mardi 21 juin 2016

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 62 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )




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                                                          1662

                                                                                                                        1er Janvier 1662

            En m'éveillant brusquement, ce matin, je donnai un grand coup de coude à ma femme dans la figure et le nez, et la douleur l'éveilla, ce dont j'eus chagrin. Je me rendormis.
            Je me levai et partis en voiture avec sir William Penn pour aller à Westminster. En route, voyant qu'on jouait aujourd'hui Le Vicaire espagnol, je descendis et le laissai continuer seul, et je rentrai, envoyai un message chez le jeune Mr Penn et sa soeur pour les inviter tantôt avec ma femme et moi au Théâtre.
            Cela fait, Mr W. Penn vint me retrouver, et nous sortîmes ensemble à pied, allâmes chez le libraire et examinâmes quelques gravures et cartes pour ma maison. Puis nous rentrâmes dîner. Bientôt arrivèrent les deux jeunes Penn et, après avoir mangé une bourriche d'huîtres, nous allâmes en voiture à la comédie. Fort bien jouée, c'est une bonne pièce. Seulement , Diego, le fossoyeur chargeait excessivement son rôle.
            De retour ils restèrent avec nous jusque tard dans la soirée à jouer aux cartes, fort joyeusement
mais le plus plaisant fut que Mr Penn avait laissé son épée dans la voiture, de sorte que mon petit laquais et lui allèrent à la poursuite de la voiture et, par le plus grand des hasards, la retrouvèrent à la Bourse. Il reprit son épée.
            Et au lit.


                                                                                                                       2 Janvier

            Reçu une invitation avant de nous lever de la part de milady Sandwich pour venir dîner avec elle. Puis au bureau toute la matinée et à midi nous allâmes là-bas dîner. Ce fut un bon et grand dîner, et la société, Mr William Montagu et sa femme, qui me parut très loin de la beauté à laquelle je m'attendais après ce que milady m'avait dit, que je fus de mauvaise humeur toute la journée pour avoir vu mon attente si déçue, Mr Rumbold et Townshend et leurs épouses. Après le dîner retour par le fleuve et au bureau jusqu'au soir. Puis je partis, comme convenu, retrouver Mr Gaunt qui avait promis de me rencontrer au café pour me présenter Cooper, le grand miniaturiste, mais ils m'avaient fait faux bond, et je rentrai chez moi et restai à mon luth et à chanter jusqu'à presque minuit, et au lit.
            Sir Richard Fanshaw est arrivé inopinément du Portugal, mais personne ne sait pourquoi.


                                                                                                                       3 Janvier
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            Fait la grasse matinée. Puis levé et sorti pour aller en plusieurs endroits pour de menues affaires. Entre autres, chez Tom qui m'a donné de grands espoirs, il fera son chemin. Ce dont je me réjouis, et ne suis donc plus si pressé de lui trouver une femme. Puis dîner chez Mr Crew et sa femme. Après le dîner chez Faithorne, je lui achetai quelques gravures. A ce moment sont passés les gardes du corps du roi, celui-ci étant allé Lincoln's Inn cet après-midi pour voir les divertissements. Il y avait, selon une vieille coutume, un prince et toute sa noblesse, et d'autres occasions de réjouissance et de dépenses.
            Puis rentrai et montai dans ma chambre pour examiner des papiers et d'autres choses, fort troublé depuis quatre ou cinq jours par les grandes dépenses que je fais actuellement, et je le resterai tant que je n'aurai pas fait les comptes pour voir où en est ma fortune. Et c'est à quoi je répugne, par peur d'avoir trop dépensé, et je repousse, afin de pouvoir payer mon portrait et celui de ma femme, et le livre que j'achète pour le collège Saint-Paul, avant de faire mes comptes.


                                                                                                                      4 Janvier

            Chez moi presque toute la matinée. Accrochai des gravures pour voir quel effet mes candélabres d'étain que j'ai achetés feront dans mon atelier et mon vestibule. Allai ensuite, avec ma femme, par le fleuve à Westminster. Elle alla chez son père et moi à la Grand-Salle. Je fis quelques pas avec Mr Symons et Mr Chetwind qui avait un chien qu'un autre homme revendiqua comme étant le sien, mais Mr Chetwind appela le chien et le chien le suivit, et non son ancien maître, de sorte que c'est Chetwind qui a gardé le chien. De là allai retrouver ma femme chez milord. Nous allâmes dîner chez Wilkinson, accompagné du vieil East. On nous servit du mauvais boeuf rôti, un pâté de mouton et une tourte. Je ne trouvai rien de bon. Nous rentrâmes en voiture et j'allai au bureau jusque tard. Puis avec ma femme chez sir William Penn pour jouer aux cartes et souper, joyeusement. Il y a eu grand commerce entre nos deux familles tout ce temps de Noël. Puis rentrai, et au lit.


