dimanche 22 avril 2018

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 88 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

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                                                                                                              16 février 1663

            Lever et en fiacre avec sir William Batten et sir John Mennes à Whitehall et, après notre entretien habituel avec le Duc, chez milord Sandwich. A sa demande chez sir William Wheler, descendu de son cabinet en chaise à porteurs, car il est podagre, afin de lui emprunter 1OOO livres pour les besoins de milord. Mais il m'opposa un refus très courtois, mais que si d'autres y consentaient il se porterait garant de milord pour cette somme. Ensuite au palais de Westminster, où tous s'interrogent sur la décision du Parlement, lorsqu'il siégera de nouveau dans deux jours, en matière de religion. La grande question est de savoir si les pasteurs presbytériens accepteront que les papistes obtiennent la liberté de conscience avec eux, ou s'ils préféreront qu'elle leur soit refusée aussi à eux-mêmes. Et les papistes, me dit-on s'efforcent de faire en sorte que les presbytériens consentent à obtenir leur liberté et à les laisser obtenir la leur tout comme eux, et d'aucun pense qu'ils l'obtiendront.
            Il paraît qu'un prêtre en vêtements sacerdotaux a été pris en train de dire la messe quelque part à Holbornn l'autre jour, et a été emprisonné par le secrétaire Morice comme le veut la loi, et l'on dit que l'évêque de Londres l'en a remercié.
            Ensuite dînai chez milord Crew en nombreuse compagnie. L'affaire dont je viens de parler est présentement le sujet de toutes les conversations.
            Puis chez mon avocat, Mr Philips, pour l'entretenir de plusieurs affaires, afin de mettre un terme à toutes les démarches engagées, et au Temple où, chez l'avocat général je retrouve Mr Chomley et Creed lisant à celui-là l'accord qu'il devra rédiger concernant le contrat pour la construction du môle à Tanger. La somme de 13 shillings le yard cube a été arrêtée. Mais, sur ma conscience, il n'est pas un membre de la commission en dehors des parties concernées qui entende ce qui se fait à ce sujet, ni si l'on donne trop ou pas assez.
            De là allai avec Mr Creed voir Mr Moore toujours malade et qui garde la chambre. Je demeurai un bon moment après le départ de Creed à parler de tout ce qui me venait à l'esprit, du travail ou autre chose. Puis rentrai voir sir William Penn et jouai aux cartes avec lui, sa fille et Mrs Rooth. Puis un petit moment à mon bureau, et à la maison, et au lit.


                                                                                                              17 février

            Lever et à mon bureau réunion toute la matinée. Ma femme étant allée à Chelsea avec son frère, sa belle-soeur et Mrs Lodum assister à la fête de l'école où travaille Mary Ashwell, à midi j'amenai chez moi Mr Pett pour dîner. Nous eûmes une longue conversation sur les affaires du bureau, et nous nous séparâmes. Avec bien des difficultés, car il pleuvait très fort, ce qui ne s'était pas produit depuis bien longtemps car il gelait depuis un bon moment, je trouvai un fiacre et me rendis dans le quartier du Temple où je parlai avec Mr William Montagu du dessein qu'a milord d'emprunter de l'argent. Pris ensuite une barque, ce que je n'ai pas fait depuis longtemps à cause du froid, pour Westminster voir sir William Wheler que je trouve chez lui occupé avec les commissaires aux égouts.. Mais je lui parlai de l'emprunt que veut faire milord, et me rendis chez milord Sandwich pour lui rendre compte de mes démarches. Je le trouvai jouant aux cartes avec Pickering, mais il finit promptement et nous restâmes seuls. Après avoir écouté mon rapport il me dit avoir un grand secret à me confier que ne connaissait et ne devait connaître âme qui vive. C'était le suivant : hier matin Eschar, serviteur de Mr Edward Montagu, vint le voir de la part de son maître accompagné de plusieurs clercs du Trésor, afin que milord signât leurs registres au sujet de l'argent de l'ambassade. Milord, fort civilement, exprima son désir de n'en rien faire avant d'avoir parlé à son maître en personne. Dans l'après-midi, alors que milord et milady Wright jouaient aux cartes dans son cabinet, voilà qu'arrive Mr Montagu. Il demanda à entretenir milord dans l'encoignure de la fenêtre de sa chambre, et commença à l'accuser de la plus grande ingratitude du monde : milord qui lui devait son titre de comte, son titre de la Jarretière, ses 4 000 livres de rente et sa position dans le monde, s'employait à présent à lui causer tout le déshonneur qu'il pouvait. Il dit ensuite à milord que s'il disait tout ce qu'il savait de lui, il pourrait faire bien des choses. En un mot, il alla chercher contre milord tout ce que l'on pouvait dire de mal et usa pour l'exprimer des termes les plus vils. A quoi milord répondit avec beaucoup de flegme, se justifiant tout en s'efforçant de modérer l'emportement de son cousin. Cette humeur est surprenante de sa part lorsque l'on sait qu'il doit tout ce qu'il possède au monde à milord et qu'il est maintenant tout ce qu'il est par son entremise et sa faveur. Mais milord s'abstint d'envenimer la querelle, sachant qu'il n'avait rien à gagner à ce que le monde vît une désunion dans sa famille et, au contraire, apaisa Mr Montagu, tant et si bien qu'il se mit à pleurer. Et après une longue conversation, son cousin lui dit entre autres, qu'il y avait en ville une certaine personne, et il me nomma, qui l'avait desservi, et que s'il venait à en être certain il lui donnerait la bastonnade. Milord lui promit que si à l'examen des comptes il constatait qu'il ne restait peu de fournisseurs impayés, il signerait les registres. Mais dans le cas contraire il ne pourrait prendre une trop grosse dette sur lui. Alors, aujourd'hui, il lui a envoyé ses comptes et une lettre par laquelle il l'assurait qu'il n'y avait pas plus de 200 livres d'impayés. Et milord a donc signé les registres du Trésor.                                                                                                       le1hebdo.fr  
Image associée            D'après tout cela j'entends fort bien quel coquin il est et ce que milord pense et pensera de lui à l'avenir, car il m'a dit qu'il avait aussi agi ainsi envers son père, milord Manchester, et toute sa famille. Qui pis est il a insulté et dans ses discours il insulte tous les jours milord le chancelier dont il a perdu la faveur. Il n'a aucun ami à part sir Henry Bennet, je connais les débuts de cette amitié, cela uniquement parce qu'ils ont les mêmes plaisirs et fréquentent la même compagnie, portent le même intérêt aux choses viles et à la luxure, que Dieu le leur pardonne ! Mais il se flatte, d'après des promesses de sir Henry Bennet, de pouvoir obtenir une pension de 2 000 livres par an et d'être fait comte. Milord me dit qu'il s'attendait à quelque provocation de sa part, mais qu'il n'y avait pas grand chose à craindre car sa réputation est au plus bas depuis son duel avec Mr Chomley, tout simple et insignifiant qu'il soit, le brave et se pavane devant lui en présence de la reine, au grand amusement et au vu de toute la Cour.
            Et il a retenu milord à la fenêtre, l'insultant et le bravant plus d'une heure durant, alors que milady Wright était à côté, mais milord me dit qu'elle n'a pas pu entendre toutes ses paroles quoiqu'elle sût fort bien de quoi ils parlaient. Elle en avait suffisamment entendu. Il me commande donc de considérer cela comme le plus grand secret du monde et m'ordonne de ne rien dire contre Mr Montagu de crainte que j'aie à souffrir de sa fureur.
            Après qu'il m'eut dit cela retour en fiacre à la maison et trouvai ma femme couchée, sa belle-soeur dans sa chambre avec elle. Elle n'avait pas pu rester à la fête tant ses menstrues la font souffrir, ce dont j'eus bien du regret. Nous envoyâmes chercher la viole de gambe de sa belle-soeur dont elle joue fort bien pour une jeune femme. Mais elle déçoit fort mon attente, non seulement pour son jeu, mais pour sa disposition d'esprit car elle est, je le vois, une coquine fort subtile et rusée qui donnera bien du tourment à son mari, toute jeune qu'elle est, alors que je la prenais jusque-là pour une enfant,  innocente. Je jouai également, cela faisait longtemps que je n'avais pas touché d'instrument. M'interrompis finalement pour aller à mon bureau, craignant de me laisser gagner par mon trop grand intérêt pour la musique, de retomber dans mon ancienne passion pour elle, et donc de négliger mon travail, comme par le passé.
            Puis à la maison et, au lit.
            Rentrant de chez milord Sandwich j'ai accompagné Mr Pickering dans le quartier du Temple. Il me dit que l'histoire de l'avorton tombé sur le parquet lors du bal à la Cour est absolument vraie et que le roi l'a pris dans son cabinet une semaine plus tard et l'a disséqué et à déclaré en plaisantant qu'à son avis il devait être âgé d'un mois et trois heures et que, quoi qu'en pensent certains, il était le plus grand dans cette affaire, car il y avait perdu un sujet.
            Il me dit également que la seconde histoire, celle du mariage de milady Castlemaine et de la Stuart est tout à fait vraie, et que c'était pour que le roi couchât avec la Stuart, ce que tout le monde croit. Il me dit que sir Henry Bennet est catholique et que toute la Cour a changé en mal depuis son arrivée, car tous le craignent, et que la Cour de la reine-mère est maintenant la plus grande de toutes et que notre propre reine a peu ou pas de compagnie qui vienne la voir. Et je sais aussi que c'est parfaitement vrai, et cela me fait du regret.


                                                                                                              18 février

            Lever et laissé ma femme malade, comme hier soir, au lit. Au bureau toute la matinée à faire les comptes avec le capitaine Cocke pour les 500 tonnes de chanvre amenées de Riga et qu'il a achetées avec ses associés. Je trouve bien des choses utiles à connaître. Puis à midi allai dîner emmenant Mr Hayter pour ne pas perdre de temps, et l'après-midi seuls au bureau lui et moi finîmes les comptes concernant les dépenses extraordinaires de la marine, qui ne relèvent pas en propre de la Marine depuis l'avènement du roi et jusqu'à Noël dernier, et une fois retranchés tous les frais annexes, je trouve que les véritables dépenses de la marine, jusqu'à cette date s'élèvent à 374 743 livres par an. Je m'arrêtai de travailler vers 11 heures du soir et rentrai me coucher, presque épuisé.
            Aujourd'hui nouvelle réunion du Parlement depuis sa longue prorogation. Mais je ne sais rien de ce que l'on y a fait n'étant pas sorti de toute la journée.


