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samedi 18 avril 2020

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 114 SamueL Pepys ( Journal Angleterre )


Soho Square, London 1812
ctgpublishing.com
                                                                                                                       1er Avril 1664

            Levé puis au bureau, travaillai jusqu'à midi, puis à la Bourse où je trouve tous les négociants soucieux de présenter à la Commission du Parlement désignée pour les entendre, leurs doléances contre les Hollandais. Rentré dîner puis en voiture, déposai ma femme à la nouvelle Bourse. A Whitehall arrivé trop en avance pour la commission de Tanger, allai à pied chez Mr Blagrave pour chercher une chanson que j'avais laissée depuis longtemps. Comme il était absent devisai avec sa parente, sans toutefois l'entendre chanter, car je ne le connais pas suffisamment, mais je serais heureux de la faire venir chez moi pour une semaine de temps à autre.
            De retour à Whitehall, rencontrai le duc d'York dans la galerie. Je vis aussi la reine aller au parc avec ses demoiselles d'honneur, elle paraît malade. Je trouve aussi que Mrs Stuart est devenue plus grosse et moins belle qu'autrefois. Le Duc me fit appeler et s'entretint un bon moment avec moi. Après s'être absenté deux ou trois fois, il resta et me fit de nouveau appeler pendant toute la séance du Parlement. Parla enfin des Hollandais. J'ai le sentiment qu'il souhaite ardemment que le Parlement trouve une raison de se brouiller avec eux.
            Après son départ je trouve bientôt que les membres de la Commission de Tanger se sont réunis chez le duc d'Albermarle. Je suis donc venu en vain.
            Donc à la Bourse avec Creed, allai chercher ma femme et le laissai. Nous rentrâmes tous deux, et moi allai me promener dans le jardin avec William Howe, que nous passâmes prendre car il était venu nous voir. Il me dit que le Conseil privé a interrogé Creed au sujet d'une lettre que l'on a découverte où des fanatiques le citent comme ami très serviable, et ajoute qu'il s'en est bien sorti. Cependant continue de le tenir en suspicion, me dit-il, ce qui ne me contrarie guère car je le crois fourbe. Comme j'allais avec lui à Saint-Paul il me dit que milord est très peu chez lui, ne se souciant guère que de jeu et ne prêtant guère attention à quiconque. A son avis, milord n'est pas mécontent de moi, comme je le crains, mais se comporte étrangement avec tous, ce qui me rend d'autant moins chagrin.
            Rentré à pied puis tard au bureau, à la maison et, au lit.
            Aujourd'hui Mrs Turner m'a prêté un document fort rare, manuscrit très ancien d'un certain Mr Wells qui enseigne l'art de construire les navires, ce qui me plaît fort. Je l'examinai ce soir, mais n'osai continuer longtemps, car j'en suis arrivé à avoir les yeux très douloureux et larmoyants sous l'effet de la lumière de la bougie.


                                                                                                               2 avril

            Levé et au bureau, réunion. Grand débat avec sir William Batten, Mr Wood et ce niais et ce radoteur, sir John Mennes, qui répète tout ce que dit sir William Batten, sans jamais se soucier de savoir si c'est au bénéfice du roi ou non. A midi, au café, excellente conversation avec sir William Petty qui suggéra qu'on ne peut véritablement savoir s'il y a vraiment une différence entre l'état de veille et le rêve. Il avança qu'il est difficile, non seulement de dire ce qui nous permet de savoir quand nous agissons en réalité ou en rêve, mais encore de distinguer entre ces deux états.
            Puis me dirigeai vers la Bourse, mais appris par cette conversation et ensuite par sir Thomas Chamberlain ce que d'autres m'ont appris, que la plupart des compagnies, excepté celle des Indes orientales, ont présenté hier, à la commission parlementaire, leurs griefs contre les Hollandais. C'est, me dit-il, qu'elle ne voulait pas être considérée comme la première et la seule responsable d'une guerre avec la Hollande. Il ajouta qu'il est très probable et tout à fait nécessaire de nous brouiller avec ce peuple.                                                                                                           
            J'arrivai à la Bourse et trouvai que la plupart des gens étaient partis, rentrai donc dîner. Allai ensuite chez sir William Warren avec qui je passai tout l'après-midi, d'abord à examiner deux navires, que le capitaine Taylor et Phineas Pett faisaient actuellement construire. Ai résolu d'apprendre un peu de cet art, car je trouve que ce n'est pas difficile, mais que c'est très utile. Puis à Woolwich où Mr Pett me parla de plusieurs aspects de la mauvaise gestion de sir William Batten. Allai à pied à Greenwich en compagnie de sir William Warren, avec qui j'eus une conversation intéressante, puis par le fleuve, comme il faisait maintenant clair de lune et qu'il était 9 ou 10 heures du soir descendis à Wapping et fus reconduit sain et sauf jusqu'à ma porte par son serviteur et par lui-même, il s'en retourna ensuite chez lui. Ai passé une très bonne journée en sa compagnie. Rentré manger un morceau puis quelque temps au bureau, rentré chez moi, prières et, au lit.


                                                                                                                          3 avril
     huguenots.fr                                                                                                   Jour du Seigneur
Eglise protestante française de Londres à Soho Square            Ayant été très las hier soir, grasse matinée. Recevant la visite de William Joyce, me levai. Il venait me demander conseil, car il est convoqué demain à la Chambre des lords pour avoir essayé de faire arrêter milady Petre pour dette. Je lui donnai effectivement conseil et le secourrai volontiers. Il resta donc la matinée, mais ne voulut point dîner avec moi, puis au bureau, expédiai les affaires. A midi rentré dîner. Comme nous étions installés avec ma femme dans la cuisine, mon père vint s'asseoir et dîna avec nous.
            Après dîner il me rend compte de sa façon de procéder pour sa maison et pour ses biens. Il a presque terminé et pense retourner à Brampton la semaine prochaine. J'en suis bien aise parce que je crains les enfants de milord qui se trouvent là-bas, j'ai peur qu'ils puissent être mécontents.
            Après son départ allai au bureau où fus embesogné à mettre des papiers en ordre jusque tard dans la nuit. Mais dans l'après-midi, ma femme me fit mander à la maison pour voir sa nouvelle robe ornée d'un galon d'or, j'entends, sa robe qu'elle vient de faire orner d'un galon. Elle lui va vraiment à merveille et est bien faite. Cela me fait grand plaisir.
            Le soir, souper, prières et, au lit.


                                                                                                                          4 avril

            Levé, allai à pied chez milord Sandwich, lui parlai de William Joyce qui m'a dit vouloir faire ce qui convenait dans une affaire délicate. Je perçois encore une certaine réserve chez lui quand je désire m'entretenir avec lui. Puis à Westminster dans la Chambre peinte, rencontrai les deux Joyce, William d'humeur fort mélancolique. Après un bref entretien allai à la Chambre des lords avant qu'ils tiennent séance et restai un bon moment. pendant lequel le duc d'York vint me parler assez longtemps du nouveau bateau de Woolwich..... et vis milady Petre, imprudente drôlesse, rameutant tous les lords à sa cause. On appela William Joyce..... je pense qu'il n'a rien dit qu'à son désavantage et fut donc remis à l'huissier de la Verge noire - c'est un jugement très sévère car il n'a agi que sur le conseil de l'intendant de milord Petre en personne. Mais l'huissier de la Verge noire donna ordre à l'un de ses messagers de l'emmener sous bonne garde. Il se laissa donc conduire à la taverne du Cygne aux Deux Cous dans Tuttle Street, dans une belle salle à manger, où il fut traité fort courtoisement, mon oncle Fenner, son frère Anthony et d'autres amis se trouvant en sa compagnie. Qui eût pu croire que cet homme, dont j'aurais juré qu'il aurait pu parler devant le monde entier, serait impressionné au point de ne plus savoir ce qu'il disait et de pleurer ensuite comme un enfant ? J'affirme que c'est fort étrange à observer.
            Je les laissai pourvoir à son séjour dans cette taverne pour la nuit et préparer une requête contre son incarcération le lendemain. Partis donc au palais de Westminster, rencontrai Mr Coventry qui m'emmena dans ses appartements, en compagnie de sir William Hidkeman, membre des Communes, et personne très aimable. Nous prîmes un dîner plantureux, puis allâmes à Whitehall chez le Duc. Après un entretien sur l'état de la flotte en vue d'une guerre avec la Hollande, car c'est à cela, me semble-t-il, que le Duc souhaite qu'on aboutisse, nous partîmes au bureau où se tint notre réunion. Je pris soin de m'en aller de bonne heure, par le fleuve, vers la taverne de la Demi-Etape, échangeant tout le long des propos intéressants avec Mr Waith. Rencontrai là ma femme qui était allée se promener avec Bess, sa servante. Mais, Seigneur ! comme ma jalousie me la fit soupçonner d'avoir eu un rendez-vous avec quelqu'un ! Mais je les rencontrai, les pauvres petites, alors qu'elles s'en retournaient, donc les ramenai, mangeai et bus. Rentré à la maison et, après un moment passé au bureau, rentré, souper et, au lit.
            C'était un triste spectacle, pensai-je, aujourd'hui de voir milord Petre, sortant de la Chambre, se quereller avec sa femme, dont il est séparé, à propos de cette affaire, et lui dire qu'elle le déshonorait. Mais elle a été belle et, semble-t-il, c'est maintenant une femme dévergondée mais aussi très pétulante.


                                                                                                                    5 avril 1624

            Levé très tôt, allai chez mon cousin Anthony Joyce et de là avec lui voir son frère William dans Tuttle Street, où je le trouve assez gai à la suite de ce qui s'est passé hier, fier comme Artaban, sa femme venue à ses côtés et son fils ayant passé la nuit avec lui.
            Restai une ou deux heures et écrivis une nouvelle requête, celle rédigée par leur avocat ne me plaisant pas. Puis à la Chambre peinte et bientôt en voiture chez milord Peterborough à qui je remis la requête en mains propres. Il promit, avec grand empressement, de la présenter aujourd'hui à la Chambre. Revins parler à plusieurs lords. Son avocat à qui William Joyce a promis 5 livres s'il est relâché, fit de même. Un grand débat eut lieu dans la Chambre, apprenons-nous, discutant du pour et du contre. Il fut finalement décidé qu'il devait être mis en liberté sous caution jusqu'à la prochaine session de la Chambre, après Pâques, s'il s'engage à comparaître. Cela ne comble pas nos espérances, mais nous ne pouvions, raisonnablement, rien attendre de mieux.
            Bientôt arriva le roi et l'on adopta le projet de loi portant abrogation de la loi de triennalité, ainsi qu'un autre sur les recours pour vice de forme. Je me faufilai et entendis le discours du roi. Je n'ai de ma vie entendu si mal parler, c'est encore pire que s'il lisait d'un bout à l'autre, et il tenait son texte écrit à la main.
            Puis, une fois la séance levée et après m'être enquis de l'ordre du jour, j'allai voir William Joyce et son frère et leur racontai tout. Kate s'y trouvait, c'est une belle femme, corpulente. Je ne voulais pas rester dîner, pensant rentrer dîner chez moi. Allai par le fleuve jusqu'au Pont mais, pensant que les deux frères aimeraient que je me trouve avec eux pour servir, au besoin, de caution, je m'en retournai. Mais les trouvant sortis en chercher une, il ne restait que William, sa femme, sa soeur et quelques amis venus lui rendre visite, allai au palais de Westminster puis bientôt, comme convenu, chez Mrs Lane où je fis venir une langouste que je mangeai avec Mr Sxayne et sa femme. Je plaidai vivement, en leur présence, en faveur de Hawley. Mais rien n'y fit. Pourtant j'irritai Mrs Lane en déclarant qu'elle était vieille, en lui disant ses quatre vérités. Son corps se refusait à tout badinage amoureux, donc, après être resté trois ou quatre heures, mais en prenant garde d'honorer mon serment de ne pas rester plus d'un quart d'heure avec elle, j'allai voir William Joyce. J'apprends que les instructions sont arrivées, que la caution est donnée, par son père et son frère, et qu'il paie ses frais qui s'élèvent à plus de 12 livres, outre les 5 livres qu'il doit donner à un homme et ses frais de nourriture et de boisson ici, et 10 shillings par jour tant qu'il sera en liberté sous caution. J'espère que cela lui apprendra à mieux tenir sa langue qu'auparavant.
            Rentré seul avec la femme d'Anthony Joyce en parlant de la sottise de William. après l'avoir déposée, rentré chez moi où je trouve ma femme habillée comme si elle était sortie, mais je ne crois pas que ce fut le cas. Mais comme elle me répondit d'une façon qui me déplut, je la tirai par le nez, à vrai dire pour l'offenser, bien qu'ensuite, pour l'apaiser, je l'ai nié, prétendant que ce n'était que pour plaisanter. La pauvre malheureuse le prit fort mal. Outre le fait que je lui avais tordu le nez, je crois que cela lui fit mal et elle pleura donc fort longtemps. Mais bientôt nous fûmes réconciliés. Après souper, quelque temps au bureau, puis à la maison et, au lit.
            Ce jour un grand nombre de négociants vinrent à une commission solennelle du Parlement pour présenter leurs griefs contre les Hollandais. Je prie Dieu de nous amener à une heureuse conclusion.


