ou ramassant des glanes au bord des routes. Mais les forestiers étaient durs pour nous, les paysans nous jetaient des pierres. Alors, comme les pauvres qui ne trouvent plus à gagner leur vie au pays, nous sommes allées la demander au travail des grandes villes.
            Il y en a qui sont entrées dans des filatures. D'autres ont vendu des pommes, l'hiver, au coin des ponts, ou des chapelets à la porte des églises. Nous poussions devant nous des charrettes d'oranges, nous tendions aux passants des bouquets d'un sou dont personne ne voulait, et les petits se moquaient de nos mentons branlants, et les sergents de ville nous faisaient courir, et les omnibus nous renversaient. Puis la maladie, les privations, un drap d'hospice sur la tête... Et voilà comme la France a laissé toutes ses fées mourir. Elle en a été bien punie !
            Oui, oui, riez, mes braves gens. En attendant nous venons de voir ce que c'est qu'un pays qui n'a plus de fées. Nous avons vu tous ces paysans repus et ricaneurs ouvrir leurs huches aux Prussiens et leur indiquer les routes. Voilà ! Robin ne croyait plus aux sortilèges, mais il ne croyait pas davantage à la patrie... Ah ! si nous avions été là,  nous autres de tous ces Allemands qui sont entrés en France, pas un seul ne serait sorti vivant. Nos draks, nos feux follets, les auraient conduits dans des fondrières. A toutes ces sources pures qui portaient nos noms, nous aurions mêlé des breuvages enchantés qui les auraient rendus fous ; et dans nos assemblées, au clair de lune, d'un mot magique, nous aurions si bien confondu les routes, les rivières, si bien enchevêtré de ronces, de broussailles, ces dessous de bois où ils allaient toujours se blottir, que les petits yeux de chat de M. de Moltke n'auraient jamais pu s'y reconnaître. Avec nous, les paysans auraient  marché. Des grandes fleurs de nos étangs nous aurions fait des baumes pour les blessures, les fils de la Vierge nous auraient servi de charpie ; et sur les champs de bataille, le soldat mourant aurait vu la fée de son canton se pencher sur ses yeux à demi fermés pour lui montrer un coin de bois, un détour de route, quelque chose qui lui rappelle le pays. C'est comme cela qu'on fait la guerre nationale, la guerre sainte. Mais hélas ! dans les pays qui ne croient plus, dans les pays qui n'ont plus de fées, cette guerre-là n'est pas possible.
            Ici la petite voix grêle s'interrompit un moment, et le président la parole :
Image associée   *         - Tout ceci ne nous dit pas ce que vous faisiez du pétrole qu'on a trouvé sur vous quand les soldats vous ont arrêtée.
            - Je brûlais Paris, mon bon monsieur, répondit la vieille très tranquillement. Je brûlais Paris parce que je le déteste, parce qu'il rit de tout, parce que c'est lui qui nous a tuées. C'est Paris qui a envoyé des savants pour analyser nos belles sources miraculeuses, et dire au juste ce qu'il entrait de fer et de souffre dedans. Paris s'est moqué de nous sur ses théâtres. Nos enchantements sont devenus des trucs, nos miracles des gaudrioles, et l'on a vu tant de vilains visages passer dans nos robes roses , nos chars ailés, au milieu de clairs de lune en feu de Bengale, qu'on ne peut plus penser à nous sans rire... Il y avait des petits enfants qui nous connaissaient par nos noms, nous aimaient, nous craignaient un peu ; mais au lieu des beaux livres tout en or et en images, où ils apprenaient notre histoire, Paris maintenant leur a mis dans les mains la science à la portée des enfants, de gros bouquins d'où l'ennui monte comme une poussière grise et efface dans les petits yeux nos palais enchantés et nos miroirs magiques... Oh ! oui, j'ai été contente de le voir flamber votre Paris... C'est moi qui remplissais les boîtes des pétroleuses, et je les conduisais moi-même aux bons endroits :
" Allez, mes filles, brûlez tout, brûlez, brûlez ! "
            - Décidément cette vieille est folle, dit le président. Emmenez-la.