                                                                                                               19 février 1663
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Image associée            Lever et à mon bureau fort occupé toute la matinée. Ma femme pas encore rétablie dînai donc à son chevet. Nous nous sommes presque querellés quand j'ai parlé de retarder la venue de Miss Ashwell, car ma femme a cru que j'avais dans l'idée de prendre Pall, ce qui est faux quoique j'aimerais bien qu'elle fût digne de venir chez nous. Puis à mon bureau bientôt en réunion, la première depuis fort longtemps, nos heures ayant changé car le Parlement a recommencé de siéger. La réunion achevée, à mon bureau jusqu'à minuit à établir des copies de dépenses extraordinaires de la marine, dont une à envoyer à Mr Coventry tôt demain matin. Puis à la maison et au lit, fatigué, somnolent et la vue commençant à baisser d'avoir si longtemps regardé du papier blanc à la lueur d'une chandelle.
            J'ai lu ce jour le discours du roi, hier, au Parlement. Il est fort court et peu civil, et les informe simplement qu'il désire obtenir le pouvoir d'accorder la tolérance aux consciences scrupuleuses sans pour cela souffrir la moindre atteinte à la discipline de l'Église selon l'Acte d'uniformité; et il dit la même chose pour les papistes mais se déclare opposé à ce qu'ils soient jamais autorisés à occuper des charges ou des fonctions de confiance dans le royaume. Mais Dieu m'est témoin qu'ils sont trop nombreux à en avoir.


                                                                                                                 20 février
            Lever et par le fleuve à Deptford avec le commissaire Pett. Visitai l'arsenal et fis appel, ce qui me donna l'occasion d'être fort satisfait  de notre nouveau registre du personnel qui est de mon invention.............  après avoir avancé nos affaires en canot jusqu'au bateau de plaisance. Je manquai être malade en route car le vent était très frais. Mais tout fut très agréable et c'était la première fois que je montais sur cette sorte d'embarcation. Fûmes conduits à la pointe du Cocu, puis en canot jusqu'au quartier du Temple, sous une pluie battante. Ne trouvai point mon cousin Roger avec qui je voulais m'entretenir et rentrai à pied et à mon bureau jusqu'à l'heure du coucher, puis à la maison et, au lit.


                                                                                                                  21 février

            Lever et à mon bureau où se trouvait déjà sir John Mennes, toute la matinée à répondre à des requêtes et m'occuper d'autres affaires. Vers midi entre un homme, comme s'il venait pour une affaire ordinaire et qui me montre une injonction de la cour de l'Echiquier, qui s'appelle une ordonnance de prise de corps, et me dit que je suis son prisonnier. Il s'agit de notre affaire avec Field. J'eus l'impression que mon coeur se glaçait de penser que nous n'étions pas en sûreté lorsque nous travaillions aux affaires du roi. Je lui dis comment et au service de qui nous étions employés, et le priai de montrer quelque considération, et comme il voyait que nous étions occupés il accepta et se retira pour une heure. Pendant ce temps sir John Mennes se rendit à la Cour pour voir ce qu'il pourrait faire de là-bas. Et l'avoué qui nous représente contre Field arriva à l'improviste et me dit qu'il irait payer les droits au tribunal et mettrait un terme à cette affaire. Il partit s'en occuper et je demeurai dans mon petit cabinet jusqu'au moment où, un peu plus tard, l'homme et quatre de ses acolytes vinrent s'enquérir de se que je voulais faire. Je leur dis d'attendre jusqu'au moment où je recevrais des nouvelles du roi ou de milord premier baron de la cour de l'Echiquier que j'avais entre-temps fait tous deux aviser. Ils se concertèrent et me dirent que si je voulais bien promettre de ne pas quitter la maison, ils iraient se restaurer puis reviendraient pour connaître la réponse que j'aurais reçue.
            Après leur départ j'allai dîner chez moi, où arriva à l'improviste Mr Hawley qui dîna avec moi.
            Avant même que j'eus fini mon repas les baillis revinrent avec le sergent de ville, frappèrent à la porte du bureau mais ne me trouvèrent point. Moi, jugeant à ce que j'entendais la manière dont ils se conduisaient, je me gardai bien de leur faire savoir où je me trouvais. Ils restèrent donc là à frapper et à demander après moi.
            Bientôt, à la fenêtre de mon petit salon, se montre Mingo, valet de sir William Batten, pour me dire que ses maîtres m'invitaient à venir chez eux en passant par le logement de sir John Mennes, ce qui était impossible. Je passai, cependant, au moyen d'échelles, par dessus la palissade qui sépare nos deux cours et parvins ainsi jusqu'à leur maison. où je les trouve fort inquiets, à juste titre, pour moi, particulièrement milady.
            Les drôles restèrent plantés dans la cour, lançant des jurons en compagnie d'un ou deux sergents de ville. A un moment nous les enfermâmes dans la cour, pour les laisser sortir un peu plus tard, et ainsi occupés tout l'après-midi, sans les laisser me voir ni leur montrer où j'étais. Une fois je montai tout en haut de la maison et depuis une des fenêtres je parlai à ma femme qui se tenait à l'une des nôtres. Je fis cela par plaisanterie, mais j'étais affligé, je crois, de penser combien il serait triste que je fusse pour de bon prisonnier. Puis arrive sir John Mennes qui, selon son habitude très caractéristique, nous dit qu'il ne peut nous être d'aucune utilité, mais que milord le chancelier s'étonne  que nous n'ayons pas envoyé les marins leur frotter les côtes, ce que nous eussions fait bien volontiers si cela avait été possible sans être vus. Ce que fit le capitaine Grove......... qui fut amené à tirer l'épée contre l'un d'eux..........
            Bientôt arriva Mr Clerke notre avoué qui nous apporte une décharge du procureur, pourvu que nous payions les frais de l'ordonnance, cinq marcs, et leur dû à ces drôles qui ont nom d'huissiers, mais ce sont les plus infâmes coquins que j'aie jamais vus. Il leur montra sa décharge, ce qui sembla les satisfaire, et ils s'en allèrent chez le procureur pour recevoir leur argent. Avant leur départ sir William Batten et milady leur lancèrent des quolibets, mais les coquins leur répondirent avec impudence, jurèrent qu'ils reviendraient et me traitèrent de coquin et de rebelle, et qu'ils amèneraient le shérif jusque dans leur maison..........                                                            abcgallery.com
Image associée            Bon, ils s'en allèrent enfin, et j'en profitait, comme on me le conseillait, pour sortir et me promener dans la rue, me montrer aux voisins, afin qu'ils n'allassent pas penser que l'affaire est pire qu'elle ne l'est. Rencontrai les capitaines Taylor et Bowry dont nous avons affrété le vaisseau pour Tanger. Nous marchâmes jusqu'à Cornhill parlant de leur affaire et après avoir discuté leur prix nous parvînmes à un accord. Ils insistèrent ensuite pour m'emmener à la taverne où je bus un verre de vin et parlai un peu du fret d'un navire qui pourrait me rapporter quelque argent. Puis je rentrai chez sir William Batten où se trouvaient sir John Lawson et quelques autres. La conversation ne roula que sur le déshonneur qui rejaillit sur notre bureau pour s'être trouvé exposé à tout cet embarras, et dont il faut le laver.
            Bientôt arriva Mr Clerke qui dit avoir payé les droits du tribunal pour l'ordonnance, mais que les hommes n'accepteront pas moins de 5 livres pour leurs frais, ce qu'il refuse de leur donner. Il me conseille donc de ne pas sortir jusqu'à ce qu'il revienne ou m'envoie une lettre lundi, ce qui fait que je ne pourrai pas me rendre à Whitehall chez le duc d'York, comme je le devrais.
            Je restai donc là jusqu'à dix heures du soir, fâché et cependant content de voir tout le monde, ........ prendre mon parti. A la maison, mes gens sont fort étonnés des événements, mais cela ne me fait guère souci, car il ne s'agit pas d'une chose qui touche ma personne ou mes biens propres.
           Sir William Batten m'a dit qu'aujourd'hui a été ordonné que tous les membres de la Chambre devaient souscrire à l'abjuration du convenant, ce qui va créer de l'embarras à certains, pense-t-on.
            On a aussi présenté un projet de loi pour interdire le port d'étoffes et de drap fabriqués à l'étranger, et il est probable qu'il sera adopté.
            Parmi les sujets abordés ce soir, milady a parlé de l'affaire du commissaire Pett qui aurait traité le roi de " bâtard " et d'autres noms injurieux. Sir William Batten nous dit qu'il avait fait au Duc ou à Mr Coventry un rapport à ce sujet et sur d'autres faits semblables par écrit et sous serment, ce qui m'a causé et de la honte et du regret. Mais je vois bien qu'il y a entre eux une haine implacable que rien ne peut changer. Et sir John Mennes, ce vieux fat, se réserve de s'en servir, ce qui me tourmente. ..........  A mon bureau je rédigeai le journal de ce jour, puis à la maison l'esprit fort troublé, non pas véritablement affligé par les événements, mais honteux, pour moi un peu, et pour l'honneur du bureau bien davantage. Ensuite à la maison et, au lit.


                                                                                                                   22 février
                                                                                                  Jour du Seigneur
            Grasse matinée et pas sorti de la journée mais après dîner chez sir William Batten et sir William Penn. On a beaucoup causé du tapage et du scandale d'hier. Mais ce qui m'inquiéta le plus c'est que sir John Mennes revint de la Cour le soir et au lieu de m'en rapporter un grand réconfort, mais je ne m'attendais pas à mieux de sa part, il me dit que le Duc et Mr Coventry ne sont guère préoccupés par cette affaire. Puis le soir, fort mécontent, fis mes prières et, au lit.


