lundi 16 septembre 2019

Tiens bon, Yale ! Damon Runyon ( Nouvelle Etats Unis )

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                                             Tiens bon, Yale !

            Ce que je faisais à New Haven le jour du grand match de football entre Harvard et Yale, c'est une chose qui demande pas mal d'explications, car je ne suis pas un type qu'on s'attend à trouver à New Haven en quelque circonstance que ce soit, surtout le jour d'un grand match de football.
            Mais le fait est que j'y étais, et la raison pour laquelle j'y étais remonte à un vendredi soir. Je me trouvais assis au restaurant Mindy, dans Broadway, en train de penser à bien peu de chose, si ce n'est au moyen qui pourrait me faire gagner quelques thunes pour subvenir à ma chère existence. Et, pendant que j'étais là, survient Sam le Gonoph qui fait métier de revendre des billets et qui, pour le moment, a l'air de chercher partout quelqu'un.
            Sam le Gonoph commence donc à bavarder avec moi et j'apprends qu'il est à la recherche de Georgie le Gigolo, ainsi nommé parce qu'il est toujours fourré dans les boîtes de nuit, avec ses petites moustaches et ses guêtres blanches, dansant avec les vieilles rombières. Georgie le Gigolo n'est autre chose qu'un aigrefin et je suis surpris que Sam le Gonoph soit à sa recherche.
            Mais, à ce qu'il paraît, la raison pour laquelle Sam le Gonoph désire rencontrer Georgie le Gigolo, c'est afin de lui flanquer un marron sur le blair car, à ce qu'il paraît, Sam le Gonoph a confié à Georgie le Gigolo pour les revendre à la commission un certain nombre de billets d'entrée au grand match de football entre Harvard et Yale, et il n'a jamais touché un sou. Naturellement Sam le Gonoph considère Georgie le Gigolo comme une fripouille pour avoir agi de la sorte avec lui, et il déclare qu'il tient à rencontrer Georgie le Gigolo afin de lui flanquer une tournée, dut-elle être le dernier acte de son existence.
            Sam m'explique alors qu'il possède quantité de bonnes places pour le grand match entre Harvard et Yale et qu'il emmène plusieurs types avec lui à New Haven demain pour vendre ses billets. Il me demande si j'aimerais aller avec lui pour l'aider à les vendre et gagner moi-même quelques dollars, et son invitation me paraît tomber à pic.
            Comme de juste il n'est pas donné à n'importe qui d'obtenir de bonnes places pour le grand match entre Harvard et Yale, à moins d'être personnellement un type de ces universités, et Sam le Gonoph n'est point l'un de ces types. De fait le contact le plus étroit que Sam ait jamais eu avec une université, c'est le jour où il a traversé le terrain appartenant à celle de Princeton, mais à ce moment-là il était en fuite avec les flics à ses trousses et il n'a pas dû voir beaucoup l'université.
            Tout étudiant a droit à des cartes d'entrée pour les grands matchs de football auxquels participe son université, et il est véritablement étonnant que tant d'entre eux ne tiennent pas à assister aux grands matchs de football, même une fois en possession de leurs cartes d'entrée, surtout si un revendeur de billets comme Sam le Gonoph leur offre quelques dollars de plus que les cartes ne leur ont coûté. J'imagine que c'est parce que les types des universités se disent qu'ils auront bien le temps de voir des grands matchs de football quand ils seront vieux, tandis qu'il se passe un peu partout un tas de choses qu'ils doivent voir pendant qu'ils sont assez jeunes pour les apprécier, les Folies par exemple.
            Quoi qu'il en soit bien des étudiants se laissent convaincre quand Sam le Gonoph vient leur proposer de leur acheter leurs places. Alors Sam le Gonoph prend ces billets et les revend aux amateurs environ dix fois le prix marqué, si bien qu'à la fin Sam ne fait pas une si mauvaise affaire.
            Depuis une vingtaine d'années que je connais Sam le Gonoph, je le vois toujours occupé à revendre des billets d'une espèce ou d'une autre, tantôt pour le championnat de base-ball ou de grands matchs de boxe, quelquefois simplement pour des matchs de tennis, bien que personne n'arrive à comprendre, pas plus Sam le Gonoph qu'un autre, qu'il existe des gens qui tiennent à voir une chose comme un match de tennis.
            Pendant toutes ces années, j'ai vu Sam se faufiler parmi les foules qui se pressent à ces grands événements sportifs, ou parcourir les trains spéciaux afin d'acheter ou de vendre des billets, mais je n'ai jamais entendu dire que Sam ait assisté personnellement à aucun de ces événements, sauf peut-être à une partie de base-ball ou à un match de boxe, car Sam ne s'intéresse à ses billets que pour le profit qu'il peut en tirer.                                                                                     harvard.edu 
            C'est un petit type trapu et noir avec un blair monumental, toujours en nage, même les jours les plus froids. Il vient du quartier d'Essex Street dans le bas d'East Side. De plus l'équipe de Sam le Gonoph est généralement composée de types du quartier d'East Side car, depuis que Sam s'occupe de ce genre d'affaires il a gagné beaucoup de pognon, il a développé son commerce et il a besoin d'un tas d'auxiliaires pour écouler en vitesse les tickets d'entrée à ces diverses réunions sportives.