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                                                                                    Alphonse Daudet

                                                 Ce conte parut dans l'Evènement en avril 1872
       
           






















































































































































































































dimanche 12 novembre 2017

Journal secret 4 ( extraits )Pouchkine ( Russie )

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                                                              Journal secret

                                                                          ( extraits )

            J'ai réussi à convaincre N. que d'Anthès a la syphilis et qu'il infecterait toute femme. J'ai appris à N. qu'un homme atteint de la syphilis traverse des périodes où ses symptômes disparaissent temporairement et pendant lesquels il peut devenir moins contagieux, tout en le restant. Pendant de telles périodes l'homme malade se montre particulièrement passionné. C'est ainsi que j'ai tenté de préserver N. de d'Anthès. Elle y a cru jusqu'à ce que Katka prouvât par son propre exemple que c'était un mensonge.
            Souvent, à la suite de longues danses avec lui, sur le chemin du retour, après le bal, elle me confiait qu'une fois de plus il avait eu " une rémission de sa maladie ". Un éclair traversait ses yeux et elle répondait à mes baisers avec une passion ardente. Pendant ces moments, je pensais que je devrais être reconnaissant envers d'Anthès pour avoir provoqué ce désir dont je profitais de bon coeur. Il est arrivé un moment où, lorsque N. se montrait indifférente à mes tendresses, je me surprenais à penser que je ferais mieux de l'emmener au bal pour que d'Anthès la serre contre lui pendant une danse et éveille son excitation pour la nuit, pour moi. J'étais révulsé par ces pensées, mais je n'y pouvais rien, et je n'ai finalement plus ressenti qu'une joie malicieuse.
            Regardant n'importe quel homme la courtiser, je chuchotais méchamment :
            - " Vous travaillez tous pour moi ! " Mais la jalousie me faisait enrager. Une fois durant un bal j'ai remarqué que N. dansait avec le comte H. et lui avait permis de lui embrasser la main trois fois. Quand nous sommes rentrés à la maison j'ai arraché le poignard du mur, j'ai brutalement enserré N. contre moi, sur mes genoux, et j'ai posé le poignard contre sa gorge.
             - Confesse-toi, ai-je hurlé, est-ce que tu couches avec lui ?
             N. était terrorisée et son corps se tordait comme convulsé par des vagues d'orgasme.
            - Je jure sur nos enfants que je te suis fidèle, dit N. la voix brisée, le regard dans le mien.
Image associée            J'étais prêt à la poignarder si elle avait hésité à répondre ou détourner les yeux, et elle le sentit. Comment pouvais-je ne pas la croire après un tel serment ? Je l'ai fait glisser de mes genoux et elle s'est écroulée à terre. Chaque attaque de jalousie se terminait par un désir sauvage. Gémissante, à terre, la robe troussée ses cuisses étaient couvertes de sang....... Ma femme venait de faire une fausse couche.
            Après la naissance de notre premier enfant j'ai décidé de ne plus jamais me trouver à proximité pour ne pas entendre ses cris terribles. Elle avait hurlé de façon si déchirante que j'avais fondu en larmes....... J'ai été délibérément en retard pour la deuxième naissance, mais Dieu s'est rattrapé en faisant de moi le témoin d'une fausse couche.
            Dans le sang il y avait un caillot où l'on pouvait distinguer un          bmagic.org.uk                         embryon au visage de poisson.
                                           Heureusement, le saignement s'est vite arrêté, la douleur a cessé.........

                                                                  *****************

                                      .............

