Lettre à Madeleine
13 décembre 1915
Mon amour adoré, 3 lettres de toi, celle du 29 nov. qui arrive en retard celle du 4 et du 5, Je t'adore. Hier j'ai passé à la 7è Cie pr remplacer l'officier parti en permission, mais ne modifie pas l'adresse, ce n'est que pour quelques jours. Nous étions en réserve. Résultat nul. Tout le monde fatigué. Mais les gros sont furieux, ils n'y viennent jamais voir dans les tranchées. Pas pu t'écrire hier soir. Dormi par terre ou plutôt pas dormi par terre... Je t'adore. J'ai maintenant touts les renseignements pour la perm. Il est probable que comme officier voyageant en 1è je trouverai place dans le premier bateau partant. Donc si tu n'es pas au débarquement et que je n'ai pu te prévenir ( je le ferai autant que possible ) je prendrai une voiture à n'importe quelle heure et me ferai conduire à l'école de filles de Lamur. Si c'est nuit, je frapperai en t'appelant. Je crains que d'ici là cette histoire de tranchée pas reprise, mais que nous n'avons pas nous, ne nous occasionne bien des misères. Les souffrances de l'infanterie sont au-dessus de tout ce qu'on peut imaginer, surtout en cette saison et dans cette sale région. Les autres armes ne font pas la guerre. - Je t'adore. Ta pensée m'anime. Hier où nous avons été à deux doigts de partir à l'assaut, je n'ai pas eu une minute de tristesse et Dieu sait s'il y avait de braves gens et de gens braves tristes, mon lieutnt Cnt de Cie qui est le fils du capitaine Deloncle commandant le vaisseau la Bourgogne qui périt dans ton enfance et dont le naufrage fit beaucoup de bruit, m'avait donné des commissions en vue d'accident pour lui. Mon amour, je n'étais pas triste je pensais à toi. Tes cheveux sont admirables, amour, n'en dis aucun mal. Je t'adore et je prends follement ta bouche. J'adore ce que tu dis de nos étreintes. Je te rappelle que plusieurs fois déjà je t'ai demandé d'insister sur ta croupe et la 9è porte que je connais encore mal. Je prends profondément ton parvis. J'adore la forme de ton parvis. Ma bouche follement amoureuse boit follement la liqueur divine que tu distilles. J'aime que tes sensations se précisent, amour ! Maintenant je jouis comme un fou en pensant à toi ! C'est merveilleux ! J'adore tes cheveux embrouillés ma très jolie. J'adore tes parties rousses "...??? " quelques parties de ta toison secrète. J'adore le parfum de tes cheveux. J'adore tes cils palpitants. Tu es mon esclave chérie. L'opinion de Bourget est fausse pour les très très grands artistes. Racine, Goethe, Hugo même, Gautier ont été très heureux par les femmes et bien d'autres.
Ma solitude est avec toi, d'ailleurs je n'aime pas la solitude, je l'aime à 2 c'est-à-dire avec toi. Je t'adore, je te déshabille, je te prends follement, follement : oui, amour, le 1er passage dans la 9è porte sera un peu douloureux. Mon amour je t'aime d'une tendresse enragée et je prends ta bouche.
Gui
Lettres des 14, 15 et 16 décembre. Le poète écrit : " Si tu savais comme on est las dans cette cagnât où il pleut... Dis-moi, amour si la largeur de tes hanches est supérieure ou inférieure à la largeur de tes épaules... Mon amour, j'aimerais que m permission coïncidât avec tes vacances... " Il poursuit avec le souvenir de leur 1è rencontre dans le train, et son grand besoin d'amour.
18 décembre 1915
Mon amour,le colonel m'a fait dire de me tenir prêt à partir en permission le 23 - Ce soir nous remontons en 1è ligne. Je n'ai pas eu de lettres de toi hier. - Hier en reconnaissance, boue énorme, obus. Je suis fatigué de devoir faire cette rote ce soir.
