Août-
Septembre 1894
Ce lundi soir
Mon cher ami,
Il est 9 heures et je ne veux pas me coucher encore.
Pour vous remercier de toutes vos amabilités de tantôt je continue mes modestes exercices sur Bouvard et Pécuchet, pour vous, et sur la musique. Depuis le peu de temps que je vous connais, j'ai déjà été tant de fois l'un et l'autre de ces deux imbéciles avec vous, que je n'aurais pas besoin d'aller chercher bien loin mes modèles.
Dormez bien, je vous dis comme Horatio : " Bonne nuit, aimable prince, et que les essaims d'anges bercent en chantant ton sommeil.
Dix heures moins 1/4
Cher ami,
Je n'ai pas d'idées et cela ne peut décidément pas me mener jusqu'à l'heure de me coucher.
Gardez-le tout de même et nous verrons ensemble si on ne pourrait pas faire quelque chose là-dessus.
Une autre fois je vous ferai un autre cadeau, fait pour vous, plus précisément travaillé, et " dans le genre sérieux ". J'espère que ce sera moins détestable. Ce ne sera jamais bien, mais je ne peux vous donner que ce que j'ai. Je tâcherai seulement de travailler avec plus de soin, avec " amour " comme disent les ciseleurs. Ce sera un de ces petits travaux qui dans les boutiques portent le nom de Souvenirs et qui sont souvent de bien laides petites choses de mauvais goût, d'une intention excellente, touchante et puérile.
Votre
M.P.
lintervalle.blog/
J'ai oublié ma réponse sur Massenet, " Une chanson d'adieu, c'est toujours la même note ". Je suis un peu fatigué, comme ces mélancoliques facéties, laborieuses et haletantes peuvent vous le prouver, sans cela je l'ajouterais. Et je vous promets de ne jamais publier un Bouvard sur la musique sans y insérer cette citation expiatoire et vengeresse.
Septembre 1894
Trouville Roches Noires, Calvados
Ce dimanche matin
My little Master
Votre petit mot daté vendredi soir arrive seulement ce matin. - ? - Il fait un temps charmant, des clairs de lune dont vous lisez une interprétation selon vous. Madame Straus à qui j'ai parlé de vos " jolies qualités " et mieux sera ravie de vous recevoir. Donc sans vouloir prendre sur moi un tel voyage je crois que si vous devez venir deux jours à la mer, le meilleur moment serait maintenant - et à Trouville. Si vous ne pouvez pas - comme Maman partira bientôt vous pourriez venir après son départ pour me consoler. Mais dites-le car dans ce cas je resterai à l'hôtel après le départ de Maman pensant que vous habiterez probablement le même puisque c'est le meilleur. Si vous ne veniez pas ou veniez plus tôt, j'habiterais après le départ de Maman chez les Straus ou plutôt à Etretat chez un ami. Pourquoi " Marcel le poney " ? Je n'aime pas cette nouvelle chose. Cela ressemble à Jack l'Eventreur et à Louis le Hutin. N'oubliez pas que ce n'est pas un surnom et que je suis, Reynaldo, en toute vérité
Votre poney
Marcel.
Avez-vous vu Monsieur Carvalho. Je vs trouve sévère pour Lohengrin. Le rôle du héraut et du roi tt entier, le rêve d'Elsa, l'arrivée du Cygne, le chœur du juste, la scène entre les 2 femmes, le refalado, le Graal, le départ, le présent du cor, de l'épée et de l'anneau, le prélude, est-ce que tt cela n'est pas beau ?
( Hiver 1894 )
" Ni tenir une épée, un lys, une colombe,
Dans ma main que son corps tremblant échappe et bombe
Ne vaut tenir ta main, car le lys est moins pur
Et l'épée est moins noble. "
J'ai peur que cette improvisation ne me mène loin et comme j'ai déjà une tr. longue trotte à fournir aujourd'hui, déjeunant à Neully, Je m'arrête. Au moins le second vers vous sera-t-il commode pour imiter Mounet Sully. Mon cher petit à 1 heure je serai 6 rue Borghèse à Neuilly à 5 heures je ne sais pas, si je suis dans ces quartiers je passerai " chez vous " et non chez moi, si non à ce soir 7 h 1/2. Mais dans l'après-midi et " certainement " jusqu'à 4 heures je serai 6 rue Borghèse. Audi, et si vis, veni, gratissimus eris. Je n'ai pas la moindre envie d'aller chez le poète qui m'aime. Au contraire cela m'amusera beaucoup de me faire conduire par mon maître chez Mad Alphonse Daudet. La carte ( dont je n'arrive pas à me rappeler l'envoi ) ne pouvait d'ailleurs que signifier que ce désir, que la politesse ne feint pas souvent seule chez moi. - Comment la dame de la rue Cambon qui est " une aimable et habile personne " voit-elle des gens si ennuyeux que ceux que vous énumérez. La société est mal faite. Je vous quitte sur cette considération si neuve
" Tout " à vous.
Marcel.
Lettre 14
( Fin 1894 )
Vous êtes un ange et j'aurais bien envie d'aller vs dire bonsoir si vous ne me l'aviez défendu Un peu inquiet pourtant de n'avoir pu lire votre lettre. Mais non je ne sais pourquoi je dis cela car je ne le suis pas du tout.
Je serai à 10 h. précises chez mon concierge. Mais d'autre part si vous voulez que j'aille à
" Andromaque " je l'aimerai bien aussi. - Pour demain soir le mieux serait peut'être que j'aille vous attendre à 2 portes de Mme Hochon. En fiacre, je n'aurais pas froid. Vous auriez q.q. moments de plus à rester - et surtout la route à faire avec vous s'
Lettre 24
( Printemps 1895 )
Mon enfant
.
Tout a été remis Fg St Honoré. - Je viendrai donc vers 4 1/2. J'ai causé très longtemps hier soir avec Fauré qui est vraiment bien gentil et Madame Sulzbach ne parvient pas à me le gâter en disant qu'elle donnerait tout Beethoven pour une chose de Fauré. Nous avons parlé de toi très longtemps et je crois que je l'ai fait très intelligemment. Il m'a dit que toute sa musique devait bien t'agacer puis que les mêmes vers avt dû prendre pr toi leur expression définitive etc. Et j'ai dit que tt au contraire, je t'avais plus souvent entendu chanter ses donneurs de sérénade que les tiens, que tu chantais si bien le Cht d'Automne. Tu es un petit gentil.
Ton ami.
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