16 mai 1666
Levé de très bonne heure puis suivis la Tamise jusqu'à Deptford m'occuper de certaines affaires, devant tantôt me mettre au service du duc d'York et de Mr Coventry, aussi étais-je désireux de m'acquitter de certaines nouvelles tâches afin d'avoir l'air d'un homme affairé, droit que je ne me suis que trop bien employé à perdre depuis fort longtemps, ce qui m'est devenu tant à charge de nuit comme de jour que je ne prends presque plus plaisir à rien. Fus à pied revins par le fleuve. A Whitehall fîmes notre travail habituel en présence du Duc. Puis j'allai à l'Echiquier où ces fieffés paresseux n'ont toujours point fait mes tailles, ce qui m'irrite.
Chez Mr Hays, le payai pour mon portrait et celui de Mr Hill. Le premier 14 £ pour le tableau et 25 shillings pour le cadre, et le second 7 £ pour le tableau, car il ne s'agit que d'une copie faite d'après l'original, et 5 shillings pour le cadre, soit au total 22 £ et 10 shillings. Je suis fort satisfait de mes tableaux aussi les rapportai-je avec moi, dans une autre voiture, à la maison où ma femme et moi eûmes grand plaisir à les accrocher. Cela fait dînâmes, Mrs Barbara Sheldon nous vint voir, partagea notre dîner et nous la gardâmes avec nous toute la journée allant, pour ma part, à Deptford. Et, mon Dieu ! quel désir brûlant ne ressentais-je point de voir la femme de Bagwell ! N'y parvins point, ce dont je me réjouis. Mais j'observe avec quelle sottise je demeure esclave du plaisir et ce à un moment de ma vie où, plus qu'à tout autre, il conviendrait que je montrasse toute l'étendue de mon zèle.
J'allai et revins à pied passant mon temps à lire mon livre de droit civil et ecclésiastique. De retour à la maison je pris avec moi en voiture ma femme, Mrs Barb et Mrs Mercer. Nous fîmes notre grande excursion, nous nous restaurâmes à Islington et rentrâmes tard aux alentours de onze heures. Puis, avec grand plaisir, au lit.
Levé après avoir fait la grasse matinée las d'avoir tant marché hier, puis au bureau toute la matinée. Eus de nouvelles occasions de m'en vouloir de ma négligence envers mon travail car à cause de cela je suis loin de sembler aussi utile que ce ne fut le cas. A midi dîner à la maison et derechef à mon bureau où une heure durant j'eus peine à garder les yeux ouverts mais sommeillai tant, j'en ai peur, j'ai l'âme peu consciente de la nécessité de m'occuper de mon travail. Je m'éveillai bientôt et travaillai. En fis fort grande quantité avec fort grand plaisir. Rentrai le soir, souper et, au lit. Ile me plaisait fort d'avoir exécuté ce travail, convaincu que si seulement je m'y attelais régulièrement je pourrais à la fois jouir de loisirs convenables. Avec la grâce de Dieu je compte qu'il en sera ainsi, puis, au lit.
18 mai
Levé à 5 heures puis par le fleuve à Deptford et à Blackwall pour en terminer avec certaines affaires, puis à pied à Duke Shore, repris là un bateau et rentrai. A Westminster, fis le siège' toute la matinée de l'Echiquier pour obtenir les tailles de Tanger pour un trimestre. Mais, Seigneur ! que ces gens sont stupides et lourdauds ! Il y a de quoi devenir fous. A midi j'eus mes tailles, les rapportai avec moi et dînai fort content avec mes gens. Ne sortis point de tout l'après-midi, restant au bureau jusqu'au soir et revins à la maison pour mettre quelques papiers en ordre puis, au lit ne me sentant pas très bien. J'avais mangé trop de homard au dîner avec Mr Hollier venu chez nous et ne tarissant point d'éloges sur ce mets.
