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16 juillet 1663
Levé et envoyai des choses à la campagne, chez mon père, ainsi que deux barils d'esturgeons et une douzaine de bouteilles de vin à Cambridge pour mon cousin Roger Pepys, en cadeau. Descendis ensuite le fleuve et visitai plusieurs vaisseaux chargés de planches. Je demeurai un moment sur un appontement à regarder des calfats doubler un navire. Puis me rendis chez mon sculpteur de Wapping au sujet de ma tête de viole, et à la maison et chez mon luthier de Bishopsgate Street, il se nomme Wise et est un artisan fort habile. Ensuite à la Bourse et retour chez moi pour dîner. Puis à mon bureau réunion du Conseil au complet. Travaillai tout l'après-midi......... Rencontrai Anthony Joyce et l'emmenai avec Mr Stacey, le goudronnier, à la taverne, il me conta maintes vieilles histoires sur la conditions modeste qui était autrefois celle de milady Batten et la faillite de son premier mari, et la façon dont elle acquit sa fortune.
Le soir, la réunion terminée, je me rendis chez sir William Batten où milady et moi échangeâmes quelques paroles assez vives au sujet de la vidange de nos fosses d'aisances. Je lui dis le fond de ma pensée et nous convînmes finalement que les deux fosses seraient vidées en même temps, ce qui régla la question. Puis à la maison et au lit.
17 juillet
Lever et après avoir travaillé un peu à mon bureau, chez mon luthier avec Creed. J'entendis là le célèbre Mr Stefkins jouer admirablement, et cependant, comme chaque fois, je fus un peu déçu. L'emmenai à la taverne, il s'avéra un homme tempérant et sobre, c'est du moins ainsi qu'il m'a paru. Je lui confie le soin de surveiller la fabrication de ma viole.
Ensuite à la Bourse et à la maison où dînai avec Creed. Après le dîner sir William Warren vint me voir et nous nous retirâmes dans mon cabinet pour parler du cubage du bois, et je lui montrai que j'entendais bien cette question, et s'il m'apprit une ou deux choses, je lui en enseignai autant. Creed était parti tant avait duré ma conversation, et je me rendis donc seul, en barque, à Rotherhithe. J'allai voir ensuite sir William Penn pour deviser avec lui. Je lui dis en termes fort clairs ce que je pense de sir George Carteret et de sir John Mennes, ce qui pourrait me mettre dans l'embarras s'il s'avisait de le leur répéter, mais il m'en dit autant sinon davantage à leur sujet, ce dont je pourrais me souvenir..........
Sur le chemin du retour je fus salué par Bagwell et son épouse ( la femme pour qui j'ai de l'inclination ), ils voulurent me faire entrer dans leur petite maison, ce que j'acceptai bien volontiers, et j'embrassai sa femme. Ils avaient du vin pour moi et je vois qu'ils vivent dans une certaine aisance. Je crois aussi que sa femme est honnête et vertueuse............. Retour en barque à la maison. Il est probable qu'il pleuve de nouveau ce soir. Que Dieu nous en préserve ! Souper et au lit.
18 juillet
Lever et à mon bureau toute la matinée.Avec sir John Mennes travaillâmes un peu, mais seulement un tout petit peu. Je mangeai quelques bouchées à la maison, puis sortis pour me rendre dans divers endroits, notamment chez mon libraire, et ensuite chez Thomson le fabricant d'instruments de mathématiques pour commander une règle à cuber le bois, etc., qui tienne dans la poche, et je crois qu'il l'exécutera à mon idée. Puis dans le quartier du Temple où j'allai chercher des cravates que m'avait confectionnées Mrs Lane.......... Mrs Lane revint bientôt et comme mes cravates n'étaient pas prêtes je la quittai pour la retrouver à la taverne de la Couronne dans la cour du Palais où nous mangeâmes un poulet que je fis apporter et bûmes et nous en donnâmes à coeur joie. Elle me laissa entièrement libre de la patiner et de faire tout ce que je voulus, à l'exception de la toute dernière chose.