                                                                *****************

            Je ne me sens en paix que lors de ses grossesses, parce que N. est obnubilée par les préparatifs de la naissance, ce qui a au moins l'avantage d'apaiser sa coquetterie, même si elle n'est jamais complètement bannie. C'est pourquoi je m'efforce de la garder enceinte, bien que cela me ruine. En procréant, je m'endette.
Image associée            L'autre intérêt de la grossesse de N. c'est qu'elle pardonne ma boulimie des autres femmes. Au cours des derniers mois de sa grossesse elle ne m'a pas laissé l'approcher parce que les docteurs lui ont dit que c'était très dangereux pour l'enfant. Elle n'a cédé à aucun argument, je me suis énervé et j'ai dit que j'irai chez une p... A ma surprise N., calmement a simplement souhaité que ce fût réellement une p... et pas une maîtresse quelconque.
            Ce fut ainsi que je confessai mon adultère pour la première fois et que j'obtins la permission de coucher avec des prostituées.................
            N. tolérait les catins mais sa jalousie envers les autres femmes s'aggravait d'une manière incroyable...................
   soundcloud.com                                    Maintenant elle comprend tout par elle-même.....................
            Non, N. ne m'aime pas, je m'en aperçois, et je fais tout pour aggraver son indifférence. Quand le désir s'éveille en elle, elle me laisse le combler, le reste du temps elle ne fait que me tolérer.

                                                                           ****************

            N. est devenue jalouse de moi et de Katrin et a décidé de la faire épouser par Khalustine, mais j'ai effrayé ce dernier avec la menace d'un duel, et le couard a disparu.
            N. m'a avoué plus tard, mais je l'avais déjà compris, qu'elle avait installé ses soeurs chez nous dans un dessein précis. Les sauver des gifles de leur mère et des griffes du dément qu'elles avaient pour père n'en était pas la seule raison. N. préférait que je me laisse séduire par elles plutôt que par des inconnues. Pauvre fille elle ne comprenait pas qu'un feu de forêt ne peut pas simplement brûler un arbre et s'éteindre. Au contraire plus il consume d'arbres plus il devient fort. Mais je ne voulais pas lui expliquer cela, et je me suis juste frotté les mains...........

                                                                           *****************

            .............. J'ai une drôle de progéniture, ainsi que l'aurait dit le regretté Delvig. Les enfants sont les défenseurs de ma vie de famille et préservent leur mère de la tentation. Plus il y a d'enfants mieux c'est. En ce qui me concerne, chacune de ses grossesse m'apparaît comme une providence qui excuse mes adultères.
             J'adore le ventre rond de N. à l'endroit où son nombril disparaît et où une tâche sombre le remplace...................
            Plus nombreuses sont nos années de mariage moins cela m'intéresse d'y consacrer beaucoup d'efforts. Je me force en esprit à faire preuve de zèle, il me dit de ne pas laisser ma femme insatisfaite sous peine de la voir se jeter dans les bras d'un amant............
Image associée            ............. Je n'ai pas de temps pour les enfants. L'écriture et les femmes me laissent rarement du temps pour jouer avec Mashka et Saska ( fils de P. 1833-1914 ), Grishka ( fils de P. 1835-1905 ) et Natashka ( fille de P. 1836-1913 ) en sont encore au stade de l'inconscience infantile et je n'ai rien à faire avec eux. Le plus grand plaisir qu'ils m'apportent est de pouvoir les exhiber devant mes invités. Je me sens si fier d'eux, comme après avoir composé un bon poème........ leurs visages font penser à ceux de chatons....... Mais en général les enfants m'ennuient et j'essaie de me tenir à l'écart. Leurs pleurs et leurs maladies, leurs chamailleries ne me permettent pas de me concentrer et consument mon temps. J'ai juste assez de patience pour une demi-heure, il me faut ensuite m'enfuir.........
            J'ai engendré mes enfants sans prendre en considération leurs          souffrances futures, ne cherchant qu'à me préserver de la douleur, de la douleur que provoque ma jalousie envers N.........                                                                revelessencedesoi.com
Souvent je regarde leurs petites mains, leurs jambes, leurs visages, et le simple fait de savoir qu'ils sont la chair de ma chair m'empreint d'une admiration poétique, malheureusement vite remplacée par le sentiment d'avoir été trahi, appâté jusque dans une cage puis enfermé à l'intérieur. La responsabilité permanente à l'égard des enfants est une cage dont je ne pourrai jamais m'échapper.
            La responsabilité m'oppresse, même si c'est un choix volontaire. Je me suis laissé entraîné dans la spirale des coutumes humaines et je l'ai suivie jusqu'au bout malgré les avertissements de mon esprit.
            Je suis maintenant convaincu qu'il ne sortira rien de bon de ma vie de famille. De telles confessions ne font rien pour accroître mes sentiments paternels.
            Avant je ne protégeais que mon propre honneur, puis celui de ma femme aussi. Aujourd'hui il me faut m'occuper de l'honneur de mes enfants et de mes belles-soeurs. L'honneur que j'ai pour mission de protéger est devenu si étendu depuis mon mariage qu'il s'en trouve incroyablement palpable. Il me faut être vigilant à chaque instant. L'existence même de d'Anthès empiète sur ma dignité. Par conséquent il me faudra me battre avec lui sans délai.
            Le Tsar m'a dit qu'il prendrait soin de N. et des enfants dans l'éventualité de ma mort, comme si elle était arrêtée. Cela a offensé mon honneur, car c'est le genre de soins que l'on prodigue à sa concubine..............
            A quelque chose malheur est bon : grâce la paternité j'ai rencontré des nourrices. C'est un plaisir spécial........................