19 mai
artsper.com
Levé et au bureau toute la matinée. A midi j'emmenai Mr Deane récemment arrivé à Londres dîner chez moi. Après l'avoir quelque peu gourmandé et bien conseillé sur la façon dont il exerce la charge à Harwich, détenue grâce à mon influence, et après avoir affirmé que j'étais résolu à demeurer son ami, nous nous entretînmes de son navire, le Rupert, qu'il construit. C'est une fort belle réussite qui lui vaut d'être très honoré, et moi aussi pour l'avoir recommandé. Le roi, le duc, tout un chacun déclarent en effet que c'est le meilleur navire jamais construit. Puis il se mit à m'expliquer sa façon de calculer le tirant d'eau déplacé par un navire, secret qui lui vaut l'admiration du roi et de tout le monde, et il est le premier à être parvenu à prédire avec certitude le tirant d'eau d'un navire avant son lancement.
Je dois avouer que je suis bien aise du succès qu'il connaît et je m'émerveille de l'assurance de Castle qui a lui sous-évalué le tirant d'eau que m'avait communiqué Deane, à telles enseignes que je fus trop embarrassé pour faire état de ces calculs ou dire qui en était l'auteur. Castle m'avait demandé sitôt qu'il avait vu les calculs de Deane, si celui qui les avait faits avait jamais construit un navire, ce qui ne fit qu'accroître mes doutes à son égard.
Après son départ fus au bureau où j'avais beaucoup de travail et où de nombreuses personnes mes voulaient parler. Rentré tard chez moi heureux d'avoir un peu la paix.
20 mai
Jour du Seigneur
A l'église ce matin avec ma femme. A midi dînâmes tout à fait dignement seuls tous les deux. Après le dîner ma femme et Mrs Mercer s'en furent en voiture à Greenwich pour servir de marraines à l'enfant de Mrs Daniel, moi je fus à Westminster et directement chez Mrs Martin. Je fis là ce que j'avais en tête. Elle était restée toute la journée chez elle pour me voir. N'étant pas trop satisfait de sa trop libre et licencieuse compagnie m'en fus à l'abbaye de Westminster où j'entrai en conversation avec Mr Blagrave qui m'apparaît comme un homme de sang-froid et de calcul sachant obtenir argent et promotions. Rentre en voiture à la maison, puis par le fleuve, après m'être entretenu un moment avec Mr Yeabsley que j'avais rencontré et fait monter avec moi dans ma voiture et qui, à ce jour, offre 100 £ à milord Ashley comme gage d'amitié relativement à ses comptes que nous examinons actuellement. Milord les a acceptés ce qui, me semble-t-il, confirme en fait de corruption les pires rumeurs colportés sur son compte. Rendis visite à tous les navires d'avitaillement pour voir à combien se montaient leurs effectifs.
Puis à Deptford m'enquérir d'une petite affaire. Retour par le fleuve, lisant à l'aller comme au retour Faber fortunae de milord Bacon, que je ne saurais jamais trop lire. Et retour à la maison où je vois que ma femme est rentrée fort satisfaite de la façon dont on la reçue là-bas. Elle est marraine et tint l'enfant sur les fonds baptismaux, il s'appelle John.
Donc retour à la maison et après avoir mis de l'ordre dans mes papiers et soupé, au lit, souhaitant me lever tôt demain matin.
21 mai 1666
Levé entre 4 et 5 heures, mis bon ordre à plusieurs documents, puis au bureau où tînmes réunion extraordinaire. Mais, Seigneur ! quelle torture que de me voir à ce point incapable de rendre compte de mes affaires de subsistances ! Cela me décourage en tous autres domaines, si bien que jamais comme aujourd'hui je ne ressentis plus grande honte au fond de moi-même, ni plus grand souci relativement aux affaires publiques. Mais j'aurai raison de ces difficultés dès que possible.
A midi dînai chez moi, puis arrivée de Balty, frère de ma femme, et de sa femme. Il est à terre ayant quitté la flotte pour un ou deux jours.
Me rendis, non sans précipitation chez milord Ashley. Il est stupéfiant de voir dans quel esprit de faveur et néanmoins de discrétion, milord Ashley agit envers Mr Yeabsley pour ce qui touche aux affaires de ce dernier. Aussi ai-je lieu de penser que nous traiterons ses affaires d'une façon fort civile. Mais c'est la chose la plus extraordinaire à observer et je n'eusse manqué cette scène pour tout l'or du monde.