                                                                                                                        5 Janvier
                                                                                                      Jour du Seigneur
            Laissai ma femme au lit, indisposée, ayant ses " mois ". Pour ma part j'allai à l'église, puis rentrai dîner, et dînai seul de quelques os à moelle, et il y avait un beau morceau de boeuf rôti, mais étant seul je n'en pris point. Ensuite arrive mon frère Tom. Il me raconte qu'il a vu les parents de la jeune fille que mes cousins Joyce voudraient lui voir épouser, et qu'ils y sont très favorables. Mais nous sommes très embarrassés dans cette affaire, car 200 livres c'est peu d'argent, et j'espère que s'il continue comme il a commencé il pourra en chercher une qui ait davantage.
art therapie            A l'église et avant le sermon on chanta un long psaume et la moitié d'un autre pendant que le sacristain quêtait ce que les paroissiens voulaient bien lui donner pour l'année écoulée. Je lui donnai 3 shillings et la semaine dernière j'ai donné 2 shillings au clerc, ce que j'inscris pour savoir que faire l'année prochaine, s'il plaît au Seigneur que je vive jusque-là. Mais le comique c'est que le clerc commence le psaume 25 qui a son air à lui, et puis le 116  qui ne peut se chanter sur cet air-là, ce qui parut fort risible.
            Après le service allai chez sir William Batten. Je l'ai volontairement évité depuis quinze jours, et je suis décidé à me tenir un peu plus sur la réserve pour éviter de me déprécier, ce qui autrement serait nécessairement le cas. Puis rentrai et restai bavarder avec ma femme, puis montai pour la prière et pour me coucher, ayant écrit ce soir une lettre à sir John Mennes qui est dans les Downs pour avoir son avis sur l'affaire du salut des pavillons.     


                                                                                                                   6 Janvier
                                                                                                      Jour des Rois
            Ce matin j'ai envoyé mon luth chez le peintre et suis resté en sa compagnie toute la matinée à le regarder peindre le collet de mon luth dans mon portrait, qui ne me plut guère une fois fini. De là j'allai dîner chez sir William Penn, car c'était un jour de fête solennelle pour lui, l'anniversaire de son mariage, et on nous donna, outre une belle échine de boeuf et d'autres bonnes choses, dix-huit petits pâtés dans un plat, ceci étant le nombre d'années de mariage. Il y avait sir William Batten avec sa femme et sa fille le colonel Treswell et le major Holmes. Je vois bien qu'il aimerait prendre des libertés et se lier d'amitié avec ma femme, mais je l'en empêcherai, et elle aussi se défie de lui. Après dîner ils se mirent à boire, ce qui m'empêcha de rester et je rentrai chez moi. Le capitaine Cocke qui était tout à fait ivre me suivit et resta un moment, puis s'en alla. Je retournai après le départ de la compagnie et restai jouer aux cartes avec sir William Penn et ses enfants, après souper je rentrai. Et là on me dit que mon commis Gul était allé se coucher. Comme je demandais pourquoi on me dit qu'il avait vomi avant d'aller se coucher et qu'il se plaignait d'un mal de tête. Là-dessus, bien qu'il fût endormi, je lui fis dire de se lever. Ce qu'il fit et vint me trouver, et j'eus l'air d'être fort en colère et je l'accusai d'être ivre. Il me dit qu'il avait été en compagnie de Mr Southerne et de Homewood au Dauphin et qu'il avait bu une quarte de xérès, mais qu'il avait mal à la tête avant de sortir. Mais je crois en fait qu'il avait trop bu, aussi je le menaçai de de dire à son oncle de lui trouver quelque autre place. Et je le renvoyai se coucher, et je suis bien décidé à continuer d'être fâché. Alors au lit avec ma femme et lui racontai ce qui s'était passé.


                                                                                                             7 Janvier 1662

            Grasse matinée. Puis levé et allai avec Mr William Penn jusqu'à Stepney chez Mrs Chappel, celle qui a pour fils ce joli enfant, et trouvai là ma femme et tous les enfants de sir Willaim Penn, Mrs Poole et son jeune fils, et nous dînâmes fort gaiement, puis je rentrai en voiture et allai au bureau dans l'après-midi. Le soir chez sir William Penn, soupai, jouai aux cartes gaiement. Les enfants retournent tous au collège demain. Puis à la maison et au lit.