                                                                 *****************

            Les femmes pleines de fausseté : les dames de la société prétendent qu'elles ne veulent pas et les putains prétendent qu'elles veulent.

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            Il existe deux bonheurs : le premier se fait jour quand vous allez plein d'impatience voir une femme, et l'autre quand vous vous en retournez soulagé d'elle et du désir.

                                                                   *****************

            Le comte M. est revenu de Paris et je l'ai assailli de questions sur les femmes de là-bas. Il a dit qu'elles étaient d'une beauté incroyable, et que même les p... des rues avaient l'air de reines.
            Je suis devenu curieux :
            - Combien en as-tu essayé ?                                                                      fineartamerica.com 
Image associée            - Aucune, a-t-il dit.
            Je me suis imaginé à sa place et j'ai ragé :
            - Comment as-tu plu laisser passer une telle chance ?
            Tandis que j'exprimais ma surprise à propos de son manque d'initiative et que je le plaignais d'avoir ainsi perdu son temps à Paris, M. n'a rien dit et s'est contenté de me regarder tristement.
            - Pourquoi, mais pourquoi n'en as-tu pas baisé au moins une ? je ne pouvais pas m'arrêter.
            - Eh bien, parce que j'aime ma femme, voilà pourquoi, a répondu le comte.
            Et j'ai eu honte face à une explication aussi simple.

                                                                            *******************

                                                                ...................................

                                                                           ******************

            Comme c'est écoeurant de prendre conscience que toutes les femmes ne me veulent pas.

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            Pour les hommes qui ne tâtent pas de la variété pendant le célibat, le désir s'en va lentement dans le mariage. Par conséquent ils ne s'en aperçoivent pas, et quand ils s'en aperçoivent c'est trop tard, car ils sont déjà vieux. Ma passion pour ma femme s'est éteinte un mois après le mariage..........

                                                                               *****************

            Après avoir goûté au fruit défendu, Adam et Eve apprirent la honte et eurent honte de leur nudité. La honte fut créé par le Diable, si bien que Dieu détermina qu'ils avaient commis un péché en reconnaissant leur honte. Pour leur désobéissance, Dieu les expulsa du Paradis mais leur laissa le plaisir en consolation. En copulant Adam et Eve ne ressentirent pas la culpabilité et cette innocence leur rappela leur séjour au Paradis. Il en est de même pour les amants. Le Paradis leur vient de leur conscience réciproque. Mais le Diable ne se reposa pas et créa la société humaine qu'il affligea d'une honte incommensurable.
            Dieu permit à l'homme d'avoir une femme sachant que le péché de frissons de la chair n'est que passager, mais il ne lui permit pas le moins du monde de forniquer avec une nouvelle femme. Le péché revit et dure grâce à la diversité de femmes qu'offre la société. L'être humain est l'oeuvre de Dieu et la société humaine est l'oeuvre du Diable.
            Pour la transgression Dieu n'expulsa pas seulement Adam et Eve du Paradis mais décupla aussi les interdictions. Enfreignez-en une seule et vous n'irez pas au Paradis. J'en ai transgressé une en forniquant et j'en violerai une seconde quand je me débarrasserai de d'Anthès.