Ayant terminé notre travail en ces lieux tout en ayant bien avancé dans notre examen des affaires de Yeabsley, me rendis avec sir Hugh Chomley chez milord Belayse arrivé de Tanger lui rendre visite, mais milord est sorti. Un peu à la Grand-Salle pour quelques affaires et retour chez moi par le fleuve. Allés avec ma femme, son frère, sa belle-sœur et Mrs Mercer jusqu'à Islington, notre grande excursion, où nous mangeâmes et bûmes. Mais à la faveur de conversation je me réjouis énormément de la façon dont Balty s'acquitte de son travail d'officier de rôl e et je fonde de grands espoirs sur lui. Me félicite de tout cœur de lui avoir trouvé ce travail.
Rentré tard chez moi et, au lit. Ils couchent eux aussi à la maison, Balty ayant l'intention de regagner la mer demain.
22 mai
artmajeur.com
Rentré travailler et faire mon courrier, le soir à la maison souper et, au lit.
23 mai
artmajeur.com
Levé dès 5 heures et à mon cabinet de travail où mis diverses choses en ordre puis sortis en direction de Whitehall rendant visite en chemin à milord Belayse. Fus à son chevet et il me fit une description longue et complète de l'état de ses affaires de Tanger au moment où il les avait quittées. Se déclare entièrement satisfait des soins que je montre. Paraît plaider habilement en faveur d'une augmentation des effectifs postés là-bas. Me narra toute l'histoire de ses gains dus aux prises de guerre effectuées aux dépens de la Turquie, il reconnaît qu'elles lui ont procuré 5 000 £. Me promit les mêmes bénéfices que ceux destinés à Povey. Au bout du compte le juge fort subtile. Le quittai et me rendis à Whitehall en présence du duc d'York, traitâmes nos affaires ordinaires et je me soulageai en disant deux ou trois choses d'importance que j'avais sur le cœur relativement au salaire de Lanyon, que j'ai fait fixer à 150 £ par an. A Westminster afin de veiller à l'obtention de petites tailles au lieu de grandes, mais cela n'ira point sans tracas.
Me dirigeant vers chez moi rencontrai sir Philip Warwick à qui je parlai de ce sujet, il se montre hésitant. Causâmes ensuite du manque d'argent dont souffre la marine. Il rend désormais la nouvelle loi entièrement responsable et reconnaît avoir fait preuve de sottise en jugeant que cette loi valait qu'il cédât aux pressions. Est profondément affligé de voir où tout cela risque fort de mener.
A la Régie auprès des commissaires afin d'organiser une rencontre entre eux, les autres et moi-même au sujet de nos liens avec la Régie à Tanger. Un peu à la Bourse, rentré chez moi avec Creed, trouvai ma femme dînant avec Mr Cook qui se rend à Hinchingbrooke. Après le dîner sortons, Creed, ma femme, Mrs Mercer et moi en voiture. Les laissai à la nouvelle Bourse, fus à Whitehall où demeurai dans les appartements de sir George Carteret en attendant la fin du Conseil privé. Puis tous deux, nous en étions convenus ce matin, fûmes au Parc en passant par Tyburn, dans son carrosse. Nous entretînmes de la situation financière de la marine et aussi de la situation du royaume, constatant à quel point il est difficile de faire rentrer davantage d'argent. Et de nous entretenir aussi de notre bureau, sir George m'avertissant qu'il y a mes ennemis au même titre que les siens. Il cite milord Brouncker qui a tenu d'étranges discours contre moi. Il me conseille d'être sur mes gardes. A moins de m'adonner trop aux plaisirs, ils auront fort à faire.
Nous restâmes un long moment à aller et venir dans le parc, nous rentrâmes et il me déposa à Charing Cross. Me rendis chez Mrs Pearse reprendre ma femme et Mrs Pearse. Je constate là que son nouveau portrait par Hayls ne plaît point à Mrs Pearse, à moi non plus car il n'a rien d'imposant, n'est point très ressemblant ni très habilement peint.
A la maison souper et, au lit, ayant depuis peu l'œil droit douloureux et plein d'humeurs en raison, pensé-je, du fait que j'ai depuis peu changé de brasseur et que je bois de la bière à 8 shillings.