                                                                                                                        6 avril
ph.ucla.edu
Statue of Charles II in Soho Square, London, England            Levé et au bureau où arriva bientôt John Noble, le vieux serviteur de mon père, pour me parler. Soupçonnant de quoi il s'agissait, je l'emmenai chez moi et là, seul à seul, il me dit qu'il avait rendu service à mon frère Tom lorsque celui-ci engrossa Margaret, sa servante, vilaine traînée. Elle accoucha de deux enfants dans la paroisse du Saint-Sépulcre. L'un est mort, l'autre est vivante, elle se prénomme Elizabeth et porte le nom de Taylor, fille de John Taylor. Pendant fort longtemps, semble-t-il, Tom confia cette affaire à un certain Crawly qui lui extorquait de l'argent tous les jours. Finalement, trouvant qu'il s'était fait abuser, il s'en ouvrit à John Noble, sous le sceau du secret. La première idée de Tom fut de payer une mendiante de l'autre rive pour qu'elle prenne l'enfant en charge. Ils y allèrent bien une fois, mais n'en firent rien car John Noble dit que la mère pourrait, sept ans plus tard, venir exiger l'enfant et obliger Tom à le présenter, sous peine d'être soupçonné de meurtre. C'est alors, je crois, qu'ils délibérèrent et persuadèrent, en lui donnant 5 livres, un certain Cave, pauvre petit pensionnaire de la paroisse de St Bride, de prendre l'enfant. Il promit donc de la garder pour toujours sans que cela leur coûtât rien d'autre.
            Sur ces entrefaites, la paroisse accuse ce Cave d'élever cet enfant à la charge de la paroisse, et le fait envoyer par sir Richard Browne à la prison de Counter. Cave écrit alors à Tom et lui demande de l'en sortir. Tom lui répond par une lettre écrite de sa main, mais non signée, que John Noble m'a montrée, où il parle de le libérer et de se porter garant de lui, mais ne mentionne pas, de près ou de loin, la question de l'enfant. donc, autant que j'aie pu en juger, il n'y a là, pour l'essentiel, rien qui pût porter tort à mon frère. Je n'insistai donc pas pour déchirer ou pour emporter ce papier.
            Après sa libération Cave exige de mon frère 5 livres supplémentaires pour que mon frère n'ait plus jamais de responsabilité vis-à-vis de l'enfant. Il fut obligé de les lui donner, et prit un engagement de 100 livres envers Cave, par-devant un notaire, un certain Hudson, je crois, de l'Old Baily, pour garantir John Taylor et ses mandataires, etc. ,  eu égard aux 10 livres qui lui ont été payées, contre toute difficulté ou toute dépense afférente à la nourriture, à la boisson, aux vêtements et à l'éducation d'Elizabeth Taylor. Et, semble-t-il, dans cet acte, John Noble fut considéré comme le mandataire de ce John Taylor. John Noble dit qu'il procura l'argent à Tom, et qu'il est également tenu par un autre engagement de lui payer 20 shillings supplémentaires ce lundi de Pâques. Mais il n'y a aucun papier de la main de Tom concernant aucune de ces deux sommes. Je lui dis que je vais sans doute perdre beaucoup d'argent suite à ce décès et que je ne veux rien payer de plus, quant à moi, mais que j'en parlerai à mon père cet après-midi. Il s'en alla donc.
            Je fus ensuite occupé toute la matinée au bureau, rentré à midi pour dîner, fort gêné par des vents. Après dîner pris une voiture et allai à Paternoster Row où achetai de la belle soie pour faire un jupon à ma femme, puis la déposai à la nouvelle Bourse. Laissant le tissu chez Unthank, allai à Whitehall. Mais comme le Conseil privé se réunissait à Worcester House, j'y allai et remis au duc d'Albemarle un mémoire concernant certaine affaire de Tanger. Puis allai chercher ma femme à la Bourse et à pied chez mon père qui emballait des affaires pour la campagne.
            Je l'abordai et lui parlai de cette affaire de Tom. Le pauvre homme en fut très contrarié. Il souhaita que je parle avec John Noble et que je fasse ce qui me semble convenir en cette affaire, sans l'y impliquer.
            J'allai donc voir Noble et vis l'engagement de Cave ainsi que la lettre de Tom mentionnée ci-dessus. Somme toute, je pense qu'il pourra en résulter de la honte, mais qu'il sera difficile, après tout ce que je vois, de prouver que cet enfant est bien le sien. Puis chez mon père, lui dis ce que j'avais fait et comme j'avais apaisé Noble en lui disant que, bien que nous ayons résolu de ne plus payer de notre poche, cependant, s'il peut prouver qu'il y a vraiment dette et justifier qu'il nous revient de l'honorer, nous agirions comme il le faut pour l'honorer. Je dis aussi que j'acquitterais avant mes propres dettes.
            Mon père et moi sommes donc modérément satisfaits, quoique fâchés de penser que mon frère était, à tous égards, un gredin. Je ramenai ma femme à la maison en voiture, puis au bureau, tard avec sir William Warren. A la maison, souper, au lit.
            J'ai entendu dire aujourd'hui que les Hollandais ont commencé les hostilités en accordant des lettres de marque sur nous. Mais je n'en crois rien.


                                                                                                                            7 avril

            Levé et au bureau où réglai les affaires. Bientôt arrivent sir William Warren et le vieux Mr Bond afin de me résoudre des questions concernant les mâts et leurs proportions. Mais il ne sut guère me convaincre, je ne le gardai donc pas longtemps et nous prîmes congé. Au bureau travail jusqu'à midi, puis à la Bourse où l'on parle beaucoup de la protestation des Hollandais contre notre Compagnie royale en Guinée et de l'octroi à des capitaines de lettres de marque sur nous. Tout le monde s'attend à une guerre, mais j'espère qu'il n'en sera pas ainsi et que ce n'est pas vrai. Puis à dîner où ma femme fit donner une bonne fricassée de veau à la française pour dîner. Ensuite au bureau, fâché de voir comme sir William Batten a organisé le travail cet après-midi.......... Le soir, après un long entretien et après m'être tranquillisé l'esprit par une conversation avec sir William Warren, travaillai tard. A la maison, souper et, au lit.


                                                                                                                          8 avril

            Levé tôt puis au bureau, bientôt il se mit à faire beau, après une grande averse ce matin. Allai par le fleuve à Deptford avec sir William Batten, prenant au passage son fils Castle, avec qui je n'échangeai mot de la lettre qu'il m'écrivit l'autre jour. Après un tour dans l'arsenal, je l'accompagnai à l'hospice pour voir le bâtiment qu'il a l'intention de construire pendant son mandat comme grand Maître de Trinity House. C'est du beau travail. Avec quelle simplicité il répondit à la question de quelqu'un lui demandant s'il envisageait de mettre les armes de la corporation sur la porte, ainsi qu'à d'autres remarques ! Il n'en nia pas l'utilité, mais dit qu'il laisserait ce nom au grand Maître qui lui succéderait .
            Je pris congé de lui et retournai à l'arsenal du roi, où m'enquis de l'affaire des fanaux de poupe. Je trouve l'occasion de corriger considérablement ce que j'ai mis dans le contrat avec l'argenteur. Résolus, bien que je ne sache comment, de le leur faire amender, bien qu'ils l'aient signé hier soir. Ramenai donc Stanes en bateau avec moi, tout en en discutant. Il viendra à la raison quand je lui ferai comprendre ce dont il s'agit.
            Nous n'avions pas sitôt débarqué qu'il tombe une terrible averse de pluie et de grêle, j'entrai donc dans une boutique de cannes et en achetai une pour marcher, au prix de 4 shillings et 6 pence, faite d'une seule pièce.
            Rentré chez moi dîner, eus un excellent dîner de vendredi saint, soupe de pois et tourte aux pommes.
            Puis au bureau tout l'après-midi préparer un nouveau registre pour mes contrats. Cet après-midi arrivèrent les globes pour le bureau, fabriqués à ma grande satisfaction. Le soir brève visite à sir William Penn qui ressent de nouveau, depuis un ou deux jours, les atteintes de sa vieille maladie. Ensuite promenade dans le jardin avec ma femme, puis au bureau un moment, et à la maison pour le seul repas de carême que j'aie jamais eu avec des gâteaux et de la bière. Puis au lit.
            Ce matin, de bonne heure, Smith, le maître d'équipage de Woolwich, vint au bureau me citer un remarquable exemple de friponnerie commis par les officiers de l'arsenal et par Mr Gold, au sujet d'un contrat passé par Mr Wood pour de vieux cordages. Je crois bien que je trouverai que sir William Batten est de la partie.


                                                                                                              9 avril 1664

            Dans la nuit, je ne sais si c'est pour avoir pris froid, ou pour avoir eu l'esprit trop préoccupé de l'affaire de Stanes concernant l'argenterie pour la marine, car j'en eus l'esprit contrarié toute la nuit, je me réveillai vers une heure du matin, ce qui m'arrive rarement, et pissai un peu, mais avec grande douleur. Continuai d'avoir sommeil mais eus une température élevée toute la nuit, ayant très chaud et souffrant un peu. Je dormis un peu vers le matin. Au réveil me sentais mieux mais eus encore mal en pissant. Me levai, les vêtements couverts de sueur, je l'avoue, et il faisait assez froid ce qui, je crois, pourrait aggraver le mal, car je continuai d'avoir froid et d'être près de trembler toute la matinée, si ce n'est que les problèmes avec sir John Mennes et sir William Batten me réchauffèrent. A midi rentre dîner à la maison, de tripes. Bien que ne me sentant pas bien, sortis avec ma femme en voiture pour aller chez son tailleur et à la nouvelle Bourse, puis chez mon père, à qui je dis un mot. Rentré à la maison, j'avais mal au coeur et vomis, ce qui n'est pas mon habitude, bus ensuite un ou deux verres d'hypocras et allai au bureau expédier les affaires urgentes. A la maison et au lit. Dormis très bien grâce à du mithridate.


                                                                                                                    10 avril
 lemalesaint.fr                                                                                               Jour du Seigneur
            Grasse matinée, puis me levai et ma femme s'habilla car c'était Pâques. Mais comme je n'étais pas assez bien pour sortir elle resta à la maison avec moi, quoique contre son gré, car elle avait mis sa nouvelle robe, la plus belle qui, maintenant, est vraiment magnifique avec son galon d'or. Ce matin son tailleur apporta sa nouvelle robe de soie neuve, décorée d'un galon plus mince et le nouveau jupon que j'achetai l'autre jour, tous deux très beaux.
            Nous avons passé la journée en aimable conversation et en compagnie l'un de l'autre à lire dans le livre du Dr Fuller ce qu'il dit de la famille des Clifford et des Kingsmill. Et le soir, comme je me trouvais mieux pour avoir pris un clystère qui m'enleva beaucoup de vents. Après souper, le soir, allai au lit et dormis bien.


                                                                                                                     11 avril

            Grasse matinée, devisant avec ma femme, puis me levai et allai dans mon cabinet de travail préparer des papiers pour m'entretenir avec mon père qui viendra coucher ici, des affaires de la campagne. Bon dîner avec ma femme à la maison. Je ne me sentais pas encore complètement rétabli car j'urinais douloureusement, mais étais beaucoup mieux, toute crainte d'accès de fièvre ayant disparu.
            Dans l'après-midi mon père vint nous voir. Après son départ je remontai vaquer à mon travail du matin, dans la soirée quelque temps au bureau, puis visite à sir William Batten qui est de nouveau malade. A la maison, souper et, au lit.


                                                                                                                             12 avril

            Levé, après que ma femme se fut très bien habillée en mettant sa nouvelle robe galonnée d'or, et vraiment très belle, William Howe venant également nous voir, je l'emmenai, en voiture, chez mon oncle Wight et l'y déposai. Avec William Howe allai au café, où nous parlâmes de lui trouver une place avantageuse au service de milord, s'il doit prendre la mer. Je serais heureux de lui obtenir une place de secrétaire et d'évincer Creed si possible, car c'est un gredin fourbe et roué.
            Puis un moment à la Bourse d'où je l'emmenai chez mon oncle Wight, où dînèrent mon père, pauvre homme mélancolique autrefois si plein de vie, ainsi que le frère de ma tante, Mr Sutton, négociant dans les Flandres, bel homme très réservé, et Mr Cole et sa femme. Mais, Seigneur ! que j'adorais autrefois la conversation de cet homme ! et maintenant je le trouve que très ordinaire. Son fils est vraiment un joli garçon mais, malheureusement, il a le nez de travers. Il y avait d'autres invités et un dîner médiocre, et rien que médiocre, pour tant d'invités. Après dîner pris une voiture, très cher car c'est la période de Pâques et que le temps est exécrable, pour aller chez milord, rendis visite à milady. Après avoir laissé ma femme, allai avec William Howe chez Mr Paget où j'entendis de la musique, pas très bonne, à l'exception d'un certain Dr Walgrave, Anglais éduqué à Rome, qui joue du luth mieux que quiconque. Rencontrai également Mr Hill, le petit négociant. A la fin nous chantâmes. Je m'en sortis assez bien avec un ou deux psaumes de Lawes. Quant à lui je vois qu'il a beaucoup de talent et chante bien, l'un de ses amis a une belle voix de basse.
            Retour tard, allai à pied avec eux deux jusque chez milord, pensant chercher ma femme et les ramener à la maison, mais comme il n'y avait pas de voiture ils partirent. Je restai fort longtemps, comme il était très tard, environ 10 heures, avant de trouver une voiture. Je trouvai milord, les dames et ma femme à souper. Milord semble très gentil, mais je suis encore disposé à penser le pire et qu'il fait seulement semblant en présence de ma femme et de milady.
            Rentré et trouvé mon père venu coucher à la maison. Souper et menai, pauvre homme, au lit, n'ayant jamais éprouvé plus d'amour pour lui, ni d'admiration pour sa sagesse et pour le mal qu'il s'est donné jusqu'à présent en ce bas monde, qu'en voyant comment Tom s'est comporté en affaires, et comment le pauvre homme pense à subvenir aux besoins de ses jeunes enfants et de ma mère. Mais j'espère qu'ils ne seront jamais dans le besoin. Ma femme et moi, au lit.