                                                                     *****************

            Les mensonges des humains sont nés de la honte. La honte est la dissimulation de ce que vous possédez. En nous débarrassant de la honte nous nous débarrassons du mensonge et il ne restera rien de la diabolique société humaine. Il n'y aura plus sur Terre que des amants heureux.

                                                                      ******************

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Image associée            Je regarde les centaines de livres qui ornent mon bureau et me rends compte que, pour la plupart, je ne les ai pas touchés depuis la première fois où je les ai lus ou feuilletés. Mais il ne me vient même pas à l'esprit de m'en débarrasser, qu'adviendra-t-il si un jour j'ai envie d'ouvrir celui-ci ou celui-là ? J'ai dépensé mes derniers roubles tant pour l'acquisition de nouveaux livres que pour me payer des putains. Acheter des livres est un plaisir très différent de celui de la lecture : examiner minutieusement, sentir, feuilleter un nouveau livre est un bonheur en soi.
            La disponibilité des livres me donne confiance, je peux toujours profiter d'eux si je choisis de le faire. Il en est de même avec les femmes, et il m'en faut beaucoup, elles doivent s'ouvrir devant moi à la manière des livres. En vérité, pour moi, les livres et les femmes se ressemblent beaucoup. Ouvrir un livre c'est comme écarter les jambes d'une femme, la connaissance se dévoile sous vosyeux. Chaque livre a sa propre odeur. Lorsque vous l'ouvrez, le respirez vous sentez l'encre, et pour chaque livre c'est différent. Couper les pages d'un livre vierge est un plaisir indescriptible. Même un ouvrage stupide me donne du plaisir quand je le manie pour la première fois. Plus le livre est intelligent plus il m'attire, et la beauté de la couverture ne m'importe pas. Ce qui n'est pas toujours le cas avec les femmes.
            De même qu'une femme peut avoir du plaisir avec n'importe quel homme habile, un livre s'offre à celui qui s'en saisit. Il distillera le plaisir délicat de son savoir à quiconque est capable de le comprendre. Je suis donc jaloux de mes livres et n'aime pas les prêter à qui que ce soit. Ma bibliothèque est mon harem.


                                                                              ( à suivre ........... )



 











            

vendredi 10 novembre 2017

Trois ans après Victor Hugo ( Poème France )

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                                                         Trois ans après

            Il est temps que je me repose ;
            Je suis terrassé par le sort.
            Ne me parlez pas d'autre chose
            Que des ténèbres où l'on dort !

            Que veut-on que je recommence ?
            Je ne demande désormais
            A la création immense
            Qu'un peu de silence et de paix !

            Pourquoi m'appelez-vous encore ?
            J'ai fait ma tâche et mon devoir.
            Qui travaillait avant l'aurore,
            Peut s'en aller avant le soir.

            A vingt ans, deuil et solitude !
            Mes yeux baissés vers le gazon,
            Perdirent la douce habitude
            De voir ma mère à la maison.

            Elle nous quitta pour la tombe ;
            Et vous savez bien qu'aujourd'hui
            Je cherche, en cette nuit qui tombe,
            Un autre ange qui s'est enfui !


            Vous savez que je désespère,                                                                          comvv.fr
Image associée             Que ma force en vain se défend,
             Et que je souffre comme père,
             Moi qui souffris tant comme enfant !

            Mon oeuvre n'est pas terminée,
            Dîtes-vous. Comme Adam banni,
            Je regarde ma destinée,
            Et je vois bien que j'ai fini.