Mon amour, j'ai pensé à toi toute la nuit. Tu es mon amour exquis et j'adore tout ce que tu penses de notre amour. Dès que je pourrai je télégraphierai à Lamur. En principe cette lettre doit te parvenir le jour de Noël. Je serai en route, mais avant tout je t'embrasse bien pour la Noël. Prends tous les renseignements pour les démarches que j'aurai à faire pr avoir la plus longue perme possible. Je crois que j'arriverai juste aussi pr ta permission à toi ô mon amour adoré.
Je pense à ta beauté, à ta chère beauté potelée. Je pense à ta toison, aux 9 portes adorables et au gouffre rose et blanc de ta bouche exquise.
Je pense à ta chair duvetée, à ta grande porte. Tu es délicieusement gracieuse mon amour.
Mon amour, un pâle rayon de soleil joue sur quelques pâles bouleaux. Il y a longtemps que je n'avais plus vu de soleil. Mais la boue est épaisse d'une façon inimaginable.
J'attends ce 23 avec impatience, encore 6 jours ! Et toi mon amour ? Je trouverai la réponse à Lamur.
Au reçu de cette lettre n'écris plus, mon amour, moi je te tiendrai par des télégrammes au courant de tout mon voyage. Je t'adore je t'embrasse passionnément, mon âme. Je prends ta bouche, nos langues jouent divinement et nos mains caressent nos corps. Je baise tes longs cheveux et je t'adore amour chérie, belle, divine, ma Madeleine à moi.
Gui
20 déc. 1915
Mon amour, je n'ai pas pu t'écrire hier. Je n'ai pas eu une minute à moi. J'ai reçu ton adorable petite lettre du 13. Ce petite poulet me promet une nouvelle lettre-volupté qui arrivera peut-être aujourd'hui. Mon amour au reçu de cette lettre écris-moi une lettre poste restante à Marseille ou plutôt non, écris-moi encore ici jusqu'à ce que tu reçoives le télégramme que je suis réellement parti, parce qu'avant d'être parti on n'est pas sûr. Je suis de nouveau en première ligne. Je t'ai écrit, mon amour le 18 où je te faisais part de la reconnaissance de la veille et que nous remontions aux tranchées le soir. Donc je suis parti avec la 7è Cie le lieutnt qui la commandait depuis 13 mois est allé suivre un stage de mitrailleur. Moi je remplace le lieutnt permissionnaire après qui je dois partit et 1 nouveau capitaine est arrivé. Nous sommes 2 officiers. Mon capitaine qui vient des chasseurs d'Afrique, vient du Maroc, si bien que nouveau fantassin je suis plus au courant que lui, plus nouveau que moi. Nous sommes partis à la nuit, il y avait clair de lune, la boue infâme de la veille avait séché. Comme j'avais fait la reconnaissance c'est moi qui allais en tête de la colonne. Comme je craignais la boue des boyaux nous allions à découvert. A la lisière d'un bois je vois des canons sans abri mais recouverts de serpillière, j' ai pensé à ma pièce. C'est curieux. Aussitôt j'entends des voix qui chuchotent : " C'est peut-être la Cie à Kostro " ( c'est l'abréviation dont on me désignait entre sous-off. à ma batterie, les hommes eux qui n'ont jamais pu dire exactement le nom prononçaient Kostro l'exquis ou Cointreau Whisky selon qu'ils étaient Picards ou Flamands ). J'ai entendu tourné la tête en un clin d'oeil arrêté la la Cie et aperçu dans les arbres mes anciens camarades, l'adjudant de la batterie un nommé Benoît qui est buraliste à Carcassonne et le chef de la 3è pièce Horb cultivateur de l'Aisne, ils m'ont reconnu aussitôt et j'ai vu leur émotion qui m'a fait quelque chose, surtout qu'il s'agit de gens très froids surtout Horb. La Batterie a bien avancé, elle est près des secondes lignes dans un endroit dangereux et les canons n'ont pas d'abris. J'ai causé deux minutes avec mes anciens camarades et ai eu le temps d'apprendre des choses qui m'ont fait bien de la peine et dont je ne connaîtrai jamais les détails vraisemblablement, car j'ai eu à peine le temps d'échanger quelques mots avec eux et qui sait quand je les rencontrerai de nouveau ! Quoiqu'il en soit, presque toute ma pièce a été massacrée ou blessée. Mon maître pointeur Louis Déportère, de Lille a été tué. C'était un garçon au-dessus ( comme âme non comme instruction ) de sa condition d'ouvrier, il ressemblait au portrait de Beethoven jeune, grand front pur, très doux, très volontaire, très sérieux. Pointeur épatant, 1er prix de tir. Je lui avais trouvé comme parrain et marraine Gaston Picard ( qui rédige le Bulletin des écrivains ) et sa femme que je ne connais pas. Déportère était jeune marié et avait laissé sa femme enceinte à Lille. Il n'avait jamais pu avoir de nouvelles d'elle ni de personne de sa famille. Il y a 12 jours j'ai reçu un mot de Gaston Picard, me disant que Déportère était content parce qu'il avait eu enfin des nouvelles de sa femme et d'une fille qui était née depuis la guerre.