                                                                                                                   13 avril

            Bien qu'il fut tard, passé minuit, lorsque nous allâmes au lit, j'entendis cependant mon pauvre père se lever. Aussi je sonnai mes gens, me levai et lui donnai quelque chose à manger et à boire. Sortis en voiture, car il faisait très mauvais, déposai mon père dans Fleet Street. Allai à St James où trouvai Mr Coventry, le Duc étant maintenant ici pour l'été, avec un orfèvre, triant son argenterie pour échanger la vieille contre de la neuve. Mais, Seigneur ! comme il en a beaucoup ! Je restai m'entretenir avec lui pendant deux ou trois heures, au sujet de ce qui ne va pas dans notre bureau, et moi de lui dire surtout comment sir William Batten et sir John Mennes mènent les affaires, à mon grand regret. Il semble également s'inquiéter fort à ce sujet, ainsi que pour toutes les affaires du roi traitées de la même façon partout ailleurs, et même pour les affaires domestiques du Duc, généralement avec malhonnêteté, mais surtout avec négligence et indifférence. Je lui dis haut et fort mon opinion de sir John Mennes et de l'autre, et lui fais confiance pour en faire bon usage.
            Puis de parler de notre affaire avec les Hollandais. Il m'explique longuement qu'il ne croit pas que cela va aboutir à la guerre, car il me montra d'abord une lettre de sir George Downing, de sa propre écriture, où il l'assure que les Hollandais eux-mêmes ne désirent pas une guerre, mais la craignent par dessus tout, qu'ils non pas accordé de lettres de marque sur nos navires en Guinée et que de Ruyter ne maintient pas sa flotte au port à cette fin, mais par manque de vent favorable, qu'il est maintenant sorti à cette fin, mais par manque de vent favorable, qu'il est maintenant sorti et se dirige vers la Méditerranée.
            Il me dit aussi que tout ce qu'il espère c'est que le Parlement présentera les griefs des négociants au roi, en le priant de protéger ses sujets contre les Hollandais. Et bien que le Parlement ne puisse peut-être pas en voir l'utilité immédiatement, cependant cela suffira à faire savoir aux Hollandais que le Parlement ne s'oppose pas au roi, et cela leur fera perdre l'espoir de voir le roi d'Angleterre incapable de se procurer de l'argent ou d'agir en vue d'une guerre contre eux. Ils se croyaient dégagés de l'obligation de restituer quoi que ce soit, ce en quoi ils verront ainsi qu'ils se trompent.
            Il me dit aussi que les Etats hollandais ne sont pas eux-mêmes en bon ordre, qu'il y a des différends entre eux et, qu'assurément, seuls les Etats de Hollande et de Zélande participeront à une guerre, les autres considérant, comme ils sont à l'intérieur des terres qu'ils ne tireront profit de la guerre ni de la paix.
            Mais c'est intéressant d'entendre ce qu'il dit. D'après lui ceux qui à la Cour sont partisans de la guerre apparaissent aux yeux de tous comme n'ayant d'autre dessein que de mettre de l'argent dans les poches du roi. Ceux qui ailleurs se déclarent pour la guerre ont pour dessein de troubler l'ordre dans le royaume et de donner aux fanatiques l'occasion de frapper. Et enfin, ceux qui sont contre la guerre, ainsi lui-même par exemple, est assez réservé à ce sujet, ont la réputation de se laisser corrompre par les Hollandais.
            Après cette longue conversation, il m'emmena dans son carrosse, car il pleuvait encore, à Charing Cross et là me mit dans une voiture, et, passant prendre mon père et mon frère, je les emmenai chez moi pour dîner, ma femme gardant le lit tout le jour car elle est indisposée.
            Tout l'après-midi au bureau avec William Bodham à examiner ses comptes de la Caisse des invalides de Chatham qui montrent bien quel escroc est le commissaire Pett depuis le début, et comment sir William Batten a continué en prenant de belles sommes pour se rémunérer, lui et d'autres, avec l'argent des pauvres. Tout sera dévoilé avec le temps.
            Dans la soirée allai voir sir William Penn puis rentrai chez moi auprès de mon père pour lui tenir compagnie, car il doit quitter Londres. Veillai tard avec lui et avec mon frère John, jusque passé minuit, pour préparer convenablement les comptes de Tom, de façon à les remettre à mon cousin Scott. Enfin nous en avons terminé, après souper tous, au lit.


                                                                                                                     14 avril 1664
                                                                                                                    wikiwand.com
St Patrick's Church, Soho Square - Wikiwand            Levé tôt. Après que mon père eut mangé, je l'accompagnai à pied jusqu'à Milk Street, lui tournant pour descendre jusqu'à Cripplegate, prendre une voiture. Au bout de la rue je pris congé, craignant fort de ne plus le voir ici, tant il décline chaque jour. Je continuai à pied, ne trouvant pas de voiture avant d'arriver à Charing Cross où le colonel Frowde me prit et me conduisit à St James, où discutai avec Mr Coventry, Povey, etc, des comptes de milord Peterborough. Mais, Seigneur ! c'est très étrange de voir comme ce Povey peut paraître fat avec toute son affectation. Puis à Whitehall......
            Allai ensuite à pied, avec Creed, au café de Covent Garden, où ne se trouvait personne, mais il me raconta maintes belles expériences réalisées à Gresham College, et comment on a démontré que la température de l'air dilate et contracte la substance même du verre. Ainsi si l'on plonge un matras plein d'eau froide dans l'eau chaude, la dilatation du verre fait d'abord baisser le niveau de l'eau et ensuite, lorsque la chaleur de l'eau augmente, le niveau monte. Si on le plonge ensuite dans l'eau froide, cela fait monter le niveau de l'eau par contraction du verre. Et lorsque l'eau se refroidit le niveau baisse, ce qui est très intéressant et vrai, il l'a vu expérimenter.
            Rentrai à la maison en voiture et dînai à l'étage avec ma femme, à son chevet, elle garde le lit car elle est indisposée. Puis au bureau : vive querelle avec Wood et Castle au sujet de leurs mâts de Nouvelle Angleterre.
            Dans la soirée, l'esprit un peu contrarié, pourtant sans raison, car mon avis prévaudra, j'espère, pour le bénéfice du roi. A la maison, souper et, au lit.


                                                                                                                          15 avril

            Levé. Toute la matinée chez moi avec le capitaine Taylor à parler de questions de marine...........
            A midi à la Bourse où je rencontrai Mr Hill, le petit négociant qui, je crois, va me faire connaître un musicien à engager. Mais je veux que cela se passe le plus simplement du monde.
            A la maison, dîner. Puis allai, avec ma femme, en voiture, au Théâtre du Duc, où vîmes une représentation de La Princesse allemande, jouée par l'héroïne elle-même. Mais jamais histoire si bien menée et avec sérieux ne fut plus mal jouée, comme pour plaisanter sur scène. A dire vrai, toute la pièce, hormis le comique de celui qui joue le rôle de son mari, est très simple, excepté une ou deux réparties spirituelles çà et là. Nous rencontrâmes le Dr Clerck et nous plaçâmes près de lui. Et puis repris le chemin de notre domicile, passant chez Madame Turner. Déposai ensuite ma femme chez ma tante Wight, allai au bureau jusque tard et puis, à dix heures du soir, vins la chercher pour la ramener. Retournai un court moment au bureau, puis souper et, au lit.


                                                                       à suivre........

                                                                                                                             16 avril 1664

            Levé, puis........
         

         
                                                                                                                         






dimanche 22 mars 2020

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 111 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

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                                                                                                                       17 février 1664

            Levé, et avec ma femme, la laissant chez son père à Long Acre, dans un quartier si mal famé, parmi toutes les maisons de débauche que j'étais inquiet de la voir là-bas. Puis à Whitehall, allant et venant, parlant avec Mr Pearse qui me dit que le roi donna à milord Fitzgerald deux baux qui appartiennent en fait à la reine, d'une valeur de 20 000 livres, et qu'on en jase beaucoup, et d'autres choses de cette sorte que je suis navré d'apprendre. Nous fîmes une promenade autour du parc avec grand plaisir avant de revenir. Ne trouvant pas le temps de parler à milord d'Albermarle, j'allai à pied à la nouvelle Bourse où je rencontrai ma femme chez notre belle Doll. Je la ramenai à la maison ainsi que Creed que je rencontrai..... Dîner à la maison où je trouvai un excellent mastiff nommé Towzer envoyé par un chirurgien. Après dîner j'emmenai de nouveau ma femme en voiture, laissant Creed à Greshal College, dont il est maintenant le virtuosi, et à Whitehall où je lus une communication sur Tanger à milord le duc d'Albermarle dans la chambre du Conseil. Puis chez Mrs Hunt pour chercher ma femme, et retour directement en voiture à la maison puis au bureau jusqu'à 3 heures du matin, ayant beaucoup parlé avec Mr Cutler. Il m'a raconté comment les Hollandais nous traitent à l'étranger et ne nous apprécient nulle part. Il ajoute que Mr Rider et lui ont trouvé de bonnes raisons d'écarter le capitaine Cocke de leur compagnie car il leur a joué des tours déloyaux et grossiers et a causé sa propre ruine en abusant tout un chacun par sa prétention d'avoir de l'esprit. De même sir Richard Ford, ce sont tous deux hommes pleins d'esprit.
            Sir William Rider resta avec moi jusqu'à environ minuit, car nous étions occupés à comprendre comment Mr Wood mesurait ses mâts, ce à quoi j'arrivais si bien avant que l'on jugea que je négociais durement avec Wood, mais à ma grande honte je ne compris pas mieux, j'espère néanmoins que l'on pense de moi, faire de nouvelles économies pour le roi. Impatient d'en finir, la tête pleine de notions confuses et embrouillées, sans être arrivé en rien à une compréhension distincte, j'avais décidé de veiller, ce que je fis. Il est maintenant sur le point de sonner 4 heures, suis tout seul, gelé et ma chandelle n'a plus de quoi m'éclairer jusque chez moi. Ayant cependant acquis une compréhension certaine de l'affaire et l'ayant élucidée par écrit, je rentrai à la maison et, au lit l'esprit rasséréné. La servante veillait pour m'attendre, les autres tous couchés. Je mangeai et bus un peu et, au lit, las, ayant sommeil, froid et mal à la tête.


                                                                                                                      18 février

            Appelé au bureau, bien contre mon gré je me levai, ayant fort mal à la tête, et au bureau, où j'arguai utilement pour le roi de ce que j'ai préparé cette nuit contre Mr Wood, mais n'amenai l'affaire à aucune conclusion. Beaucoup de travail jusqu'à midi, puis avec Mr Coventry au bureau de la Compagnie africaine. J'examinai les comptes de milord Peterborough. A dîner excellente conversation avec sir George Carteret de d'autres de la Cie africaine. Puis terminai les comptes un peu plus tard. Rentré directement à la maison, ayant grande douleur de tête et somnolent. Après avoir un peu travaillé au bureau et écrit à mon père pour lui proposer le mastiff, rentrai à la maison et, au lit, alors qu'il faisait encore jour, vers 6 heures, et m'endormis. Réveillé vers minuit quand ma femme  vint se coucher, me rendormis jusqu'au matin.


                                                                                                                  19 février

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elevage english mastiff            Levé, la tête bien remise, rasé et au bureau. Mr Cutler vint se promener et discuter avec moi fort longtemps, puis allâmes à la Bourse et, comme il était tôt, il me cita en exemple plusieurs hommes remarquables qui s'étaient élevés à la Bourse, à force de diligence et d'épargne. Il parla aussi de sa propre fortune et comment on lui accorda de plus en plus de crédit, alors que sa fortune ne se montait pas vraiment à 1 100 livres il eut 100 000 livres de crédit. Il parla aussi de sir William Rider, comment il s'est élevé, et d'autres encore. Sir John Banks nous rejoignit, il nous raconta certaines transactions de la Compagnie des Indes orientales et comment dans son cas, lorsque les Hollandais lui devaient 64 000 livres à lui ainsi qu'à l'échevin Mico pour préjudice subi dans les Indes orientales, et qu'ils tardaient à lui payer cette somme, peu après la paix, Oliver Cromwell leur fit dire que s'ils ne payaient pas avant une certaine date il accorderait à ces négociants des lettres de marque sur eux. Ils eurent une si grande peur de lui qu'ils payèrent vite, jusqu'au dernier farthing.
            Un peu plus tard comme la Bourse se remplissait je traitai de nombreuses affaires et à deux heures allai avec mon oncle Wight chez lui où, comme convenu, nous emmenâmes nos femmes, elles en voiture avec Mr Maes et nous à pied, chez Mr Jaggard, marchand de salaisons dans Thames Street, à qui je fis une faveur car il est au nombre des fournisseurs subsistances peu fortunés. Sa femme que je n'avais pas vue depuis longtemps et qui est la fille du vieux Day, maître de mon oncle Wight, est une femme très ordinaire, mais ils ont de beaux enfants. Je pensai qu'ils avaient un train de vie assez modeste, mais ensuite je vis leur dîner, exclusivement du poisson présenté avec grand soin. Mais la compagnie n'étant pas bonne je ne pris aucun plaisir. Après dîner comme il n'y avait a pas d'affaires extraordinaires, nous nous séparâmes. Je rentrai de nouveau chez moi et emmenai ma femme prendre une voiture. Allâmes rendre visite aux dames Jemima et Paulina Montagu et à Mrs Elizabeth Pickering que nous trouvâmes dans la nouvelle maison de leur père dans Lincoln's Field, la maison pleine de saleté. Elles nous reçurent assez bien, mais je n'essayai pas de me comporter familièrement Après une brève visite...... nous repartîmes en voiture et ma femme rendit visite à sa cousine Scott qui est encore très malade, puis retour chez Jaggard, très bon dîner et vaisselle d'argent en grande quantité, et surtout, après dîner Mrs Jaggard, sur mes vives instances, joua de la viole mieux, je crois, que toute autre femme en Angleterre, seuls quelques maîtres jouent mieux. Je dois avouer que cela m'étonna beaucoup.... Je priai ensuite Maes de chanter, mais il le fit avec tant d'affectation que j'en fus ecoeuré.
            Vers 11 heures je raccompagnai ma tante à la maison, après avoir en chemin déposé ma femme à la maison. Elle me dit que les Jaggard ont la réputation d'être très riches, leur fortune atteint 10 ou 12 000 livres, et leur propriété à la campagne toute l'année, et tout le répondant, ce qui me surprend fort, quand je pense pour quel pauvre homme je le pris quand je lui fis cette faveur au bureau
            Après les prières, au lit, n'ayant eu d'autre plaisir que d'entendre Mrs Jaggard jouer de la viole, et cela me rend supportable tout le reste qui ne me donna point satisfaction.