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Je la touchai autant que je voulus .......... J'en suis profondément honteux, et je prends la résolution de ne jamais plus recommencer.
Mais Seigneur ! comme elle a envie d'un mari, et comme elle me montre ses mains en me demandant de lui dire la bonne aventure ! Elle terminait toutes ses questions en demandant qui elle prendrait pour époux, et quand. Et je lui fis grand plaisir en lui disant que je savais qu'elle me prendrait moi. Elle dit ensuite qu'elle avait consulté tous les astrologues de la ville et qu'ils lui disaient toujours les mêmes choses : qu'elle aurait une longue vie, qu'elle serait riche et aurait un bon mari mais peu d'enfants, et une grave maladie et vingt autres choses.......
Je restai longtemps attendant que mes cravates soient prêtes, on finit par me les apporter. Je me rendis alors dans le quartier du Temple par le fleuve et de là rentrai à pied, en nage à force d'avoir batifolé avec elle, et d'avoir marché. Souper léger et au lit, craignant d'avoir pris froid.
19 juillet 1663
Jour du Seigneur
Grasse matinée fort longue occupée à de plaisantes rêveries jusqu'à l'heure de l'office. Me levai, et comme il faisait un temps affreux et que je ne pouvais donc aller à pied retrouver mon cousin Roger chez Thomas Pepys, où il est arrivé à cheval hier soir, à Hatcham, j'allai à l'office où un grave docteur fit un bon sermon. Je rentrai lire un peu, puis derechef à l'office où l'Ecossais fit un sermon ordinaire. Rentrai à la maison et à mon bureau où relus mes résolutions et rajoutai de m'abstenir de toute boisson forte...... jusqu'au mois de novembre. En prenant cette résolution je verrai comment je peux m'en passer. Dieu fasse que ma santé n'en souffrît point, et dans ce cas peu me chaut de ne plus boire ! Je commençai ensuite de lire une sotte pièce, écrite par une personne de qualité. ( ce qui à mon avis revient à dire un fat ) intitulée
L'amour à la mode.
Quand j'eus fini, à la maison où jouai du luth et chantai des psaumes jusqu'à l'heure du coucher. Puis prières et au lit.
20 juillet
Lever et à mon bureau puis à pied à Woolwich en lisant le
Faber Fortunae de
Bacon, que j'admire davantage chaque fois que je le lis. Retrouvai le capitaine Cocke et passâmes notre temps à courir pour nous occuper de nos affaires, puis l'accompagnai à pied chez lui où fîmes un fort bon dîner. J'eus grand mal à le convaincre que je ne désirais pas boire de vin, et je goûtai seulement une larme de xérès qu'il avait sorti pour sa femme. Il craint qu'elle ne soit un peu phtisique, et sa beauté commence à perdre ses couleurs. C'était du malaga qui avait certainement, à ce qu'il dit, 30 ans d'âge. J'en goûtai une larme, et c'était de l'excellent vin, plus semblable à une liqueur qu'à du vin.
Retour en barque au bureau, pris certains papiers et par le fleuve à Whitehall et St James....... et rentrai. J'étais recru de fatigue et me hâtai de me mettre au lit. Une fois au lit demandai à Will de lire et d'expliquer deux ou trois versets de la Bible en latin et le gourmandai d'avoir oublié sa grammaire. Puis m'endormis. Passai une mauvaise nuit, restai donc tard au lit le matin jusqu'à ce que j'entendisse frapper à ma porte. Je pensai qu'il était environ 8 heures, mais m'étais trompé, et me levai, pestant contre Will et la servante, jurant que j'avais envie de les jeter en bas de l'escalier à coups de pied, à quoi la servante répondit en maugréant de belle manière.
C'était mon frère qui demeura un moment pour causer. L'affaire qui le préoccupe est qu'il va construire la partie supérieure de sa maison, ce qui va lui occasionner de grandes dépenses, plus grandes qu'il ne le croit.