            L'humble enfant que Dieu m'a ravie
            Rien qu'en m'aimant savait m'aider ;
            C'était le bonheur de ma vie
            De voir ses yeux me regarder.

            Si ce Dieu n'a pas voulu clore
            L'oeuvre qu'il me fit commencer,Il
            S'il veut que je travaille encore,
            Il n'avait qu'à me la laisser !

            Il n'avait qu'à me laisser vivre
            Avec ma fille à mes côtés,
            Dans cette extase où je m'enivre
            De mystérieuses clartés !

            Ces clartés, jour d'une autre sphère,
            O Dieu jaloux, tu nous les vends !
            Pourquoi m'as-tu pris la lumière
            Que j'avais parmi les vivants ?

            As-tu donc pensé, fatal maître,
            Qu'à force de te contempler,
            Je ne voyais plus ce doux être
            Et qu'il pouvait bien s'en aller !Qu'i

            T'es-tu dit que l'homme, vaine ombre,
            Hélas ! perd son humanité
            A trop voir cette splendeur sombre
            Qu'on appelle la vérité ?

            Qu'on peut le frapper sans qu'il souffre,                                                     victorhugo2002.culture.fr
Résultat de recherche d'images pour "victor hugo"            Que son coeur est mort dans l'ennui,
            Et qu'à force de voir le gouffre,
            Il n'a plus qu'un abîme en lui ?

            Qu'il va, stoïque, où tu l'envoies,
            Et que désormais, endurci,
            N'ayant plus ici-bas de joies,           
            Il n'a plus de douleurs aussi ?

            As-tu pensé qu'une âme tendre
            S'ouvre à toi pour se mieux fermer
            Et que ceux qui veulent comprendre
            Finissent par ne plus aimer ?

            O Dieu ! vraiment, as-tu pu croire
            Que je préférais, sous les cieux,
            L'effrayant rayon de ta gloire
            Aux douces lueurs de ses yeux !

            Si j'avais su tes lois moroses,
            Et qu'au même esprit enchanté
            Tu ne donnes point ces deux choses,
            Le bonheur et la vérité,

            Plutôt que de lever tes voiles,
            Et de chercher, coeur triste et pur,
            A te voir au fond des étoiles,
            O Dieu sombre d'un monde obscur,

            J'eusse aimé mieux, loin de ta face,
            Suivre, heureux, un étroit chemin,
            Et n'être qu'un homme qui passe
            Tenant son enfant par la main !

            Maintenant, je veux qu'on me laisse !
            J'ai fini ! le sort est vainqueur.
            Que vient-on rallumer sans cesse
            Dans l'ombre qui m'emplit le coeur ?

            Vous qui me parlez, vous me dites
             Qu'il faut, rappelant ma raison,
             Guider les foules décrépites
             Vers les lueurs de l'horizon ;

            Qu'à l'heure où les peuples se lèvent,
            Tout penseur suit un but profond ;
             Qu'il se doit à tous ceux qui rêvent,
             Qu'il se doit à tous ceux qui vont !
                                                                                                                             information.tv5monde.com
Résultat de recherche d'images pour "victor hugo"            Qu'une âme qu'un feu pur anime,
             Doit hâter, avec sa clarté,                                                               
             L'épanouissement sublime
             De la future humanité ;
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            Qu'il faut prendre part, coeurs fidèles,
            Sans redouter les océans,
            Aux fêtes des choses nouvelles,
            Aux combats des esprits géants !

            Vous voyez des pleurs sur ma joue,
             Et vous m'abordez mécontents,
            Comme par le bras on secoue
            Un homme qui dort trop longtemps.

            Mais songez à ce que vous faîtes !
            Hélas ! cet ange au front si beau,
            Quand vous m'appelez à vos fêtes,
            Peut-être a froid dans son tombeau.