            Quand Sam le Gonoph était plus jeune, les flics le considéraient comme un type d'un abord dangereux........... Quoi qu'il en soit, le lendemain matin je rejoins Sam le Gonoph et son équipe au guichet des renseignements de la gare de Grand Central, et voilà comme il se fait que je me trouve à New Haven le jour du grand match de football entre Harvard et Yale.
            Pour un match comme celui-ci Sam a amené ses meilleurs auxiliaires......, mais à regarder ces types-là, on ne les prend jamais pour le gratin des revendeurs de billets. Tout ce qu'on pourrait dire c'est que c'est une bande de types qu'on n'aimerait pas à rencontrer dans une petite rue sombre. Mais le métier de revendeur de billets est un dur métier et il ne serait pas de bonne politique d'y employer des tapettes.
            Or, pendant que nous essayons de revendre ces billets près de la grande porte du Stade de Yale, je remarque une jolie petite gonzesse de seize ou dix-sept ans, plantée là et qui scrute attentivement la foule. Il est facile de voir qu'elle attend quelqu'un, comme font souvent les poules aux matchs de football. Mais je remarque également qu'à mesure que la foule s'écoule et que l'heure du match approche, la petite donne des signes d'inquiétude. Elle ne tarde pas à avoir les larmes aux yeux, et s'il y a une chose que je ne puis souffrir, c'est bien de voir une gonzesse avec les larmes aux yeux.
            Alors finalement je vais vers elle et je lui dis :
            - Qu'est-ce qu'il y a donc comme cela, petite mademoiselle ?
            - Oh, dit-elle, j'attends Elliot. Il doit arriver de New York et me rejoindre ici pour m'emmener au match, mais il n'est pas encore là et je crains qu'il ne lui soit arrivé quelque chose. De plus, dit-elle, et ses larmes deviennent de plus en plus grosses, j'ai peur de rater le match, car c'est lui qui a mon billet.
            - Mais, dis-je, c'est bien simple, je vais vous vendre un billet pour dix dollars, et si je vous le laisse à si bon compte c'est parce que le match va commencer à l'instant et que le marché est en baisse.    pinterest.fr
Les 31 meilleures images du tableau L'UNIVERSITE DE ...            - C'est que, fait-elle, je n'ai pas dix dollars. Il ne me reste que quinze cents dans mon sac, ce qui m'ennuie beaucoup, car je me demande ce que je vais devenir si Elliot n'arrive pas.Voyez-vous, dit-elle, je viens de l'école de Miss Peevy, à Worcester, et je n'avais que juste de quoi payer mon chemin de fer jusqu'ici et, naturellement, je ne pouvais pas demander à Miss Peevy de me prêter de l'argent parce que je ne voulais pas qu'elle sache que j'avais l'intention de partir.
            Tout cela, bien entendu, me fait l'effet, au premier abord du récit que n'importe quelle gonzesse peut faire de ses malheurs. Je m'en vais donc à mes affaires, car je me dis qu'elle ne va pas tarder à me faire payer son billet d'entrée ou son chemin de fer pour retourner à Worcester, bien que la plupart du temps ce soit à San Francisco qu'habitent les poules qui racontent leurs malheurs.
            Mais celle-ci n'a pas changé de place. Je m'aperçois que maintenant elle pleure tant et plus et je commence à me dire qu'elle est la petite poule la plus mignonne que j'aie jamais vue, quoique trop jeunette pour qu'on la prenne au sérieux. En outre je commence à penser que ce qu'elle raconte est peut-être la vérité.
            Maintenant la foule presque tout entière a pénétré dans le stade. Il n'y a plus dehors que quelques flics et les vendeurs de toute espèce de choses et un grand brouhaha s'élève de l'intérieur, quand Sam le Gonoph arrive et nous dit :
             - Qu'est-ce que vous pensez de cela ? Il me reste sept billets sur les bras et les types du patelin ne veulent même pas me les prendre au prix marqué, alors que je les ai payés trois dollars de plus chacun. Eh bien ! dit Sam, je ne vais certainement pas les vendre au-dessous du prix marqué quand même je devrais les avaler. Si nous nous en servions nous-mêmes pour aller voir le match ? En ce qui me concerne, ajoute Sam le Gonoph, voilà longtemps que j'ai envie d'assister à un de ces grands matches afin de savoir ce qui fait que ces imbéciles tiennent à payer si cher leurs billets.
             C'est une idée qui a l'air de frapper tout le monde, y compris moi-même, comme une inspiration, car nous autres non plus n'avons jamais vu un grand match de football.Nous nous dirigeons donc vers l'entrée, et au moment où nous passons devant la petite gonzesse qui pleure toujours, je dis à Sam le Gonoph :
            - Écoute Sam, il te reste sept billets, nous ne sommes que six et voici une poule à qui son type a posé un lapin et qui n'a ni billet, ni fric pour s'en payer un, si nous l'emmenions avec nous ?