24 mai
Levé de très bonne heure, beaucoup travaillé dans mon cabinet puis au bureau où fus occupé toute la matinée. A midi interrompîmes nos travaux. Cela faisait un an que je n'avais pas vu sir William Coventry ainsi que tout le Conseil de si plaisante humeur, du fait du ton plaisant dont sir William Batten contredisait les autres, affamé qu'il était et désireux de s'en aller.
A la maison, Mr Hunt dîna avec moi, mais je fus empêché de dîner avant 4 heures par sir Hugh Cholmley et sir John Banks venus pour quelque affaire de Tanger. A leur départ dînai. Mr Shipley arrivé depuis peu de la campagne est venu nous voir, ce dont je me réjouis. Tout allait bien là-bas à son départ mais je sens que l'on y est quelque peu chagrin au sujet de milord à l'idée qu'il encourt la disgrâce du roi. Mais ce n'est pas du tout le cas, ainsi que sir George Carteret me l'a assuré.
Après leur départ fus travaillé au bureau, le soir sortis seul avec ma femme, fûmes à Kingsland, puis retour et, au lit. j'ai toujours l'œil droit fort mal en point victime des chassies dont il souffre depuis 4 ou 5 jours.
25 mai 1666
Levé de bonne heure et travail à mon cabinet, puis à la Bourse causer avec le capitaine Cocke. Il me dit que mon argenterie est prête et me sera bientôt envoyée. Et de faire une nouvelle proposition, de nous livrer mille tonnes de chanvre, me dit que cela me rapportera 500 £ si l'affaire est conclue. Ce sont là propos agréables. Puis fus trouver sir George Carteret qui s'occupe ce jour de la distribution des billets de solde avec sir John Mennes. Je demeurai un temps avec eux, jamais venu auparavant en ces lieux. Fus dîner avec eux, bon dîner. Puis vint, provenant de France arrivé ce jour, Mr Browne de Saint-Malo qui, entre autres, m'explique la signification de la coutume qui consiste à poster tous les soirs des chiens au-delà des remparts, chiens dont on dit qu'ils assurent la sécurité de la ville, mais ce n'est point la vraie raison, qui est de leur faire garder les ancres, les câbles, les bateaux à sec sur le rivage, qui pourraient bien être volés pendant la nuit. Et ils sont postés là tous les soirs. Tous les matins un homme muni d'une corne les rassemble, ils rentrent en grand ordre. artmajeur.com
A la maison, je trouve Mrs Knepp dînant avec ma femme. Elle est maintenant très forte et à moins de quinze jours de son accouchement. Mais j'avais l'esprit occupé par le travail aussi ne m'amusai-je point, les laissai donc promettant de revenir et de sortir avec elles dans la soirée. A la Régie un rendez-vous ayant été fixé avec sir Stephen Fox, trésorier de la Maison du Roi afin de régler l'affaire de nos tailles. Nous y parvînmes d'assez belle façon avant une réunion prévue plus tar
Retour à mon bureau et sortis derechef pour aller trouver le capitaine Cocke. En compagnie de Mr Moore admirant la science du Dr Spencer ( note de l'éd. Célèbre hébraïsant et pionnier de l'étude des religions )
Nous entretînmes encore un peu de nos affaires puis à la maison. Mrs Knepp étant partie sortis avec ma femme et Mrs Mercer prendre un peu l'air, allâmes jusqu'à Hackney et retour puis, au lit.
26 mai
Levé de bonne heure et au bureau où passai toute la matinée. A midi dînai à la maison et derechef au bureau. Un moment au bureau des subsistances afin de comprendre un peu ce qui s'y passe. Au bureau j'expédiai beaucoup d'affaires à ma plus grande satisfaction et à la maison, souper et, au lit.
27 mai
Jour du Seigneur
Levai de bonne heure, au bureau jusqu'à l'heure d'aller à l'église. Copiai au net deux exemp
laires de mon testament datés de ce jour. A la faveur de ce document je donne 500 livres à ma sœur Pall, 2 000 £ à mon père pour qu'il subvienne à ses besoins ainsi qu'à ceux de ma mère, le reste de ma fortune à ma femme. Mais j'ai fait en sorte qu'elle dispose en tout état de cause de 2 500 £ en retranchant au besoin sur ce que j'ai donné à mon père et à ma sœur.