                                                                                                               8 Janvier
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Afficher l'image d'origine            Je me levai et allai à la Grand-Salle que je parcourus en m'occupant de diverses affaires. Rencontrai sir William Penn. Il me dit avoir entendu ce matin que sir George Carteret était fort courroucé contre mon  commis Will, qu'il était un jour sur deux en compagnie des commissaires du Parlement à Westminster et que son oncle était un gredin à qui il rapportait tout ce qui se passe au bureau. Et sir William, bien qu'il aime beaucoup ce jeune homme, me conseilla de m'en séparer, ce qui me prit au dépourvu et me troubla grandement, bien que je fusse déjà fâché contre lui. Puis allai à la Garde-Robe par le fleuve. Pendant tout le trajet j'interrogeai Will sur cette affaire, mais sans lui dire le pourquoi. Mais je vois que le pauvre garçon se doute de quelque chose. Dînai avec milady et ensuite parlai longuement avec elle. Puis à la maison et chez sir William Batten, restai causer avec lui. Rentrai malheureux. Montai dans mon cabinet et lus les deux traités qui sont avant le Mare Clausum de Mr Selden. Puis au lit. Ce soir m'arrivèrent environ 100 livres de Brampton par porteur, dans ses fontes, de la part de mon père, ce qui me fit rire.


                                                                                                               9 Janvier

            Au bureau toute la matinée, en réunion particulière avec sir George Carteret. J'attendais qu'il me dît quelque chose de l'affaire d'hier, mais il n'en fut rien. Présents également les sirs William Batten et Penn, pour rédiger une réponse à plusieurs demandes de milors le trésorier. Nous travaillâmes jusqu'à 2 heures. Puis allai dîner et retrouver ma femme chez sir William Penn. Retour au bureau où je restai tard. Retour à la maison, je trouve Mr Armiger en bas, causant avec ma femme, mais comme j'étais froissé de ce qu'il avait quitté mon frère Tom, au lieu de lui faire bon visage je le lui manifestai ouvertement. Je crois qu'il en fut marri, mais je suis content de le lui avoir dit. Quand il fut parti je montai écrire plusieurs lettres à envoyer par la poste. Mis mes papiers et mes affaires en ordre, et allai au lit. Ce matin nous convînmes de certaines réponses à faire au Duc à propos du salut au pavillon, ce qui va me pousser à réaliser mon projet d'écrire quelque chose sur ce sujet.


                                                                                                               10 janvier 1662
                                                                                venise.tourisme.com 
Résultat de recherche d'images pour "doge venise 17è siècle"            A Whitehall, je parlai là avec Sir Paul Neale d'une question de mathématiques que milord voulait lui poser. Je la lui communiquai et il promit une réponse par quelqu'un. Il s'agissait d'une observation de la Lune et des étoiles, mais quoi, je n'y prêtai pas attention. Je rencontrai là Mr Moore qui me dit qu'une injonction est accordée en chancellerie contre Thomas Trice. Ce dont je fus fort content, ayant eu des inquiétudes. J'allai avec lui à la Grand-Salle où je déambulai jusqu'à midi en causant avec les uns et les autres, puis j'allai dîner à la Garde-Robe. Là fatigué de la compagnie de Mr Pickering, je revins à Westminster pour retrouver ma femme chez Mrs Hunt, pour bavarder avec elle. Ce que nous fîmes entre nous très gaiement. Je lui fis cadeau d'une tasse et d'une cuillère pour le filleul de ma femme. Puis rentrai en voiture et lus tard dans mon cabiner. Au lit, ma femme fâchée que je tienne la maison éveillée si tard.


                                                                                                                11 janvier

            Mon frère Tom est venu me voir. Nous allâmes chez Mr Turner le marchand de drap payer 15 livres que mon père lui devait pour du drap pour le deuil de mon oncle. Puis chez lui et là j'invitai tous les Honywood à dîner lundi prochain. Puis à la Bourse. Et là on ne parle que d'une alliance des Français et des Hollandais contre nous, mais je ne crois pas que ce soit déjà fait. Rentrai dîner et l'après-midi au bureau, puis chez sir William Batten où, au cours de la conversation, j'appris comment se passe l'élection du doge de Gênes qui, pendant deux ans, est accompagné tous les jours avec la plus grande pompe et 4 ou 500 hommes l'escortent toujours comme un roi. Quand les deux années sont passées et qu'un autre doge est élu, on lui envoie un messager qui se tient au pied de l'escalier, lui étant en haut, et dit " Vostra Illustrissima Serenidad sta finita et puede andar en casa ". Il se couvre de son chapeau et l'ancien doge, après avoir selon la coutume envoyé ses biens chez lui à l'avance, part à pied sans rien de plus peu-être qu'un seul homme sur ses talons, et le nouveau doge est aussitôt installé à sa place avec toute la pompe du monde. On nous raconta aussi comment dans le duché de Raguse sur l'Adriatique, petit état mais plus ancien que Venise et qu'on appelle la mère de Venise, et tout environné par les Turcs, comment ils changent les officiers de la garde, par crainte de conjuration, toutes les 24 heures, de sorte que personne ne sait qui va être capitaine de la garde ce soir-là. Mais deux hommes viennent en trouver un, s'en saisissent comme d'un prisonnier et l'emmènent sur place. Et là on lui remet les clefs de la garnison, et aussitôt il donne ses ordres pour le guet de cette nuit-là. Et il en va toujours ainsi, soir après soir. Sir William Rider raconta la première histoire qu'il connaît personnellement. Lui et sir William Batten confirment la seconde.
            De là rentrai et lus, puis au lit, mais de nouveau très tard.