            Sam le Gonoph accepte, les autres ne font pas d'objection, je m'approche donc de la petite gonzesse et je l'invite à nous accompagner. Immédiatement elle cesse de pleurer et nous fait risette en nous disant que nous sommes bien gentils... Elle adresse son plus beau sourire à Sam le Gonoph qui déclare sur-le-champ qu'elle est tout à fait mignonne, puis elle adresse au vieux Lèvre en Foie un sourire encore plus beau. Elle fait plus encore : elle lui prend le bras et se dirige avec lui vers le stade, ce qui fait que le vieux Lèvre en Foie a l'air, non seulement tout épaté, mais encore tout guilleret, au point qu'il se requinque et s'avance fièrement, lui qui d'habitude n'est plus un type à faire le moins du monde attention aux gonzesses jeunes ou vieilles.
            Mais, tout en marchant au bras du vieux Lièvre en Foie, la petite poule cause très amicalement avec nous de la rue du Sud et, au bout d'un moment, on dirait, à nous voir, que nous sommes tous ses oncles. Pourtant, sans aucun doute, si cette petite savait avec qui elle se trouve, il y a des chances qu'elle tombe en pâmoison.
            N'importe qui peut se rendre compte qu'elle a une bien faible expérience de ce vieux monde pervers et qu'elle est même un peu écervelée, car elle jabote à tort et à travers et nous raconte ingénument ses petites affaires. Avant même que nous soyons arrivés au stade, elle nous confie qu'elle s'est sauvée de l'école de Miss Peevy pour épouser cet Elliot et elle déclare qu'ils ont l'intention d'aller se marier à Hartford. Elle dit même qu'Elliot voulait aller à Hartford et être marié avant le match.
            " - Mais, ajoute-t-elle, mon frère joue aujourd'hui comme remplaçant dans l'équipe de Yale et je ne puis songer à me marier avec qui que ce soit avant de l'avoir vu jouer, bien que je sois très éprise d'Elliot. C'est un danseur épatant, dit-elle, et très sentimental. J'ai fait sa connaissance à Atlantic City l'été dernier. En ce moment nous faisons une fugue car mon papa ne gobe pas du tout Elliot. Pour mieux dire, il ne peut pas le sentir, bien qu'il ne l'ait vu qu'une seule fois, et c'est justement parce qu'il le déteste qu'il m'a mise dans l'école de Miss Peevy à Worcester. C'est une vieille chipie. Ne trouvez-vous pas que papa est absurde ? "
            Nous n'avons, comme bien on pense, aucune opinion des choses comme cela, mais le vieux Lièvre en Foie déclare à la petite gonzesse qu'il est complètement de son avis et, quelques instants plus tard, nous nous trouvons assis dans le stade à des places de premier ordre. Nous somme paraît-il du côté des types de Harvard, mais je ne m'en serais jamais douté si la petite ne nous l'avait dit.
            Elle a l'air très calée sur tout ce qui touche au football et, à peine sommes-nous assis, qu'elle s'efforce de nous montrer son frère qui joue comme remplaçant dans l'équipe de Yale. C'est dit-elle, le cinquième d'un groupe de types assis sur un banc tout enveloppés de couvertures, à l'autre bout du terrain. Mais, d'où nous sommes nous ne pouvons pas le distinguer très bien et, en tout cas, il ne semble pas avoir dans le match un rôle très important.
La Peinture Abstraite Du Sport Tape Le Football, Tennis ...            Donc, à ce qu'il paraît, nous sommes au beau milieu des types de Harvard. Ils font un potin de tous les diables, hurlent, chantent et se démènent, car le match a commencé au moment où nous arrivons, et Harvard est en train de bousculer les types de Yale de la belle façon. C'est pourquoi notre petite gonzesse fait connaître à tout le monde que ses sympathies sont pour ceux de Yale et qu'elle s'époumone à crier : " Tiens bon, Yale ! "
            En ce qui me concerne, il m'est impossible de dire à première vue quels sont ceux de Harvard et quels sont ceux de Yale. Sam le Gonoph et les autres n'en savent pas plus long que moi, mais la petite nous explique que ceux de Harvard ont des maillots rouges et ceux de Yale des maillots bleus, et quelques instants après nous commençons à crier, nous aussi : " Tiens bon, Yale ! " Mais cela n'est, bien sûr, que pour faire plaisir à notre petite gonzesse qui veut à toute force que Yale tienne bon, parce que, quant à nous, nous nous fichons autant des uns que des autres.
            Or, on dirait que cela porte sur les nerfs des types de Harvard qui nous entourent d'avoir parmi eux un groupe de types et une petite gonzesse qui crient à ceux de Yale de tenir bon, quoique n'importe lequel d'entre eux soit forcé de convenir que c'est là donner à Yale un excellent conseil, et quelques-uns des types de Harvard commencera à proférer des appréciations désobligeantes spécialement à l'adresse de notre petite gonzesse. Ils sont probablement jaloux qu'elle crie plus fort qu'eux, car il y a une chose que je puis vous confier, c'est qu'elle est capable de gueuler plus fort que n'importe quel homme ou femme qu'il m'ait jamais été donné d'entendre.
            Deux types de Harvard assis devant le vieux Lèvre en Foie se mettent à imiter la voix de notre petite poule, ce qui fait tordre de rire ceux qui sont autour d'eux. Mais, tout à coup, ces types quittent précipitamment leurs places et décampent en vitesse, tout pâles, et je me figure qu'ils se sentent indisposés tous deux en même temps. Mais sur ces entrefaites, j'apprends que le vieux Lèvre en Foie a tiré de sa poche un énorme lingue, l'a ouvert, et leur a déclaré confidentiellement qu'il allait leur couper les oreilles.
