samedi 4 janvier 2020

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 105 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )



Illustration.
John Michael Wright








                                                                                                                          16 Novembre 1663

            Lever et, après m'être habillé, allai en fiacre à Whitehall. Réunion avec le Duc. Mr Coventry entreprit à nouveau de se justifier de ce dont on l'accuse et de prouver, grâce à maints témoignages qu'il avait apportés, qu'il n'avait rien fait qui n'eût été déjà pratiqué par les précédents secrétaires du lord-amiral, quoiqu'il n'approuvât pas ces agissements.........
            Sortis et sir George Carteret me fit appeler pour parler de ma lettre d'hier.......... Il me promit que dorénavant, quoi qu'il pût entendre contre moi, il m'en parlerait avant de le croire.......
            Ensuite chez milord, pensant trouver Mr Moore pour le consulter avant d'envoyer ma lettre de remontrances à milord, mais il n'est pas là. Je trouve en revanche milord venu à la Cour. Je suis content de l'apprendre et le serais encore davantage si j'apprenais si l'on me disait qu'il prend soin de ses affaires, car je n'aurais ainsi plus de raison de mettre son bon naturel à l'épreuve par une aussi grande provocation que cette lettre.
            Puis retour en fiacre à la maison en passant par la Bourse, où m'entretins de plusieurs affaires avec plusieurs personnes. Dîner avec ma femme. L'après-midi à mon bureau jusque tard.
            Le soir vint Mr Hollier, et nous entreprîmes tous deux d'examiner la maladie dont sont affectées les parties intimes de ma femme. Il semble que la grande confluence d'humeurs qui précédemment s'accumulait à cet endroit a laissé en crevant une cavité devenue, avec le temps, de plus en plus profonde, et mesure maintenant près de trois pouces. Mais Dieu a voulu qu'elle n'allât point vers l'intérieur du corps, mais restât à la surface de la peau, et il va donc devoir l'inciser sur toute sa longueur. Je crains de ne pas avoir assez de courage pour voir cela, et pourtant elle  refuse la présence de toute autre personne que moi. Elle ne veut pas même ses propres servantes. Je dois donc être là pour elle, la pauvre chère âme. Il doit l'opérer demain soir.
            Après son départ derechef à mon bureau un petit moment, puis à la maison, souper et, au lit.


                                                                                                                17 novembre

            Lever et alors que je m'habille visite de Mr Deane de Woolwich...... Je l'incitai à ne pas se soucier de ce qui était arrivé samedi dernier, car je n'avais nulle crainte qu'il ne fût bientôt maître de ses ennemis autant que ceux-ci croient maintenant le maîtriser. Puis il me conta maints exemples de la conduite abominable de Mr Pett de Woolwich à son endroit. Ensuite au bureau réunion tout l'avant-midi. Mr Moore me rejoignit ensuite à midi à la Bourse, ainsi que Tom Trice et mon oncle Wight. Allâmes dans une nouvelle taverne ( le propriétaire se révèle être mon vieil ami d'enfance Ben Stanley ), puis chez un notaire pour rédiger un billet à ordre, puis dans une autre taverne, la Tête du Roi, puis nous rendîmes visite à mon cousin Angier à la maison des Indes orientales toute proche et mangeâmes ensemble un morceau de porc acheté chez un traiteur. Après le dîner nous scellâmes le billet et l'on me remit l'ancien billet de mon oncle à ma tante. A ce moment Tom Trice reconnaît qu'aucun différend ne nous oppose plus sur cet héritage, et qu'il me remettra dans six jours une attestation de la main de son procureur..........
Résultat de recherche d'images pour "metiers angleterre 17è siècle"            Nous nous quittâmes vers le soir. Je rentrai à la maison et allai voir Mr Moore à mon bureau....... Je lui lus la lettre concernant milord........ il la jugea si bien écrite qu'il ne voulut à aucun prix que je me dispensasse de l'envoyer............. Après son départ j'en fis une copie pour mes archives en sténographie et cachetai la lettre que je ferai porter demain par mon commis Will. Puis à la maison où Mr Hollier était arrivé pour voir ma femme. Comme elle était au lit et que nous étions seuls pour examiner de nouveau ses parties, il considère qu'en dépit du fait que la douleur ne serait pas grande, elle a tellement peur et que les soins seront quelque peu douloureux, dont je ne pourrai me charger, requerront la présence d'une infirmière et de gens auprès d'elle, si bien qu'à la réflexion il pense  qu'une fomentation fera aussi bien l'affaire. Quoique ce remède soit gênant il n'est pas douloureux et sa servante pourra l'appliquer, sans savoir directement pour quoi il est, et pourra penser qu'il sert à soigner les hémorroïdes, car bien qu'il n'y ait là rien que de très honnête, ma femme répugne pourtant à donner l'occasion
qu'on en parle.
            Médecine -
                              Ma femme et moi sommes fort soulagés d'entendre cela, car j'avoue que j'aurais été fort chagrin de vois ma femme opérée sous mes yeux. Je n'aurais pas pu supporter de voir cela. Je parlai longuement avec lui de ma maladie. Il me dit à nouveau que le matin je dois manger du gruau pour lâcher le ventre, et le soir des pommes cuites au four. Que je dois, de temps à autre, boire de la bière avec mon vin, et manger des tartines de beurre et de miel, et du pain de seigle, si je peux le supporter, car c'est un laxatif. Je dois prendre une fois par semaine le clystère qu'il m'a prescrit la dernière fois, en remplaçant de temps en temps le beurre par du miel. Toutes recommandations que je suis maintenant résolu à suivre exactement.
            Après son départ, à mon bureau pour travailler un peu, puis à la maison, souper et, au lit, un peu souffrant pour avoir bu de la petite bière trop froide et m'être trouvé dans une pièce froide, à la taverne, je pense.