J'expédiai tout cela avant qu'il ne fut temps d'aller à l'église, retournai chez moi et à l'église avec ma femme. Retour à la maison pour dîner rejoints par mon oncle Wight, mon oncle et ma tante Norbury et Mr Shipley. Bon dîner et force gaieté. Nous séparâmes après dîner, fus pas le fleuve chez Mrs Martin et passai là une heure ou deux avec elle, son mari et Mrs Burrows, cette jolie personne. Un moment à la taverne du Cygne, puis chez moi par le fleuve et avec ma femme allâmes tantôt par le fleuve jusqu'à la hauteur de Greenwich, à seule fin de prendre l'air. Retour à la maison souper et, au lit, avec grand plaisir.
28 mai
Levé et à mon cabinet pour un peu de travail, puis un temps au bureau et comme convenu à la Régie où je passai toute la matinée à attendre le trésorier de la Maison du roi et de sir Stephen Fox. Mais point ne vinrent, aussi pris avec les commissaires de la marine toute cette peine pour rien et c'est en vain que nous avions espéré régler nos affaires. Retour à la maison où je trouve Mr Lovett et sa femme. C'est un joli couple et elle une femme aux belles manières. Ils dînèrent avec nous et le peintre Browne, elle joue fort bien du luth. Ma femme et moi prîmes grand plaisir en sa compagnie. Après le dîner nous séparâmes, fus au bureau, descendis ensuite par le fleuve jusqu'à Deptford, rentrai à pied jusqu'à Rotherhite puis retour au bureau soucieux de la manière dont il fallait que je répondisse à sir William Coventry sur les subsistances. Mais je m'en remets à Tom Wilson, je suis sûr qu'il aura préparé un registre à mon intention. Puis, au lit. Ma femme me déclare qu'elle a rencontré ce jour ma tante Wight et qu'elle a vu Mrs Margaret Wight, elle dit que c'est une des plus belles femme qu'elle ait jamais vues avec un nez et une bouche des plus remarquables. Elles allèrent voir la jolie Mrs Batelier, et de conclure qu'elle est plus jolie que Mrs Pearse que ma femme a aussi montrée à ma tante.
29 mai 1666
artmajeur.com Anniversaire du Roi et fête de la Restauration
Réveillé par les cloches sonnant d'un bout à l'autre de Londres. Levé avant 5 heures et au bureau où réunion. Fus grandement tracassé toute la matinée, me demandant comment je me pourrais tirer d'affaires l'après-midi lorsque sir William Coventry irait au bureau des subsistances pour voir quelle y est la situation, et me sembla-t-il du fait qu'il s'y rendit sans m'en parler mais seulement à sir William Penn, il fallait que ce fût dans l'intention de constater mes négligences. Néanmoins sir William Penn m'ayant invité sans excès de cérémonie j'allai dîner à son bureau avec sir William Coventry. Fîmes belle et bonne chère et écoutâmes force histoires plaisantes de la bouche de sir William Coventry, mais n'y pris point plaisir. Je m'étais néanmoins hier soir préparé un peu à rendre compte de la situation et sans appréhension je me rendis avec eux au bureau des subsistances. Là, aussi incroyable que cela puisse paraître, je m'acquittai fort bien de ma tache à leur entière satisfaction. Je surmontai cette deuxième anicroche en ce domaine, et si je me retrouve jamais en pareille situation ma perte sera chose méritée.