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Image associée            Levé de bonne heure et, n'osant emprunter les rues, rejoignit discrètement Whitehall par le fleuve, Griffith m'accompagnant de crainte qu'il ne m'arrive quelque chose. Retrouvai Mr Coventry et comme à l'accoutumée me rendis chez le Duc, le second de mes commis étant arrivé. Mais il ne fut point question de notre affaire, le Duc étant appelé par le roi. Ce matin milord Windsor, de retour de Jamaïque, est venu baiser la main du roi, il lui parla de sa santé mauvaise durant tout le trajet mais qui s'améliorait depuis son retour, Il raconta au Duc la prise du fort de Santiago sur l'île de Cuba, par ses hommes. Mais, dans l'ensemble, je pense qu'il s'est conduit comme un jeune lord, et ne supportait pas de servir hors de son pays où il aurait pu mener une vie de plaisirs, car je trouve honteux que cet après-midi même, le premier jour qu'il passait en ville, on l'ait vu au théâtre.
            Puis chez milord Sandwich, malade bien qu'il soit sorti deux ou trois jours. Il s'est fait saigner ce matin, mais j'espère qu'il n'a qu'un rhume.
            Je fus très contrarié, et grande était mon appréhension, que milord me demandât de me rendre au palais de Westminster, à la porte du Parlement, pour affaire et d'aller voir sir William Wheler. Je lui dis que j'irais volontiers mais n'osais de crainte d'être arrêté par ces coquins. Mais il me fallut aller jusqu'à Whitehall pour embarquer et accoster sous la Tour de la Porte de Fer, et je dus emprunter le chemin de derrière pour gravir la petite colline de la Tour. Et le visage caché dans mon manteau j'emmenai avec moi un des bateliers et demeurai à l'abri d'un mur du nouveau bâtiment, derrière notre jardin pendant qu'il allait voir si quelqu'un était posté devant la porte des fournisseurs par laquelle nous passons pour entrer dans notre jardin. Il n'y avait qu'un petit garçon fort sale, mais je me mis à trembler et suer à l'idée qu'il s'agît d'un piège. Mais il n'y avait personne et je parvins sain et sauf dans le jardin. Comme j'ouvrais la porte de mon bureau, quelque chose qui était derrière tomba, ce qui me fit sursauter. Dieu sait dans quel déplorable état je serais si je me trouvais réellement dans la situation de bien des pauvres gens endettés, et je devrais donc bénir le ciel de n'avoir pas de raison véritable de m'inquiéter, et m'efforcer de me garder par ma bonne conduite et la gestion prudente de mes affaires de tomber dans de telles conditions.
            A la maison, dîner avec ma femme et Mr Creed qui se trouvait là. Je trouvai un mot que Mr Clerke avait laissé en mon absence pour m'informer que j'étais libre et qu'il avait interrompu toutes les actions en justice. Et j'en fus très content, et il me vint tout de suite à l'esprit une pensée frivole, celle d'aller me divertir pour me mettre du baume au coeur. Je décidai donc d'emmener ma femme voir une pièce à la Cour ce soir, d'autant plus que c'est mon anniversaire. J'ai aujourd'hui trente ans, le ciel en soit loué !
            Pendant que ma femme s'habillait Creed et moi allâmes voir quelle pièce on jouait aujourd'hui, et il s'avéra que c'était " La demoiselle dédaignée ". Mais le ciel m'est témoin que, bien que me sachant hors de danger, je n'osais passer par la rue, mais pris par le jardin pour sortir par la rue de la Tour !
            Nous partîmes en fiacre pour le Théâtre du Duc où nous vîmes une bonne représentation, quoique la pièce ne vaille pas grand chose, fort content de voir la petite fille danser costumée en garçon, car elle a de bien jolies jambes, à part qu'elle a les cuisses arquées, comme apparemment toutes les femmes. La pièce terminée, en fiacre à la Cour où nous trouvâmes de bonnes places pour voir " Le Galant furieux ", représenté par la troupe du roi. Mais la pièce était mal jouée et si mauvaise que je n'en ai jamais vue de pire ou presque, et si peu en rapport avec le titre que, du début à la fin, je fus incapable et le suis toujours de dire avec certitude lequel des personnages est le galant furieux. Le roi, pendant toute la durée, eut l'air fort mécontent.............. Milady Castlemaine valait bien d'être vue ce soir, ainsi que la petite Stuart...........
            Après la représentation, en fiacre rentrâmes chez nous vers minuit, sans encombre. Comme j'avais l'esprit fort peu satisfait de ces deux pièces, j'étais en les voyant affligé de me dire que j'avais dépensé tant d'argent et m'étais aventuré à enfreindre mes résolutions, ce que je regrette, béni soit le ciel ! et pourtant mon naturel me porterait volontiers à continuer de m'adonner à ce plaisir. Je réglai mon amende sur le champ, mais j'espère la regagner en renonçant à deux pièces à la Cour pour celle du Théâtre Royal, ou bien à celle que je dois voir à Pâques, la dernière parce que le Carême va commencer, je fus d'autant mieux consolé d'avoir gaspillé tant d'argent.
            Puis au lit.
             Aujourd'hui on m'a dit que milady Castlemaine s'était fait offrir tous les cadeaux de Noël que le roi avait reçus des pairs, ce qui est une chose tout à fait abominable, et qu'au grand bal elle portait bien plus de bijoux que la reine et la duchesse mises ensemble.


                                                                                                                       24 février

            Dormis profondément jusqu'à 8 heures, puis fus éveillé par Mr Clerke qui venait me consulter sur l'affaire Field. Je le fis venir à mon chevet pour parler et, selon lui, nous allons l'étriller.
            Puis lever et au bureau, et à 11 heures en barque à Westminster. Vu sir William Wheler au sujet de l'emprunt de milord, puis chez milord toujours malade mais va se rétablir, je n'en doute pas.
            Il me dit, entre autres, avoir entendu que les Communes ne se rallieront pas à la récente déclaration du roi et ne concéderont pas que les papistes puissent avoir quelque possibilité que ce soit de relever la tête en Angleterre, ce à quoi l'on s'attendait à la Cour, me fait comprendre milord. Retour à la maison et, après un mauvais dîner, car je n'étais pas attendu, au bureau. Réunion et avec le capitaine Cocke nous examinâmes les comptes concernant son chanvre, jusqu'à 9 heures du soir. Puis, ne me sentant pas très bien, à la maison, souper et, au lit. Mon indisposition, inflammation et démangeaisons étant revenue il me faudra penser à suer comme la première fois.


                                                                                                                      25 février

            Lever et à mon bureau où je terminai les comptes avec le capitaine Cocke. A midi à la maison pour dîner. Ma femme venait d'entrer après avoir dépensé environ 4 livres pour diverses choses en vue du carême. L'après-midi dans le quartier du Temple, chez mon frère, à la Garde-Robe, chez Mr Moore et ailleurs pour de menues affaires. Le soir retour à mon bureau, puis souper et, au lit.
            Les Communes au Parlement, dit-on, sont fort désireuses de s'en tenir à l'Acte d'uniformité, et n'accorderont point la tolérance aux papistes, ce que le parti de la cour tente d'obtenir, ni aux presbytériens.


                                                                                                                26 février 1663
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Résultat de recherche d'images pour "holbein henry viii"            Lever et bu un verre de vin d'armoise avec sir William Batten à la taverne de Steelyard, puis au Parlement en barque. Il entra et je me promenai dans le vestibule. On ne parle que de l'écart considérable entre les voix de ceux qui sont pour la tolérance aux papistes et aux presbytériens, et celles de ceux qui sont contre, ces derniers l'ayant emporté par 200 voix contre 30. Et c'est chose admirable de voir comment le roi veut donner de lui-même l'image d'un protestant inflexible et d'un bon fils de l'Église, tout en voulant paraître disposé à accorder des libertés à ces gens à cause de sa promesse de Breda. Cependant tout le monde est persuadé que le roi ne désire pas du tout que cette liberté leur soit accordée.
            Puis chez milord qui, me dit-on, a de nouveau de la fièvre, ce dont je suis désolé. Ensuite avec Creed à la table d'hôte de la Tête du Roi. Nombreuse compagnie, notamment un jeune godelureau récemment arrivé de France qui se gargarisait de son français, lequel ne m'a point paru fort bon, quoique suffisant pour qu'il se crût pour longtemps un homme très sage. Rentrai en barque à la nouvelle Bourse à la Tour. Réunion au bureau, puis écrivis des lettres jusqu'à 11 heures du soir.
            Inquiet de ce que ma femme ne soit pas rentrée de Chelsea où elle est allée voir la pièce donnée par l'école où travaille Miss Ashwell. Mais elle a fini par rentrer, apparemment en barque, dans le froid et l'obscurité. Mais rentrée saine et sauve et me dit avoir beaucoup aimé le jeu et le maintien de Miss Ashwell, ce dont je suis heureux.
            Puis à la maison souper et, au lit.