                                                                                                           12 janvier
                                                                                         Jour du Seigneur      lefigaro.fr
Afficher l'image d'origine            A l'église où un inconnu fit un fort excellent sermon. A midi sir William Penn et mon bon ami le doyen Fuller par arrangement, et le frère de ma femme par rencontre, dînèrent avec moi très gaiement et très bien. Ensuite, le doyen, ma femme et moi en carosse, prêté par sir William Penn, allâmes, lui à Whitehall et ma femme et moi rendre visite à Mrs Pearse et de là à Mrs Turner toujours fort malade. Theophilia est aussi tombée malade, ce qui m'afflige pour la pauvre mère. A la maison et lus, affligé d'entendtre ma femme tancer, bien que ce ne fût pas sans cause, sa servante Nell, qui est une paresseuse.
            Puis la prière et au lit.


                                                                                                                       13 Janvier

            Toute la matinée chez moi et Mr Birchensha, que je n'avais pas vu depuis très longemps, vint et parla longuement avec moi de musique. Je suis décidé à apprendre la composition avec lui, et à m'y mettre demain, car il me laisse fort espérer que j'y arriverai rapidement.
            Avant 12 heures arrivent, comme convenu, Mr Peter et le doyen, le colonel Honywood, les frères, pour dîner avec moi. Mais de si bonne heure que j'en fus gêné. Je les occupai pourtant par la conversation et des huïtres jusqu'à une heure. Nous nous mîmes alors à table, sans attendre mon oncle et ma tante Wight, ce qui me gêna, mais ils arrivèrent au bout d'un moment, et fûmes très gais. C'est du moins ce dont j'eus l'air, mais ce dîner ne me plut pas, et moins encore le doyen et le colonel que je trouve gens bien médiocres, quoiqu'ils aient bon coeur. Mais Mr Peter vaut mieux que les deux autres. Après le dîner celui-ci nous montra l'expérience, dont j'avais entendu parler, des perles chimiques qui se brisent et tombent en poussière quand on en brise le petit bout, ce qui m'intrigue beaucoup. Après leur départ ma tante Wight, ma femme et moi nous mîmes aux cartes. Elle nous enseigna à tous deux le jeu de gleek. C'est un joli jeu mais je n'ai pas l'esprit assez libre pour m'y intéresser vraiment. Peu après mon oncle revient, on soupe et on cause et on se remet aux cartes. Ma femme et moi nous le battons deux jeux à un, et on se dit bonsoir, et au lit.


                                                                                                                  14 Janvier

Newton House à Dinefwr, Carmarthenshire, dans le pays de Galles.            Toute la matinée à la maison. Visite prévue de Mr Birchensha. Il commença la composition musicale. Après son départ je range mes papiers et mes affaires dans mon cabinet. Après dîner, dans l'après-midi, au bureau et de là dans mon cabinet pour m'occuper de plusieurs affaires du bureau et des miennes propres, et puis souper et au lit. Aujourd'hui sont arrivées mes belles enveloppes de vélin pour y ranger mes gravures, dont je suis fort content.


                                                                                                                  15 Janvier 1662

            Ce matin Mr Birchensha est revenu et, après qu'il m'eût interrogé et appris certaines choses sur le travail que j'avais fait, nous allâmes déjeuner dans mon cabinet d'un fromage de hure. Après que nous eûmes mangé il me demanda si nous n'avions pas commis un péché en mangeant aujourd'hui, me disant que c'est un jour de jeûne ordonné par le Parlement afin de prier pour un temps qui soit davantage de saison, car il y a depuis un moment un temps d'été, c'est-à-dire quant à la chaleur et à tout le reste, exactement comme au milieu de mai ou de juin, ce qui peut être cause de peste, comme tout le monde le pense, car il en a été presque de même l'hiver dernier, et toute l'année suivante a été fort malsaine, et l'est encore. Je ne suis pas sorti de chez moi de la journée, j'ai étudié ma musique, et le soir, après souper, au lit.