                                                                                                                      18 novembre


             Lever et après m'être habillé et avoir un peu travaillé au bureau........ à Deptford, où je n'étais pas allé depuis longtemps. Là, versai la solde de l'équipage du Milford et le fis désarmer, exactement selon la règle, et l'on m'a témoigné tout le respect possible dans l'accomplissement de ma tâche. A midi emmenai le capitaine Terne ainsi que le capitaine Berkeley dîner à la Taverne du Globe. Ce dernier qui revenait d'Alger nous fit une bonne description de l'endroit et nous dit que le pacha vit comme un prisonnier, à la merci des soldats et des officiers de sorte que règne là-bas la plus grande confusion
            Après dîner arriva sir William Batten que je laissai se charger de la solde et du désarmement d'un autre vaisseau et je rentrai à pied à la maison, lisant un petit livre de nouveaux poèmes de Cowley que m'a offert son frère. Il semble qu'Abraham soit toujours fort malade mais qu'il a de bonnes chances de guérir.
            Restai à mon bureau puis arriva Mr Hollier, si bavard et si prodigue de phrases latines que je le crois pris de boisson, mais je n'en suis pas sûr. Quoiqu'il en soit, il n'arrête pas de parle, faisant l'apologie de Calvin et de Luther. Il a commencé ce soir l'application de la fomentation à ma femme, et j'espère que cela lui fera du bien. Après son départ, un peu au bureau puis, au lit.
            Ce matin, j'ai envoyé Will porter ma grande lettre à milord Sandwich, et il la lui a remise en mains propres.
            Milord,
                        J'espère vivement que votre Seigneurie ne condamnera ni la forme ni l'objet de cet avis, quand j'aurai allégué pour ma défense au sujet de la forme que j'ai tenté à deux reprises..... de vous le présenter de vive voix............ J'estime trop l'honneur de Votre Seigneurie, et je vois que la Cité comme la Cour bruissent de propos qui vous causent du tort et sont trop répandus pour que moi ni personne, excepté Votre Seigneurie, puisse les arrêter, et je vais, milord, sans exagérer ni amoindrir l'affaire le moins du monde, faire mon devoir en l'exposant brièvement devant vous.
            ............ La vie retirée indigne.......Le fait que vous veniez de moins en moins à la Cour ont donné plus d'une fois lieu à des commentaires dans l'entourage du roi.
            D'autres ont dit, à propos de Votre Seigneurie, qu'ayant maintenant obtenu ce qui vous convenait et reçu du roi de grands biens, vous laissez votre souverain se maintenir ou choir comme il le pourra, et l'on souligne que vous avez entièrement abandonné le service de la Marine.
Image associée *           Des censeurs les plus nombreux...... insistent sur la mauvaise réputation de la maison où Votre Seigneurie ( dont on peut voir maintenant qu'elle a parfaitement recouvré la santé ) continue d'habiter. Et ont nommément accusé une des demoiselles d'être une fille publique........... et ceci....... éclabousse de scandale Votre Seigneurie. Et ceci aussi bien en réjouissant certains ennemis qu'en blessant davantage d'amis que je ne saurais dire.
            Enfin, milord, je découvre chez tout le monde une froideur générale envers Votre Seigneurie, telle que je n'en avais encore ressentie depuis que je suis votre obligé. Je n'aurai la présomption d'ajouter à cela ni réflexion, ni conseil de ma part, sachant bien que Votre Seigneurie n'en a nul besoin. Mais en vous donnant l'assurance la plus sincère que je n'ai confié à nul homme ni papier en ce monde ce que j'écris ici, dont les seuls dépositaires sont moi-même et cette lettre que j'aurai soin de vous faire remettre en mains propres, je demeure confiant que Votre Seigneurie percevra la droiture de mes intentions respectueuses et, très humblement, je prends congé,
            s'il plaît à Votre Seigneurie;
            Le dix-septième novembre 1663.
                                                                  De Votre Seigneurie le très humble serviteur
                                                                                                                                   S. P.
            Pour mémoire.
                                    La lettre ci-dessus a été cacheté avant d'être jointe à celle qui suit :
            Milord,
                        Si ce pli surprend Votre Seigneurie alors qu'elle est en compagnie ou occupée, je la supplie de différer l'ouverture de la lettre ci-jointe jusqu'à ce que les circonstances soient propices ( le sujet peut aisément souffrir un tel retard ) et je demeure très humblement,
                        s'il plaît à Votre Seigneurie,
                        Le dix-septième novembre 1663,
                                                                             De Votre Seigneurie le très humble serviteur,
                                                                                                                                               S. P. 
            Mon domestique a reçu comme instruction de vous remettre ceci en mains propres et de ne pas attendre de réponse.