                                                                                                          27 février

           Lever et à mon bureau où plusieurs personnes me vinrent voir pour affaires. Vers 11 heures avec le commissaire Pett à pied à l'hôtel des chirurgiens. Nous étions tous invités avec la promesse d'y dîner. On nous conduisit dans l'amphithéâtre où le conférencier, le Dr Terne, le grand maître et toute la corporation firent leur entrée en un fort beau cortège. Quand tous furent installés il commença sa leçon, la seconde qu'il donnait sur les reins, les uretères et la verge. Ce fut fort bien.. A la fin du discours nous nous rendîmes dans la grande salle. Il y avait beaucoup de monde et nous fîmes un excellent dîner, en bonne et savante compagnie, comprenant maints docteurs en médecine, et l'on nous traita avec un respect extraordinaire.
            Entre autres, nous bûmes à la santé du roi dans une coupe dorée offerte par le roi Henri VIII et ornée de clochettes que chacun est tenu de faire tinter en agitant la coupe après l'avoir entièrement vidée. Il y a aussi dans la salle un excellent portrait de ce roi peint par Holbein, avec les membres de la corporation agenouillés devant lui pour recevoir la charte.
            Après le dîner le Dr Scarburgh emmena certains de ses amis, auxquels je me joignis, pour voir le corps en privé. Il s'agissait d'un vigoureux gaillard, un marin pendu pour vol. Je touchai le cadavre de ma main nue. C'était froid, et je trouvai sa vue fort désagréable.
            Il paraît qu'un certain Dillon, issu d'une grande famille, a été, après qu'on eût fait bien des efforts pour le sauver, pendu cette session avec une corde de soie, préparée de ses mains, et non point uniquement pour des raisons d'honneur, mais parce que, semble-t-il, étant souple et lisse, cette sorte de corde glisse aisément, serre de près et tue, par strangulation, immédiatement. Alors que plus raide ne serre pas d'aussi près et la personne peut mettre un certain temps à mourir. Mais tous les docteurs avec qui j'étais à table affirment que la pendaison ne fait aucunement souffrir, car elle arrête la circulation du sang et par conséquent toute sensation et tout mouvement instantanément.
            Nous nous rendîmes ensuite dans une salle interdite au public, c'est apparemment là que les corps sont préparés, où se trouvaient les reins, les uretères, la verge, les testicules et les canaux séminaux sur lesquels portait la leçon d'aujourd'hui. Et le Dr Scarburgh, à ma demande et à celle de l'assistance, expliqua fort clairement la maladie de la pierre et son opération, et répondit à toutes les autres questions qui me vinrent à l'esprit, et il nous parla aussi de la nature de la semence et de la façon dont elle parvient à la verge, et comment l'urine arrive à e la vessie en passant par les trois peaux ou membranes, exactement comme ce pauvre Dr Holliffe me l'avait exposé autrefois.
            Ensuite, fort satisfait, rejoignis le reste de la compagnie et entendis d'intéressantes conversations. Puis assistai à la leçon de l'après-midi sur le coeur, les poumons, etc. Quand ce fut fini nous prîmes congé et rentrâmes tous deux au bureau........
            Restai tard, puis chez sir William Warren pour parler d'une affaire. Je trouve sir John Mennes qui me parut fort éméché. Il me prit en particulier pour me dire qu'étant passé aujourd'hui chez milord le chancelier, il avait appris que le grand sceau allait prochainement être apposé sur la nomination de sir William Penn comme contrôleur, en quelque sorte pour lui être associé, puisque la charge est trop lourde pour un homme seul. Ce qui le rend fou de rage et le fait jurer de renoncer à sa charge, et pester de plus belle contre sir William Penn.
            Je fis de mon mieux pour augmenter son emportement et cela me fit grand plaisir de l'entendre pester contre l'autre, car je vois ainsi clairement qu'il est peu probable qu'ils soient jamais grands amis puisqu'il tempête contre lui au sujet de sa maison, de son jardin, Dieu sait quoi encore. Pour ma part j'espère, une fois tout cela terminé, être à l'abri de leur envie en me consacrant à mon travail. C'est merveille de voir comment ce vieillard ce pavane et jure qu'il est aussi facile de comprendre sa charge que de casser une noix ! Et même plus facile, dit-il à milord le chancelier, car des dents il n'en a plus, et qu'il l'entend mieux que quiconque en Angleterre, et qu'il ne permettra jamais que l'on écrive dans les annales qu'il était incapable de s'acquitter seul de ses fonctions. Et pourtant, Dieu sait qu'il ne le peut davantage qu'un enfant.
            Je suis content de voir de tels différends les opposer sans que j'aie rien à craindre. Cependant j'espère qu'en dépit de cela le service du roi s'accomplira comme à l'accoutumée; car je ne voudrais point qu'il eût à souffrir de la moindre de nos querelles privées.
            Ensuite à mon bureau, puis à la maison, souper et, au lit.


                                                                                                                      28 février 1663

            M'éveillai avec une grande douleur dans l'oreille droite, j'y suis sujet apparemment, car j'ai pris froid. Lever et au bureau en réunion toute la matinée. Dînai avec sir William Warren par hasard, car nous sommes tous les deux en affaires au sujet d'un contrat pour l'achat de mâts de Nouvelle-Angleterre.
            Puis dans le quartier du Temple rencontrer mon oncle Thomas, mais mon cousin Roger n'étant pas rentré je pris une barque et me rendis à Westminster. Je le trouvai l'après-midi au Parlement. La Chambre ce midi a rencontré le roi pour lui exposer les raisons de son refus d'accorder la tolérance aux presbytériens et aux papistes, ce qu'il reçut avec un grand contentement et un plaisir apparent............
            De là chez milord Sandwich que son rhume continue d'incommoder. Parler de différentes affaires.........
             Puis ensemble au Temple, mais comme mon oncle était parti, nous nous séparâmes et je rentrai à pied à mon bureau. Et à 9 heures dînai fort bien d'une joue de boeuf préparée et cuisinée par ma femme. Ensuite de nouveau à mon bureau jusqu'à 11 heures du soir à faire mes comptes du mois écoulé. Et il apparaît que la somme est la même que la dernière fois, c'est-à-dire 640 livres. Puis à la maison et, au lit.
            Sur le chemin du retour me suis arrêté à Whitehall et au Sceau privé j'ai vu l'abrégé de la lettre patente qui fait de sir William Penn l'assistant du contrôleur, comme me l'a dit sir John Mennes hier soir. Je dois m'efforcer d'empêcher cette affaire.



                                                                                 à suivre.............

                                                                                                                  1er Mars 1663

            Lever et................
                             






                                                                     


                                                                                                     

      

jeudi 19 avril 2018

Nevermore Clair de lune Green Paul Verlaine ( Poèmes France )


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                                                  Nevermore

            Souvenir, Souvenir, que me veux-tu ? L'automne
             Faisait voler la grive à travers l'air atone,
             Et le soleil dardait un rayon monotone
             Sur le bois jaunissant où la bise détonne.

            Nous étions seul à seule et marchions en rêvant,
            Elle et moi, les cheveux et la pensée au vent.
            Soudain, tournant vers moi son regard émouvant :
            " - Quel fut ton plus beau jour ? " fit sa voix d'or vivant,

            Sa voix douce et sonore, au frais timbre angélique.
            Un sourire discret lui donna la réplique,
            Et je baisai sa main blanche, dévotement.

            - Ah ! les premières fleurs, qu'elles sont parfumées !
            Et qu'il bruit avec un murmure charmant
            Le premier Oui qui sort de lèvres bien-aimées !



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                                                Clair de lune
                                                                                                                         discogs.com
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            Tout en chantant sur le mode mineur
            L'amour vainqueur et la vie opportune,
             Ils n'ont pas l'air de croire à leur bonheur
             Et leur chanson se mêle au clair de lune.

            Au calme clair de lune triste et beau,
            Qui fait rêver les oiseaux dans les arbres
            Et sangloter d'extase les jets d'eau, 
            Les grands jets d'eau sveltes parmi les marbres.



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                                                          Green
                                                                                                                                             colnect.com
Image associée            Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches
             Et puis voici mon coeur qui ne bat que pour vous.
             Ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches
             Et qu'à vos yeux si beaux l'humble présent soit doux.

            J'arrive tout couvert encore de rosée
            Que le vent du matin vient glacer à mon front.
            Souffrez que ma fatigue à vos pieds reposée,
            Rêve des chers instants qui la délasseront.

            Sur votre jeune sein laissez rouler ma tête
            Toute sonore encor de vos derniers baisers ;
             Laissez-la s'apaiser de la bonne tempête,
             Et que je dorme un peu puisque vous reposez.


                                                                              Verlaine

            


                                                       

            

lundi 16 avril 2018

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 87 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

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                                                                                                                     1er Février 1663
                                                                                                       Jour du Seigneur
            Lever, à l'office bon sermon de Mr Milles. A la maison bon dîner avec ma femme, ce qui me fit plaisir, et la pensée de me séparer de Jane devenue très bonne cuisinière me contrarie fort. Me rendis à pied chez milord Sandwich et demeurai avec lui dans son cabinet presque tout l'après-midi. Il n'est pas sorti depuis sa maladie. Avons notamment parlé de sir Robert Bernard démis de sa charge de juge de Huntingdon, par les commissaires pour la réglementation etc. Ce qui me soucie car il va penser que c'est le fait de milord Sandwich et se vengera en partie, c'est probable, sur moi à l'occasion de mon affaire. De sorte qu'il me faut chercher autour de moi quelque autre avocat pour me représenter.
           Plus tard arrivèrent Mr Povey et d'autres personnes, eux partis, milord, moi et Mr Povey nous occupâmes des affaires de Tanger, le ravitaillement, puis nous interrompîmes. Comme il gelait à pierre fendre, éclairé par mon petit valet, je rentrai à pied à la maison. Après souper montai dire mes prières. Ensuite seul avec ma femme et Jane lui dis ce que je pensais qu'il allait advenir d'elle, puisque après être restée si longtemps à mon service elle s'était conduite de telle sorte que nous sommes désireux de la congédier, et je lui donnai ma bénédiction, mais lui commandai de ne jamais me faire savoir de ses nouvelles, car je ne pourrais jamais pardonner son ingratitude. Puis au lit, l'esprit fort troublé à l'idée que cette pauvre fille nous quitte, pourtant elle ne se repent pas de certaines paroles  adressées effrontément, cependant je pense innocemment et par excès de familiarité à sa maîtresse il y a environ six semaines, je n'ai pu revenir sur ma décision
            ( Aujourd'hui Creed et moi, lors de notre promenade dans le jardin de Whitehall, avons vu le roi entrer en secret chez milady Castlemaine, ce qui pour un prince n'est pas chose très digne. Et je fis part à Creed de mon sentiment en des termes que je n'eusse pas choisis si je n'avais eu confiance en lui ).