            Loin de moi, certes, l'idée de blâmer les types de Harvard de s'être débinés à toute vitesse, car Lèvre en Foie a bien la tête d'un type pour qui couper les oreilles doit être un véritable plaisir. D'autre part, Nubbsy Taylor et tous les autres commencent à échanger de tels coups d'oeil avec les types de Harvard qui nous entourent et font des réflexions désobligeantes sur notre petite poule qu'instantanément règne dans notre voisinage un silence de mort, sauf en ce qui concerne notre petite gonzesse qui continue à crier tant qu'elle peut : " Tiens bon, Yale ! " A ce moment, voyez-vous, nous sommes tous toqués de notre petite gonzesse. Elle est si mignonne, si pleine d'entrain ! Et nous ne voulons pas que qui que ce soit se permette de faire sur elle des remarques malsonnantes, ni surtout sur nous.
            Nous sommes tellement toqués d'elle que, lorsqu'elle dit qu'elle a un peu froid, Louie et Nubbsy se faufilent parmi les types de Harvard et reviennent avec quatre couvertures de voyage, six cache-nez, deux paires de gants et une bouteille thermos remplie de café bien chaud, tout cela pour elle. Louie ajoute que si elle a envie d'un manteau de vison elle n'a qu'un mot à dire. Mais elle en a déjà un. De plus, il lui apporte un gros bouquet de fleurs rouges qu'il a cueillis sur une gonzesse qui est avec un des types de Harvard, et il est très déçu quand notre petite poule lui dit que ce n'est pas sa couleur préférée.
            Enfin, le match se termine, et il ne me laisse pas un souvenir très précis, quoique sur ces entrefaites j'apprenne que John, le frère de notre petite gonzesse, a joué comme remplaçant dans l'équipe de Yale, et qu'il a fort bien joué. Mais il paraît que c'est Harvard qui a gagné. Notre petite gonzesse en est tout affligée et elle reste là, assise à regarder le terrain, rempli maintenant de types qui dansent comme s'ils étaient devenus subitement fous, et ce sont vraisemblablement des types de Harvard, car ceux de Yale n'ont, en vérité, aucune raison de danser.                 
            Tout à coup notre petite poule regarde vers l'une des extrémités du terrain et elle s'écrie :
            - Oh ! Ils vont prendre nos poteaux !                                                          galerie-creation.com
            Il y a en effet à ce bout de terrain un tas de types de Harvard rassemblés autour des buts et qui s'efforcent d'arracher les poteaux, lesquels n'ont pas l'air de s'en porter plus mal. Personnellement je ne donnerais pas dix ronds de ces piquets-là mais, plus tard, un type de Yale m'a dit que quand une équipe de foot gagne un match, il est admis que les types de cette université emportent les buts des autres. Mais il n'a pas pu me dire à quoi servaient ces poteaux une fois en leur possession, et cela restera toujours pour moi un mystère.
            Quoi qu'il en soit, tandis que nous regardons ce qui se passe autour des buts, notre petite gonzesse nous dit de la suivre, elle se lève précipitamment, dégringole quatre à quatre les gradins, se met à courir à travers le terrain, pénètre dans le groupe qui entoure les buts avec, cela va sans dire, nous autres à sa suite. Elle réussit, je ne sais comment, à se frayer un passage à travers les types de Harvard qui sont là et, en un clin d'oeil, elle grimpe comme un écureuil à l'un des poteaux et se trouve perchée à califourchon sur la traverse qui relie les deux.
            Elle se figurait, nous a-t-elle expliqué plus tard, que les types de Harvard ne seraient pas assez mufles pour abattre les poteaux avec une dame perchée dessus, mais il faut croire que les types de Harvard ne sont pas galants, car ils continuent à tirer, et notre petite gonzesse se balance en même temps que les poteaux. Naturellement elle ne risque pas de se faire de mal car, si elle tombe, ce sera certainement sur la tête des types de Harvard et, à mon avis, la tête des types qui passent leur temps à tirer sur des piquets doit être assez ramollie pour amortir la chute la plus sérieuse.
            Nous voilà maintenant arrivés au pied des buts, Sam le Gonoph, le vieux Lèvre en Foie, Nubbsy Taylor, Benny de la rue du Sud et moi,  et notre petite gonzesse ne nous a pas plutôt aperçus du haut de son perchoir qu'elle nous crie :
            - Ne les laissez pas prendre nos poteaux !
            A ce moment, l'un des types de Harvard qui me fait l'effet d'avoir deux mètres cinquante de haut, allonge le bras par-dessus cinq ou six autres types et me décroche au menton un coup qui m'envoie dinguer à une telle distance que, quand je me relève, je suis assez loin du groupe pour assister en spectateur à ce qui se passe.
            On me dit plus tard que le type m'a sans doute pris pour un de ceux de Yale qui venaient au secours des poteaux, mais je dois dire que je conserverai toujours une très fâcheuse opinion des gars des universités, car je me souviens que, pendant que je volais en l'air et que je ne pouvais me défendre, deux autres types m'ont frappé.