                                                                          à suivre......./
                                                                                                    16 Janvier 1662........

              En allant à........
                                                                                
         
         

dimanche 19 juin 2016

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 61 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

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                                                                                                                                                                                                                                                                     15 Décembre 1661
                                                                                       Jour du Seigneur
            A l'église le matin. Notre jeune lecteur lut aujourd'hui son premier texte. Sir William Penn dîna avec moi, et nous prîmes du plaisir. Derechef à l'église, retour chez moi et, tout seul, lus jusqu'au coucher/ Prières et au lit.
            Aujourd'hui, je fus chagriné par une dispute entre ma femme et sa servante Nell. C'est une péronnelle un peu sotte et je crains que nous ne la trouvions querelleuse. En ce moment, toutes mes pensées sont occupées par mon projet d'ouvrage sur le salut à la voile que nous entendons imposer sur mer aux étrangers. Aussi suis-je plongé dans la lecture de Selden, Grotius et autres auteurs.
 

                                                                                                    16 Décembre

            Levé à 5 heures du matin, à la chandelle ce qui ne m'était pas arrivé depuis longtemps. Réveillé comme convenu par un certain Mr Bollen, en affaire avec milord le garde du Sceau privé, ce matin. Passâmes prendre Mr Moore à la Garde-Robe, puis en voiture à Chelsea où nous demandâmes à milord d'apposer son sceau. Retour à la Grand-Salle, puis à l'appartement de milord Sandwich où je rencontrai ma femme qui était allée hier chez Mrs Hunt accouchée d'un garçon. Commandai un rôti chez un traiteur et dînâmes ensemble. Après le dîner à l'Opéra, où l'on donnait une nouvelle pièce, Le Bravache de Coleman Street, écrite en 1658, et comportant une critique de la période récente. Comme c'était la première les places étaient deux fois plus chères, c'est pourquoi, par économie, ma femme et moi montâmes dans la galerie la plus élevée. Nous nous installâmes et vîmes fort bien. C'est une fort bonne pièce, écrite, apparemment par Cowley. Retour à la maison, et au lit.


                                                                                                        17 Décembre

            Levé et allé chez le peintre voir comment avancent nos portraits. Rentrai dîner à la maison. Fus ensuite demandé au Sceau privé. Restai si longtemps et si tard que j'en fus fort fâché. Nous en eûmes enfin terminé et me rendis ensuite en toute hâte au bureau où ils étaient en réunion et travaillâmes jusqu'à une heure tardive. Retour chez moi, souper, lecture de Mare Clausum de Selden, et au lit.


                                                                                                       18 Décembre
                                                                                                                       fr.pinterest.com
Résultat de recherche d'images pour "homme lecture peinture"            Au bureau pour affaires extraordinaires toute la matinée, dîner chez milord Sandwich où ma femme me rejoignit après être passée chez le peintre. Dînâmes. Je la laissai là et allai dans le quartier du Temple, chez mon frère, pour voir Mrs Turner, qui commence à aller mieux. Retour chez milady où l'on me fit fête. Ramenai ma femme à la maison en voiture. Chez moi, dans mon cabinet jusqu'à l'heure du coucher, et au lit.


                                                                                                                                                                                                                       19 Décembre 1661

            Ce matin ma femme mit ses plus beaux atours pour aller au baptême de l'enfant de Mrs Hunt. Nous nous arrêtâmes chez le peintre. Elle posa jusqu'à midi cependant que j'examinais de belles gravures fort variées. Bientôt mon valet arriva et nous dit que Mr Hunt était passé chez nous. Apprîmes que le baptême n'aurait pas lieu avant samedi prochain. Lorsque le peintre eut terminé, le portrait me plut assez. Ma femme et moi rentrâmes à la maison en voiture, mais pendant le trajet je trouvai l'occasion de me disputer violemment avec elle à propos de ses rubans mal assortis, étaient de deux couleurs. En vînmes à échanger des propos fort vifs, si bien que, cédant à un emportement stupide, je la traitai de catin, ce que je regrettai par la suite. Je la déposai à la maison et me rendis, comme prévu, au Dauphin. Sir William nous offrit à tous un bon dîner. Ensuite au bureau où je restai tard en réunion. Puis retour chez moi.