            Je prie le ciel de bénir cette lettre. Mais j'avoue en craindre pour moi les conséquences, qui seront bonnes ou mauvaises, selon qu'il en admettra ou non le bien-fondé. Je suis, néanmoins, persuadé qu'elle lui fera du bien, et qu'il a besoin d'un tel avis.


                                                                                                                   Le 19 novembre


            Lever et au bureau, réunion jusqu'à midi, puis à la Bourse, où ne fis pas grand chose, et à la maison pour dîner. Creed se joignit à nous. Après le repas, Mr Gentleman, le père de ma servante Jane, vint nous voir et voir sa fille. Après avoir passé un petit moment avec eux je fus mandé, comme convenu, par sir George Carteret. Allai chez lui et l'accompagnai en carrosse chez milord le trésorier général pour nous entretenir avec lui des moyens de payer Mr Gauden, et lui demander s'il ne serait pas nécessaire, le crédit de Mr Gauden étant tombé fort bas, de prendre des garanties s'il demande une grosse somme, 20 000 livres par exemple, qui devraient lui être payées maintenant, à valoir sur ce dont il déclarera avoir besoin pour l'année prochaine. Il est bien triste que l'ayant nous-même réduit à cet état, nous fussions les premiers à mettre en doute son crédit ( la Marine doit 30 000 livres à Gauden pour la fourniture des subsistances de l'année ), mais c'est ainsi. Cependant l'on agira avec lui avec les plus grands égards. Nous avons trouvé milord le trésorier général dans sa chambre à coucher, immobilisé par un accès de goutte. Il me paraît un homme bien disposé et certainement un bon serviteur du roi. Il a parlé avec beaucoup d'allant et de justesse du service du roi. La seule chose qui m'ait déplu chez lui, ce sont ses ongles longs, qu'il laisse pousser sur une main blanche, courtaude, assez épaisse, et cela m'a gêné de les voir.
            Retour en carrosse avec sir George Carteret qui me laissa à la nouvelle Bourse. En chemin il me dit qu'une guerre avec la Hollande est tout à fait improbable, car ni eux ni nous n'y sommes préparés. Nous y viendrons certainement d'ici quelque temps, car nous avons les mêmes intérêts, en matière de commerce, cela s'entend. Mais ce n'est pas pour le moment.
            Puis dans le quartier du Temple, visitai mon cousin Roger Pepys et son frère John. Ce sont à mon avis deux hommes fort ordinaires. Je partis ensuite chez Mr Moore pour lui parler, et le rencontrai en chemin. Il me dit, à ma grande satisfaction, qu'il croit que ma lettre à milord Sandwich a opéré favorablement sur lui, et qu'elle va l'inciter à prendre soin de lui-même et de ses affaires, car il commence déjà à le faire. Mais je n'ose tirer aucune conclusion avant de l'avoir vu, ce que je dois faire demain matin, afin que cesse mon tourment de ne pas savoir comment il prend la chose.
            Ensemble au café, nous bûmes et causâmes un peu, et à la maison. Après avoir passé un petit moment à mon bureau, retour à la maison pour souper et, au lit. Ne pouvant m'empêcher d'espérer après les paroles de Mr Moore ce soir, et pourtant je crains le pire.


                                                                                                                    20 novembre 1663

            Lever et dès que je le pus chez milord Sandwich, mais il était sorti et me voilà frustré de mon espoir de trouver le repos d'une façon ou d'une autre dans cette affaire de milord. Je montai voir Mr Howe que je vis pour la première fois en perruque, ce qui lui sied à merveille, et causai avec lui. Il me dit que milord est tout à coup transformé, et il pense qu'il prend ma lettre en fort bonne part. Quoi qu'il en soit, nous louons tous deux le Seigneur que cela ait un effet si bénéfique sur lui. Puis retour à la maison en m'arrêtant à la Garde-Robe où je trouve milord, mais si occupé avec Mr Townshend à faire des comptes, que je ne voulus point le déranger et m'en allai. Un peu plus tard dîner fort gaiement. Et, vraiment, il m'apparaît comme un jeune homme fort prometteur, quoiqu'un tantinet imbu de lui-même.
            Après dîner les emmenai, lui et ma femme. Je la laissai chez sa mère à Covent Garden, et nous nous rendîmes chez milord. De là à Whitehall avec Mr Moore, et comme le roi et le Conseil étaient en réunion et que je jugeai l'endroit peu propice à une première discussion avec milord, je pris un fiacre, allai chercher ma femme et rentrai à la maison, après avoir reconduit Mr Moore. Je restai tard seul au bureau à étudier des cartes des mers du Nord, des mers blanches, et du fleuve Arkhangelsk, puis rentrai à la maison et, après souper, au lit.
            Ma femme me dit qu'elle et son frère ont eu une grande querelle ce soir, car il prétend qu'elle a de grandes obligations envers lui, et l'accuse de ne pas se conduire comme elle le devrait envers sa famille et il dit qu'elle peut obtenir davantage de moi qu'elle ne le prétend, et je ne sais quoi encore. Mais grâce soit rendue à Dieu, elle ne le peut point.
            On parle beaucoup aujourd'hui d'un affrontement entre certains fanatiques qui ont pris les armes et les soldats du roi dans le Nord. Mais je ne sais pas encore si cela est vrai.