            Sur ces entrefaites, Sam le Gonoph et les autres réussissent, je ne sais comment, à se faufiler à travers la foule jusqu'auprès des buts, et notre petite gonzesse est très contente de les voir arriver, parce que maintenant, les types de Harvard font balancer tant et plus son perchoir et que les poteaux menacent de tomber d'une minute à l'autre.
            Comme de juste Sam le Gonoph ne tient pas à avoir des histoires avec ces particuliers et il tente de s'adresser courtoisement aux types qui tirent sur les piquets :
            - Écoutez, dit Sam, cette petite gonzesse qui est là ne veut pas que vous preniez ces poteaux.
             Il est possible qu'au milieu du brouhaha ils n'entendent pas les paroles de Sam, ou que, s'ils les entendent, ils ne veuillent pas en tenir en compte car, d'un coup de poing, un des types de Harvard enfonce le chapeau de Sam jusqu'au-dessous de l'oreille gauche du vieux Lèvre en Foie, tandis que d'autres houspillent violemment les autres.
            - Très bien, dit Sam le Gonoph, dès qu'il peut retirer son chapeau de sur ses yeux, très bien messieurs, si c'est comme cela que vous voulez jouer. Et maintenant, les gars, à l'assaut !
            Alors, Sam le Gonoph et les autres se ruent à l'assaut, et non seulement avec leurs poings, mais avec quelque chose dans leurs poings, car ils sont ingénieux quand il s'agit de se battre, et chacun d'eux a dans sa poche de quoi tenir dans ses poings au cas où il aurait à se battre, ne serait-ce, par exemple, qu'un rouleau bien serré de pièces de cinq sous.
            En plus de cela ils jouent de la godasse et envoient des coups de pied dans le ventre des types quand ils ne réussissent pas à leur flanquer un gnon dans le menton. Le vieux Lèvre en Foie se sert également de sa tête avec succès. Il empoigne les types par le revers de leur veston et les attire à lui pour leur appliquer un coup de tête entre les deux yeux, et je dois avouer que la caboche du vieux Lèvre en Foie est, en toute circonstance, une arme fort dangereuse.
 *         Autour d'eux, le sol est bientôt jonché de types de Harvard et il y aussi, paraît-il, des types de Yale dans la collection, quelques types de Yale qui ont pris Sam le Gonoph et son équipe pour d'autres types de Yale en train de défendre leur poteaux et qui ont voulu venir à leur secours. Mais naturellement Sam le Gonoph et son équipe ne peuvent pas faire la distinction entre ceux de Yale et ceux de Harvard. Ils n'ont pas le temps de les identifier et ils cognent indistinctement sur tous ceux qui se présentent. Pendant tout ce temps notre petite gonzesse est assise sur sa traverse et hurle des encouragements à Sam et ses types.
            Mais il se trouve que les types de Harvard ne sont pas des nouilles dans une peignée de ce genre et, à mesure qu'ils dégringolent, ils se relèvent et retournent se battre et, si au début Sam le Gonoph et les autres ont l'avantage grâce à leur vieille expérience, les types de Harvard ont pour eux leur jeunesse.
            Au bout d'un moment ce sont les types de Harvard qui abattent pour commencer Sam le Gonoph et en quelques minutes les autres, et c'est tellement rigolo que les types de Harvard ne pensent plus du tout aux poteaux. Naturellement, à mesure que Sam le Gonoph et ceux de son équipe sont abattus, ils se relèvent, mais ceux de Harvard sont trop nombreux et sont en train de leur administrer une raclée épouvantable, lorsque le type de deux mètres cinquante qui m'a envoyé dinguer et qui flanque Sam le Gonoph par terre si souvent que le dit Sam commence à la trouver mauvaise, dit tout à coup :
            - Écoutez, même si ce sont des types de Yale, ce sont de fameux types. Cessons de cogner dessus et accordons-leur un hourra !
            Alors les types de Harvard envoient par terre encore une fois tous nos types, puis se rassemblent et crient à tue-tête :
            - Rah-rah-rah ! et s'en vont, laissant les poteaux debout avec notre petite gonzesse toujours assise sur la traverse.
            Mais j'ai appris plus tard que les types de Harvard qui n'avaient pas pris part à la peignée se sont emparés des poteaux qui étaient à l'autre bout du terrain et les ont emportés avec eux. Toutefois j'ai toujours déclaré que ces poteaux-là ne comptaient pas.
            Cependant, assis par terre, trop amoché pour se relever de sa dernière chute, la main sur son oeil droit complètement fermé, Sam le Gonoph est assez mal en point, et tout autour de lui il y a dans son équipe bien des éclopés. Mais notre petite gonzesse sautille en bavardant comme une pie entre le vieux Lèvre en Foie appuyé contre un des poteaux et Nubbsy Taylor appuyé contre l'autre, et elle fait ce qu'elle peut pour essuyer, avec un mouchoir de la dimension d'un timbre poste, le sang qui leur coule sur la figure.
            Deux de notre équipe geignent encore de leur dernière chute, et le stade est maintenant désert, à l'exception des journalistes, là-haut dans la tribune de la presse, qui ne semblent pas se rendre compte que le plus grand combat du siècle vient de se livrer sous leurs yeux. Il commence à faire sombre et, tout à coup, surgit du crépuscule un type en guêtres blanches avec un pardessus à col de fourrure, et se précipite vers notre petite gonzesse.