                                                                                                    20 Décembre

            Fis la grasse matinée, puis levai et à la Garde-Robe pour dîner. Revins ensuite vers la maison avec Mr Moore, rencontrâmes en chemin Mr Swan, ma vieille connaissance, et allâmes dans une taverne où il nous rebattit les oreilles de ses habituels radotages sur la religion. Sur ce chapitre il est plus prétentieux que jamais. Me dit qu'il commence à écrire un livre sur L'Usage illégal des choses légales. Mais c'est un personnage des plus niais, et je le quittai. Nous bûmes un verre, puis nous nous séparâmes. Mr Moore et moi dans le quartier de Cornhill. Il faisait nuit noire, et dans la rue et à la Bourse discutâmes de la maîtrise des mers, sujet qui me préoccupe fort ces temps-ci. Retour chez moi et veillai tard en lisant Mr Selden. Au lit.


                                                                                                     21 Décembre
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Afficher l'image d'origine            A Whitehall au Sceau privé, où milord garde du Sceau privé nous dit qu'il cessait pour ce mois-ci d'apposer le sceau, car il va passer Noël à 12 lieues de Londres. Ce dont je me réjouis, craignant toutefois que nous ne soyons forcés de le chercher au fond de sa campagne pour lui faire mettre le sceau à quelque document royal.
            Ensuite à la Grand-Salle de Westminster, après avoir pris en passant un verre avec Mrs Sarah et Mrs Betty dans les appartements de milord. Emmené par des gens de l'Echiquier à la taverne du Chien. C'est la Saint-Thomas, et comme le veut la coutume, ils tiennent une réunion générale, un dîner. Fus fort gai, comme tous..Discutai avec Mr Falconberg et lui demandai s'il pouvait me trouver dans le Domesday Book des détails relatifs aux affaires de la mer et à sa maîtrise. Il promit de regarder. Pris congé d'eux et allai chez mon frère, rencontrai comme convenu Prior de Brampton qui doit me verser de l'argent mais, désirant prendre conseil, il attend jusqu'à lundi. Retour en voiture au bureau. Fus fâché en m'apercevant que les deux sirs William semblaient bien décidés à me tenir un peu à l'écart, disant qu'il ne pouvait exister de comité sans leur registre, ce que je prends assez mal et vois clairement qu'il me faut prendre un peu de distance par rapport à eux et ne pas courber l'échine si je veux pouvoir traiter avec eux sur un pied d'égalité. Retour chez moi et écris des lettres pour la poste. Ce soir ma femme revint du baptême du fils de Mrs Hunt, appelé John. Elle était accompagnée d'un négociant de Mark Lane qui avait été son partenaire. Après avoir achevé mon travail et lus un peu Mr Selden, je me mis au lit.


                                                                                                     22 Décembre
                                                                                          Jour du Seigneur 
                                                                                                                                                                             aventuresdelhistoire.com       
Afficher l'image d'origine             A l'église ce matin où le lecteur fit un sermon puéril. Rentrai dîner, saisis le prétexte de la couleur noirâtre de la nourriture qui sortait de la marmite pour m'en prendre vivement à ma femme et aux servantes, leur reprochant leur négligence. Quittai la table et montai lire Mr Selden dans mon cabinet en attendant l'heure de l'office, A l'église ma femme et moi. Sur le même banc avec le reste de notre groupe se trouvait le capitaine Holmes dans son habit à galons d'or, ce qui m'inquiéta, pensant aux avances qu'il fit autrefois à ma femme. L'esprit inquiet, je me tins coi. Mais je saisis bientôt le prétexte de la pluie qui continuait à tomber pour rappeler à ma femme qu'elle devait aller au baptême de l'enfant de Nick Osborne, elle y était invitée. Elle quitta le banc, ce qui me tranquillisa. Retour chez moi après le sermon. Vinrent souper avec moi, comme convenu, le Dr Thomas Pepys, Will Joyce et mon frère Tom. Ils étaient de fort belle humeur, quant à moi, je fis semblant de l'être, mais leur compagnie ne me plaisait pas le moins du monde. Une fois qu'ils furent partis, nous nous couchâmes.


                                                                                                    23 Décembre

            Levé tôt, avant le lever du jour, en voiture à la Garde-Robe où pris Mr Moore. A Chelsea chez milord le garde du Sceau privé. Nous apposâmes le sceau à quelques pièces. Il doit quitter Londres demain pour la période de Noël. Retour à Westminster et de là par le fleuve au bureau de la Trésorerie où je trouve sir William Penn occupé à payer les soldes du Sophia et du Griffin que l'on désarme. Je restai avec lui jusqu'à midi. Nous nous fîmes apporter une roulade de boeuf et un pâté. Mangeâmes et bûmes. Je le laissai et chez mon frère, comme prévu, pour rencontrer Prior, mais comme il ne venait pas j'allai voir Mr Turner qui est toujours faible. On m'annonça peu de temps après que le valet de Prior était passé chez Tom. M'y rendis donc et comptai les 128 livres qu'il doit me verser, mais comme Prior ne venait pas, je partis en laissant, comme il le voulait, l'argent à mon frère pour la nuit. Ils doivent venir chez moi demain matin. Je pris une voiture et, descendant chez mon libraire à l'enclos de Saint-Paul, rencontrai Mr Cromleholme et le principal adjoint du collège. Je les emmenai à l'Etoile où nous restâmes parler. Je pris grand plaisir à leur compagnie, fort heureux de tomber sur lui par hasard, car j'avais omis trop longtemps d'aller le voir. Alors que nous parlions de livres, j'offris de donner au collège le livre de son choix pour une somme de 5 livres. Nous nous quittâmes. Retour chez moi et à Mr Selden, puis au lit.