                                                                                                                 21 novembre
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            Au bureau toute la matinée. A midi je reçois une lettre de Mr Creed accompagnée d'un présent, une très belle robe indienne multicolore pour ma femme. La lettre est curieusement écrite, exagère le prix de son cadeau, et ne reconnaît qu'à peine les services passés que j'ai pu lui rendre, et se contente de me présenter ses respects les plus sincères et je ne sais quoi encore.
            J'avoue que j'espérais tirer plus grand profit de mon aide dans l'affaire de ses comptes. Je donnai donc 12 shillings à son petit valet et lui renvoyai son présent
            Après m'être occupé de la solde d'un vaisseau cet après-midi à la Trésorerie, je me rendis en fiacre à Ludgate et, après avoir regardé là-bas les prix de plusieurs robes j'en déduis que la sienne peut valoir environ 12 ou 15 livres. J'attends, cependant, au moins 50 livres de lui. Et donc, le soir, je lui écrivis une lettre et lui exprimai clairement ma pensée. J'en garde une copie ainsi que de sa lettre. Je suis résolu à ne plus avoir avec lui les mêmes relations qu'autrefois, mais j'obtiendrai ce que je veux de lui. Puis écrivis mes lettres et quand j'eus terminé rentrai à la maison souper et, au lit, l'esprit fort soulagé d'avoir écrit à Creed et davantage encore d'avoir reçu 17 livres à la Trésorerie en remboursement des 17 livres que j'ai payées il y a un an au sculpteur sur bois pour ses travaux chez moi, que j'avais l'intention de payer moi-même, mais voyant que d'autres le faisaient, je pensai qu'il n'était pas inconvenant de me faire rembourser moi aussi. Mais j'appréhende que cela ne nous desserve plus tard et nous coûte davantage.


                                                                                                                22 novembre
                                                                                                 Jour du Seigneur
            Levé fort tôt. J'avais hier soir commandé un fiacre qui ce matin me fit faux bond. Je marchai donc jusqu'au quartier du Temple et pris un fiacre qui me conduisit aux appartements de milord, que je trouvai prêt à partir pour la Chapelle. Mais, quand j'entrai, il entreprit, l'air fort sérieux, qu'il avait reçu ma lettre de tantôt. Il avait tout d'abord noté le soin que je prends de lui et de son honneur, et me remercia du passage où je disais que du plus profond de mon coeur j'étais persuadé du contraire de ce que je relate comme étant les propos d'autrui. Mais, puisque mon intention avait été non de faire des remontrances, mais d'informer et de lui permettre de juger des choses avant d'agir, il me fallait lui dire de quelles personne je tenais les divers détails sur lesquels j'insiste.
            J'aurais voulu m'en dispenser mais, le voyant si déterminé, je me trouvai contraint de lui obéir. Je lui nommai donc Mr Pearse, le chirurgien, pour ce qui est des bavardages de Cour sur la façon indigne dont il vit, une ancienne servante à moi qui avait habité à l'école de Chelsea, et aussi Mr Pickering pour les rumeurs concernant la jeune femme, ainsi que Mr Hunt d'Axe Yard, près de chez qui elle habitait. J'ajoutai que la Cité tout entière dit qu'il néglige ses affaires, et j'affirmai à maintes reprises la droiture de mes intentions dans toute cette affaire. Il reconnut qu'il me croyait.
            Mais plusieurs choses me troublent extrêmement : en particulier, il m'assura de la respectabilité des gens de la maison et de la jeune dame qu'il regrettait de voir ainsi accusée. Il dit aussi qu'on ne le persuaderait pas de changer sa manière de vivre et aussi que s'il s'apprêtait à louer une maison et entendait mener une vie différente, ce n'était pas pour plaire à quiconque ou faire cesser les rumeurs, mais parce que cela lui plaisait ( mais je crois qu'il a dit cela pour ne pas sembler trop affecté par ce que j'ai écrit ). Enfin, et surtout, quand je parlai des précautions que j'avais prises pour lui déclarer tout ceci, et dis que personne d'autre n'en avait connaissance, il dit que je devais lui permettre de faire une seule exception. Je lui dis qu'il était possible que d'aucuns connaissent certaines de mes pensées, parce que j'avais obtenu d'eux quelque information, mais nul ne pouvait prétendre avoir connaissance de ce que j'avais écrit. Cela, je l'avoue cependant, me tourmente fort car il m'a paru bien prompt à rétorquer. Il doit sûrement penser à Will Howe, qui n'a rien vu de ce que j'ai écrit. Mais je crois que cela ne peut me causer de tort.                      * *                
Image associée            Force lui est d'admettre qu'il croit en mes bonnes intentions ce qu'il a affirmé à maintes reprises. Pourtant, je vois bien que dans son for intérieur, il est fâché par cette affaire et, je l'avoue, je crains de m'être fait du tort en voulant son bien. Et si c'était à refaire, et qu'il me semblât qu'il ne prendrait pas mieux la chose, je crois que je me tiendrais tranquille, faisant mine de rien voir, car j'appréhende qu'il n'y ait pas de juste milieu : ou il le prendra très bien, ou il prendra fort mal.
            A la fin, je ne pus m'empêcher de pleurer devant lui, ce dont j'ai honte à présent. Je ne puis, cependant, imaginer qu'il l'attribue à autre chose qu'à mon affection pour lui et à ma bonne volonté.
            A la fin de cette conversation, il se mit à parler joyeusement d'autre chose. Je l'accompagnai à Whitehall et nous causâmes des tableaux de la galerie. Peut-être le fit-il par calcul, pour que son petit valet ne put déceler en lui la moindre froideur, mais je crois que, d'une certaine façon, son esprit est soulagé, et j'espère que nos relations resteront inchangées. Quoi qu'il en soit, quand il verra que je prends soin de mes affaires et lui fais honneur, et qu'il est improbable que j'aie besoin de lui ou que je devienne un fardeau pour lui, et s'il continue à prendre soin de ses affaires et revient à la raison, je n'ai aucun doute qu'il prendra en compte ma loyauté envers lui, et m'accordera l'estime qu'il me doit.
            A la Chapelle je pris place sur le banc du Sceau privé avec d'autres gentilshommes et j'entendis prêcher le Dr Killigrew, mais j'avais l'esprit si troublé, ou peut-être seulement hanté par ce qui s'était passé que je ne pus prêter aucune attention et que je ne peux à cette heure me ressouvenir de trois mots. Une belle anthem suivit le sermon, il s'agissait du psaume 51 écrite pour cinq voix par un des jeunes garçons du capitaine Cook, un bien joli enfant, et l'on dit qu'ils sont quatre ou cinq à pouvoir en faire autant. Et c'est là que je vis, pour la première fois, que le roi est un peu musicien, et battit la mesure de la main tout au long de l'anthem.
            Montai dans la galerie après le sermon, rencontrai Creed. Nous nous saluâmes mais ne dîmes mot de ce qui s'était passé hier entre nous. Il me dit qu'il devait aller en un certain endroit pour dîner et nous nous quittâmes.
            Je rencontrai aussi Mr Povey qui me dit que Tanger a manqué d'être traîtreusement livré et qu'un des officiers du roi est ici, à qui l'on a offert 8 000 pièces de huit pour entrer dans le complot.
            De là à la table d'hôte de la Tête du Roi pour dîner. Maintes gens de qualité, et bon dîner. On parla principalement de chasse, dans un jargon que je n'entends guère.
            Puis en fiacre à notre église où je ne pus rien écouter, tant j'avais encore l'esprit bouleversé. Rentrai à la maison après le sermon et contai à ma femme ce qui s'était passé. Et à mon bureau, travaillai tard, uniquement pour m'occuper l'esprit, puis à la maison, souper, prières et, au lit.