            Peut-être, livide et pâlie,
            Dit-elle dans son lit étroit :
            " Est-ce que mon père m'oublie 
            " Et n'est plus là, que j'ai si froid ? "

            Quoi ! lorsqu'à peine je résiste
            Aux choses dont je me souviens,
            Quand je suis brisé, las et triste,
            Quand je l'entends qui me dit : " Viens ! "

            Quoi ! vous voulez que je souhaite,
            Moi, plié par un coup soudain,
            La rumeur qui suit le poète,
            Le bruit que fait le paladin !
                                                                                                                    jardin-secrets.com   
Résultat de recherche d'images pour "victor hugo"            Vous voulez que j'aspire encore
             Aux triomphes doux et dorés !
             Que j'annonce aux dormeurs l'aurore !
             Que je crie  : " Allez ! espérez ! "

            Vous voulez que dans la mêlée,
            Je rentre ardent parmi les forts,
            Les yeux à la voûte étoilée... -
            Oh ! l'herbe épaisse où sont les morts !


                                                                  Victor Hugo
                                                                                        Novembre 1846
                                                                           
         




         
         
         

            

mardi 7 novembre 2017

La disparition de Josef Mengeié Olivier Guez ( Roman France )

La disparition de Josef Mengele
         fnac.com

       Prix Renaudot 2017

                                                         La disparition de Josef Mengelé

            Le 22 juin 1949 Josef Mengele devient Helmut Gregor, jusqu'à la fin de sa vie, en mettant le pied sur le sol argentin. L'homme qui fut un des hommes de main les plus cruels d'Aushwitz, le docteur Mengele qui envoyait directement au four crématoire des wagons entiers de juifs, arrivés de Hongrie, de Pologne, de France et d'ailleurs, coupant les cheveux vendus aux usines qui fabriquaient avec du feutre, extrayaient les yeux des bébés, et d'autres crimes abominables, fuit après 1945, se cache, "....... s'est noyé dans la Wermacht pour échapper aux griffes de l'Armée rouge...... " interné et relâché, il se cacha dans une ferme " fleurie de Bavière non loin de Günzburg sa ville natale ...... " Enfin l'arrivée en Italie où un passeur aide les nombreux nazis à traverser l'Atlantique et trouver refuge à Buenos Aires. L'homme aux incisives du bonheur ou et de la chance, est riche fils d'une famille soudée qui le soutiendra jusqu'à la fin, cependant sa femme Irène ne le suit pas, restée en Allemagne elle élève leur fils qui ignora longtemps les ignominies de son père, celui-ci nie et affirme n'avoir fait que son devoir, qu'il fit sans état d'âme. Mais si Peron et Evita arrivés au pouvoir protègent tous ces Allemands venus cacher leurs méfaits, ses successeurs seront plus prudents. Et Mengele Gregor homme au front bombé et à la grosse moustache est obligé de fuir encore, d'un pays à l'autre, la traque s'organise en Europe, mollement soutenue par les pays sud-américains. Simon Wiesenthal, survivant de la Shoah est actif, le Mossad est sur la piste d'Eichmann arrêté et jugé en Israël. Gregor, amateur de poésie et de musique classique allemandes, a peur, habite dans des fermes qu'il acquiert en partie grâce aux dollars dont profitent les habitants. Violent, caché sous un grand chapeau son périple le mène au Brésil et alentour, protégé et surtout aidé par quelques nazis qui espèrent l'arrivée d'un 4è Reich. Lorsque les recherches semblent au point mort, actif il conduit des sociétés, sort avec certains, rencontre même Borges devenu Directeur de la Bibliothèque Nationale de Buenos Aires. Mais nerveux, acariâtre il mâchonne sa moustache, avale les poils qui vont provoquer une occlusion intestinale. Les protecteurs âgés disparaissent, Gregor affolé se cache dans une masure, toujours en possession de sa valise remplie de fioles et de seringues qui lui permirent de procéder quelques avortements lors de son arrivée, à de très jeunes filles. Et ce sera la lutte finale, qui des juges ou de l'assassin gagnera la partie.