C'est ton amour, Madeleine, qui m'a protégé. Si j'étais resté à ma batterie nul doute que j'eusse été au moins blessé, les plus exposés étant le pointeur et le chef de pièce.
Tout cela fut dit en quelques secondes et en marche de nouveau. La relève se fit épatamment, j'avais reconnu le secteur, qui est un peu à droite d'où nous étions et plus dangereux. Hier j'ai été exténué. Nos prédécesseurs n'ayant rien fait, tout est à faire. J'ai passé la nuit à faire faire des sphères, à les faire jeter, à faire de nouveaux créneaux, placer des chevaux de frise. Mais il y a bien du travail, ces cochons de Boches nous ont lancé quelques rafales qui ont fait ébouler la tranchée. Heureusement pas de mal. Mais nous sommes mal placés et il fait clair de lune. Extrêmement dangereux pour travailler. Hier matin le colonel a passé et m'a redit que je partirai dès que l'officier permissionnaire sera rentré et vraisemblablement le 23. Je commande ici la 2è section, ma cagnat est petite mais bien et bon augure ! elle est dans un petit boyau détourné qui s'appelle le boyau Paget c'est presque Pagès, quand pourrai-je t'enfiler pour de bon mon petit boyau Pagès !! Ma cagnat s'appelle Parvis Madeleine c'est moi qui ai fait graver cela sur la craie, à l'entrée, l'entrée est très basse à cause des bombes 50 centimètres, sur la 1è marche descendante il y a mon sac et c'est là que mon ordonnance Crapouillot, le plus rigolo des petits soldats, croix de guerre pr avoir fait seul dix prisonniers à la Côte de Tahure et s'être distingué à la côte 196 est en train de coudre un bouton à ma vareuse, sur la seconde marche ( chaque marche a 80 cm de longueur sur 90 de hauteur ) est mon brasero allumé, car il gèle, la nuit il y couche le soldat tourangeau Labin qui est ouvrier en bois et m'a fait l'aménagement. Pendu à la chandelle de droite est l'appareil Draeger qu'ont maintenant les officiers contre les gaz. Il est tout près et plein d'hyposulfite. Sur la troisième marche ma table où je t'écris ( assis sur la 2è marche ). C'est sur la 3è marche que la nuit dort Crapouillot après la 4è marche est mon lit en treillage ( système que j'importe de l'artillerie dans l'infanterie où on couche à même le sol ). Voilà mon amour chéri ce qui se passe. Les Boches travaillent beaucoup mais notre artillerie les embête. Moi j'attends ma permission je t'adore. J'adore ta volupté précise. Je prends ta bouche et ta langue. Ma main gauche caresse tes seins et la droite agace le petit ermite qui se contracte et s'épanche à force, sous mon doigt, longue exquise caresse où tu t'abandonnes, tu es ma fleur exquise et ma virilité se dresse en ton honneur, ma reine exquise.
Gui
P.S. Inscription sur la paroi de ma cagnat : Auque Segula clairon d'Inf. 3è Cie 2è section : à moi les femmes à poil à moi la gnôle à volonté.
Mon amour, je t'adore.
Gui !!