                                                                                                                 20 février

            Levé et au bureau réunion toute la matinée. A midi à la Bourse avec Mr Coventry, rentré dîner et après en yole à Woolwich, où je trouvai Mr Falconer, puis à l'autre arsenal où je réglai quelques affaires à mon contentement. C'était une très belle soirée aussi j'allai à pied à Greenwich, et rentrai chez moi par le fleuve avec la nuit. Au bureau travaillai tard. A la maison, souper et, au lit.


                                                                                                                21 février 1664
epicetoorecettes.fr                                                                                                   Jour du Seigneur
Résultat de recherche d'images pour "potée"             Levé et ayant beaucoup d'affaires à traiter passai toute la matinée au bureau.....  A midi rentrai dîner, mon frère Tom vint et après dîner je le fis monter et lui lus la lettre de mécontentement que j'ai récemment envoyée à mon père. Apparemment elle lui plaît et il réprouve le caractère désagréable de ma sœur et la vie paresseuse qu'elle mène là-bas.
            Après son départ, retour au bureau, terminai le travail de la matinée. Puis après avoir, comme d'habitude, relu mes résolutions, rentrai, et avec Mr Maes me promenai dans le jardin en lui parlant de son affaire. Après son départ, un petit tour aussi avec ma femme. Puis souper chez mon oncle Wight venu nous chercher........... Maes vint et après souper chez sir George Carteret.... Je crois qu'il peut espérer autant de faveurs que George Carteret peut lui en accorder, mais je crains que cela ne soit pas beaucoup. Après être resté longtemps là-bas, rentrai à la maison. En chemin ma femme me dit que, lorsqu'il fut seul avec elle, lui dit qu'il l'aimait plus que jamais, bien qu'il ne trouvât point convenable de le montrer publiquement pour des raisons concernant les deux parties. Il semble vouloir dire pour éviter ma jalousie et celle de sa femme. Mais je suis porté à croire qu'il nous veut du bien et nous donner quelque chose s'il meurt sans enfant.
            Rentré, prières et, au lit.
            Ma femme a appelé nos gens pour la lessive à 4 heures du matin. Notre petite fille de service Su est une servante tout à fait remarquable et nous plaît beaucoup, car elle rend plus de services que les deux autres et mérite mieux ses

                                                                                                                   22 février

            Levé et rasé, puis sortis avec ma femme en voiture. Je l'ai laissée près de chez son père, l'esprit contrarié et furieux contre elle parce qu'elle est obligée, pour y aller, de passer par cet endroit mal famé, au milieu des maisons de débauche ou à proximité. Je la laissai donc et allai chez sir Philip Warwick, mais ne pus lui parler. Puis fis un tour dans le parc de St James et rencontrant Anthony Joyce, fis un tour avec lui dans le mail, puis il me quitta lui allant du côté de St James, moi en direction de Whitehall, passant devant un marchand de gravures près de la Demi-Lune dans le Strand en face de la nouvelle Bourse, je feuilletai des plans de diverses grandes villes et en achetai deux recueils brochés qui m'ont coûté 9 shillings et 6 pence. Rentré chez moi repensai à ma résolution et versai 5 shillings dans ma tirelire des pauvres, espérant, avec l'aide de Dieu, ne pas encourir de gages de ce genre.
            Puis, rencontrant Mr Moore à la Bourse où je trouve ma femme chez la belle Doll, je la dépose ensuite chez mon oncle Wight pour qu'elle aille avec ma tante de nouveau au marché faire des provisions pour le carême, et moi au café puis à la Bourse, mon but étant de me renseigner sur la façon de conserver les mâts secs ou humides dans les autres pays. Je reçus de bons conseils. Rentré chez moi je mangeai seul un mauvais dîner froid, mes gens étant occupés à la lessive toute la journée. Au bureau tout l'après-midi à écrire des lettres à Mr Coventry à propos de la conservation des mâts. La terminai très bien ce soir et la recopiai au propre.
            Ce soir vint Mr Alsop, brasseur du roi, avec qui je passai une heure à bavarder et à déplorer la situation actuelle. Le soir se laisse mener par une demi-douzaine d'hommes, de sorte qu'aucun de ses véritables serviteurs et amis n'a accès auprès de lui. Il s'agit de Lauderdale, Buckingham, Hamilton, Fitzharding à qui il a, semble-t-il, donné 12 000 livres par an prises dans la meilleure part de la fortune royale, que le vieux duc de Buckingham ne put jamais obtenir..... Le roi n'aime pas du tout la reine, il est plutôt maussade avec elle, et elle, d'après tout ce qu'on rapporte est incapable d'avoir des enfants. Il aime tant le duc de Monmouth que chacun s'en émerveille et, dit-il, le duc a déclaré qu'il donnerait la mort à quiconque prétendrait que le roi n'était pas marié avec sa mère, bien que, dit Mr Alsop, il soit notoire que c'était une catin avant que le roi ne couchât avec elle. Mais il semble, dit-il, que le roi est fort gentil avec ses bâtards et à présent il va, à minuit, chez les nourrices de milady Castlemaine prendre l'enfant et le faire sauter dans ses bras.
            Que vraisemblablement il ne va plus prendre ses repas en public, car la clique qui l'approche ne veut plus qu'il s'expose aux regards du public et veut le garder pour elle, à l'écart de tous.
            Qu'il a, semble-t-il, donné ordre de faire garder ce soir la Grand-Salle, où il doit y avoir un bal devant le roi, comme celle de la reine-mère, par la garde à cheval. Alors que jusqu'à présent c'était le lord chambellan ou l'intendant et leurs gens qui assuraient cette garde. Mais on craint qu'ils fassent appel à la soldatesque et que tous les autres postes soient supprimés. Le pire de tout c'est qu'il veut changer la milice actuelle et tout réduire à une armée mobile.
            Que milord Lauderdale, l'ennemi de Middleton, qui méprise le chancelier, allant même jusqu'à l'insulter ouvertement devant le roi, s'est emparé de tout le pouvoir en Ecosse, alors que l'autre jour il était sur le point de se voir déchu de tous ses biens, de son honneur et de sa vie.
            Que le roi s'est fait tout le tort possible dans cette affaire de milord Antrim en Irlande. Bien qu'il ait été à la tête des rebelles, cependant dans sa lettre le roi reconnaît qu'il a agi par mandat de son père, de sa mère et du souverain. Mais il semble qu'en réalité il s'est mis dans l'obligation, la libération de ses biens, de les mettre sur la tête d'une fille de la reine mère, qu'elle avait eue de milord Jeremy, je suppose, en vue de son mariage selon le bon vouloir de la reine, triste histoire. Il semble qu'une fille du duc de Lennox allait se faire marier de force l'autre jour à Harry Jermyn dans Somerset House, mais elle s'enfuit et courut demander la protection du roi qui dit qu'il la lui donnerait. Elle est, semble-t-il, très proche parente du roi. De telles folies ont lieu tous les jours à la Cour.
            Le viol d'une femme à Turnstile l'autre jour, alors que son mari était attaché avec sa chemise et qu'ils étaient au lit, car c'était la nuit, par deux Français qui, non seulement ont couché avec elle mais ont abusé d'elle avec une torche, est étouffé pour 300 livres, car ce sont des serviteurs de la reine mère.
            Un livre français en vers fut traduit l'autre jour et offert au duc de Monmouth, d'un style si arrogant que le duc d'York, me dit Mr Alsop, en fut vivement offensé. Le frère de la mère du duc de Monmouth a une place à la Cour. Etant gallois, d'après ce qu'il me dit, je crois, il parle très crûment du mariage du roi avec sa sœur.                                                                produits-de-nouvelle-aquitaine
Résultat de recherche d'images pour "potée"            Ajoutant que l'autre jour le roi en son Conseil fit incarcérer le chapelain de milord Digby, son surintendant et un autre serviteur qui étaient venus au procès intenté contre leur maître, pour jurer qu'ils l'avaient vu à l'église recevoir la communion comme un protestant, ce qui, d'après les magistrats suffit à le prouver tel d'après la loi. Le roi, dis-je, les fit incarcérer à Gatehouse, sans tenir compte du fait qu'ils invoquèrent leur état de fidèles et loyaux sujets de celui qu'ils tenaient pour leur maître et dont ils mangeaient le pain. Et, précisa-t-il, le roi aurait dit qu'il verrait s'il était le roi ou si c'était Digby.
            Il dit aussi que la reine mère s'est ruinée en dépenses et qu'elle va maintenant très mal payer et s'endetter, l'argent qu'elle a reçu de ses nouveaux baux étant dépensé.
            Il croit qu'il n'y a pas d'argent dans les caisses, contrairement à ce que, comme je le lui ai dit, certains espèrent. Mais, dit-il, selon les sources mieux informées, il peut m'assurer qu'il n'en est rien et que personne ne fera d'enquête, et qu'il reste moins de 80 000 livres de l'argent de Dunkerque.
            Qu'Olivier Cromwell, l'année où il dépensa 1 400 000 livres dans la marine, dépensa en tout
2 600 000 livres pour l'ensemble du royaume.
            Que la Cour est enragée pour faire la guerre aux Hollandais, mais lui et moi tombâmes d'accord pour dire que c'est à craindre plutôt qu'à espérer, à moins que, si le roi de France se jette sur les Flandres, Français et Hollandais ne soient divisés.
            Que notre ambassadeur en France a, il est vrai, été reçu en audience, mais de la façon la plus déshonorante qui fût, car les princes du sang, quoique invités par notre ambassadeur, la plus grande bévue commise par un ambassadeur depuis 400 ans, n'y étaient pas, et donc on ne put dire qu'ils cédèrent le pas à l'ambassadeur de notre roi. Que notre roi dit ouvertement l'autre jour dans sa chambre privée que son droit et sa prééminence ne seraient pas mis à mal par le roi de France, si grand fût-il.
            Que le pape est heureux d'accéder à la demande de paix des Français, comme dit la gazette,  aux conditions les plus déshonorantes possibles.
            Que la conversation de ces gens qui entourent notre roi et dont j'ai parlé plus haut..... lorsqu'ils sont seuls est si ignoble et si abjecte que cela échauffe les oreilles des gentilshommes des escaliers de service, comme il les a je crois appelés, d'entendre ce qui se dit à portée du roi, cela doit être vraiment très choquant. Il dit que milord Digby envoya à Lisbonne deux prêtres pour tâcher de découvrir tout ce qu'ils pouvaient comme griefs contre le chancelier au sujet de l'alliance royale, pour prouver qu'il savait d'avance que la reine ne pouvait pas avoir d'enfants et qu'on lui avait fait prendre quelque chose pour qu'il en fût ainsi. Mais, si discrets qu'ils eussent été, ils furent jetés en prison dès leur arrivée là-bas. Que milord Digby s'efforce de porter l'affaire devant la Chambre des communes dans l'espoir de l'emporter sur le chancelier, car il a beaucoup d'ennemis, mais j'espère qu'il arrivera le contraire. Que feu le roi avait hypothéqué Clarendon Park pour 20 000 livres, que notre roi l'a donné au duc d'Albermarle et que celui-ci l'a vendu à milord le chancelier dont le titre de comte vient de là. Le roi donna ordre ce jour même, au Sceau privé de payer ces 20 000 livres à milord le chancelier pour lever l'hypothèque.
            L'Irlande est dans un état d'extrême confusion à cause des mauvais traitements qu'y subissent les protestants alors que les catholiques sont trop bien traités, Il résulte de tout cela, Dieu m'en est témoin, que je ne m'attends à rien d'autre qu'à des des désastres, sauf si les choses s'arrangent sous peu.
            Après le départ de Mr Alsop, ma femme vint me dire comme mon oncle Wight fut gentil avec elle encore aujourd'hui, bien qu'elle constate que toute sa bonté à notre égard vient du respect qu'il lui témoigne, elle ne trouve qu'extrême courtoisie de sa part. Pourtant ce n'est que ce qu'elle me dit, sinon il me dira tout autre chose. Mais aujourd'hui il lui dit clairement que si elle avait un enfant celui-ci serait son héritier, et que si elle et moi le voulions il serait notre ami sincère. Il a demandé à ma femme d'acquiescer à tout ce que dit sa femme à tout moment car elle est irritable. Ce qui prouve qu'il a le dessein de nous garder en bons termes avec sa femme, pour notre bien j'en suis sûr, et il la dit jalouse, de sorte qu'il n'ose pas venir voir ma femme comme il le ferait ou s'efforcerait de le faire s'il le pouvait. Cela semble étrange, tout bien pesé, mais j'espère toujours qu'il a de bonnes intentions. Ma tante est aussi très franche avec ma femme, elle lui dit simplement que son mari a l'intention de doubler sa part à sa mort pour lui constituer un douaire. Qu'il donnera bientôt 100 livres à sa nièce Mary et un legs substantiel à sa mort. Et il semble qu'il agit de même avec l'autre sœur. Cela me contrarie qu'il accorde tant à l'ami de sa femme tous les jours comme il le fait. Mais on ne peut refaire le passé et à l'avenir j'essaierai d'y porter remède.
            Après toute cette conversation avec ma femme je fus au bureau seul. Elle rentra à la maison voir comment se passait la lessive et je terminai mon travail. Ensuite à la maison, souper et, au lit.