                                                                                                              23 novembre

            Lever et me rendis chez l'échevin Backwell rejoint par sir William Rider, et nous nous consultâmes suivant les instructions de milord le trésorier général sur l'opportunité d'assurer notre vaisseau qui ramène du chanvre d' Arkhangelsk, au sujet duquel nous sommes fort inquiets. Une fois l'affaire engagée j'allai chez Mr Beecham, un de nos jurés, m'entretenir avec lui de notre affaire en justice contre Field, le procès ayant lieu demain. Puis à l'enclos de Saint-Paul où passai commande du Recueil de Rushworth et des Lois du Long Parlement, etc. de Scobell, que je ferai payer par le roi en disant que c'est pour le bureau, et ainsi je ne contreviens point du tout à mes résolutions.
            Retour au café, puis à la Bourse où sir William Rider et moi proposâmes 15 pour cent. Mais personne ne veut accepter moins de 20 pour cent, et l'offre la plus basse est une prime de 15 pour cent plus une déduction de 15 pour cent sur le remboursement en cas de perte du vaisseau. Nous n'avons pas jugé bon de l'accepter sans ordre. Sur ce nous nous quittâmes et je rentrai à la maison pour un dîner rapide, quoique trop bon pour être pris sans compagnie, à savoir une bonne oie et un excellent morceau de boeuf rôti.
            Ensuite dans le quartier du Temple, mais comme j'étais en avance et que je rencontrai Mr Moore, je l'emmenai chez milord le trésorier général puis chez sir Philip Warwick à qui je demandai son avis. Il me laissa libre de faire ce que je jugerais bon au sujet de cette assurance.
            Retour au quartier du Temple. En chemin racontai à Mr Moore ma conversation d'hier avec milord, et vraiment je crains de plus en plus que milord ne se corrige pas comme je l'avais espéré, ni n'ait la sagesse d'admettre le bien-fondé de mes conseils. Cependant, je suis convaincu que la personne pour laquelle il m'a demandé de faire une exception n'est pas Mr Moore, et donc, Mr Howe n'a pu lui parler de ma lettre, ni lui dire qu'il l'ait jamais vue.
            Arrivé je quittai Mr Moore et montai au cabinet du président de la Chambre où je retrouvai Mr Coventry pour m'entretenir avec lui de l'affaire Field.
            Je repris ensuite le chemin de la maison, entrai dans un café où appris par le plus grand des hasards l'arrivée d'une lettre nous annonçant que notre vaisseau était parvenu sans dommage à Newcastle. Je courus aussitôt porter la nouvelle, âne bâté que je suis, à l'échevin Backwell, et nous allâmes ensemble à la maison de l'Afrique dans Broad Street pour en parler à sir William Rider, mais il était sorti. Alors qu'il m'était si facile de faire tout cela, de feindre de prendre une assurance et d'empocher 100 livres sans me fatiguer ni courir le moindre risque ! Quand je pense que j'ai pu faire une telle sottise, comme cela me chagrine !
            Rentrai ensuite avec l'échevin Backwell, parlant de la nouvelle monnaie. Il dit, qu'à son avis, elle est impossible à contrefaire, mais qu'elle est terriblement malcommode à compter, tant elle est épaisse et les bords sont relevés.
            Il m'apparaît fort occupé, et à vrai dire, c'est un homme fort consciencieux, comme il l'a toujours été, et maintenant il est bien payé pour cela.
            Ensuite à la maison et à mon bureau où travaillai tard pour gagner un peu d'argent, puis à la maison souper et, au lit.