            - Clarice, dit-il, je te cherche partout. Mon train a été arrêté par un accident de l'autre côté de Bridgeport et je suis arrivé ici juste à la fin du match. Mais je pensais bien que tu devais être quelque part à m'attendre. Dépêchons-nous de partir pour Hartford, chérie.
            Mais en entendant cette voix Sam le Gonoph ouvre son bon oeil et jette un regard sur le type. Puis, tout à coup, bondit sur ses pieds, s'approche du type en titubant et lui envoie un coup de poing entre les deux yeux. Sam est encore un peu chancelant et ses jambes un peu vacillantes de la pile que lui ont flanquée les types de Harvard, si bien qu'il manque son coup, car le type s'abat seulement sur les genoux et se relève immédiatement tandis que notre petite gonzesse s'écrie :
            - Oh, ne faites pas de mal à Elliot ! Il n'en veut pas à nos poteaux !
            - Elliot ? fait Sam le Gonoph. Mais ce n'est pas Elliot. Celui-ci n'est autre que Georgie le Gigolo. Je le reconnais à ses guêtres blanches, dit Sam. Et maintenant je vais prendre ma revanche de la volée que m'ont administrée les types de Harvard.
            Ce disant il envoie un nouveau marron au type, et cette fois-ci, le coup semble un peu mieux appliqué, car le type s'en va par terre et Sam le Gonoph commence à lui travailler les côtes à coups de pied, bien que notre petite gonzesse continue à crier en suppliant Sam de ne pas faire de mal à Elliot. Comme de juste, nous autres nous savons bien que ce n'est pas Elliot, mais tout simplement Georgie le Gigolo. Et nous nous disons que nous pouvons bien nous aussi tanner le cuir de Georgie. Mais, à peine nous approchons-nous de lui que subitement il se tortille, se met précipitamment sur ses pattes et détale à toutes jambes à travers le terrain. Tout ce que nous apercevons de lui ce sont ses guêtres.blanches qui disparaissent par l'une des portes.
            A ce moment deux autres types sortent de l'ombre. L'un d'eux est un grand type très distingué, avec une moustache blanche. N'importe qui peut se rendre compte que ce n'est pas le premier venu. Et voici que notre petite gonzesse se précipite droit dans ses bras, l'embrasse sur ses moustaches blanches en l'appelant papa, et se met à pleurer tant et plus, ce qui me fait penser que nous n'allons pas tarder à perdre notre petite gonzesse. Alors le type à moustaches blanches va vers Sam le Gonoph et lui tend la main en disant :
            - Monsieur, accordez-moi l'honneur de serrer la main qui m'a rendu le signalé service de corriger le gredin qui vient de s'enfuir d'ici. Et, dit-il, permettez-moi de me présenter. Je suis J. Hildreth Van Cleve, directeur de la Compagnie Van Cleve. Miss Peevy m'a prévenu de bonne heure aujourd'hui que ma fille avait quitté précipitamment l'école et nous avons été informés qu'elle avait pris un billet pour New Haven. J'ai immédiatement soupçonné que cet individu y était pour quelque chose. Heureusement, depuis quelque temps, je le fais filer par des détectives privés, car je n'ignore pas que ma fille s'est toquée de lui, comme une petite collégienne qu'elle est, nous avons donc pu le suivre facilement jusqu'ici. Nous étions dans le même train que lui, et nous sommes arrivés juste à temps pour assister à la dernière scène de la petite pièce que vous venez de lui jouer. Encore une fois, monsieur, merci.
            - Je vous connais de réputation, Mr. Van Cleve, répond Sam le Gonoph. Vous êtes le Van Cleve qui en est réduit à ses quarante derniers millions. Mais, ajoute-t-il, ne me remerciez pas d'avoir flanqué une raclée à Georgie le Gigolo. C'est un propre à rien, et je suis désolé qu'il est réussi à duper, même une minute, votre gentille petite gosse. Bien que, ajoute Sam, elle soit à mon avis plus bébète qu'elle n'en a l'air si elle s'est laissé duper par un type comme Georgie le Gigolo.
            - Je le déteste, s'écrie la petite gonzesse. Je le déteste parce que c'est un capon. Quand il a reçu un coup il ne se relève pas pour retourner se battre encore, comme vous. Lèvre en Foie et les autres. Je ne veux plus jamais le revoir.                                                                  pinterest.fr     
            - Vous en faites pas, dit Sam le Gonoph, je serai trop près de Georgie dès que je serai remis de mes cabochons pour qu'il reste longtemps dans ce coin du pays.
            Sur ces entrefaites une année se passe sans que j'aperçoive Sam le Gonoph, ni aucun autre de l'équipe. Puis l'automne revient et un jour je me dis par hasard que c'est vendredi et que le lendemain les types de Yale vont jouer contre ceux de Harvard dans un grand match de football à Boston.
            Je me dis aussi que c'est pour moi une bonne occasion de me joindre de nouveau à Sam le Gonoph et d'aller à ce match revendre des billets pour son compte. Je sais qu'il partira vers minuit avec son équipe. Je m'en vais donc à cette heure-là à la gare du Grand Central et, au bout d'un moment, le voilà qui arrive en se frayant un passage à travers la foule avec Nubbsy Taylor et les autres derrière lui. Ils ont tous l'air d'être très agités.