                                                                                                                       23 février

            Levé. Aujourd'hui mardi gras, et en réunion toute la matinée. A midi rencontrai sir William Rider à la Bourse, et soudain, sachant ce que j'avais à la maison, le ramenai, ainsi que Mr Cutler et Mr Cooke, homme sérieux et cultivé que j'ai connu naguère lorsqu'il était secrétaire de milord à Dunkerque et actuellement commis de monsieur le secrétaire Morrice. Je les traitai bien et leur donnai un beau dîner, quoique improvisé. Nous devisâmes très plaisamment et eux décrivirent abondamment leurs voyages à l'étranger. Après leur départ, au bureau, traitai de nombreuses affaires jusque tard, mais suis bien aise de voir que je monte en estime chaque jour de plus en plus et que je reçois des présents plus souvent que naguère, comme par exemple un coffret de très jolis couteaux à manche d'agate de Mrs Russel. Rentré chez moi puis, au lit.
            Aujourd'hui, avec la bénédiction de Dieu, j'ai vécu 31 ans dans le monde, et par la grâce de Dieu je me trouve non seulement en bonne santé, en particulier en ce qui concerne la pierre, mais je souffre seulement quand je prends froid. De plus en passe d'être mieux estimé et d'avoir une meilleure situation dans le monde que je l'ai jamais espéré. Mais je prie Dieu de me donner le courage de faire face aux coups du sort et de m'y préparer.


                                                                                                                  24 février 1664
  alimentarium.org                                                                     Mercredi des Cendres
Résultat de recherche d'images pour "17è siècle  MARDI GRAS"            Levé puis allai par le fleuve car c'était une très belle matinée, à Whitehall pour parler à sir Philip Warwick, mais il était allé à la chapelle du roi. Passai donc une grande partie de la matinée à me promener dans le parc et à me rendre à la chapelle de la reine, où je restai regarder leur messe jusqu'à ce qu'un homme vint me dire de sortir ou de m'agenouiller, donc je sortis. Puis à Somerset House où j'entrai dans la chapelle où Monsieur d'Espagne prêchait autrefois. Elle est maintenant bien embellie et il y avait dix fois plus de monde que dans la chapelle de la reine au parc de St James, ce qui m'étonne. De là au jardin de Somerset House, parcourus en tous sens le nouveau bâtiment qui sera, à tous égards, magnifique et somptueux. Je restai longtemps à deviser avec un homme qui sciait un bloc de marbre et lui donnai 6 pence pour boire. Il me donna beaucoup de détails sur la nature et les difficultés de ce travail. Il me dit qu'il ne pouvait scier plus de 4 pouces de pierre par jour..... Quand le marbre est scié on le frotte avec du sable d'abord grossier, puis de plus en plus fin, jusqu'à ce qu'on utilise la potée et l'on obtient un poli lisse comme du verre. Leurs scies n'ont pas de dents, mais c'est le sable que la scie frotte.
            Puis par le fleuve au café où je restai longtemps avec l'échevin Barker à parler du chanvre et du commerce qu'on en faisait. Puis un peu à la Bourse. Rentré dîner avec ma femme, puis au bureau jusqu'au soir, et me promenai alors gaiement avec ma femme dans le jardin. Retournai travailler jusque tard. A la maison, souper et, au lit.


                                                                                                                       25 février

            Debout puis au bureau, réunion et de là en voiture avec Mr Coventry à la verrerie où nous dînâmes. Avant et après le dîner fîmes les comptes de milord Peterborough. Rentré travailler jusqu'à la visite de Creed, et en voiture, laissant ma femme chez mon frère, chez milord où je vis les jeunes demoiselles et devisai un moment avec elles, puis quelque temps à Whitehall où je bavardai mais ne m'occupai pas d'affaires. Mais décidai de rencontrer milord demain, car j'avais obtenu aujourd'hui un cheval de Mr Coventry. Rentrai donc en passant chercher ma femme. Après avoir travaillé au bureau, rentrai à la maison l'esprit troublé ( Dieu me pardonne !) par la jalousie à la pensée de ce que fera ma femme demain, quand je ne serai pas à Londres. C'est un enfer pour moi et pourtant il n'y a pas de raison, Dieu me pardonne et m'amende ! Rentrai à la maison et préparai mes affaires pour le voyage et, au lit.


                                                                                                                     26 février

            Levé, après m'être bien habillé pour monter, je me rendis pas le fleuve à Westminster dans les appartements de Mr Creed, et après avoir bu du chocolat, joué de la viole, en présence de Mr Malard, sur la nouvelle viole de Creed qui se révèle bien plus mauvaise que la mienne, me semble-t-il, et regardé cette nouvelle invention consistant en un bureau et des étagères pour les livres, nous partîmes d'une auberge toute proche où avait été amené le cheval de Mr Coventry et en contournant les taillis par de mauvais chemins à Highgate. En chemin conversation intéressante. La journée fut d'un bout à l'autre extraordinairement agréable. D'après les renseignements que nous avions pris nous nous étions arrêtés à l'auberge du Coq, à un mile de ce côté-ci de Barnet, car nous ne voulions pas nous faire entretenir et nous ne savions pas si milord accepterait une collation quand il passerait. Nous prîmes quelque chose sur place, plaçant un jeune garçon en sentinelle pour surveiller leur arrivée depuis la colline de Barnet. Après deux ou trois fausses alertes, ils arrivèrent. Nous allâmes avec force courtoisie à la rencontre du carrosse, et je fus aussi bien accueilli que je pouvais l'espérer par milord et par milady qui tinrent des propos aimables. Puis accompagnai le carrosse à cheval, un bon moment et me mis donc à deviser avec plusieurs des personnes qui se trouvaient là, il y en avait une douzaine qui accompagnaient le carrosse et une autre voiture pour les servantes et pour le pasteur.
            Parlant entre autres avec Will Howe, j'appris que milord, l'autre jour, raconta en détail à milord Peterborough et à Povey qui étaient allés avec eux à Hinchingbrooke, comment et à quelle date il avait renvoyé Creed et m'avait pris à son service et que, depuis lors, le duc d'York l'a souvent remercié à mon sujet, ce qui me plut fort. Plus tard, alors que je demandais à Mr Howe en quelle circonstance avait eu lieu cet entretien, il me demanda de ne pas en parler maintenant, car il ne voulait pas que milord nous vît ensemble, mais il promit de me le dire une autre fois, ce qui m'amena à m'interroger sur ce qu'il entendait par là. Lorsque nous arrivâmes chez milord j'entrai et, je ne sais si c'est par négligence ou par indifférence, mais ne me fit aucune espèce de compliment. Il me semble que les jeunes demoiselles me méprisent quelque peu. Je sortis donc sans dire adieu à quiconque car je ne voulais pas être jugé trop servile, mais j'espère et je crois que milord m'estime toujours autant qu'avant, bien qu'il n'ose plus m'admettre dans la même intimité que par le passé, et que milady reste la même femme.
            Rentrai à cheval à la maison où je trouvai mon oncle Wight. C'est étrange, comme dit ma femme, la façon qu'il a de la bien traiter et de venir exprès lui rendre visite, mais je ne m'inquiète pas du tout à son sujet, mais j'en espère les meilleurs effets. Après son départ je mange quelque chose, et ma femme de me donner, après que je lui eus narré tous les événements du jour, de très bons conseils, fort rationnels, sur la conduite à tenir avec milord et sa famille, en ne prêtant attention à nul autre sauf à milord et à milady, et en donnant l'impression de n'avoir pas la moindre amitié ou affection pour eux. Ce que j'ai résolu de faire, sachant que c'est une fière contenance qui devrait me servir là, ainsi que d'être bien mis et d'apparaître dans de beaux atours.
            Au bureau un moment, étant las rentré plus tôt puis, au lit.


                                                                                                                     27 février

            Levé, mais las, puis au bureau, réunion toute la matinée.
            Avant mon départ pour le bureau, la femme de Bagwell vint me parler au nom de son mari. Elle me plut beaucoup et je la caressai sous le menton, mais ne pus trouver le front de lui proposer rien qui fût inconvenant, car elle est, je crois, très honnête.
            A midi avec Mr Coventry au bureau de la Compagnie africaine et de nouveau aux affaires de milord Peterborough. Puis à dîner, avant nous eûmes les meilleures huîtres que j'ai vues cette année et, je crois, à bien des égards, les meilleures que j'aie jamais mangées. J'en mangeai vraiment beaucoup.
            Excellente compagnie à dîner. Entre autres, sir Martin Noell qui nous raconta le litige qui l'oppose, en tant que fermier des aides additionnelles, à la Compagnie des Indes orientales, pour savoir si le calicot est ou n'est pas en lin. Il dit qu'il est en lin, c'est ainsi qu'on l'a toujours considéré. La Compagnie dit que le calicot est en coton qui pousse sur des arbres, contrairement au chanvre et au lin. Le jugement rendu donne tort à la Compagnie, bien qu'elle s'oppose à ce verdict.
            Rentré à la maison et au bureau, fort tard. A la maison souper puis, au lit.
            J'ai reçu aujourd'hui une réponse très plaisante et très condescendante de mon pauvre père, en réponse à ma lettre de colère et de mécontentement écrite l'autre jour, ce qui me réjouit fort.


                                                                                                                        28 février
pinterest.fr                                                                                                     Jour du Seigneur
Résultat de recherche d'images pour "huitres en peinture"            Levé, à pied à St Paul et, par un heureux hasard, c'était extraordinaire pour les professeurs des écoles de droit et pour les étudiants en droit de venir à l'église ce jour, car c'était une ancienne cérémonie tombée en désuétude depuis 25 ans, fixée au premier dimanche de carême. Il y avait foule d'étudiants, plus qu'on ne pouvait en faire asseoir, sauf sur les bancs et l'église était pleine.
            Un certain Hawkyns, de l'université d'Oxford, prêcha un bon sermon sur ce texte :
            " Mais la sagesse d'en haut est premièrement pure, puis pacifique. "
            Avant comme après le sermon je fus irrité d'entendre le chœur le plus mauvais que j'aie jamais entendu. Mais ce qui fut extraordinaire ce fut que l'évêque de Londres, qui était assis là sur un banc, placé spécialement pour lui près de la chaire, donne la dernière bénédictions à l'assemblée. Comme c'est un vieillard fort digne, j'ai trouvé cela très convenable de sa part.
            Le lieutenant de la Tour, sir John Robinson, tint absolument à me ramener chez lui en voiture. Ayant fait prévenir chez moi, j'acceptai l'invitation et dînai avec lui. Il a une excellente table et sa femme, au port très fier, est grande mais gracieuse. Elle me plut beaucoup. Les officiers de son régiment dînaient avec lui. A table conversation sans intérêt.
            Mais après dîner milady voulut voir un jeune garçon qu'on lui décrivit comme un petit paysan ingénu amené en ville il y a un ou deux jours et abandonné dans le vaste monde. Après s'être perdu il s'était trouvé par hasard à la Tour. Milady le croit, prend pitié de lui et veut le garder. Mais, malgré son jeune âge, ce garçon raconte son histoire si volontiers et répond à toutes les questions avec tant d'esprit qu'assurément c'est un fieffé chenapan élevé à Londres. Mais milady ne veut rien en croire, elle lui a fait donner à manger. Je pense qu'elle va le garder comme petit laquais pour son fils aîné.
            Après dîner allai avec le lieutenant à la chapelle de la Tour, précédés du porte-clefs, des gardes et du gentilhomme portier. J'étais assis à côté du lieutenant sur son banc, en grand apparat, mais dormis pendant tout le sermon. Aucun des prisonniers actuellement détenus à la Tour ne vient, semble-t-il assister à l'office, bien qu'ils en aient la permission.
            Retour chez sir John, puis le quittai et rentrai à la maison.Tantôt chez sir William Penn, restai un moment à parler avec lui à parler de sir John Mennes et de la sottise avec laquelle il s’acquitte de sa charge qui me dégoûte et dont je suis las de parler. Dis aussi comme l'on trompe le roi dans cette affaire, bien que Penn ne propose ce sujet de conversation, avec ruse, que pour me le faire dire. Mais je me sens très libre de lui dire mon sentiment, étant tout disposé à lui laisser rapporter mes propos, s'il le souhaite, à sir John Mennes ou à quiconque.
            Rentré chez moi, me promenai dans le jardin avec ma femme par un beau clair de lune pendant environ deux heures, jusque passé huit heures. Puis souper, et après les prières, au lit.