                                                                                                                  24 novembre
                                                                                                                                      saor-alba.fr 

Image associée            Lever et à mon bureau réunion toute la matinée. A midi à la Bourse où tout le monde me félicita de l'arrivée à bon port de notre cargaison de chanvre. Et il paraît qu'un homme, Middleburgh, a proposé 20 pour cent en or hier soir, trois ou quatre minutes avant que soit connue la nouvelle de son retour.
            Rentrai chez moi avec Mr Deane pour dîner. Après avoir mangé et parlé longuement des affaires de l'arsenal de Woolwich, nous regardâmes le plan d'un vaisseau qu'il a fait pour moi. Il est vraiment tout à fait excellent et j'espère qu'il me sera bien utile dès que j'aurai un peu de temps, et je suis fort reconnaissant envers ce brave homme.
            Vers le soir, en fiacre à la commission de Tanger et parlai là à milord, qui se montra fort civile avec moi. Mais je vais le mettre à l'épreuve demain par une visite, pour voir s'il continue ou non dans ces dispositions. Retour à la maison et à mon bureau tard avec le capitaine Minors à parler de l'affaire de la Compagnie des Indes orientales.
            A la maison pour souper et, au lit. Cela me tourmente d'être aussi constipé malgré toutes les purges que je prends.
            C'est aujourd'hui qu'avait lieu notre procès contre Field. Il paraît qu'on lui accorde 20 livres de dommages en plus, ce qui est étrange, mais ce n'est cependant pas autant que la première fois et moins que je ne le craignais.


                                                                                                                25 novembre

            Lever et me rendis chez sir George Carteret et l'accompagnai à Whitehall dans son carrosse. Il me traite fort bien, à ma grande joie et, au cours de notre conversation, trouve l'occasion de me dire que le service que je lui avais demandé l'autre jour, il me le demandait à son tour, que nous puissions réciproquement à tout moment nous rapporter le moindre incident qui se passerait parmi nous au bureau ou ailleurs, et qui nous rendrait mécontents l'un de l'autre. Et que je le trouverais en toute chose aussi bienveillant et prêt à me servir que mon propre frère.
            Ceci me parut fort soudain et extraordinaire et me fait un plaisir extrême, et je suis résolu à ne jamais, à aucun prix, perdre son estime, si je le puis.......
            Il me laissa dans Fleet Street. Je pris une autre voiture et me rendis chez milord Sandwich à qui je remis la sphère magnétique de Mr Barlow. Cela lui plut beaucoup et il se montra fort civil avec moi.........
            Je le quittai de bonne humeur et me rendis à Whitehall où retrouvai le duc d'York et Mr Coventry. Je recommandai de faire assurer notre vaisseau qui transporte le chanvre à 1,5 pour cent, nonobstant son arrivée à Newcastle, et j'espère vivement que pour mes trois places ( nte de l'éd. Pepys était secrétaire de la Marine, siégeait à la mission de Tanger et travaillait pour Sandwich ) qui sont toute mon espérance et mon gagne-pain, je n'ai maintenant nulle crainte, mais si je prends les précautions nécessaires et, avec l'aide du ciel, jamais plus je ne négligerai de le faire, je ne doute point de conserver leur estime à tous, car sur le Duc et Mr Coventry, milord Sandwich et sir George Carteret reposent mes plus grandes espérances..............
            Retour en fiacre à la Bourse, parlai avec sir William Rider de la possibilité d'assurer le vaisseau, parlai aussi affaires avec plusieurs autres personnes, et l'on va sous peu me connaître fort bien.   saor-alba.fr
Résultat de recherche d'images pour "metiers angleterre 17è siècle"            A la maison pour dîner avec ma pauvre femme, et avec grande joie à mon bureau travailler tout l'après-midi. Visite de Mr Bland, nous avons eu une conversation intéressante et il m'a choisi pour arbitrer une affaire. Un peu plus tard arrive sir Warren et nous eûmes une admirable conversation. Il me conseilla, à ma demande, sur les prêts à grosse aventure et autres façons de placer de l'argent, par exemple en parts de vaisseaux et sur les risques encourus.
            Nous en vînmes enfin à parler de l'administration de la Marine en Hollande, et je crois qu'il va m'aider à me procurer des rapports sur certains aspects de l'amirauté hollandaise que je suis fort désireux de connaître.
            Il semble fort bien connaître certaines choses concernant milord Albermarle avant son ralliement à la cause du roi, ainsi que les négociations entre le roi et lui et d'autres personnes, commencées plusieurs années auparavant. Mais j'ai l'impression que tout n'est pas entièrement vrai. Ces propos sont cependant fort instructifs en général, bien qu'ils m'aient semblé sur ce sujet sortir un peu de l'ordinaire.
            Rentré tard à la maison, souper et, au lit. J'ai l'esprit en paix, et seule ma santé m'inquiète un peu.