                                                                                                           2 Février

            Lever, et après avoir payé ses gages à Jane, je sortis car j'avais les larmes aux yeux, et elle pleura, disant que ce n'était pas sa faute si elle partait. Mais vraiment il est difficile de dire quelle est la cause de son départ, si ce n'est qu'elle-même ne désire pas rester.
            En fiacre avec sir John Mennes  et sir William Batten chez le Duc, et après notre entretien dans son cabinet, j'allai chez milord, le roi et le Duc s'étant rendus à la chapelle car c'était le jour des Insignes, puisque c'était la Chandeleur. Restai jusque vers midi. Jonas Moore était présent et parlait de certaines questions de mathématique. De là à pied à midi chez Mr Povey, où Mr Gauden me retrouva et après un excellent et copieux repas, comme d'habitude, nous remîmes à notre affaire de ravitaillement jusqu'à ce qu'une querelle manquât d'éclater entre Mr Gauden et moi. Il soutenait que ses provisions étaient fournies à temps quand je sais que partout les vaisseaux les attendent.
            Puis à Whitehall avec Mr Povey, à pied, et il gelait toujours très fort. Après un tour dans le parc où les gens glissaient, nous rejoignîmes la commission  de Tanger au grand complet, et nous mîmes d'accord sur l'organisation du voyage de Mr Rutherford et sur d'autres propositions.
            Puis avec Mr Coventry à son cabinet de travail. Il me dit, entre autres, que c'était sa volonté mais aussi l'essence de sa politique de servir ses intérêts en s'acquittant de sa tâche avec probité et justice, dût-il contrarier les desseins d'autres plus grands que lui, car il est peu soucieux de se faire des amis par de beaux compliments. Et de cette manière et il constate qu'il vit aussi content                 ( maintenant qu'il sait ne plus avoir à redouter le besoin ), et dans l'ensemble tout aussi, sinon davantage, exempt de craintes ou de soucis que ceux qui, selon ses termes, " connaissent des plaisirs plus vifs et des tourments plus cruels que lui.                                                                                                                                                                                                                          uncorked.winterthur.org
Image associée            Repris à pied avec Mr Creed le chemin de la maison, fîmes halte en chemin dans une taverne où nous bûmes une chope de bière au poulet avant de nous séparer. Je me rendis dans le quartier du Temple où dans le cabinet de mon cousin Roger je rencontrai Madame Turner et la raccompagnai chez elle après être résté un petit moment avec elle et les laissai. Elle et sa fille étaient allées voir la pièce donnée aujourd'hui par l'école de droit où c'est jour de réjouissances.
            M'arrêtai chez mon frère qui est à l'église pour l'enterrement du jeune Cumberland, un robuste jeune homme.
            A la maison où ma femme et moi nous trouvons fort affligés du départ de Jane, et je ne pus moi-même retenir mes larmes, par crainte que la pauvre fille ne tourne mal après être restée si longtemps à mon service.
            Ensuite à mon bureau où j'arrangeai des documents, puis à la maison, souper et, au lit. Aujourd'hui chez milord j'ai envoyé cherché Mr Ashwell et sa femme est venue. D'après ce qu'elle  dit je vois que leur fille me convient parfaitement, ma maison lui convient aussi, mais je crains qu'elle n'y perde en venant chez moi pour des gages aussi réduits, mais de cela il sera question plus tard.


                                                                                                            3 Février

            Au bureau toute la matinée. Rentrai dîner avec Mr Creed et Mr Ashwell avec qui j'eus un entretien à propos de la venue de sa fille chez nous. J'en conclus que sa fille fera très bien l'affaire, mieux que quiconque, je crois. Quant à ses conditions je ne sais quelles elles seront car il la laisse entièrement libre sur ce point. Nous nous mettrons d'accord dans quelque temps, quand ma femme la verra. Après une heure d'entretien avec eux, retour à mon bureau où je travaillai tard aux affaires du bureau, puis à la maison, souper et, au lit.


                                                                                                               4 Février

            Me levai et chez Mr Moore puis chez Mr Lovell au sujet de mes affaires en justice puis au collège Saint Paul car c'était le jour de la Disputaison. J'entendis certains de leurs discours semblables en tous points à ceux des anciens dans les sept arts libéraux, mais à mon sens pas aussi bons que ceux que nous faisions de mon temps. Sortis puis à l'église St Mary-le-Bow à la cour archiépisscopale où un juge siège entouré de ses assesseurs en robe et qui plaident entièrement en latin. Je prêtai là serment de répondre par la vérité aux accusations de mon oncle. Réglai ensuite les droits pour avoir prêté serment et retournai au collège Saint-Paul et montai écouter les élèves des classes supérieures interrogés en latin, grec et hébreu, mais je trouve qu'ils ne répondent dans aucune de ces langues aussi bien que nous le faisions, ils ont toutefois bien réussi en géographie. Les Drs Wilkins et Owtram étaient les examinateurs. Redescendis et Mr Cromlehome me fit beaucoup d'honneur en disant à la nombreuse assistance quel cadeau j'avais fait au collège, montrant mon Stephanus en quatre volumes qui m'a coûté 4 livres 10 shillings. Il nous montra aussi, à ma requête, une vieille édition de la grammaire de Colet, dont l'épître aux enfants est très belle. Et dans le Credo il est écrit " né de Marie vierge immaculée ". De là avec Mr Elborough, seul de mes anciens camarades que j'aie pu rencontrer, chez un traiteur pour dîner, mais je le trouve aussi sot que par le passé, sinon plus. Puis chez mon cousin Roger Pepys et Mr Philips pour mes affaires en justice qui se présentent fort mal. Et au bureau après avoir un peu travaillé je rentrai à la maison où je trouve notre nouvelle servante Mary arrivée en remplacement de Jane.


                                                                                                         5 Février
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Résultat de recherche d'images pour "cuisine couple de canards"            Lever et réunion au bureau toute la matinée, et à la maison pour dîner, que je trouve si bien apprêté, si supérieur à ce que j'attendais de ma servante Susan que je la fis venir pour lui donner six pence. Me rendis ensuite à pied dans le quartier du Temple où j'avais rendez-vous au cabinet de mon cousin Roger Pepys avec mon oncle Thomas et son fils Thomas. Comme je leur montrai un inventaire fidèle des biens de mon oncle tels qu'il les a laissés avec les dettes etc. restant à payer, nous en vînmes à des propos mesurés et des offres équitables en vue d'un accord entre les deux parties. Je propose quand même de renoncer au revenu de toutes terres pendant huit à dix ans en tout. Mais si cela peut nous donner la paix et me dégager un peu l'esprit, j'en serai content. Je leur remis un exemplaire de cet inventaire et nous avons rendez-vous demain pour qu'ils me donnent une réponse.
            Rentrai à pied à la maison car il gèle toujours à pierre fendre, et à mon bureau où je restai tard à écrire des lettres d'affaires. Ensuite à la maison, souper et, au lit.


                                                                                                        6 Février 1663

            Lever et à mon bureau à interroger plusieurs personnes sur ce qu'elles pourraient déclarer sous serment contre Field. En définitive c'est qu'il nous a traités de fieffés filous et de coquins, ce que nous espérons bien lui faire payer.
            Ensuite à Lincoln's Fields, me promenai et examinai l'extérieur du théâtre en construction dans Covent Garden et qui sera fort beau, en attendant l'heure du dîner. Puis chez un libraire dans le Strand où je rachetai Hudibras, car c'est certainement parce que je suis d'humeur mauvaise que je suis tellement monté contre un livre que le monde entier proclame être le modèle du bel esprit. Je suis donc résolu à le lire encore une fois pour voir si je le trouve comme on le dit. Ensuite chez Mr Povey où je me joins à tous les invités. Il y avait en particulier Mr Williamson, le secrétaire latin qui, je le vois, est homme fort savant et un érudit, mais peut-être a-t-il trop bonne opinion de lui-même. De là dans le quartier du Temple chez mon cousin Roger Pepys où je retrouvai mon oncle Thomas et son fils et, après nombre de grandes exigences nous parvînmes finalement à une sorte d'accord à des conditions très dures qui doivent être rédigées pour mardi prochain. Mais comme j'avais en passant promis de donner l'argent de l'héritage de ma cousine Mary au moment de son mariage, ils me dirent après coup qu'elle était déjà mariée, et fort bien mariée, de sorte qu'il me faut payer dans fort peu de temps.
            Mon cousin Roger fut si ému que nous fussions parvenus à un accord qu'il ne put se retenir de pleurer et vraiment, quoique les conditions soient très dures je suis profondément content d'entrevoir la fin probable de nos ennuis. Puis nous nous séparâmes pour ce soir.
            Me rendis ensuite chez milord Sandwich où je restai car la commission devait siéger pour décider du contrat pour le môle auquel, j'ose le dire, personne d'entre nous ne comprenait rien, mais les autres n'en acceptèrent pas moins toutes les exigences de Mr Cholmley et de sir John Lawson, les entrepreneurs. Je les laissai donc accepter tout cela, car je n'y entendais goutte.
            A la maison en fiacre et comme il y avait déjà un passager le cocher m'emmena plus loin que l'ancienne Bourse où il déposa son client qui refusa de le payer parce qu'il avait transporté un inconnu avec lui. Après qu'ils se furent querellés le cocher se contenta de 6 pence, et comme il était fâché il refusa pendant un grand moment de me conduire chez moi prétendant me laisser là pour les 6 pence restants. Mais de bonnes paroles le persuadèrent. Je rentrai donc chez moi et à mon bureau réglai certaines affaires, puis à la maison, souper et au lit. L'esprit fort troublé par l'importance de l'affaire que j'ai traitée aujourd'hui, mais cependant content de savoir proche la fin de mes tourments.

         
                                                                                                        7 Février
                                                                                                                          laboetgato.fr
Résultat de recherche d'images pour "cuisine couple de canards"            Lever et à mon bureau arrive Mr Coventry avant la réunion, comme prévu. Nous nous entretenons de la préparation des comptes et dépenses exceptionnelles de la marine depuis l'avènement du roi, ajoutées à ce que, à strictement parler, sont les dépenses propres de la marine.
            Fin de la réunion à midi, à la maison pour dîner. L'après-midi certains d'entre nous nous retrouvâmes pour parler d'une affaire concernant le ravitaillement. Puis écrivis des lettres et composai l'index de mon nouveau livre sur la marine, qui est du plus bel effet et, après avoir envoyé une lettre à mon père dans laquelle je l'informais de mes efforts pour parvenir à un compromis, quoique fort mauvais, avec mon oncle, et le priais de bien vouloir s'en contenter, je rentrai à la maison et, au lit.