                                                                                                                         29 février 1664

            Levé, en voiture avec sir William Penn jusqu'à Charing Cross où je descends et vais rendre visite à sir Philip Warwick pour l'entretenir de marine. Je traitai le sujet dans son ensemble, et lui me parla non seulement de la marine, mais encore du Trésor, plus de deux heures, je crois. Pendant ce temps nombre de personnes attendaient dehors, mais il semblait ne pas ménager ses efforts pour me faire comprendre les affaires du Trésor ou pour me rendre témoin des efforts qu'il déployait à en rendre compte.
            Il me montra, à vrai dire, nombre de remarquables inventaires ( rapport visible au British Museum - nte de l'éd ) sur l'état du Trésor élaborés sous les règnes précédents ainsi qu'à l'époque récente et de nos jours. Il me montra comment les différentes impositions calculées entre 1643 et 1659, c'est-à-dire les droits perçus, outre l'accise, les droits de douane, les séquestres et le dixième, les terres du roi, de la reine et de l'Eglise et tout le reste, mais rien que les impositions s'élevaient à plus de 15 millions.
            Il me montra un mémoire qu'il avait rédigé sur le Trésor de notre pays comparé à celui d'autres pays. D'après lui le Trésor de l'Espagne est grand, mais divisé entre ses différents royaumes et donc se réduit à peu de chose. Celui de la France a toujours dépassé de loin le nôtre en volume, mais le prince peut imposer le peuple selon son bon plaisir, ce qui n'est pas le cas ici. La Hollande a le meilleur système d'imposition qui porte seulement sur l'achat de marchandises, l'accise. Il en conclut que le seul impôt convenant à l'Angleterre est une taxe calculée en pourcentage par livre sterling ou accise prélevée sur l'achat de marchandises.
            ............. Milord le trésorier général dit au roi que ce sont des dépenses supérieures au revenu qui ont d'abord causé la perte de son père, et depuis celle des rebelles, qui, dit-il, tout comme Henri VIII , vit sa fortune soudain beaucoup augmenter, mais mourut pauvre pour avoir trop dépensé. Il dit encore au roi qu'une grande part du 1 200 000 livres sont pour le souverain de son vivant.
            Le Parlement devra donc renouveler cette somme pour son successeur. Cela se produit rarement sans que la couronne doive céder certaines de ces prérogatives. S'il refuse et persiste à prélever cette somme sur le peuple, cela peut déclencher une guerre civile qui peut se révéler fatale pour la Couronne, comme dans l'affaire des droits de tonnage et de poundage.........
            Il me présenta également un excellent argument pour prouver que contrairement à une idée reçue le royaume ne se trouve pas appauvri du fait que nous importons moins que nous exportons, bien que cela soit un paradoxe et que je ne me souvienne pas des arguments, je pense qu'il y avait beaucoup de vrai dans ce qu'il disait. Dans l'ensemble je trouve que c'est un homme très précis et méthodique et fort diligent. Très heureux qu'il ait jugé bon de me donner toutes ces explications, bien que je ne puisse aisément en deviner la raison, à moins que ce ne fût à cause de la franchise dont il me voit user pour lui dire combien le roi risque de souffrir si nous ne comprenons pas l'état du Trésor.
            Puis à Whitehall où se trouvait milord Sandwich qui me fit, je crois, bonne contenance. Traitai des affaires habituelles devant le Duc, expédiai plusieurs affaires dans le Palais, puis me rendis aux écuries royales avec sir William Penn.
            Chemin faisant rencontrai d'abord Will Howe qui, de lui-même me conseilla d'être plus libre avec milord et de prendre les devants, car ma propre froideur, dit-il, à son avis, ne fait qu'irriter milord.
            Dans les écuries sir William Penn et Mr Baxter me montrèrent plusieurs bons chevaux, mais le duc d'York a donné l'autre jour à un Français le cheval appelé " Pen ", dont sir William Penn lui avait fait présent. Baxter en est fort chagrin. Il dit qu'il n'est pas prêt d'avoir un si bon cheval.
            Puis à la Bourse et dans un café avec sir William Warren...... Et repris le chemin de mon domicile. En chemin m'arrêtai pour regarder un incendie dans une cour d'auberge à Lombard Street. Grand Dieu ! comme les merciers et les négociants qui y avaient des entrepôts en enlevaient leurs étoffes et leurs soie ! On finit par éteindre l'incendie.    *                                  bfmtv.com
Jeff Koons au Centre Pompidou            Rentré dîner. Emmenai ensuite ma femme et la laissai avec ses deux servantes pour faire des achats dans Fleet Street. Puis à Whitehall, sans but précis. Allai donc au Palais de Westminster où devisai avec Mrs Lane et Howlett, mais le mariage avec Hawley ne se fera pas, j'ai l'impression, j'ai donc la ferme intention d'éviter toute occasion de faire des efforts supplémentaires pour elle.
            Revins en bateau à Salisbury Court et retrouve ma femme, comme convenu, chez Mrs Turner. Après être resté bavarde un moment, la dépose, ainsi que le jeune Arminger, à Cheapside. Rentré à la maison avec ma femme. Retour avant nos servantes qui arrivèrent bientôt tout effrayées, criant qu'elles avaient manqué de se faire tuer par une voiture. Grand Dieu ! Voir Jane raconter son histoire comme une sotte et avec l'imagination exaltée, à l'envi de sa grand-mère, mais aussi tellement comme une simple d'esprit que l'on en mourrait presque de rire, tout en étant chagrin de l'entendre.
            Sur ces entrefaites allé au bureau faire mes comptes mensuels. Les ayant terminés ce soir, je trouve, à mon grand plaisir, que je suis à la tête de 890 et quelques livres, la plus grande fortune que j'ai jamais eue.
            Le coeur bien aise, au lit.


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                                                                à suivre............

                                                                                                                1er Mars 1664

            Levé puis.......
         
                             
         
         
         
         


             

samedi 14 mars 2020

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 110 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

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                                                                                                                        1er Février 1664

            Debout, mes servantes s'étant levées de bonne heure pour la lessive. Après m'être préparé je trouve Mr Trutt, le commissaire de marine, en bas avec 12 bouteilles de xérès. Il me dit que le jeune Jack Davis a invectivé sir William Batten parce qu'il s'était efforcé de la renvoyer, ce que j'avais déjà appris de sir William Batten. Je suis désolé pour le jeune homme parce que cela provoquera vraisemblablement sa ruine, bien que je le croie fieffé coquin.
            J'emmène Strutt avec moi en voiture à Whitehall où il descendit. allai chez milord, mais il s'est rendu tantôt à la Garde-Robe du roi. Je suis heureux de voir qu'il s'occupe ainsi de ses affaires, bien que je sois contrarié que la raison en est le conseil que je lui ai donné à mon détriment. On me dit qu'il va à la campagne la semaine prochaine et que les deux jeunes demoiselles montent en ville cette semaine, précédant milady leur mère.
            J'apprends que deux hommes hier soir, se disputant le haut du pavé près de la nouvelle Bourse, se tuèrent, chacun transperçant l'autre. L'un d'eux est un serviteur de la chapelle du roi, l'autre un serviteur de milord le général Middleton. Puis à Whitehall où le roi vint dans la chambre du Duc et resta une ou deux heures, se moqua de sir William Petty venu au sujet de son bateau et de Gresham College en général. Le pauvre Petty, je le vis bien, était un peu décontenancé, mais discuta avec mesure et supporta les outrances excessives des objections formulées par le roi et d'autres assistants avec grande retenue. Il proposa de prendre des paris contre les meilleurs bateaux du roi, mais le roi ne voulut pas miser et se contenta de le décrier en paroles. Quant à Gresham College, il se moqua beaucoup de ses membres qui passent leur temps à peser l'air et à ne rien faire d'autre depuis qu'ils siègent.
            Puis au palais de Westminster, rencontrai plusieurs personnes, car il y a une session. Entre autres, je parlai à Mrs Lane. Je redoutais d'apprendre les effets de notre dernière rencontre, il y a environ deux ou trois semaines mais, à ma grande satisfaction, elle n'en dit rien. Je rencontra Mr Pearse. Il me conta plusieurs anecdotes de la Cour, entre autres, lorsque le roi arriva l'autre jour à son théâtre pour voir La Reine des Indiens, dont il me loua la splendeur, milady Castlemaine était déjà installée dans la loge voisine. Se penchant par-dessus les autres dames un instant pour chuchoter au roi elle quitta sa loge, entra dans celle du roi et s'assit à la droite du roi, entre le roi et le duc d'York, ce qui, affirme-t-il, décontenança le roi lui-même, de même que tous les autres spectateurs. Il croit qu'elle agit ainsi pour prouver au monde qu'elle n'est pas en disgrâce, contrairement à ce que l'on croyait.
            Revins dans la voiture de l'échevin Maynell à la Bourse où fus occupé avec plusieurs personnes. Retour pour dîner à la maison. Emmenai immédiatement ma femme au Théâtre du Roi, comme c'est le début du mois et que je peux y aller une fois par mois, pour voir jouer La Reine des Indiens, un spectacle effectivement très agréable et au-delà de toutes mes espérances. La pièce est bonne mais gâchée par la rime qui rompt le sens. Au-delà de mes espérances surtout, la plus âgée des demoiselles Marshall joua de manière excellente, mieux que toute actrice que j'aie jamais entendue, mais sa voix n'est pas si douce que celle de Ianthe. Nous rentrâmes chez nous fort satisfaits. J'y rencontrai Mr Pickering et sa maîtresse, Mrs Doll Wilde. Il me dit que les passions se donnent libre cours entre le chancelier et milord Bristol contre le Parlement, et que milord Lauderdale et Cooper sont ouvertement hostiles au chancelier, ce dont je suis désolé.
            Sur le chemin du retour je descendis au café où j'entendis le lieutenant-colonel Baron raconter des histoires très intéressantes sur ses voyages dans les hautes montagnes d'Asie, au-dessus des nuages. Le ciel y est clair. On traverse le nuage dans un épais brouillard qui mouille les vêtements comme une éponge. La terre au-dessus des nuages est aride et desséchée, rien n'y pousse, ce n'est qu'un sol sec, il fait pourtant moins chaud au-dessus qu'en-dessous des nuages. La nuit les étoiles brillent d'un éclat vif et le ciel est d'un beau bleu. Mais on ne peut à aucun moment voir la terre à travers les nuages. Les nuages semblent être un monde à vos pieds.
            Rentré souper ayant faim, puis au bureau, affaires, en particulier concernant Creed, pour qui je suis maintenant bien paré, et à la maison.
            Aujourd'hui, au palais de Westminster, William Bowyer me dit que son père est mort récemment. Il mourut en se noyant dans le fleuve, revenant la nuit, mais, dit-il, il n'avait pas bu. Il fut emporté la canne à la main et la cape sur l'épaule, aussi rougeaud qu'avant sa mort. Son cheval fut emporté la nuit dans l'eau, entravé par sa bride. Mais on n'eut pas l'intelligence de chercher son maître avant le matin suivant où on le trouva noyé.


                                                                                                                    2 février

            Levé, au bureau où, bien que ce fut la Chandeleur, réunion avec Mr Coventry et sir William Penn les autres étant à une inspection à Deptford. A midi Mr Coventry et moi, en voiture, à la Bourse. De là au café où le capitaine Cocke expliqua clairement les effets bénéfiques d'une certaine forme de guerre avec la Hollande, et de conquête. Je n'y avais pas pensé, bien au contraire. C'est-à-dire que le commerce du monde est trop limité pour nos deux pays, donc l'un des deux doit être ruiné. Deuxièmement, bien que cela ne fasse pas de nos négociants de meilleurs hommes d'affaires, notre laine vaudra un meilleur prix si nous vantons nos tissus, et ainsi nos métayers seront plus à même de payer les loyers et nos terres prendront de la valeur, ainsi que toutes nos fabriques, alors qu'actuellement les Hollandais nous surpassent en ce domaine. - Il pense que les Hollandais ne sont pas en si bonne position qu'auparavant, parce qu'ils n'ont jamais assez d'hommes, surtout maintenant avec les guerres contre les Turcs. -                                     pinterest.fr
Résultat de recherche d'images pour "COQUINS PAYSANS 17è siècle"            De nouveau à la Bourse et à la taverne du Soleil avec sir William Warren. Bavardâmes longtemps et reçus de bons conseils et des suggestions utiles de sa part. Il me remit une paire de gants pour ma femme, enveloppés dans du papier que je me gardai d'ouvrir, ayant senti que le paquet était dur, mais je lui dis que ma femme le remercierait et continuai la conversation.
            Rentré chez moi, Seigneur ! dans quelle impatience j'étais de voir ma femme quitter la pièce sans lui demander de s'en aller, de façon à voir comment étaient ces gants. Bientôt elle sortit, et découvris que c'était une paire de gants blancs pour elle et 40 pièces d'or sonnant et trébuchant, ce qui me réjouit tant le cœur que je ne pus presque rien manger à dîner, tant j'avais de joie à penser que Dieu nous bénit chaque jour davantage, et plus encore avec l'accroissement de ma charge et de mes efforts. J'étais perplexe, ne savais s'il fallait ou non le dire à ma femme. A peine pouvais-je me retenir, mais c'est ce que je fis. Je réfléchirai avant de lui en parler de crainte de lui laisser croire que je suis dans une meilleure situation ou plus apte à gagner de l'argent que je ne le suis en fait.
            Après dîner au bureau  travaillai infiniment jusqu'à plus de 10 heures du soir pour ma tranquillité d'esprit. Rentré tout joyeux pour souper et, au lit.
            Ce soir Mr Hempson est venu me dire que son maître, sir William Batten, ne veut plus entendre parler de lui comme commis à l'intendance à Chatham. Il l'a renvoyé sans raison nouvelle ni particulière, et je crois, simplement au motif, comme il l'écrit lui-même plus ou moins et que l'avoue James Norman, qu'il fut deux fois avec moi l'autre jour et ne lui présenta pas ses respects, tant il me craint, moi et tout ce qui me touche........