                                                                                                                  26 novembre 1663

            Lever et au bureau réunion toute la matinée. A midi à la Bourse, rencontrai Mr Cutler, le marchand. Il voulut à toute force m'inviter dans sa maison à côté de l'église hollandaise. Je dînai là, dans une vieille mais belle maison, avec sa femme et sa mère, deux vieilles femmes aux manières simples. Le dîner fut simple et bon, et ce qu'il me dit après le repas sur les subsistances de la marine était très intéressant et valait d'être entendu. Puis à la maison et à mon bureau dans l'après-midi, l'esprit tout occupé de mon travail. Restai tard puis rentrai auprès de ma pauvre femme pour souper et, au lit. J'ai un peu mal à un testicule, à cause d'un coup que je me suis donné en remontant mes chausses trop violemment hier. Mais je ne vais rien y appliquer avant de voir si la douleur cesse d'elle-même.
            Il paraît que la peste devient de plus en plus violente à Amsterdam, et nous nous apprêtons à obliger tous les navires provenant d'Amsterdam et de Hambourg, ou de tout autre endroit touché par l'épidémie, à effectuer à Hole Haven une quarantaine ( de 30 jours...... ), ce que nous n'avions jamais fait auparavant.


                                                                                                                    27 novembre

            Lever et à mon bureau. Travaillai avec très grand plaisir toute la matinée. A midi à la Bourse, puis à la maison pour dîner avec ma pauvre femme, fort content de retourner à mon bureau. Travaillai d'arrache-pied jusque tard le soir à établir la balance des comptes pour le fret dû au roi par la Compagnie des Indes orientales, puis à la maison souper et, au lit.
            Je parle depuis quelque temps d'aller à Calais ou dans quelque autre port français l'été prochain sur un des yachts, ce qui fait grand plaisir à ma femme. Je crois bien que cela se fera. Il est fort amusant que ma servante Jane n'ose pas y aller, alors que Bess en est ravie et ne se tient plus de joie, et pourtant elle veut bien rester si Jane le désire. Et, en cela comme en toute chose, elle montre son excellent naturel qui n'a point d'égal au monde.


                                                                                                                  28 novembre

            Lever et à mon bureau, réunion toute la matinée, et à midi à la Bourse dans le carrosse de Mr Coventry. Rencontrai Mr Pearse, le chirurgien, qui m'annonça comme une bonne nouvelle que milord Sandwich avait résolu de ne plus aller à Chelsea, et me dit que j'avais donné des conseils à milord, ce que je n'infirmai ni n'affirmai, mais lui montrai que je me réjouissais avec lui de ce qu'il n'y allât plus.
            A la maison pour dîner et à l'enclos de Saint-Paul où feuilletai la seconde partie de Hudibras, que je n'achète pas mais emprunte pour la lire, afin de voir si elle est aussi bonne que la première que tout le monde porte aux nues. Pourtant je ne l'aime guère, quoique j'aie essayé en la lisant deux ou trois fois d'y trouver de l'esprit.
            Retour à la maison, à mon bureau où restai tard à travailler, puis à la maison, souper et, au lit. On me l'avait déjà dit deux ou trois fois, mais aujourd'hui on m'a rapporté comme certain que les Hollandais ont publié des dessins qui chargent notre roi. Sur l'un il est représenté les poches retournées et vides, sur un autre en compagnie de deux courtisanes qui jouent les voleurs à la tire, sur un troisième tenant deux dames par la main, tandis que d'autres l'invectivent, ce qui est un grand outra

                                                                                                         29 novembre
   apiculture.net                                                                             Jour du Seigneur
Résultat de recherche d'images pour "metiers angleterre 17è siècle"            Ce matin j'ai mis mon plus bel habit de drap noir rehaussé de rubans écarlates, qui est fort seyant, ma cape doublée de velours et un nouveau chapeau de castor. L'ensemble est fort élégant avec mes canons attachés par des rubans de soie noire que j'ai achetés il y a un mois.
            Me rendis seul à l'office, car ma femme n'y allait pas. Vis milady Batten en robe de velours, et je fus fâché qu'elle pût en porter une avant ma femme, avant que j'eusse les moyens de lui en acheter une, mais à chose impossible nul n'est tenu. J'en parlai cependant à ma femme en rentrant, et je suis bien faible car, sur le coup, j'étais fort près de lui en offrir une, mais j'y renonçai après avoir réfléchi. Et vraiment cela me perdrait de vouloir imiter sir William Batten et sa femme, qui possède de grands biens en plus de sa charge.
            Le dîner fut bon, " du boeuf à la mode ", mais pas aussi bien préparé que ma femme ne le fait d'habitude et, après le repas, à l'église française. Mais comme le service était commencé depuis trop longtemps, je retournai à St Dunstan, à côté de chez nous, entendis un bon sermon et retournai à la maison. A mon bureau toute la soirée à faire mes comptes de ce mois et, Dieu soit loué, j'ai amélioré ma situation, mon bien se monte à présent à 770 livres, la plus grosse somme que j'aie jamais possédée, et j'ai, de plus, un grand nombre de beaux vêtements. C'est une grande grâce que Dieu me fait là.
            Ensuite, à la maison souper et, au lit.