                                                                                                   8 février 1663
                                                                                         Jour du Seigneur   
            Lever et, comme il gelait à pierre fendre, je me rendis à pied à Whitehall voir milord Sandwich, au coin du feu jusqu'à l'heure de l'office, puis à l'office où prêcha le petit Dr Duport de Cambridge sur les paroles de Josias : " Mais moi et ma maison servirons le Seigneur ". Mais tout grand érudit qu'il est, il fit le discours le plus plat et le plus morne, pour ce qui est du contenu et de l'élocution, que j'eusse jamais entendu et dépassant de beaucoup le temps habituel, ce qui n'arrangea rien.
            Ensuite à la table d'hôte de la Tête du Roi, avec Mr Creed. Nous fîmes un bon dîner et ensuite avec sir Thomas Willys et une autre personne discussion sur le sujet qu'ils choisirent, des abus et de la corruption de la marine, ainsi que de ses grandes dépenses, car ils ignoraient qui j'étais. J'entrepris finalement de réfuter leurs arguments et de les détromper, ce qu'ils prirent bien, et j'espère que cela aura été utile, car ils sont membres du Parlement. Un peu après chez milord, où je restai un bon moment à parler de ses besoins d'argent et des façons dont il pourrait en emprunter, etc. Puis je pris congé à l'arrivée d'autres visiteurs. Creed, moi et le capitaine Ferrer descendîmes le parc, regardant glisser les gens, et devisâmes. Le capitaine Ferrer me conta, entre autres menus incidents survenus à la Cour, qu'il y a environ un mois, lors d'un bal au palais, une des dames qui dansaient laissa choir un enfant à terre, mais nul n'a su de qui il s'agissait, car quelqu'un emporta l'avorton dans son mouchoir. Le lendemain matin, toutes les dames d'honneur parurent fort tôt à la Cour pour se justifier, de sorte que personne ne pût dire à laquelle cette mésaventure était arrivée. Mais il semble que Mrs Wells soit tombée malade l'après-midi du même jour et qu'elle ne se soit point montrée depuis, de sorte qu'on en a conclu que c'était elle. Selon une autre historiette, milady Castlemaine, il y a quelques jours, convia Mrs Stuart à un divertissement et, le soir venu on décida, en manière de plaisanterie qu'il fallait les marier. Et l'on fit un vrai mariage, avec les alliances et tous les autres rites du service religieux, les rubans, le posset de xéres au lit et le lancement du bas. Mais il paraît qu'à la fin milady Castlemaine, qui jouait le rôle du marié, se leva, et le roi vint prendre sa place auprès de la jolie Mrs Stuart. Il paraît que l'histoire est absolument vraie.
            Le capitaine Ferrer nous a aussi raconté qu'il lui était souvent arrivé, ainsi qu'à Will Howe, de regarder par les fenêtres de milady Castlemaine et de la voir se mettre au lit alors que sir Charles Berkeley était présent. Mais l'autre jour, alors que le capitaine Ferrer était allé s'excuser de ne pas s'être trouvé à son poste à l'heure exacte, sir Charles, jurant et sacrant, lui dit devant un grand nombre d'autres gentilshommes qu'il ne souffrirait pas qu'un seul des hommes de la garde royale s'absentât de son logis une seule nuit sans permission.
            " - Ce n'est pas, dit-il, que j'ignore qu'une ou deux fois par semaine un gentilhomme doive aller voir sa catin, et je ne désire l'interdire à personne, mais il faudra que chacun demande la permission et rende compte de son absence, afin que nous puissions savoir sur combien de gardes le roi peut compter. "
            Le petit duc de Monmouth, à ce qu'il semble, doit avoir la préséance sur tous les autres ducs, et vient juste derrière le prince Rupert avant le duc de Buckingham et tous les autres.
            Est-ce le vent et le froid qui en sont cause, je ne sais, quoi qu'il en soit, je suis depuis un jour ou deux fort incommodé par des démangeaisons sur tout le corps, ce que j'attribuai d'abord aux piqûres de quelque pou, mais je constate, cet après-midi, que tout mon corps est en proie à une inflammation et que mon visage est fort rouge, enflé et couvert de boutons. De sorte qu'avant la fin de notre promenade j'étais, non seulement malade, mais honteux de voir mon visage ainsi altéré. Nous quittâmes donc dès la fin de notre conversation et je rentrai chez moi à pied, avec bien des difficultés. Le capitaine Ferrer m'accompagna jusqu'à Ludgate Hill, du côté de chez Mr Moore à la Garde-Robe, tant il y avait de glace dans les rues et de flaques d'eau là où elle avait été piétinée. Rentrai finalement chez moi et aussitôt au lit. Passai une fort mauvaise nuit à cause de grandes douleurs d'estomac et d'une forte fièvre.


                                                                                                           9 février
meteo.be
Résultat de recherche d'images pour "gel londres 17 è siecle"            Incapable de me lever pour aller chez le Duc avec les autres, comme j'aurais dû le faire, je gardai le lit, et l'apothicaire , Mr Battersby me conseille de bien suer afin d'éliminer toute cette humeur, ce que la nature ferait d'elle-même, mais par ce moyen on assiste la nature, car il s'agit de quelque mal qui assiste le sang. Mais par quelle voie, je ne sais, à moins que ce ne soit la grande quantité de cornichons de Dantzig que j'ai récemment mangés.
            Dans la soirée arrivée de John Mennes et sir William Batten, et sir John Mennes me donne le même conseil. Il ne voulut rien me voir prendre qui me vînt de l'apothicaire, mais m'offrit de la thériaque de Venise qui est meilleure que toutes les autres. J'acceptai et en pris un moment plus tard, et me mis à suer abondamment. Mes sueurs s'arrêtèrent vers 10 ou 11 heures, je me changeai et dormis fort bien, tout seul ma femme ayant
                                                                                                 10 février
couché dans la chambre rouge en haut. Et le matin l'essentiel de ma maladie, c'est-à-dire les démangeaisons et les boutons, avait disparu. Le matin visité par Mr Coventry et d'autres, je fus content de voir que l'on s'est autant enquis de moi et que ma maladie a été à ce point remarquée. Je garde le lit toute la journée et sue de nouveau le soir, ce qui me fait espérer être rétabli demain.
            Ce soir, sir William Warren s'est présenté en personne à ma porte et a laissé une lettre et une boîte pour moi, puis s'en est allé. Il est question, dans sa lettre, d'une paire de gants qu'il nous offre, à ma femme et moi. Mais en ouvrant la boîte nous découvrons une paire de gants blancs tout simples à ma taille et un beau plat d'apparat en argent accompagné d'une coupe avec mes armes gravées dessus, d'une valeur que j'estime de 18 livres. Ce qui est un fort beau cadeau, le plus beau que j'aie encore jamais reçu.
            Puis, après une fort agréable conversation avec ma femme, elle au lit et allé me reposer.


                                                                                                           11 février
                                                                                                                   
            Pris un clystère le matin et me levai l'après-midi. Ma femme et moi dînâmes d'une poulette et je mangeai de bon appétit, n'ayant rien avalé depuis dimanche, que du gruau clair et du posset. Mais je dois dire que notre nouvelle servante Mary a fort bien rempli son rôle par l'empressement et la discrétion dont elle a fait preuve en me soignant, ce dont je suis très heureux.
            L'après-midi plusieurs visites, mon oncle Thomas, Mr Creed et sir John Mennes, qui m'a témoigné, Dieu sait dans quel dessein, une grande sollicitude et beaucoup de gentillesse durant ma maladie. Le soir ma femme me lut Le procès de sir Henry Vane qu'elle a commencé hier soir, et je trouve ce livre tout à fait excellent, d'une lecture profitable, et son auteur fort sage.
            Ensuite souper, et au lit.


                                                                                                          12 février 1663

            Levé me sentant fort bien puis au bureau toute la matinée. M'interrompis à midi pour dîner à la maison, dans ma chambre verte où brûlait un bon feu et où nous rejoignit le frère de ma femme accompagné de Mary Ashwell, qui semble une jeune fille fort susceptible de nous plaire quant à sa personne et sa conversation et autres qualités. Elle dîna avec nous puis partit, étant entendu qu'elle viendrait vivre chez nous dans trois semaines ou un mois environ. Ma femme et moi fort satisfaits de notre choix, je prie seulement le Seigneur d'en avoir les moyens.
            Puis vint un vieil homme de la part de Mr Povey pour me parler de l'expérience qu'il a de la maladie de la pierre. Je lui en suis bien obligé et suis très satisfait de ses conseils, son remède principal étant le posset additionné de savon de Castille.
            Puis le soir au bureau jusqu'à une heure avancée, à écrire des lettres et mon journal depuis samedi, et à la maison, souper et, au lit.


                                                                                                             13 février
                                                                                                                            isarde09.blogspot.fr 
Image associée            Resté fort tard au lit avec ma femme avec grand plaisir, puis lever. Ce matin, Mr Cole, notre marchand de bois de charpente, m'a envoyé cinq couples de canards. Notre servante Suzan est très malade, et toute la charge de la maison repose donc sur notre servante Mary qui s'acquitte fort bien et de très bonne grâce de sa tâche, mais je regrette qu'elle soit forcée de faire tout cela.
            Dînai d'une couple de canards aujourd'hui. Puis, avec ma femme en fiacre, chez Tom. J'allai ensuite dans le quartier du Temple m'entretenir avec mon cousin Roger Pepys de mon affaire en justice. Puis nous rentrâmes. Les effets du dégel sont si terribles qu'il est impossible de passer dans les rues autrement qu'en voiture, et cela est-il fort difficile.
            Ramenai ma femme à la maison et m'en fus au bureau. Je me sens fort bien mais redoute le froid. Puis à mon bureau, où je restai tard à travailler, avec Mr Bland. Il me parle du retour imprévu de milord Windsor de la Jamaïque, ce qui nous fait penser que ces jeunes lords sont inaptes à servir en quelque capacité que ce soit hors d'Angleterre, bien que l'on dise qu'il ne supportait pas le climat de là-bas, et qu'il a rasé un fort du roi d'Espagne à Cuba, ce qui est considérable, du moins le dit-on pour son honneur.
            Puis à la maison souper, et au lit. Aujourd'hui j'ai acheté la seconde partie de l'Elencus  du Dr Bate, qui va jusqu'à la chute de Richard, mais pas plus loin, ce que je regrette fort.
            " Ce soir ma femme avait grande envie de choisir nos amoureux de la Saint-Valentin pour demain. Pour moi Mrs Clarke ou Mrs Pearse, pour elle, Mr Hunt ou le capitaine Ferrer, mais j'ai refusé à cause de la dépense que cela occasionnerait, aussi bien à moi pour ces dames qu'à ces messieurs pour ma femme, ce qui ne lui plut guère. "