M'en retournai à mon bureau d'un cœur joyeux. Ma femme m'y vient dire que si je souhaite voir la plus belle femme d'Angleterre il me faut venir à la maison incontinent. Et ne voila-t-il pas qu'il s'agit de la jolie demoiselle de notre paroisse qui, jusqu'à présent avait son banc de l'autre côté, en vis-à-vis de notre galerie, et qui s'est depuis mariée. Avec Mrs Anne Jones femme de cette paroisse qui danse de belle façon et avec une autre dame elle vint voir ma femme. Fus donc à la maison où je trouvai également Creed. Je passai avec eux l'après-midi. C'est assurément une jolie brune du nom de Mrs Horsley. Mais Seigneur ! quelle misère de voir que ma nature ne put résister à la tentation et que je ne pus m'empêcher de les inviter à Vauxhall, au jardin de printemps, lors même que je venais à peine de recevoir les procès-verbaux relatifs à nombre d'affaires extraordinaires. Je n'y pus cependant rien. Les envoyai devant avec Creed et fis uns partie de mon travail puis les suivis et les retrouve sous une charmille. Ils avaient rencontré Mrs Pearse et des gens qui l'accompagnaient. Je leur consacrai 20 shillings en ces lieux, nous égayâmes fort. Il y avait là un homme qui imitait de la voix toutes sortes d'oiseaux, chiens, porcs, ce qui était fort plaisant. Restâmes jusqu'au soir, puis déposâmes Mrs Pearse à la nouvelle Bourse, quant à nous prîmes une voiture, raccompagnâmes Mrs Horsley chez elle et rentrâmes non sans grandes difficultés du fait des feux de joie dans la rue en ce jour de fête. Mais Seigneur ! quelle différence entre la foule de gens qui se trouvaient de l'autre côté et le peu qui se trouvaient du nôtre, partie du Temple du côté de la Cité. Il y a de quoi s'étonner de la différence d'état d'esprit entre ces deux parties de la population, sans parler pour la population tout entière de la différence entre ce qui se fait à présent et ce qui se produisit le soir où Monck fit son entrée dans la Cité ( 11 février 1660 ). ........
<< Après être rentré à la maison je restai avec le capitaine Cocke jusqu'à une heure du matin, occupé à rédiger avec lui un contrat censé être soumis demain au duc d'York pour lequel, si les choses vont bien, il me promet 500 £. >>
30 mai
Levé et à mon bureau afin de régler quelques affaires avant de comparaître devant le duc d'York aujourd'hui. Puis à Whitehall aux appartements de sir William Coventry où j'apprends que le Duc est parti chasser avec le roi. Après m'être entretenu avec sir William fus par le fleuve à Westminster. Rédigeai là un projet d'ordre de paiement destiné à la signature de milord le trésorier général pour que l'on me fasse quelques petites tailles en lieu et place de deux grandes de 2 000 £ chacune, ce qui me permettra de régler de petites sommes. Je montrai le document à sir Robert Long, dont j'eus l'accord puis fus chez sir Philip Warwick à qui je le donnai pour qu'il le fît signer.
Retour à mon bureau où travaillai. Tantôt vers midi on me fait savoir que mon père et ma sœur sont arrivés. Je les attendais aujourd'hui mais point de si bonne heure. Vais les trouver et me réjouis de tout cœur de les voir, en particulier mon père qui, le pauvre homme ! a fort bonne mine et a effectué ce trajet à cheval dans d'excellentes conditions, mais il voit et entend fort mal. Je dînai avec eux, ma femme étant partie pour Barnet à leur rencontre avec Will Hewet et Mrs Merceer alors qu'ils étaient arrivés par Ware.
Après le dîner je les laissai s'habiller et je sortis pour, comme convenu, trouver milord Ashley. Il est étonnant de voir avec quel talent celui-ci dissimule sa partialité relativement à l'affaire de Yeabsley, personne au monde ne s'en méfierait, mais il se trouve que je suis au courant de sa vénalité. A Whitehall où j'attends avec Creed la fin du Conseil privé, espérant qu'il y aurait une réunion de la commission de Tanger qui permit de mettre un terme à l'affaire de trésorier général et obtins mon autorisation de paiement. Puis chez Lovett, où je constatai que rien n'est fait. Revins faire un peu de travail au bureau, puis descendis la Tamise jusqu'à Deptford, puis derechef sur le fleuve et retour tardif. Ayant signé certains documents et donné des ordres relatifs au travail, à la maison où ma femme est rentrée. Souper avec mon père, de fort bonne humeur, ma femme fort amène envers lui et Pall.
Après le souper, au lit, ayant quant à moi sommeil et encore fort mal à l'œil droit, comme depuis cinq ou six jours, ce qui me met sens dessus dessous.