Mr Deane de Woolwich arrive pour me montrer les plans d'un navire où sont représentées, fort joliment les préceintes et les formes principales de la coque. Cela me plaît infiniment et je suis résolu à étudier d'arrache-pied et apprendre comment interpréter un plan en coupe........ A midi, à l'invitation de milady Batten, je me rendis chez Mr Castle, de l'autre côté du fleuve. C'est aujourd'hui qu'il amène son épouse dans sa propre maison. Je trouve là un grand nombre d'aimables vieilles dames, ainsi que milady, sir William Batten et sir John Mennes
On nous servit un bon et beau dîner, quoique simple, puis me promenai dans le jardin assez plaisant, davantage que je ne m'y attendais. Ensuite au bureau par le fleuve, réunion. Je me rendis ensuite dans le quartier du Temple au sujet de mes affaires en justice.
Retour à la maison, écrivis des lettres à mon père et à ma femme pour les prier de fêter la fête de Brampton, et d'inviter milady et ses gens. Puis à la maison, souper et au lit. J'ai eu tout le jour mal à la tête de m'être si mal reposé la nuit dernière et rendu malade à force de trop marcher hier et aussi de m'être cogné la tête contre le linteau d'une porte basse chez Mr Castle.
Aujourd'hui le Parlement à observer un jeûne en raison du temps déréglé que nous avons cet été.
22 juillet
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Lever et peu après arriva mon oncle Thomas à qui je remis les 10 livres de sa rente pour la demi-année écoulée. J'obtins aussi sa signature et son cachet, ainsi que ceux de son fils, pour la reconnaissance de nos droits sur l'hypothèque de Pigott, ce que nous avions oublié de mettre par écrit
............. Puis je sortis, me rendant ici et là pour de menues affaires, entre autres chez le barbier de mon frère Tom et me fis couper les cheveux, tandis que son petit serviteur jouait du violon. Ce n'est pas un beau garçon mais il a de fort bonnes dispositions...... et je m'amusai à voir tous les efforts qu'il fît pour obtenir un cordon de soie rouge. Me rendis chez milord Crew. Comme il n'était pas rentré j'attendis en bas avec le capitaine Ferrer........ Comme nous parlions des dames de la Cour, il me dit que lady Castlemaine était redevenue aussi puissante que jamais, que son départ n'avait été qu'un mouvement d'humeur causé par des paroles offensantes du roi, à la suite de ça elle avait commandé que son carrosse fût prêt dans le quart-d'heure et quitté la Cour pour Richmond. Le lendemain matin le roi, sous prétexte d'aller chasser, s'en fut la voir pour se réconcilier avec elle....... elle revint à la Cour et a maintenant sur le roi un ascendant plus grand que jamais, et elle obtient et fait tout ce qu'elle veut.
Pas plus tard qu'hier soir était donnée chez le duc de Buckingham une réception privée pour le roi et la reine et elle n'était pas invitée. Mais hier, chez sa tante milady Suffolk, où dînaient Mrs Jemima et milord Sandwich, on entendit milady Castlemaine affirmer :
" - Bah ! grand bien leur fasse, je m'amuserai toujours autant qu'eux. "
Elle rentra chez elle et fit préparer un grand souper, et après que le roi eut été avec la reine à l'hôtel de Wallingford, il se rendit chez milady Castlemaine et y passa toute la nuit, et milord Sandwich avec lui. Ce qui explique pourquoi milord a couché en ville ce soir, ce qu'il n'avait pas fait depuis fort longtemps...........
Je comprends aux paroles du capitaine que milord Sandwich trouve du plaisir à la campagne où il réside à présent. Veut-il parler d'une des filles de la maison, je ne sais...........
Ce fat de Ned Pickering, nonobstant toutes ses espérances et l'assistance de milord ( je suis fâché d'apprendre que milord s'était tant intéressé à sa cause ) est renvoyé de la place qu'il comptait garder dans la Maison de la reine.