                                                                                                                    30 novembre 1663

            Un message est venu m'appeler de la part de sir William Penn, pour me convier à aller avec lui à Whitehall dans sa voiture. Je me levai donc et l'accompagnai.
            En chemin il commença, le fat, à me rappeler l'attitude désobligeante que j'ai eue à son égard il y a une ou deux semaines lors d'une réunion du Conseil. Je lui répondis assez ouvertement que je ne pensais avoir envers personne l'obligation de faire ceci ou cela, parce qu'on le voulait ainsi........ alors il parla et je parlai, et le sujet fut abandonné sans que l'un ni l'autre n'eût reçu ni donné grande satisfaction. Nous passâmes à autre chose, mais je reste persuadé que c'est un fourbe et un coquin.
            A Whitehall nous rencontrâmes le Duc, dans une Grande Galerie où il s'entretint avec nous. Peu après arrive milord Sandwich qui resta un moment à nous parler, mais comme c'était la Saint André et jour des Insignes il nous quitta pour se rendre à la Chapelle. Sir William Penn et moi repartîmes, je descendis à la Bourse et allai au café. J'entendis là l'excellent histoire d'une escroquerie tentée par un capitaine marchand, qui avait emprunté deux fois à la grosse aventure et assuré pour la même somme son vaisseau et sa cargaison qu'il voulut ensuite abandonner sur les côtes de France où  il le laissa, refusant le secours des pilotes qu'on lui proposa, et donc le gouverneur de la place prit le vaisseau et le renvoya ici pour retrouver son propriétaire. Le vaisseau est donc arrivé sans dommage, avec sa cargaison, le tout ne vaut pas 500 livres, alors qu'il avait, d'une façon ou d'une autre empoché 3 000 livres. Le procès doit avoir lieu demain à l'Hôtel de Ville, et j'ai l'intention d'y assister.
            Dîner à la maison et donnai sa leçon d'arithmétique à ma femme. Dans la soirée visite de William Howe. Il me dit que milord a été en colère contre lui pendant trois ou quatre jours et refusait de lui parler. Quand il le fit enfin, il l'accusa de m'avoir parlé de ce qu'il avait remarqué concernant Sa Seigneurie. William Howe niant obstinément, milord s'apaisa. Il est depuis fort calme et se hâte, autant qu'il le peut, de déménager de Chelsea. Mais les regards que m'a jetés milord aujourd'hui, ou, peut-être n'est-ce que mon manque de confiance en moi, comme les propos de William Howe me font croire que milord n'est pas très content, et que peut-être il ne le sera pas de fort longtemps. J'en suis fâché, mais j'espère que cela passera avec le temps, sinon je serai bien mal récompensé de mes services.
            Un peu plus tard nous nous rendîmes ensemble dans le quartier du Temple et nous nous séparâmes. J'allai chez mon cousin Roger Pepys que je rencontrai alors qu'il se rendait à son cabinet. Il était pressé, il part demain en voyage. Il me parle d'une lettre de mon père qu'il va conserver pour me la lire à son retour. Je suppose qu'elle traite de la jalousie de mon père qui pense que ma femme le dessert auprès de moi. Uniquement parce qu'ils se sont querellés pendant qu'elle était là-bas, et cette lubie fort déraisonnable ne lui sort pas de la tête, et il se tourmente et tourmente ses amis pour trouver le moyen de me le faire savoir, par exemple milord Sandwich, Mr Moore et mon cousin Roger. Ce qui me fâche, mais je dois l'imputer à son âge et à ses inquiétudes au sujet de ma mère et de ma soeur Pall, et ne pas y prêter attention.
            Après avoir causé un peu avec lui, je pris un fiacre et rentrai à la maison. Je m'arrêtai chez mon libraire pour prendre deux livres, les Ruceuils de Rushworth et de Scobell. Je vais les faire payer par le roi. J'ai passé quelque temps à le lire à mon bureau, et c'est un excellent ouvrage. Puis à la maison, et passai la soirée à faire de l'arithmétique avec ma femme et souper et, au lit.
            Je termine ce mois l'esprit en paix, sauf pour une chose, car j'ai malencontreusement offensé milord, en lui rendant le service de lui représenter ce que le monde dit de lui et de ses affaires.


*     mathblogger.free.fr
**  le-cartographe.net

                                                                                 à suivre..........
      
                                                                                                                   1er Décembre 1663

            Lever et.............






         
         
         

                           

                                                                

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