                                                                                                 24 Décembre

            Chez moi toute la journée, au bureau l'après-midi. Retour chez moi.


                                                                                                    25 Décembre 1661
                                                                                              Jour de Noël
            A l'église le matin, je dus attendre devant notre banc parce que le bedeau n'avait pas ouvert la porte. Bon sermon de Mr Mills. Dînai tout seul chez moi. Quelque défaut du repas me fournissant l'occasion de me plaindre de la malpropreté de ma servante, j'eus une prise de bec avec ma femme et montai fort mécontent dans mon cabinet. Après dîner ma femme monta me voir, et nous voilà raccommodés. Tous deux en promenade sur la terrasse. Sir William nous appela et nous allâmes dîner chez lui. Auparavant le capitaine Cocke nous rendit visite à moitié ivre et se mit à parler, mais sir William Penn, connaissant bien son caractère et le sachant intarissable, but quatre grands verres de vin à sa santé coup sur coup, et à celle du roi, etc.. et ainsi l'enivre, si bien qu'il partit. Nous soupâmes alors joyeusement. Puis retour à la maison, et au lit.


                                                                                                      26 Décembre
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Afficher l'image d'origine            Ce matin avec sir William Penn au bureau de la Trésorerie. Nous procédâmes au désarmement et au paiement des soldes de l'Amity, bateau du capitaine Stokes qui était en Guinée, et d'un autre navire, et retour à la maison. Après dîner sir William vint et, avec son fils, sa fille et ma femme, allâmes en voiture à Moorfields, pour une promenade à pied. Comme il faisait un temps épouvantable, nous nous arrêtâmes dans une auberge où nous mangeâmes des gâteaux et bûmes de la bière. Une femme et une gamine nous présentèrent la coupe de bière épicée avec des chansons. Quand ce fut terminé j'invitai mon petit valet, Wayneman, à nous rejoindre pour manger ce qu'il restait de gâteau, et notre hôtesse nous dit qu'il s'était commandé deux gâteaux et une chope de bière, ce qui m'irrita et suis résolu à l'en punir. Retour à la maison, sir William Penn et sa famille dînent chez moi d'une bonne dinde, et joyeuse partie de cartes, et au lit.


                                                                                                                   27 Décembre

            Le matin chez mon libraire pour commander Thesaurus de Stephanus dont j'offre 4 livres, pour en faire cadeau au collège Saint-Paul. Puis à l'église Saint-Paul où j'entendis le Dr Gunning prêcher un bon sermon pour ce jour, c'était la Saint-Jean, et l'entendis raconter une histoire qu'il voulut nous faire croire, selon laquelle saint Jean et la Vierge Marie seraient apparus à Grégoire, un évêque, au moment où il priait Dieu de le confirmer dans sa foi. Je m'étonnai de lui entendre raconter une telle fable. Rencontrai là Mr Cromleholme et lui dis que je m'employais à me procurer le Thesaurus de Stephanus pour le collège. Retour chez moi. Après dîner visite de Mr Falconberg. Comme il le souhaitait je fis venir son parent, Mr Knightly, le négociant. Il vint boire avec nous et m'invita à l'accompagner chez lui. Restai jusqu'au soir et jusqu'à ce que Mr Knightly et Mr Farconberg, pour qui je fis chercher par mon petit valet une voiture pour le reconduire à Westminster, se fussent tous deux enivrés. Retour à la maison, mais ne bus jamais meilleur vin de ma vie. Chez moi donc, ma femme partie chez sir William Penn je m'y rendis, restai jouer aux cartes et soupai. Puis rentrai chez moi, et au lit.


                                                                                                               28 Décembre

            Chez moi toute la matinée, l'après-midi tout le bureau occupé à répondre à une lettre du Duc nous demandant une estimation rapide des dettes de la Marine. Cette tâche bien avancée, retour chez moi avec sir William Penn qui, avec ses enfants, resta à jouer aux cartes jusque tard. Au lit.