Je restai dîner avec milord Crew......... Pris ensuite le chemin de la maison, et sur mon chemin m'arrêtai d'abord chez Wotton le bottier qui me dit la raison pour laquelle Harris quitte le théâtre de sir William Davenant : c'est qu'il est devenu fort orgueilleux et a exigé 20 livres de cachet exceptionnel, davantage que Betterton ou n'importe qui d'autre à chaque nouvelle pièce, et 10 livres pour chaque reprise, et d'autres choses encore, ce que sir William Davenant a refusé. Il a donc juré de ne plus jamais joué dans ce théâtre, car il compte être engagé dans l'autre. Mais à la demande de sir William Davenant le roi ne le permettra pas, car en ce cas il pourrait bien fermer ses portes, et qu'il craint que Harris ne reçoive en secret de l'argent de l'autre théâtre..............
J'allai ensuite chez mon libraire où m'attendaient mes
Waggoner, la reliure seule m'a coûté 14 shillings, mais c'est du beau travail. Je les fis transporter à la maison par un portefaix. Puis me rendis en barque à Ratcliffe où allai causer avec Cumberford le graveur. Je vis comment il procède dans son travail qui est fort délicat et minutieux. Puis je me rendis à Deptford en lisant
Le Diable est un âne de Ben Jonson. Puis j'allai voir sir William Penn que je trouvai faisant quelques pas dehors, mais il ne put rester longtemps debout. Nous rentrâmes et je restai un long moment à causer avec lui............
Rentrai à pied à la maison, comme à mon habitude. J'étais las, et après m'être entretenu avec Mr Barrow, venu me voir pour prendre congé car il part demain pour l'île de Man, j'allai me coucher.
J'ai appris aujourd'hui que les Maures ont attaqué certains ouvrages avancés de Tanger, mais milord Teviot les a repoussés et en a tué beaucoup, perdant lui-même 200 hommes.
Demain, c'est chose assurée, le roi et la reine vont à Tunbridge. Mais le roi revient avant lundi pour clore cette session du Parlement.
23 juillet
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Lever et à mon bureau puis sur des indications de Mr Acworth je me rendis à Woolwich et fis l'appel des équipages des trois vaisseaux des Indes orientales qui y sont à l'ancre, car je crois que les commissaires de marine et le vérificateur des rôles sont de mèche pour faire payer au roi la solde et la nourriture des hommes qui sont absents, et j'en trouvai fort peu à bord.........
Restai dîner chez Mr Acworth et sa femme. Il y avait là un sot, un gentilhomme de la Cour, je crois, leur parent, ce qui fit que je ne pus guère parler ni faire connaissance avec la femme d'Acworth, puis après le repas rentrai en toute hâte à la maison où trouvai sir John Mennes et sir William Batten au bureau, et à cause de leur témoignage fus forcé de donner mon consentement à l'affaire du bois de charpente du capitaine Cocke qui est parmi les plus mauvaises dont nous eussions débattu..........
On leva la séance et allai souper chez sir William Batten d'un mulet mariné, fort bonne chère,
puis à la maison et au lit.
24 juillet
Levé très tôt, bien que depuis quelque temps je sois chaque matin en retard d'une heure sur l'heure que je me suis fixée. Me rendis en barque dans le quartier du Temple où je fis mes adieux à mon cousin Roger Pepys qui quitte Londres aujourd'hui. Puis au palais de Westminster, et là à la boutique de Mrs Mitchell. Je fis apporter de la bière et du sucre et la régalai, ainsi que Mrs Hewlett sa voisine, et leurs filles, surtout celle de Mrs Hewlett, une jolie fille et que j'appelle depuis longtemps ma femme, car je trouvais autrefois qu'elle lui ressemblait. Après ces démonstrations d'amitié auxquelles je me livre pour leur donner l'occasion de dire du bien de moi et de me louer auprès de certaines personnes qui, je le sais, fréquentent de temps à autre leur boutique, je me rendis au bureau des Six Clercs où je fis établir un arrêt de suspension contre Tom Trice, que je payai 20 shillings à Wilkinson. Puis courus d'un endroit à un autre, notamment chez mon luthier où je vis la tête, qui me plaît maintenant extrêmement. Ensuite à la maison où fus immédiatement convié à me rendre chez Mr Bland invité à dîner avec Mr Povey et Gauden. On nous servit un excellent repas, il y avait abondance de tout sauf de boissons, bien qu'elles fussent variées et de qualité. Je ne bus que de la petite bière et de l'eau dont j'avalai une telle quantité que j'espère ne pas être malade.