            - Eh bien, Sam ! lui dis-je en m'empressant de le suivre, me voilà tout disposé à revendre des billets pour toi cette fois encore, et j'espère que nous allons faire de bonnes affaires.
            - Des billets ! fait Sam le Gonoph. Cette fois-ci nous ne revendons pas de billets, mais ça ne t'empêchera pas de venir avec nous. Nous allons à Boston, dit-il, pour encourager l'équipe de Yale à écrabouiller ceux de Harvard, et nous y allons comme invités personnels de Miss Clarice Van Cleve et de son vieux.
            - Tiens bon Yale ! dit le vieux Lèvre en Foie en me poussant de côté, tandis que toute la bande passe en trottant la barrière pour aller prendre le train. C'est alors que je m'aperçois qu'ils ont tous à leur chapeau une plume bleue avec un petit Y dessus, comme font toujours les types des universités pour les matchs de football, et qu'en outre, Sam le Gonoph emporte un fanion de Yale.

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                                                      Runyon

                                                                      ( in Nocturnes dans Broadway )
            

jeudi 12 septembre 2019

My absolute darling Gabriel Tallent ( Roman Etats Unis )


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                                                My absolute darling

            Mendocino, nord de la Californie. De la maison près de l'océan et à l'orée de la forêt, Julie, Turtle pour les proches et Croquette pour son père, attend le car scolaire avec son père, ce qu'elle préfèrerait éviter, mais il refuse et la conduit jusqu'au bout du chemin après leur petit déjeuner, une bière sortie du frigo qu'elle lui lance, et elle des oeufs qu'elle gobe crus. La maison est vétuste, Turtle porte un manteau trop grand, de lourdes chaussures. Est-elle laide, jolie, on ne sait trop, elle a 13, 14 ans, retient difficilement les explications du professeur, Anna qui, pourtant a de la sympathie pour la petite sauvageonne. Mais des doutes sur l'environnement de son élève que beaucoup partagent sans preuve, et Turtle poursuit une vie extrascolaire très occupée. Son père lui a appris le maniement des armes qu'il possède en grand nombre. Excellente tireuse il l'oblige à s'exercer sur des objets sur des portes. Dans la maison vivent araignées, un furet noir et autres, en paix, presque. Sa mère morte de façon assez mystérieuse, noyée sans doute, elle n'a pour toute famille que son grand-père qui vit dans un mobil-home de l'autre côté de la route au milieu des framboisiers, nourri de pizza et d'alcool. Ancien militaire, il a tué beaucoup, en Corée, au Vietnam. Turtle et le vieil homme s'entendent bien et ce dernier voudrait sortir sa petite-fille de la situation qu'il a perçue, comme d'autres. Martin est fort, de carrure impressionnante, de caractère. Il est écologiste et détaille les méfaits habituels aux écologistes extrêmes. Un jour lors de ses pérégrinations aventureuses sans but et sans chaussures mais avec son fusil toujours, Turtle croise Bret et Jacob, partis explorer la nature. Ils perdent le sentier, rencontrent un homme qui leur vend quelques " bourgeons " qu'il effrite pour 20 dollars, mais Bio, précise l'homme. Voyant les garçons perdus sous la pluie, elle s'approche et ils camperont sous un tronc de séquoia. Cet épisode de la vie des trois adolescents marque le début d'une période délicate. Martin est jaloux, férocement jaloux. Le traitement qu'il fait subir à Croquette est inacceptable. Mais Turtle ne connaît que lui, et soumise, reçoit brimades puis la couche. L'histoire cruelle qui peut finir en tuerie est entrecoupée de grands détails sur la nature. Martin lit beaucoup, les philosophes et le grand-père dit à Turtle : " Quand une petite puce connaît le nom d'une chose, elle pense tout savoir à son sujet, et elle ne regarde plus. Mais un nom ne veut rien dire, et affirmer que tu connais le nom de quelque chose revient à avouer que tu ne sais rien........ Les noms ne sont que des pièges pour t'aider à t'en souvenir........ " La dernière partie du livre est un western, sans chevaux mais avec des armes. Les personnages sont extrêmes, même ceux qui restent hors de portée de la folie ravageuse de Martin. L'océan Pacifique engloutira-t-il Turtle et Jacob isolés sur une île-rocher lors de grande marée, mais la lune est là et le soleil les réchauffe. Il fallut sept ans à l'auteur, Gabriel Tallent pour écrire ce beau, sauvage et premier livre. Du calme, de la vie heureuse d'une famille enrichie grâce à la Silicon Valley, à la brutalité sans limite de Martin, des orages et une végétation encore vivante, peut-être faut-il un dico tant les bruissements appartiennent à des espèces peu connues. Très très beau livre, surprenant au début puis on ne s'arrête plus.