                                                                                                                3 février

            Levé et après une longue conversation avec mon cousin Thomas Pepys, mon exécuteur testamentaire, en voiture avec ma femme à Holborn où je descends et elle va chez son père. Au quartier du Temple et à différents endroits et à la Bourse où travaillai beaucoup. Rentré dîner seul puis à la taverne de la Mitre et là, comme par hasard, rencontrai Will Howe venu acheter du vin pour milord qui va se rendre à Hinchingbrooke. Resté seul avec lui un bon moment à m'entretenir de la distance que prend milord avec moi. Il me répond que je n'ai aucune raison de penser ainsi, que milord est seulement plus réservé qu'auparavant. Rencontrai Mr William Rider et Mr Clerke, et après beaucoup d'affairement arrivai à une conclusion, attribuant à Mr Custos 202 livres aux dépens de Mr Bland...... Puis en voiture allai chercher ma femme chez son frère, et découvris qu'elle était rentrée à la maison. Passai voir sir Robert Bernard pour mettre mes terres en viager, et chez Roger Pepys qui garde le lit, car il souffre d'un furoncle qui l'empêche de se tenir debout ou assis.
            Rentré à la maison. Ma femme déborde d'histoires tristes au sujet de son brave homme de père et de son coquin de frère qui va aller en Hollande avec sa femme, servir comme soldat. Ensuite au bureau et, au lit. Tard dans la soirée en montant Ludgate Hill en voiture je vis deux galants et leurs valets de pied s'occuper d'une jeune fille que j'ai beaucoup lorgnée récemment, qui tient boutique sur la colline, vendant rubans et gants. Ils semblaient l'entraîner de force, mais elle les suivit et je crois qu'elle en a eu pour son compte. Mais, Dieu me pardonne, comme j'aurais souhaité et désiré être à leur place !
            Dans Covent Garden ce soir, en allant chercher ma femme, je m'arrêtai au grand café, où je n'étais jamais allé auparavant, où se trouvaient Dryden, le poète, je l'ai connu à Cambridge, tous les beaux esprits de la ville, Harris l'acteur et Mr Howell de notre collège. Si j'en avais eu le temps et si je le pouvais en d'autres occasions, ce serait bien de venir ici, car j'observe qu'il y a beaucoup d'esprit en ce lieu et que la conversation y est agréable. Mais je ne pouvais m'attarder, l'heure était avancée, ils étaient tous sur le départ.


                                                                                                                 4 février

            Levé et au bureau où après avoir un moment siégé je quittai le conseil sous prétexte d'affaires sérieuses et allai en voiture à Saint Paul où j'entendis de bons discours par les élèves qui seront choisis cette année. Puis un peu plus tard avec plusieurs de mes vieilles connaissances à la taverne de la Tête de Bidet où je leur donnai une bouteille de xérès. En ressortant j'allai au collège assister à l'examen de la classe supérieure et fus retenu par un très grand nombre de merciers, Clutterbuck..... traités par tous avec maints égards et banquetai. On me dit que dans son testament le Dr Colet précise qu'il faut trouver pour le collège un directeur qui ait une bonne maîtrise du latin et, si possible, quelques notions de grec. Le grec était si mal connu à l'époque....... Après avoir pris bien du plaisir, en particulier à entendre Mr Cromleholme répéter que j'étais un bienfaiteur du collège, chez mon libraire où je passai une heure à feuilleter Theatrum Urbium et Flandria illustrata, aux excellentes gravures, avec grand contentement.
            Retour vers la maison, passai chez ma petite chapelière, je bavardai avec elle son mari étant absent. C'est une personne follement gaie. Rentré chez moi et au bureau. Un peu plus tard ma femme rentre de l'enterrement de la femme du capitaine Grove à Wapping. Elle me conte comment sa servante, Jane, en montant dans le bateau a fait une chute, découvrant son cul. Puis vinrent mon oncle White et Mr Maes avec un compte rendu de leur affaire dont il m'a parlé très discrètement et que je trouve fort complexe. Puis, après avoir bu une ou deux bouteilles de bière, après leur départ retournai encore un peu au bureau. Rentré à la maison, prières et, au lit.
            Ce soir je terminai ma lettre à Creed à propos de ses pièces de huit et la lui envoyai. Je prie Dieu d'y donner bonne fin et que cela me rapporte de l'argent de sa part en temps voulu.


                                                                                                             5 février 1664
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Résultat de recherche d'images pour "COQUINS PAYSANS 17è siècle"            Levé. Descendis par le fleuve, belle matinée, à Woolwich où passai une ou deux heures à bonnes fins, à pieds jusqu'à Greenwich puis Deptford où je trouve plusieurs personnes venues dîner, je dînai avec eux et après ren trai chez moi par le fleuve lisant au retour, comme à l'aller Faber fortunae que je ne me lasse jamais de lire. A la maison un peu avec ma femme puis au bureau jusqu'à 8 heures et retour à la maison m'occuper des papiers de Brampton, en particulier des papiers de mon oncle en qualité de receveur général de nos impositions mensuelles pour le comté de Huntingdon pendant l'année 1647. Contrairement à mon attente je les ai trouvés en si bon ordre et si méticuleusement tenus que cela dépassait tout ce que je pouvais espérer ou imaginer. Ensuite ayant vu des acquits pour chaque quart de penny qu'il reçut, j'allai au lit tard, la conscience fort tranquille.


                                                                                                                   6 février

            Levé et au bureau réunion toute la matinée. A midi à la Bourse, rencontrai Mr Coventry pour la première fois ici. Après un bref bavardage avec lui et d'autres négociants, allai par-ci et par-là pour traiter différentes affaires et rentrai à la maison où vint le père Fogarty, prêtre irlandais que ma femme et sa mère ont connu en France, personne pondérée et discrète mais que je n'aimerais pas voir converser avec ma femme ( nte de l'éd elle est d'éducation huguenote ), de peur qu'il ne se mêle de sa religion. Mais j'aime bien cet homme. Puis sortis avec ma femme et la laissai chez Tom tandis que je vaquais à plusieurs affaires. Revins auprès d'elle, contrarié de n'avoir pas trouvé Tom chez lui à mon premier passage, tous ses livres, papiers et factures en désordre sur la table du petit salon, et lui sorti, ce pourquoi je fulminai contre lui quand il rentra. Puis à la maison en voiture passant chez ma cousine Scott qui est mourante à la suite, dit-on, d'une fausse-couche. Ma femme ne fut pas autorisée à la voir, ni personne d'autre.
            A la maison, puis au bureau tard pour écrire des lettres, puis rentré, souper et, au lit.
            Le père Fogarty me confirme la nouvelle qu'assurément la paix a été faite entre le pape et le roi de France.


                                                                                                                       7 février
                                                                                                      Jour du Seigneur
            Levé puis à l'église et retour à la maison. Ma femme étant indisposée garda le lit tout le jour et je montai dîner à son chevet. Et puis tout l'après-midi, jusque tard dans la nuit, écrivis des lettres d'affaires à mon père, lui exposant des questions en général de grande importance, et d'autres lettres pour me libérer l'esprit pendant la semaine, quand je n'ai pas le temps d'y penser. Remontai auprès de ma femme et lus, fort gaiement, les deux discours de sir William Davenant dénigrant Londres et Paris pour les opposer l'un à l'autre, puis prières et, au lit.


                                                                                                                       8 février

            Levé puis passé voir Mr Philips et après une brève conversation allai chez milord Sandwich, mais comme il était sorti restai bavarder un peu avec Will Howe, puis à Westminster pendant la session. Rencontrai Mr Pearse. Il m'a dit que le roi est toujours fou de ses femmes, sans aucune pudeur et que la bonne reine s'arrête d'elle-même parfois avant d'aller dans sa chambre d'atours, pour s'assurer que le roi n'y est pas, de peur qu'il soit comme elle l'a déjà surpris avec Mrs Stuart. Et, dit-il, la plus grande partie du douaire de la reine, contrairement aux engagements pris et à l'opinion du lord trésorier et du Conseil, est donnée ou louée, je ne sais comment,à milord Fitzharding, à Mrs Stuart et à d'autres de cette clique.
           D'après lui le roi est complètement entiché du duc de Monmouth et, apparemment, comme s'il avait l'intention d'en faire son successeur. Dieu sait comment cela se terminera !
            Après son départ j'allai parler à Mrs Lane pour la persuader d'épouser Hawley, je crois qu'elle y viendra et j'aimerais que cela fût. Puis chez Mr Hawlett et sa femme pour évoquer cette question. Ils sont tout à fait d'accord et je leur ai demandé de l'encourager, car je crois que cela sera pour leur bien à tous, et pour ma satisfaction. Mais je pris plaisir à regarder leur jolie fille devenue une jolie jeune fille et fera une belle et honnête femme.                                             
            Puis en voiture à la Bourse, après avoir réglé quelques affaires rentré dîner.
            Puis à l'Hôtel de Ville croyant entendre des plaidoiries, mais le tribunal ne siégeait pas. Ensuite chez Cade, le papetier, où je regardai des gravures qu'il m'avait réservées. Je découvris qu'il voulait jouer au plus malin avec moi, mais il finit par m'offrir ce que j'espérais. J'ai mis de côté 10 ou 12 livres et vais y réfléchir. Je répugne à y dépenser autant d'argent.
            Rentré chez moi légèrement contrarié qu'aujourd'hui je fus obligé de féliciter Will Howe et de me reconnaître sur un pied d'égalité avec Mr Moore qui m'a défié au cours de notre entretien. Je ne l'accepterai plus, que je réussisse ou que j'échoue, je me montrerai aussi distant avec eux que milord avec moi.
            Au bureau jusqu'à 9 heures, rentré à la maison, craignant des douleurs après avoir pris froid/ Souper et, au lit.


                                                                                                                   9 février
                                                                                                                                  pinterest.fr
Résultat de recherche d'images pour "COQUINS PAYSANS 17è siècle"            Levé et au bureau réunion toute la matinée. A midi à la Bourse en voiture avec Mr Coventry. Fus occupé avec plusieurs personnes. On parle beaucoup des Hollandais qui se proclament en Inde maîtres des Mers du Sud et veulent empêcher de commercer avec tous les navires autres que les leurs sous peine de confiscation, ce qui fait enrager nos négociants.
            Grande inquiétude à cause des Turcs pour deux de nos navires, très richement chargés, venant de la Méditerranée. Réconciliation entre le Pape et le roi de France, de sorte que la question est maintenant de savoir ce que les Français vont faire de leurs armées.
            Rentré chez moi je trouve le capitaine Grove portant le deuil de sa femme, et Hawley. Ils dînèrent avec moi. Après le départ de Grove, Hawley et moi parlâmes de sa maîtresse Mrs Lane. Je le conseillai sérieusement et m'enquis de sa situation. J'espère bien les unir.
            Arrive Mr Moore. Intéressante conversation au sujet de milord. Il me dit, entre autres, que milord est bien changé, c'est-à-dire qu'il est devenu très fier et très digne et ne permet plus à quiconque d'entrer dans ses appartements comme auparavant. Je ne dois pas me soucier, dit-il, de sa réserve envers moi, car il en use avec tout, mais que je garde mes distances et lui rende visite de temps à autre, pas plus, car, ajoute-t-il, lui-même ne va plus le voir sauf lorsqu'il le fait quérir, et même alors il ne l'attend pas s'il ne s'y trouve à l'heure convenue
            " - Car je peux me tirer d'affaires tout seul et ne veux pas, par excès de soumission, m’abaisser devant quelqu'un ou devenir méprisable à ses yeux. "
            C'est la règle de conduite qui me faisait le plus défaut, et je vais la suivre. Nous parlâmes de l'argent que me doit milord et des 1 000 livres pour lesquelles je suis caution vis-à-vis de mon cousin Thomas Pepys. Je me libérerai de ces deux affaires dès que possible, car je n'aime pas qu'il soit tout à la fois en colère et endetté à mon sujet. En outre, me semble-t-il, il ne se soucie pas de payer ses dettes, mais il s'enfonce de plus en plus.
            Après son départ ma femme et moi avons marché une heure ou deux à l'étage dans notre chambre à parler affaires sérieusement.
            Je lui dis que milord me doit 700 livres et lui montrai le billet à ordres et comment j'avais l'intention de me comporter envers lui. Elle et moi avons cherché les moyens d'avoir le capitaine Grove pour ma sœur, ce que nous souhaitons fort ardemment maintenant. Je pense que ce sera une bonne alliance, et vais m'y appliquer. Puis au bureau un moment, rentré, souper et, au lit.


                                                                                                             10 février 1664

            Levé et en voiture chez milord Sandwich dans la nouvelle très belle maison, mais d'un prix exorbitant, dans Lincoln's Inn Fields, lui dis quelques mots. Il est toujours fier et distant, mais il m'a demandé des nouvelles de ma femme et en me quittant me pria de donner son souvenir à sa cousine, ce qui me plut, désirant me flatter de l'idée qu'avec le temps il s'arrangera.
            Rentré directement à la maison, occupé toute la matinée et à midi avec Mr Bland chez Mr Povey, mais comme il dînait et qu'il avait beaucoup d'invités, nous nous retirâmes et allâmes dans Fleet Street chez l'un de ses amis, et puis longue visite où il me conta la longue histoire confuse de l'affaire Coronel et Bushell relative au commerce du sucre dans laquelle Mr Packer et Green et Mr Bkand et 40 autres se sont tant inquiétés des droits de douane exigés par le roi du Portugal et où chaque parti a tenté de leurrer l'autre........ Un peu plus tard vint le dîner et après conversation instructive, celle que je désirais entendre pour mon édification.
            Puis j'allai à Whitehall pour une réunion de la Commission de Tanger. J'en profitai pour demander à Creed s'il avait reçu ma lettre, et il me répondit que oui, qu'il y répondrait. Ce qui m'amène à me demander ce qu'il entend faire de moi. Mais je serai sur un pied d'égalité avec lui avant d'en avoir fini, peu importe qu'il prenne cela à la légère autant qu'il veut.
            Au quartier du Temple mon cousin Roger Pepys me montra une lettre que mon père lui avait écrit le trimestre dernier dans l'intention de me la montrer. Il proposait des suggestions pour Sturtlow, offrait une part pour Pall et je ne sais quoi encore. Cela me contrarie de le voir comploter pour me mettre dans l'embarras et les ennuis sans penser à payer nos dettes et à régler nos legs. Mais je vais lui écrire une lettre qui le persuadera d'agir plus sagement.
            Rentré chez moi. Trouvant ma femme sortie, après être rentrée d'une visite à ma tante Wight pour faire provision pour le carême ( nte de l'édit Wight était marchand de poissons ), partie avec Will chez mon frère. Je les suivis en voiture mais ne les trouvai pas, car ils venaient de repartir pour rentrer à la maison, ce qui me rendit perplexe.
            J'allai dans les appartements de sir Robert Bernard où je mis mes terres de Brampton en viager selon les dispositions de mon testament. Je suis content de l'avoir fait, mon testament est maintenant correct en tous points.
            Retour à la maison, passant un peu au café où brève et gaie conversation. Rentré chez moi, ma femme me dit qu'elle est allée chez son père pour le plaisir de voir son frère, que je trouve chez moi avec elle. Il part par la prochaine marée, avec sa femme, en Hollande pour chercher fortune. Il nous avait fait ses adieux ce matin. Je donnai à ma femme x shillings pour lui, ainsi qu'un manteau que j'avais disponible, manteau de laine claire ajusté, avec un liseré doré à chaque couture, qui était la dentelle du meilleur jupon de ma femme au moment de notre mariage. Je ne restai pas mais allai au bureau où Stanes, le vitrier, resta avec moi jusqu'à 10 heures du soir, pour rédiger son contrat. Le pauvre homme je le rendis presque fou en commettant une erreur, mais je réparai tout, car je ne voudrais pas voir trop souffrir l'homme qui travaille pour le roi à un prix tellement inférieur à celui des autres.
            Après son départ je travaillai encore un peu. Rentré, souper et, au lit. Me sentant mieux avec le temps doux, ma douleur me quitte sans atteindre le paroxysme. Le rhume que j'avais attrapé n'était pas très grave, je suppose, car seulement dû au fait que je n'avais pas boutonné mon gilet un matin.