Ils ont chez eux une parente à qui ils donnent le nom de fille, une souillon rousse, courtaude et laide, qui joue du virginal et chante, mais de si rustique façon que j'en fus lassé. Pourtant, je ne pus faire autrement que de la complimenter................ Nous reprîmes bientôt nos places car on nous servit une fort belle collation de gâteaux au fromage, de tartes crèmes et autres douceurs.
Rentrai à la maison, passai un moment à mon bureau, jusqu'à ce que Mr Hill, de Cambridge vint me déranger. Nous nous promenâmes un moment dans le jardin, puis chez moi, marchâmes de long en large dans ma salle à manger, causant de diverses affaires d'états, jusqu'à 11 heures du soir. Je lui donnai un verre de vin
Je ne répugnai point à l'entendre parler, quoiqu'il se gargarise de mots. C'est pourtant un homme qui connaît beaucoup de gens, surtout parmi les presbytériens et les indépendants. Il me donne pour certain qu'il suffit de laisser faire les évêques, et ils causeront leur propre ruine...........
Après son départ me mis au lit.
25 juillet 1663
Lever et à mon bureau où mis de l'ordre dans des papiers......... J'avais formé le dessein de me rendre aujourd'hui sur les collines de Banstead pour voir une course renommée....... j'appris que la course était reportée car les Lords siègent au Parlement aujourd'hui....... Mr Creed et moi décidâmes d'aller à Clapham chez Mr Gauden. Lorsque j'arrivai la première chose qu'il fit fut de me montrer sa maison dont la construction est presque achevée et où il vit avec les siens
( nte de l'éd. : A la mort de Gauden la maison appartint à William Hewer. Pepys s'y rendit souvent et les deux dernières années de sa vie ) Elle me paraît bien proportionnée et habilement conçue.........
Peu après on nous servit à dîner........... Après sur la proposition de Mr Gauden nous persuadâmes Mrs Gauden et sa belle-soeur de chanter......... Je pris la viole et jouai quelques airs d'un de leurs recueils, des morceaux pour viole de gambe qui parurent beaucoup leur plaire.
Nous passâmes de la sorte une ou deux heures et vers le soir nous fîmes nos adieux et remontâmes sur nos chevaux après avoir décidé qu'à la place de la course dont nous avions été privés nous irions à Epsom. Nous nous mîmes donc en route et un peu plus tard je renvoyai Will au logis pour veiller sur la maison, tandis que Creed et moi poursuivions notre chemin. La route était encombrée de bourgeois de la Cité qui se rendait à Epsom, et là quand nous arrivâmes on ne put nous indiquer aucun logement, tant la ville était comble. Mais chose plus agréable je pris la route d'Ashtead, lieu de mes plaisirs d'antan....... nous nous rendîmes chez Page le fermier...... et là trouvâmes un gîte............ parcourûmes les clos qu'il me semble si bien connaître, et je considère comme une chance de coucher ici, car cela me fournit l'occasion de refaire mes anciennes promenades.......... Puis retour à notre logis pour notre souper. On nous servit, entre autres, une magnifique jarre de crème........ Peu après au lit où, avec bien du mal, mais dans la bonne humeur, nous parvînmes à nous coucher, mais sans grand confort.
Nous étions accompagnés d'un petit épagneul qui nous a suivis tout le long de la route, un beau chien qui, je le crois, suit mon cheval et appartient à Mrs Gauden, et nous en prenons donc grand soin.