Ce soir ma femme me dit qu'elle a appris que la femme de Balty a accouché avant terme à la suite de quelque chute ou crise d'un enfant entièrement formé mais mort. Si sa santé à elle n'est pas en cause, nous n'avons point de raison d'être désolés, car il vaudra mieux pour lui comme pour elle, qu'il reste encore quelque temps sans enfant.
31 mai 1666
Ce matin réveillé de très bonne heure par un tonnerre et une pluie extraordinaires. Je me rendormis donc et me réveillai à une heure fort tardive. Comme c'était aujourd'hui jour de fête, que j'avais fort mal à l'œil et que j'avais fort peu dormi, restai au lit jusqu'à 9 heures Je me levai et vis que toute ma maisonnée était debout. Ma sœur est jolie femme, avec un corps bien fait, sans grosseur excessive, contrairement à ce que je pensais, mais couverte de taches de rousseur et sans beauté de traits. Sortis par le fleuve, naviguai parmi les bateaux et fus à Deptford et à Blackwall pour mon travail. puis rentrai à la maison et dînai avec mon père, ma sœur et ma maisonnée. Etions tous de belle humeur. Entre autres d'un moineau que notre Mrs Mercer élève depuis maintenant trois semaines, il est si apprivoisé qu'il vole de-ci de-là, va sur la table, mange, picore et agit si plaisamment en toutes choses que nous nous réjouissons fort. francefineart.com
Après dîner à mes papiers et à mes comptes du mois afin de tout mettre en ordre. C'est aujourd'hui jour de jeûne public où l'on doit prier pour le succès de la flotte. Mais il est piquant de voir à quel point on se soucie peu de l'observance de ce jeûne qui fit l'objet d'une déclaration trop tardive pour être lue dimanche dernier dans les églises, mais fut ordonnée par voie de proclamation depuis lors en raison, je suppose, de nouvelles annonçant soudainement une sortie de la flotte hollandaise.
M'occupai de mes comptes et les mis en ordre mais, à ma grande désolation, je constate que j'ai perdu près de 20 £ par rapport au mois dernier. Parce que je fus obligé de restituer à Downing le fabricant d'ancres 50 livres qu'il m'avait offertes. Je suis fort satisfait constatant que je suis à la tête de 5 200£. Ayant terminé soupai avec mon père puis finis de recopier mes comptes et, au lit.
<< Ces remarques à propos de Mr Homewood concernent en réalité le 1er juin >>
Arrivée ce jour de Londres de Mr Homewood. Je l'amenai à la maison < dans la soirée > et allâmes dans mon cabinet de travail. M'entretins avec lui de mes affaires de subsistances. J'ai l'intention de l'employer, ce qu'il souhaite aussi. Mais il déclare librement qu'il n'entend point ces affaires aussi bien que d'autres et souhaite être informé de leur nature avant de s'y lancer. Cela m'est agréable aussi l'emmenai-je chez Mr Gibson afin qu'il s'en entretienne avec lui. Et derechef retour à la maison m'occuper de mes comptes.
Ainsi ce mois se termine-t-il, alors que j'ai l'esprit préoccupé de voir que je ne parviens point à être à la hauteur de ma tâche relativement aux subsistances. Cela m'est à charge, aussi longtemps que je paraîtrai aussi peu à mon avantage à cet égard, m'entrave et mine mon courage en toutes autres choses qui sont de mon ressort. Sans parler de mes craintes de déplaire pour cette raison à sir William Coventry. Mais j'espère en peu de temps porter remède à tout cela.
Pour ce qui touche aux affaires publiques : comme l'on a appris récemment que la flotte française est arrivée à La Rochelle, encore que je ne sache point quelle est la véracité de cette nouvelle, notre flotte s'est divisée. Le prince Rupert se dirige vers l'ouest avec environ 30 navires. L'on pense qu'il s'agit de chercher l'engagement avec les Français afin de les empêcher de venir s'unir aux Hollandais.
Milord le duc d'Albemarle est resté dans les Downs avec le reste de la flotte et a l'intention de faire voile incontinent vers le Gunfleet ( nte de l'éd. Bas-fond au large de la côte de l'Essex).
à suivre........
1er juin 1666
En ayant été..........
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