                                                                                                                      11 février
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Résultat de recherche d'images pour "vermeer pinterest"            Levé et après une conversation fort agréable avec ma femme, au bureau, réunion toute la matinée et fîmes beaucoup de travail, en particulier, à ma grande satisfaction, en faisant prévaloir une opinion contraire à celle de sir William Batten dans l'intérêt du roi. A midi rentré dîner avec ma femme, prenant volontiers d'un très bon porc.
            Ce midi Mr Falconer vint rendre visite à ma femme et lui apporter un présent, une coupe d'apparat en argent avec un couvercle, d'une valeur de deux ou trois livres, pour la politesse que je lui fis l'autre jour. Il ne resta pas dîner avec moi. Je suis presque navré de ce présent, parce que j'aurais voulu garder cet homme en réserve pour aller en été visiter Woolwich avec ma femme.
            Après dîner, montai avec ma femme dans son petit salon pour voir un nouveau paquet de jolis coquillages que lui offre son frère. Puis au bureau jusqu'à 11 heures du soir. Rentré à la maison après avoir écrit une lettre courroucée à mon père..... A la maison puis, au lit l'esprit troublé à propos de la lettre que je suis obligé d'écrire ce soir à mon père, car j'y suis très dur avec lui, mais il le faut.


                                                                                                                        12 février

             Levé et préparé. Trouvai en bas le laquais de Mr Creed qui m'apportait une lettre de son maître. Je la lus donc. Dans son explication de l'affaire entre Samuel Pepys et John Creed, elle est rédigée de façon excellente, montrant tout ensemble sa fermeté et son empressement à faire la paix, alternant reproches et flatteries. Bref, elle est rédigée le mieux du monde, et à vrai dire, me place dans une meilleure situation que je ne l'aurais jamais cru. Toute la matinée réfléchis à la manière de me comporter dans cette affaire.
            A midi au café puis, comme convenu, le rencontrai à la Bourse et revins avec lui au café où, avec grand sérieux et froideur de part et d'autre, il présenta ses arguments et moi les miens. Il reconnut quelquefois mon aide et assistance, tout en s'efforçant d'en amoindrir la portée, disant, par exemple, que le succès de cette affaire ne pouvait être attribuée complètement ni en grande part à cette aide. Et moi d'arguer du contraire et de lui dire franchement que je n'avais jamais, dès le début, pensé lui faire des faveurs pour rien, mais que s'il gagnait 5 ou 600 livres, j'en attendais une part, du moins un remerciement, vrai et non pas seulement de pure forme. Bref, je ne lui dis rien pendant tout ce temps-là dont je puisse craindre qu'il l'utilisât contre moi plus qu'il ne l'eût fait avant cet entretien. Le plus que je lui ai dit fut après que nous eûmes fait la paix, quand il me demanda s'il devait répondre ou non à la lettre du Conseil. Je lui dis qu'il pouvait surseoir, et c'est tout. Puis il me demanda comment la lettre pouvait porter leur signature alors qu'ils n'avaient guère enquêté. Je lui dis que c'était comme j'en avais donné l'ordre et rien d'autre qui eût de l'importance, que l'on répète ou non mes propos plus tard. De sorte que j'ai le même rapport de forces, ni meilleur ni pire qu'avant, s'il ne tient pas son rôle. Nous fîmes la paix en ces termes. Il dit :
            " - Après tout, et bien ! je sais que vous devez vous attendre, puisqu'il doit y avoir accommodement, qu'il me revient de faire les premiers pas. Donc, dit-il, je propose, de même que l'intervalle entre la mort de l'ancien roi et l'arrivée du nouveau est effacé comme s'il n'avait jamais existé, de même qu'il en soit de notre brouille comme si elle n'avait jamais existé. "
            Il dit aussi que je devrais écarter tout malentendu à son sujet ou de sa première lettre, qu'il se sentirait de montrer la même franchise dans l'appréciation de mon amitié et des services rendus que celle qu'il aurait dû témoigner dès le début, avant que je l'aie mis avec ma première lettre, dans l'incapacité de le faire sans donner l'impression de servilité. Donc, l'affaire en reste là et je vais attendre de voir comment il me traitera.
            Après cela je commençai à me sentir libre, et nous nous entretînmes d'autres sujets, puis il vint à la maison en ma compagnie et dîna avec moi et ma femme, ce qui fut très agréable car le dîner était bon et l'on ouvrit ma lemproie, en faisant une entaille d'un côté, qui se révéla délicieuse. 
            Après dîner, avec lui à Deptford à pied. Nous rencontrâmes sir William Petty et je le ramenai et le persuadai de m'amener à son vaisseau et de m'en entretenir, ce qu'il fit très bien.
            Nous revînmes ensemble au bord du fleuve à Rotherhithe, tout en conversant plaisamment en chemin. Puis Creed et moi par le fleuve chez moi. De là pris une voiture et avec ma femme chez l'échevin Backwell où j'échangeai la coupe d'apparat offerte par Mr Falconer, contre une belle chope. La coupe valait, y compris le travail 5 livres 16 shillings. Et une autre petite coupe que nous donna Joyce Norton estimée à 17 shillings, en tout 6 livres 13 shillings, somme pour laquelle nous eûmes la  chope, qui revenait à 6 livres 10 shillings à raison de 5 shillings 7 pence l'ounce, ainsi que trois shillings en espèces. Tout heureux, de là chez mon frère. Creed me quitta alors et mon frère m'apporta le vieil étendard de soie que j'avais déposé chez lui il y a longtemps.
            Retour à la maison. Apprenant que mon oncle Wight était venu, j'allai à sa rencontre à la taverne de la Mître où avec lui et Maes et...... jusque tard, nous mangeâmes une terrine de chevreuil. La faïence ornée d'une couronne me plut fort. Repris le chemin de mon domicile, rencontrai Mr Barrow, revins donc avec lui à la Mître et discutai avec lui de ses doléances au sujet de de l'arsenal, affaire où il se montra parfois insensé et irritable, jusqu'à minuit. Rentrai et montai au lit auprès de ma femme, l'esprit mal à l'aise sur la question de savoir si je devrais penser de la sorte je m'en étais mal tiré, en manquant l'occasion de m'assurer 100 livres comme je me le proposais avec enthousiasme, ou si je m'en étais bien tiré en perdant un avantage incertain mais en évitant aussi les ennuis et le blâme si nous avions procédé à un litige public, outre le fait que je serais alors entré en conflit avec milord qui, je l'avais oublié, avait aidé Creed pour estimer la valeur des pièces de huit à ses taux tous erronés, d'ailleurs, je prendrais soin désormais d'informer milord des taux, chaque fois qu'il s'embarquera de nouveau pour la Méditerranée.   
         
         
                                                                                                                  13 février
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            Levé. Après avoir raconté à ma femme, au lit, ce matin,les événements d'hier avec Creed, j'avais la tête et le cœur infiniment plus légers qu'avant.
            Levé donc et au bureau. Après notre réunion, à 11 heures avec Mr Coventry au bureau de la Compagnie africaine où, avec sir William Rider, comme convenu, nous avons parcouru une partie des comptes de milord Peterborough, tenus par Mr Creed et Vernatty. Bientôt descendîmes dîner, à une table que Mr Coventry tient là grâce aux 300 livres qu'il reçoit chaque année au titre d'administrateur de la Compagnie royale africaine. Très bon dîner en très bonne compagnie et excellente conversation. Puis nous remontâmes à notre travail pendant une heure jusqu'à ce qu'arrivent les membres de la Compagnie qui avaient une réunion. Nous nous quittâmes donc. Creed et moi en voiture chez Reeves, le fabricant de verres optiques, où nous vîmes d'excellents microscopes qui agrandissaient parfaitement un ciron ou un grain de sable.
            Rassasiés de cette vue, nous partîmes, avec pourtant, grande envie, si mes obligations me le permettaient, d'en acheter, à pied à la nouvelle Bourse. Après un tour ou deux et quelques bavardages, je pris une voiture pour rentrer chez moi. Au bureau après avoir vu ma femme et le travail qu'elle fit aujourd'hui à découper l'étendard de soie que nous avons ramené hier soir. Cela servira à doubler un lit ou à vingt autres usages, à notre grande satisfaction. Je mis au propre la lettre courroucée destinée à mon père. Cela lui apprendra à se fier à mes conseils à l'avenir, sans récrimination ni jalousie excessives, qui m'ennuient parce qu'elles n'ont pas lieu d'être.


                                                                                                               14 février 1664
                                                                                                    Jour du Seigneur
            Levé puis seul à l'église. Sermon paresseux de Mr Milles sur un verset choisi pour introduire le catéchisme dans sa paroisse, ce qu'il a, semble-t-il, l'intention de commencer.
            Rentré chez moi. Moments très agréables avec ma femme à dîner. Travaillé seul au bureau tout l'après-midi. Le soir, après une promenade avec ma femme dans le jardin, souper chez mon oncle Wight où se trouvait Mr Norbury. Mais mon oncle n'était pas dans son assiette. Après souper il sembla fort mécontent parce que ma tante désire retirer une marmite de cuivre qu'il s'était apparemment procurée à grand peine pour y faire bouillir la nourriture et voici qu'elle s'est mis dans la tête que ce n'est pas sain. Ce qui le contraria, mais cela nous rendit fort gais. Un peu plus tard, rentrés à la maison et, après les prières, au lit.


                                                                                                                      15 février

            Levé et emmenai ma femme dans les appartements de milord, l'y laissai puis allai à Whitehall chez le Duc. Pour la première fois, aujourd'hui il mit une perruque, mais à mon avis, ses cheveux coupés courts à cet effet, étaient très beaux en eux-mêmes avant qu'il mit sa perruque. Puis dans son cabinet où nous fîmes notre travail. Ensuite avec Mr Coventry descendîmes dans sa chambre passer quelques instants. Nous nous quittâmes et je ramenai ma femme à la maison, m'arrêtant au café puis quelque temps à la Bourse. Bonne nouvelle de deux navires richement chargés, le Greyhound et un autre, pour lesquels on s'inquiétait vivement et on avait pris une forte assurance.
            Rentré dîner. Après une heure passée avec ma femme sur ses sphères, j'allai au bureau où je fus très occupé jusqu'à 11 heures du soir. A la maison, souper et, au lit.
            Cet après-midi, sir Thomas Chamberlain vint dans mon bureau me montrer plusieurs lettres des Indes orientales, révélant à quelles extrémités sont parvenus les Hollandais, manifestant du mépris pour tous les anglais, même dans notre seule fabrique là-bas, à Surat, frappant plusieurs personnes et attachant l'étendard anglais de Saint-Georges sous le drapeau hollandais par mépris, affirmant que, quoi que disent ou que fassent leurs maîtres en métropole, ils agiront à leur guise et seront les maîtres du monde là-bas. Ils se sont donc proclamés souverains de toutes les mers du Sud. Notre roi ne pourra certainement pas le tolérer, si le Parlement lui donne de l'argent. Mais j'en doute et j'espère qu'il n'en saura rien, tant que tous ne seront pas mieux préparés.


                                                                                                              16 février

            Levé et au bureau, très occupé toute la matinée, surtout avec Mr Wood, car je le harcèle à propos de ses mâts. A midi à la Bourse un moment, puis ramenai Mr Barrow dîner avec moi. J'avais un cuissot de chevreuil rôti qui m'avait été donné hier, et donc eus un beau dîner. Il parle beaucoup de son affaire qui l'inquiète fort, le pauvre. A ce sujet j'ai pitié de lui, mais j'espère lui trouver une solution. Après son départ, au bureau occupé jusqu'à la nuit. Mon oncle Wight et Mr Maes passèrent, et après un entretien sur l'affaire de Maes, souper, très gais l'esprit préoccupé par le travail. Et donc, après leur départ jouai un peu de viole, ce que je n'ai pas fait depuis des mois, je crois, puis un moment au bureau à 11 heures du soir, à la maison et, au lit.


                                                               à suivre................

                                                                                                                   17 février 1664

            Levé et avec..............