26 juillet
cornettedesaintcyr.fr Jour du Seigneur
Lever et aux sources
( Epsom ville d'eau ), où se pressaient de nombreux bourgeois de la Cité. Ils formaient la plus grande partie de la foule, quoiqu'il y eût aussi des personnes de plus haut rang. Je rencontrai nombre de gens que je connaissais.
Nous bûmes chacun deux gobelets puis nous éloignâmes. C'était fort plaisant de voir tout le monde relever ses basques, qui par-ici, qui par-là, qui dans un buisson, et les femmes de même de leur côté. Puis je me rendis à pied avec Creed à la maison de Mr Mynne...... de là à Durdans..... jusqu'au jeu de boules où j'ai vu dans ma jeunesse tant de joyeuses parties, mais maintenant il n'y a ici personne de la famille, milord Berkeley, le propriétaire, est à Londres avec les siens. Ensuite me promenai de-ci, de-là, dans le bois de Mr Mynne, revoyant avec grand plaisir les lieux........... je connus les premiers émois de l'amour, et pour la première fois le plaisir de la compagnie d'une femme
de sa conversation, celui de lui prendre la main. C'était une jolie femme.
Ensuite........... accompagnés de notre petit chien, quand nous nous retrouvâmes au milieu des noisetiers et des buissons, Seigneur ! quelle aventure que la nôtre pendant toute une heure ! Nous étions égarés et je désespérais vraiment de jamais parvenir à un sentier, n'avançant toujours que d'un fourré à un autre........ Enfin je découvris une charmante allée qui passe par le milieu du bois et le traverse de part en part, puis sortis et hélai Mr Creed que j'obligeai à me chercher de place en place. Je finis par rentrer dans le bois et le guidai par mes appels jusqu'à ma belle allée. Le petit chien était toujours avec nous et furetait par tout le bois. Dans l'allée, tout confus, éreinté et en nage Creed s'étendit à terre. Je fis de même mais pas longtemps et partis me promener dans la belle allée en relisant mes résolutions, comme je le fais tous les dimanches.
Quand j'eus fini et après m'être allongé une heure, nous rentrâmes à notre logement et payâmes notre dû. Nous remontâmes à cheval...... parcourûmes tout Epsom et observâmes les différents groupes de gens qui s'y promenaient, ne sachant guère que faire, excepté prendre les eaux le matin............ Nous sortîmes de la ville, et là notre petit chien, comme à son habitude, se mit à courir après un troupeau de moutons qui paissaient sur le pré communal, si loin que nous le perdîmes de vue, puis il tenta de nous rejoindre et revint à la barrière où il nous avait quittés, et là, le pauvre animal, se trompe de trace...... on nous dit qu'il avait traversé la ville........... Nous retournâmes une fois de plus à Ewell, fort fâchés et chagrinés de la perte de notre chien, et nous installâmes, nos chevaux et nous pour y passer la nuit. Nous prîmes à notre service des gens pour chercher notre chien dans la ville, mais personne ne put rien nous en dire.
Nous commandâmes notre souper....... un bon gigot de mouton bouilli, nous mangeâmes et allâmes nous coucher dans deux bons lits dans la même chambre, où nous dormîmes à poings fermés toute la nuit.
27 juillet
Levés vers 7 heures, après discussion décidâmes d'aller aux sources pour chercher notre chien, mais personne ne put nous en donner des nouvelles..............
Nous bûmes chacun trois gobelets......... nous repartîmes vers Ewell où nous attendait notre déjeuner, composé des restes hachés de notre dîner de la veille. Après que le maréchal-ferrant eut remis deux fers neufs au cheval de Creed, nous enfourchâmes nos montures en direction de Londres...
............. Je laissai leur cheval à Vauxhall et rentrai par le fleuve.......... Je me préparai et me changeai puis en barque pour Westminster et j'eus la grande chance d'arriver à la Chambre au moment où les membres de la Commune y pénétraient. Je me joignis à la foule et entrai avec le président............