                                                                                                            14 février

            Lever et au bureau où réunion toute la matinée. Seul absent Mr Coventry pour la deuxième ou troisième fois depuis son entrée au bureau. A la maison pour dîner avec ma femme, d'une couple de canards. Ensuite en fiacre dans le quartier du Temple où mon oncle Thomas, ses deux fils et moi nous retrouvâmes chez mon cousin Roger pour signer et sceller un accord. La seule chose qui me déplut fut l'insistance de mon cousin Roger sur mon obligation de les constituer héritiers, comme le fait le testament, de tout le bien que mon oncle a laissé, sans que j'aie le pouvoir d'en rien vendre pour payer des dettes. Mais je refusai d'y consentir sans la permission de vendre, milord Sandwich lui-même et mon cousin Thomas Pepys attestant que cela était nécessaire. Ce qui fut fait. Une autre chose me fait souci, c'est que j'ai dû promettre de leur donner la moitié des biens mobiliers susceptibles découverts et qui viendraient s'ajouter à l'estimation de 372 livres que je leur ai annoncée. Je ne pense certes pas que la valeur des biens soit inférieure, mais il aurait pu s'en contenter. J'ai finalement donné mon accord par écrit au verso du rapport sur la succession que j'avais établi et que je leur avais remis, et j'en ai fait copie au verso de celui que j'ai gardé pour moi. Quand tout fut terminé j'amenai le père et son fils Thomas chez moi en voiture et leur payai 30 livres, les arriérés de la rente due au père, et nous nous séparâmes avec force démonstrations d'affection. Je me couchai aussitôt avec un fort mal de tête d'avoir tant disputé avec mon cousin Roger et les autres lors de cette affaire.


                                                                                                                15 février 1663
                                                                                                     Jour du Seigneur
            Ce matin ma femme m'a réveillé alarmée par le bruit que je faisais en dormant. Je rêvais qu'un de nos capitaines désirait voir l'île Saint-Jean sur mon dessin. Il me semble que je le lui montrai, mais, apparemment il le mania si rudement que cela me causa une douleur effroyable. Et qu'était-ce d'autre que mes couilles qui me firent fort mal pendant un bon moment après mon réveil. Quel réveil étrange et extravagant que celui-là !
            Ensuite, me rendormis. Grasse matinée, pas rasé par le barbier, envoyai Will à l'office, tandis que je restai à la maison pour suspendre dans ma chambre verte mon tableau du " Sovereign " et mettre certaines choses en ordre chez moi.
            Ensuite dîné avec ma femme d'avec encore trois canards et de leurs sarcelles, puis à l'office. Sermon ennuyeux. Rentrai chez moi et après m'être promené quelque temps dans la maison à converser avec ma femme, j'allai au bureau pour noter quelque chose et préparer mes affaires pour demain. J'ai relu mes résolutions ce matin, ce que ma maladie, et non l'oubli ou la négligence m'avait  empêché de faire dimanche dernier, de sorte que j'espère ne pas contrevenir à mes résolutions en ne payant pas mon amende. Puis à la maison et, après mes prières, au lit où je parlai longuement avec ma femme et lui enseignai des éléments d'astronomie.



                                                                    à suivre................

                                                                                                     16 février 1663

            Lever et en fiacre..........................
       






         

         

Lettre d'un turc Voltaire ( nouvelle France )

Le Corps Bostanci de l'armée Ottomane au 17 et 18eme siècle ...
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                                                Lettre d'un Turc

                              Sur les fakirs et sur son ami Bababec

            Lorsque j'étais dans la ville de Bénarès sur le rivage du Gange, ancienne patrie des bracmanes, je tâchai de m'instruire. J'entendais passablement l'indien. J'écoutai beaucoup et remarquai tout. J'étais logé chez mon correspondant Omri, c'était le plus digne homme que j'aie jamais connu. Il était de la religion des bramines, j'ai l'honneur d'être musulman : jamais nous n'avons eu une parole plus haute que l'autre au sujet de Mahomet et de Brama. Nous faisions nos ablutions chacun de notre côté, nous buvions de la même limonade, nous mangions du même riz, comme deux frères.
            Un jour nous allâmes ensemble à la pagode de Gavani. Nous y vîmes plusieurs bandes de fakirs, dont les uns étaient des janguis, c'est-à-dire des fakirs contemplatifs, et les autres des disciples des anciens gymnosophistes qui menaient une vie active. Ils ont, comme on sait, une langue savante qui est celle des plus anciens bracmanes et, dans cette langue, un livre qu'ils appellent le Veidam. C'est assurément le plus ancien livre de toute l'Asie, sans en excepter le Zenda-Vesta.                         
            Je passai devant un fakir qui lisait ce livre :                                                                                     
            - Ah ! malheureux infidèle ! s'écria-t-il, tu m'as fait perdre le nombre de voyelles que je comptais et, de cette affaire-là, mon âme passera dans le corps d'un lièvre, au lieu d'aller dans celui d'un perroquet, comme j'avais tout lieu de m'en flatter.                              
            Je lui donnai une roupie pour le consoler. A quelques pas de là, ayant eu le malheur d'éternuer, le bruit que je fis réveilla un fakir qui était en extase.
            - Où suis-je ? dit-il. Quel horrible chute ! je ne vois plus le bout de mon nez. La lumière céleste est disparue.
            - Si je suis cause, lui dis-je, que vous voyez enfin plus loin que le bout de votre nez, voilà une roupie pour réparer le mal que j'ai fait. Reprenez votre lumière céleste.
             M'étant ainsi tiré d'affaire discrètement je passai aux autres gymnosophistes. Il y en eut plusieurs qui m'apportèrent de petits clous fort jolis, pour m'enfoncer dans les bras et dans les cuisses en l'honneur de Brama. J'achetai leurs clous dont j'ai fait clouer mes tapis. D'autres dansaient sur les mains. D'autres voltigeaient sur la corde lâche. D'autres allaient toujours à cloche-pied. Il y en avait qui portaient des chaînes, d'autres un bât. Quelques-uns avaient leur tête dans un boisseau, au demeurant les meilleures gens du monde. Mon ami Omri me mena dans la cellule d'un des plus fameux, il s'appelait Bababec. Il était nu comme un singe et avait au cou une grosse chaîne qui pesait plus de soixante livres. Il était assis sur une chaise de bois proprement garnie de petites pointes de clous qui lui entraient dans les fesses et on aurait cru qu'il était sur un lit de satin. Beaucoup de femmes venaient le consulter. Il était l'oracle des familles et on peut dire qu'il jouissait d'une très grande réputation. Je fus témoin du long entretien que Omri eut avec lui :
            - Croyez-vous, lui dit-il, mon père, qu'après avoir passé par l'épreuve des sept métempsycoses je puisse parvenir à la demeure de Brama ?
            - C'est selon, dit le fakir. Comment vivez-vous ?
            - Je tâche, dit Omri, d'être bon citoyen, bon mari, bon père, bon ami. Je prête de l'argent sans intérêt aux riches dans l'occasion, j'en donne aux pauvres, j'entretiens la paix parmi mes voisins.
             - Vous mettez-vous quelquefois des clous dans le cul ? demanda le bramin.
            - Jamais, mon révérend père.
            - J'en suis fâché, répliqua le fakir, vous n'irez certainement que dans le dix-neuvième ciel, et c'est dommage.
            - Comment, dit Omri, cela est fort honnête. Je suis tout content de mon lot, que m'importe du dix-neuvième ou du vingtième, pourvu que je fasse mon devoir dans mon pèlerinage, et que je sois bien reçu au dernier gîte ? N'est-ce pas assez d'être honnête homme dans ce pays-ci  et d'être ensuite heureux au pays de Brama ? Dans quel ciel prétendez-vous donc aller, vous, monsieur Bababec, avec vos clous et vos chaînes ?
            - Dans le trente-cinquième, dit Bababec.
            - Je vous trouve plaisant, répliqua Omri, de prétendre être logé plus haut que moi. Ce ne peut être assurément que l'effet d'une excessive ambition. Vous condamnez ceux qui recherchent les honneurs dans cette vie, pourquoi en voulez-vous dans l'autre ? Et sur quoi d'ailleurs prétendez-vous être mieux traité  que moi ? Sachez que je donne plus en aumônes en dix jours que ne vous coûtent en dix ans tous les clous que vous vous enfoncez dans le derrière. Brama a bien affaire que vous passiez la journée tout nu avec une chaîne au cou. Vous rendez là un beau service à la patrie. Je fais cent fois plus de cas d'un homme qui sème des légumes ou qui plante des arbres, que de tous vos camarades qui regardent le bout de leur nez* ou qui porte un bât par excès de noblesse d'âme.                                    
            Ayant parlé ainsi Omri se radoucit, le caressa, le persuada, l'engagea enfin à laisser là ses clous et sa chaîne et à venir chez lui mener une vie honnête. On le décrassa, on le frotta d'essences parfumées, on l'habilla décemment. Il vécut quinze jours d'une manière fort sage et avoua qu'il était cent fois plus heureux qu'auparavant. Mais il perdait son crédit dans le peuple. Les femmes ne venaient plus le consulter.
            Il quitta Omri et reprit ses clous pour avoir de la considération.
                                                                                       
* fixer le bout de son nez permet aux fakirs de voir la lumière céleste, dit-on.