                                                                                                                 29 Décembre
                                                                  scoubidous.eu                                    Jour du Seigneur
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            Grasse matinée avec ma femme. J'avais bien décidé d'aller avec elle chez milady, surtout pour éviter d'aller dîner chez sir William Penn aujourd'hui parce que Holmes y était, mais ne pus trouver de voiture à temps pour nous y rendre. Dînai donc chez moi avec mon frère Tom. Puis arriva une voiture. J'emmenai ma femme à Westminster et elle se rendit chez Mrs Hunt, de mon côté à l'abbaye où je rencontrai Mr Hooper. Il me fit entrer dans le choeur et je chantai l'office avec eux. Je me promenai ensuite ici et là jusqu'au soir, parce que Mr Coventry n'était pas encore revenu à Whitehall depuis le dîner. J'y allai enfin et il était arrivé. Je discutai avec lui d'une affaire du bureau, puis pris congé et envoyai chercher ma femme et la voiture. A la Garde-Robe souper, et restâmes fort longtemps à parler avec milady qui semble adorer chaque jour davantage notre compagnie. Retour à la maison/ Prières, et au lit.


                                                                                                                    30 Décembre

            Au bureau pour l'estimation. Puis avec ma femme et sir William Penn voir nos portraits, qui nous plaisent assez. Retour. Je m'arrêtai à la Mitre où j'avais invité toutes mes vieilles connaissances de l'Echiquier autour d'une bonne échine de boeuf. Elle fit notre dîner avec trois bourriches d'huîtres, trois poulardes, et force vin et gaieté. Nous étions douze, environ..... Je leur fis sottement la promesse de les inviter pareillement dans un an, et ainsi pour le restant de ma vie. Mais je n'ai pas l'intention de la tenir.
            Je restai là aussi longtemps que je pus les retenir. Retour chez sir William Penn qui, avec ses enfants et ma femme, est allé aujourd'hui au Théâtre voir D'Amboise, que je n'ai jamais vu. Restâmes tard à souper et à jouer aux cartes. Retour à la maison, et au lit.


                                                                                                                    31 Décembre 1661

            Ma femme et moi, ce matin, chez le peintre. Elle fit sa dernière séance de pose et j'assistai, indiquant au peintre quelques petites choses à faire, si bien que son portrait me plaira fort, je crois. Elle prit ensuite son petit chien noir pour en faire faire le portrait, ce qui nous amusa fort. A la maison pour le dîner, puis au bureau jusque tard pour terminer notre estimation des dettes de la Marine. Elles se montent à ce jour à près de 374 000 livres.
            Retour chez moi après avoir souper et m'être fait raser par le barbier. Je me mis en devoir de terminer le journal pour cette année. A ce jour, ma situation, grâce à Dieu, est comme suit :
            Ma santé, sauf lorsque je prends froid, ce qui me donne des douleurs dans le dos et me fait souffrir quand j'urine comme du temps où j'avais la pierre, fort bonne, comme celle de ma femme, à tous égards.
            Mes domestiques : Will Hewer, Sarah, Nell et Wayneman. Mon logis au bureau de la Marine. Je pense être riche de 500 livres net, et je possède en propre les biens de ma maison et ce qui me reviendra de Brampton à la mort de mon père - qu'il plaise à Dieu de retarder le plus longtemps possible ! Mais suite à la mort de mon oncle, tout le souci, le tracas de tout régler reposent sur moi. Ce qui est fort lourd en raison des procès, notamment celui avec Tom Trice à propose des intérêts des 200 livres qui, j'espère, sera bientôt réglé.
Afficher l'image d'origine   *         Ce qui occupe le plus mes pensées en ce moment est le souci de procurer à Tom une bonne épouse. Il en est une présentée par les Joyce, une de leurs cousines, riche de 200 livres comptant. Je m'occupe aussi à écrire un petit traité que je présenterai au Duc, sur le privilège qui nous est reconnu d'être salués au pavillon par les navires de toutes les autres nations. Mais ce qui me tracasse le plus, c'est qu'au cours de ces six derniers mois je me suis montré à tous égards fort dépensier, au point de n'oser faire mes comptes, je les ferai bientôt.
            Je me suis engagé une nouvelle fois, par un serment solennel, à m'abstenir de théâtre et de vin, et je suis résolu à respecter à la lettre le serment dont je garde copie sur moi. Cela fait deux semaines que la flotte est prête à faire voile pour le Portugal, mais le vent lui a manqué. De ce fait, milord est contraint de rester à la mer tout cet hiver avant d'amener la reine ici, ce que tout le monde attend maintenant. On ne parle que de cela.

*    novo-monde.com

                                                                     A suivre..... 1662...../

                                                                                                              1er janvier

         En m'éveillant ce matin......../