Le discours du président des Communes ne devait rien à l'art oratoire........... Quand les lois eurent été entérinées, le roi, assis sur son trône et tenant sur ses genoux la feuille où était écrit son discours et dont il ne leva quasiment pas les yeux...... les remercia pour leurs subsides......... Il désirait que l'on ne se ressouvint point des fautes anciennes......... il veillerait lui-même à ce que ni les uns ni les autres ne fussent encouragés à menacer la paix.........
Son discours fut très ordinaire, dépourvu de toute verve et prononcé sans aucun entrain, le contraire plutôt. Sa diction était imparfaite, il répétait maintes fois ses mots, quoiqu'il lût tout son texte, ce que je fus fâché de voir, car il ne lui eût pas été bien difficile d'apprendre tout le discours par coeur.
Puis tout le monde se retira........ Je rencontrai Creed........ nous nous promenâmes au nouveau
jardin........ puis en barque à Whitehall....... et jusqu'au Pont par le fleuve, et à la maison et au lit, las et fort satisfait de mon voyage à tous égards, si ce n'est que j'ai dû débourser environ 20 shillings, mais c'était pour ma santé et j'espère en sentir les effets. La seule chose c'est que j'ai remarqué ma petite grosseur, juste à côté de l'anus, qui m'est venue d'être monté à cheval. J'ai eu la même la dernière fois que je suis monté à cheval, puis elle a disparu, et maintenant elle est revenue, environ de la taille d'un cocon de ver à soie. Cela me fait craindre une hernie, mais j'en parlerai à Mr Hollier, et je suis content de l'avoir découverte maintenant, car je peux y remédier avant qu'elle se développe.
28 juillet
Levé après avoir très bien dormi, puis à mon bureau, rédigeai mon journal des trois derniers jours. Me remis ensuite au travail avec, je l'espère, davantage d'entrain et meilleur succès grâce au repos que je viens de prendre.
A midi chez Wise au sujet de la viole qu'il fabrique pour moi, puis dîner à la maison, retour au bureau jusque tard le soir. Ma Jane vint me trouver avec son frère Will pour me supplier de reprendre mon petit valet, mais je fais la sourde oreille, et pourtant je serais bien aise de faire quelque chose pour le garçon par amitié pour elle...... Elle voudrait que j'en fisse un marin, ce que je ferais si je le pouvais, mais aucun vaisseau n'est prêt d'appareiller. La pauvre fille pleura tout le temps et ne pouvait se résoudre à partir. Elle resta environ deux heures, jusqu'à 10 ou 11 heures du soir......... le reprendre je ne veux pas...... Je rentrai chez moi, là les ouvriers vidangeaient ma fosse d'aisances, et il me paraît qu'ils vont s'en acquitter bien plus proprement que je ne le pensais. Je montai et descendis avec eux un bon nombre de fois, mais sachant que Mr Coventry devait passer demain matin, je laissai mes gens surveiller...... Puis au lit.
29 juillet
Levé vers 6 heures et vois que les ouvriers viennent de finir, et que Hannah n'est pas encore au lit, mais nettoie la cour et la cuisine, que Will vient d'aller se coucher, à mon bureau.
........... Descendis à Wapping voir sir William Warren, restai une heure ou deux à parler....... puis à la maison et chez sir William Batten. Je n'avais aucune envie de dîner chez moi où l'on n'avait pas encore entièrement nettoyé la merde de la nuit dernière, et dînai avec milady, sa fille et son fils Castle.......... Puis descendis le fleuve et me rendis à pied à Deptford voir sir William Penn, lisant en chemin une nouvelle pièce du plus haut ridicule
L'intrigant joué ( nte de l'éd. Alex. Green, jamais jouée ). A l'arsenal, demandai à mon commis Will de rester à ma place, retour à la maison et au lit.............
30 juillet
Lever, au bureau réunion........