                                                                                      Voltaire                                                                                      
                                           

samedi 14 avril 2018

Docteur Bachar Mister Assad ses secrets et ses mystères Jean-Marie Quéméner ( document France )


*
             fnac.com


                                   Docteur Bachar Mister Assad

                             Bachar Al-Assad, fils cadet de Hafez Al-Assad militaire qui prit le pouvoir en 1970, étudiant en médecine à Damas poursuit une spécialisation en ophtalmologie à Londres. Il montre une certaine bienveillance à ses patients et pense ouvrir un cabinet dans la capitale anglaise. Le 25 janvier 1994 il sait que ses projets ne verront pas le jour. Son frère aîné Bassel formé pour prendre la succession du père disparaît dans un accident de voiture. Bachar fut élevé dans " une mission laïque française dépendant du grand lycée français de Damas ". Néanmoins alaouite la famille, le pouvoir en butte aux frères musulmans, les combattent. "
                    Entré dans son rôle de futur dirigeant de la Syrie, il étudie cliniquement le pays, emprisonne et chasse ceux considérés comme ennemis. Parmi les pays frontaliers " Pour un Syrien le Liban n'est qu'une affaire de politique intérieure... ' L'homme dépeint comme timide est passionné d'informatique de même que sa compagne épousée en 2000. Il ouvre le pays à internet, bientôt bloqué face à une jeunesse nombreuse et révoltée, et à la téléphonie mobile. Le réseau familial détient toutes les sociétés, s'enrichit. Les syriens vivent mal. 2011 " Tout juste laisse-t-il filtrer, à la fin mars, qu'il a donné l'ordre de former un comité pour élever le niveau de vie... " Le parti Baas une charge. Révoltes et bains de sang. Hama, Homs, Lattaquié... Jean-Marie Quéméner journaliste, grand reporter au Figaro éclaire quelque peu l'énigme Syrie, Bachar Al-Assad et la diplomatie proche-orientale.



* Note : livre paru en 2012

jeudi 12 avril 2018

L'Idole Londres Auguste Barbier ( Poèmes France )


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                                                       L'Idole
                                                                                                                    .artmajeur.com
            Ô Corse à cheveux plats ! que la France était belle
Image associée                    Au grand soleil de messidor !
            C'était une cavale indomptable et rebelle,
                   Sans frein d'acier ni rênes d'or ;
            Une jument sauvage à la croupe rustique,
                   Fumante encore du sang des rois,
            Mais fière, et d'un pied fort heurtant le sol antique,
                   Libre pour la première fois.
            Jamais aucune main n'avait passé sur elle
                   Pour la flétrir et l'outrager ;
            Jamais ses larges flancs n'avaient porté la selle
                   Et le harnais de l'étranger ;
            Tout son poil était vierge, et, belle vagabonde,
                  L'oeil haut, la croupe en mouvement,
            Sur ses jarrets dressée, elle effrayait le monde
                  Du bruit de son hennissement.
           Tu parus, et sitôt que tu vis son allure,
                 Ses reins si souples et dispos,
            Dompteur audacieux, tu pris sa chevelure,
                 Tu montas botté sur son dos.
            Alors, comme elle aimait les rumeurs de la guerre,
                 La poudre, les tambours battants,
            Pour champ de course, alors tu lui donnas la terre
                 Et des combats pour passe-temps :
            Alors, plus de repos, plus de nuits, plus de sommes,
                 Toujours l'air, toujours le travail.
            Toujours comme du sable écraser des corps
                  Toujours du sang jusqu'au poitrail.
            Quinze ans son dur sabot, dans sa course rapide,
                  Broya les générations ;
            Quinze ans elle passa, fumante à toute bride,
                 Sur le ventre des nations ;
            Enfin, lasse d'aller sans finir sa carrière,
                 D'aller sans user son chemin,
            De pétrir l'univers, et comme une poussière
                 De soulever le genre humain ;
            Les jarrets épuisés, haletante, sans force
Image associée                 Et fléchissant à chaque pas,
            Elle demanda grâce à son cavalier corse ;
                 Mais, bourreau, tu n'écoutas pas !
           Tu la pressas plus fort de ta cuisse nerveuse,
                 Pour étouffer ses cris ardents,
           Tu retournas le mors dans sa bouche baveuse,
                De fureur tu brisas ses dents ;
           Elle se releva : mais un jour de bataille,
                 Ne pouvant plus mordre ses freins,
            Mourante, elle tomba sur un lit de mitraille
                 Et du coup te cassa les reins.                                                          fr.muzeo.com
                                                                                                                 
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                                            Londres                                                            

            C'est un espace immense et d'une longueur telle
            Qu'il faut pour le franchir un jour à l'hirondelle;
            Et ce n'est, bien au loin, que des entassements
            De maisons, de palais et de hauts monuments,                                    london-incognito.fr   
Monet-waterloo-pont-londres            Plantés là, par le temps, sans trop de symétrie ;
            De noirs et longs tuyaux, clochers de l'industrie,
            Ouvrant toujours la gueule, et de leurs ventres chauds
            Exhalant dans les airs la fumée à longs flots ;
            De vastes dômes blancs et des flèches gothiques
            Flottant dans la vapeur sur des monceaux de briques ;
            Un fleuve inabordable, un fleuve tout houleux,
            Roulant sa vase noire en détours sinueux
            Et rappelant l'effroi des ondes infernales ;
            De gigantesques ponts aux piles colossales,
            Comme l'homme de Rhode, à travers leurs arceaux
            Pouvant laisser passer des milliers de vaisseaux ;
            Une marée infecte et toujours avec l'onde
            Emportant, remportant les richesses du monde ;
            Des chantiers en travail, des magasins ouverts,                             .spot-web.
            Capables de tenir dans leurs flancs l'univers ;
Image associée            Puis un ciel tourmenté, nuage sur nuage ;
            Le soleil, comme un mort, le drap sur le visage,
            Ou, parfois, dans les flots d'un air empoisonné
            Montrant comme un mineur son front tout charbonné ;
            Enfin, dans un amas de choses, sombre, immense,
            Un peuple noir, vivant et mourant en silence,
            Des êtres par milliers suivant l'instinct fatal,
            Et courant après l'or par le bien et le mal.
                                                                                                                                                                                                                                       


     
                                                        Auguste Barbier

mercredi 11 avril 2018

Sacha Guitry Dimberton Paillat ( BD France )

Sacha Guitry, une vie en bande dessinée
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                                                           Sacha Guitry

                                                     Une vie en bande dessinée

            Né en 1895 à Saint-Pétesboutg, son père Lucien comédien célèbre était alors sous contrat pour jouer en Russie, prénommé Alexandre en l'honneur du tsar Alexandre III, mais vite surnommé Sacha par la nurse, il joue tout enfant aux côtés de son père. Mais sa mère demeure à Paris, le réclame, pour le mettre en pension. Très mauvais élève, à 17 ans il a fréquenté une dizaine de lycées, sans jamais dépasser la sixième. Il rencontre un jour l'une des nombreuses maîtresses de son père, abandonnée par Lucien elle se venge en épousant son fils, elle est son aînée, a huit ans de plus et l'aide à parfaire son écriture, car déjà il trouve sa voix au théâtre, malgré une brouille, qui durera 13 ans, avec son père furieux du mariage de son fils. Très mauvais élève mais brillant auteur. Ses mots d'esprit, Charlotte encore à ses côtés lui rappelle les conseils de son père. Lucien disait : " ....... Notre auditoire : trois personnes, un sourd qui nous suit des yeux, un aveugle qui nous écoute et un amateur très raffiné qui nous écoute mais ne sait pas un mot de français........ " Sacha évite la guerre de 14/18, réformé par Clémenceau qui le connait depuis tout petit. Fin de vie avec Charlotte qui demande "....... Deux personnes mariées peuvent-elles s'aimer ? - Sans doute si elles ne sont pas mariées ensemble..... " Sa deuxième épouse sera Yvonne Printemps ex-compagne de Guynemer et, après noces et divorce avec Guitry sera la femme du célèbre Pierre Fresnay alors jeune comédien. Dans ses pièces Sacha Guitry ausculte avec humour les femmes, les couples. Mais il écrit aussi Debureau, célèbre mime. Lucien toujours fâché assiste à une représentation, caché : "............. Adore ton métier....... laisse la gloire à ceux qui font pleurer....... fais rire et peut-être un jour tu seras populaire et ça, vois-tu, c'est presque aussi bon que l'amour......... " Lucien et Sacha réconciliés, Yvonne Printemps partie vers d'autres amours, alors que le Groupement d'auteurs dramatiques veut que Sacha Guitry diminue sa production ce dernier décide de la doubler, s'il peut. Dans la vie de l'auteur arrive une comédienne, future épouse et les plus belles jambes de Paris, Jacqueline Delubac. Il a cinquante ans, elle en a 25; "...... Si je te quittais, tu me regretterais ? - Si les femmes savaient combien on les regrette, elles partiraient plus vite !.............. " La troisième épouse partie, de l'autre côté de la rue, mais libre Sacha Guitry tombe amoureux de Geneviève de Séréville, l'auteur de trente ans son aîné se confie à sa grande amie Arletty, et s'aperçoit vite que ce mariage est une erreur. Mais Guitry réalisateur a pris goût à la mise en scène de cinéma, et ses films ont trouvé leur public. Arrive la guerre, et Sacha Guitry vit entre deux eaux, est arrêté à la Libération, passe soixante jours en prison, malgré son aide apportée à la libération de camps d'internement de Tristan Bernard, entre autres. Le célibat pèse à l'écrivain et il trouve celle qui sera sa veuve, jeune, belle, roumaine. Elle remplace la mère qu'il a si peu connue. Elle joue dans tous ses films et sur scène. Sacha Guitry n'a jamais payé ses impôts aussi arrive le jour où il doit s'expliquer avec l'administration qui saisit sa collection de tableaux, et les laisse en dépôt accrochés au mur de son hôtel particulier. Malade, on lui ôte une partie de l'estomac, il meurt le 24 juillet 1957. Auteur et comédien préféré de nos pères, quel successeur pour ce prince de la répartie ?
Quelques pièces, quelques titres : Nono - Faisons un rêve - Debureau - Mon père avait raison.........
Quelques films : Le roman d'un tricheur - Le mot de Cambronne - Quadrille - Si Versailles m'était conté - Si Paris m'était conté............ De fait l'agréable BD est un large survol de la vie de Sacha Guitry vue au fil de ses unions et de ses plaisantes réflexions.