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Un peu plus tard arrive Mr Coventry, tout seul........ après avoir un peu travaillé, à Woolwich et visitâmes l'arsenal. Sur ces entrefaites arriva sir George Carteret....... et retournâmes en barque avec lui à Deptford et nous dînâmes chez lui. Un excellent dîner durant lequel je fus fortement tenté par des vins de toutes sortes et du bon cidre français, mais je n'en bus pas une seule goutte..........
......... Sir George Carteret a marié deux de ses filles cette année, et toutes deux fort bien.
Après le dîner à l'arsenal de Deptford, mais comme nous avions le ventre plein nous ne pûmes guère travailler et nous nous séparâmes. Retour en barque avec Mr Coventry, nous nous quittâmes. J'allai dans différents endroits pour affaires et fus m'enquérir de mes cinq volumes de l'édition variorum, reliée à la manière habituelle, plutôt que l'autre qui est plus voyante, et rentrai à la maison.
La ville ne parle aujourd'hui que de la grande course à pied disputée ce jour sur les collines de Banstead, par Lee, le valet de pied du duc de Richmond, et un tuilier, coureur célèbre. Et Lee l'a battu, malgré les paris à trois contre ou quatre contre un sur le tuilier, du roi et du duc d'York.
31 juillet 1663
Levé tôt pour faire mes comptes de ce mois, et je découvre que ma fortune se monte à plus de 730 livres, plus que je n'aie jamais possédé. J'en suis satisfait bien qu'elle n'augmente que de fort peu.
Puis à mon bureau, à midi chez mon luthier qui a commencé ma viole de belle apparence. A la Bourse, rencontrai le Dr Pearse qui me fait part de sa bonne fortune d'avoir obtenu le poste de gentilhomme de la Chambre privée de la reine, et cela sans l'aide de milord Sandwich mais seulement par chance......... pour environ 60 livres alors qu'il peut la revendre à tout moment 400 livres............
Il me dit également, comme à un ami, que je me fais grand tort en me montrant si sévère dans les arsenaux et en attirant sur moi seul la rancune de tout le bureau de la Marine......... On pense, dit-il
que j'ai le dessein de gagner la faveur du roi et du Duc, lesquels ne se soucient guère de telles choses. Je recevrai autant de remerciements si je ne m'occupe de rien........... Je ferai bon usage de ses conseils
............ allai au café où arrivèrent sir John Cutler et Mr Graunt. Ce dernier me montra des lettres de sir William Petty où il dit que le vaisseau double quille qu'il a construit......... a ce mois-ci gagné un pari de 50 livres en faisant la course entre Holyhead et Dublin avec la paquebot, le meilleur navire dont le roi dispose là-bas....... On dit d'étranges choses à propos de ce vaisseau, et il conclut sa lettre sur cette déclaration ; " J'affirme seulement que le perfectionnement des voiliers repose sur mon principe : le découvre qui pourra. "
Ensuite à la maison, rencontrai Mr Rawlison qui m'apprit que mon oncle Wight a renoncé à l'achat de terres dans le Hampshire, et qu'il apprécie moins les Wight......... J'étais de retour à la maison quand il m'envoya chercher pour dîner avec Mr Moore. J'y allai donc, fis un bon dîner, mais c'est une chose étrange pour moi de refuser, et pourtant je le fis sans la moindre réticence, de boire du vin dans une taverne où l'on ne buvait quasiment pas autre chose, et où il était de surcroît excellent.
.............. Rentrai à la maison et à mon bureau, et mis en ordre toutes sortes de papiers, écrivis des lettres....... Il était presque minuit quand les yeux fatigués de fixer ce que j'écrivais, je rentrai à la maison et au lit, terminant ce mois l'esprit fort satisfait. Ma femme à la campagne, et moi-même fort estimé et en bonne voie, grâce à mes efforts, de devenir une personne d'importance, je le crois, si Dieu bénit ma diligence.
à suivre...............
1er août 1663
Me levai de..........