lundi 9 septembre 2019

Anecdotes et réflexions d'hier pour aujourd'hui 100 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )


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                                                                                                              16 août 1663
                                                                                               Jour du Seigneur    
            Lever et à l'office avec ma femme. Comme elle m'avait paru désireuse de se rendre à l'office je soupçonnai qu'elle allait retrouver Pembleton, mais il n'était pas là. Je jugeai donc ma jalousie sans fondement et notai les principaux points du sermon avec sérénité. A la maison pour dîner, fort agréablement, si ce n'est que ma femme ne put se retenir de se fâcher contre Miss Ashwell. Après le dîner derechef à l'office. Là, en parcourant l'assistance du regard je vis Pembleton debout dans l'allée non loin de nous, car il était arrivé trop tard pour trouver à s'asseoir.
            Seigneur, quelle suée cela m'a donnée ! Je ne crois pas que ma femme l'ait vu, ce qui me consola un peu. Cependant j'enrage de voir que je suis d'un tempérament si jaloux, et que je n'y peux rien. Mais, quoiqu'il fasse, je ne vois pas, puisque je vais réduire mon train de vie, quel mal il peut me faire, car ma femme n'aura plus désormais l'occasion de prendre des leçons avec lui.
            Celui qui prêchait était un jeune fat plein d'assurance. A la maison, et je passai un moment avec sir John Mennes chez Mrs Turner, à écouter son perroquet parler, rire et pleurer, ce qu'il fait de façon admirable. Emmenai ensuite ma femme voir sir William Penn, puis chez mon oncle Wight où nous surprîmes la famille en train de souper, et nous joignîmes à eux. Mon oncle me semble bien plus aimable que par le passé avec moi et, me dit mon père, avec lui aussi, ce qui me réjouit.
            Retour à la maison par une nuit extraordinairement noire mais, par bonheur, un veilleur passa et nous lui donnâmes de l'argent pour qu'il nous éclairât jusqu'à la maison. A peine avions-nous passé la porte qu'une grosse averse tomba qui nous aurait trempé jusqu'aux os.
            Puis prières et, au lit.


                                                                                                            17 août     

            Lever, puis ma femme et moi commençons à parler de Miss Ashwell et, bien contre mon gré, je suis obligé d'exprimer à Miss Ashwell le désir qu'elle nous quitte. Cependant, dans mon for intérieur je suis content car cela me soulagera d'une dépense. Elle doit donc repartir chez son père aujourd'hui.
            Je les laissai, elle et ma femme, se quereller et me rendis en voiture avec sir John Mennes et sir William Batten à St James où, comme d'habitude, me mis au service du Duc. Puis à Whitehall où rencontrai Mr Moore. Il me parle avec grande tristesse de milord qui a été débauché, appréhende-t-il, par cette femme de Chelsea, ce qui me tourmente. Je suis résolu à lui en parler si je peux trouver le moment favorable.                                                                                      aftouch-cuisine.com
            Puis à la maison où dînai seul avec ma femme. Arrive ensuite notre ancienne servante, Susan. Elle dit qu'elle cherchait un fichu oublié avant son départ. Au vu des nombreux détails, car il était clair pour moi que non seulement c'est Hannah notre cuisinière actuelle qui l'a, mais qu'elle le portait au cou à l'arrivée de Susan et qu'elle l'a prestement ôté quand l'autre est entrée. Je lui lançai une accusation qui porta si juste, car j'avais dans l'idée de la faire quitter la maison, qu'elle prit la mouche et nous dit qu'elle partirait ce soir même, si je voulais bien lui payer ses gages. Ce dont ma femme et moi étions contents, et j'allai lui chercher ses gages. Et quoique que je craigne qu'elle emporte des choses avec ses habits, même si ma femme a fouillé ses affaires, nous sommes contents de la voir s'en aller ainsi. Elle partit donc un quart d'heure plus tard, me laissant fort ébahi de ne plus avoir de servante à part Miss Ashwell que nous n'avons pas l'intention de garder, ni de petit valet, et comme ma femme et moi demeurâmes une heure, jusqu'à l'arrivée de mon frère, seuls à la maison, je devins fort mélancolique.
            Et donc, mon frère revenu, je sortis voir Mrs Holden à qui j'avais parlé il y a quelque temps d'une fille que je pourrais engager à la place du petit valet. Je fis de même avec Mrs Standing et aussi avec mon frère Tom........ Comme je me tenais avec lui à l'entrée de la venelle, Miss Ashwell passa. Je quittai Tom et l'accompagnai presque jusqu'à la maison, parlant de son départ. Il m'apparaît qu'elle veut bien s'en aller, et je l'assurai que ( quoique dans mon dos ma femme lui eût dit que c'était davantage mon souhait que le sien de la voir partir, ce qui était choquant ), voyant qu'elle et ma femme ne pouvaient s'entendre, je préférais, eût-elle été ma soeur, qu'elle s'en allât, que ce serait mieux pour nous et pour elle aussi. Ce dont elle convint volontiers. Elle ne veut rien me dire, si ce n'est qu'elle croit que ma femme voudrait avoir chez elle une servante moins susceptible qu'elle, à son avis, de me donner des informations. Je dois cependant oeuvrer pour qu'il n'en soit pas ainsi.
            Je la quittai près de la maison et nous convînmes de ne pas mentionner que je l'avais accompagnée, puis un peu plus tard, je rentrai à la maison, après elle.
            Je trouve la maisonnée triste et désemparée, ce qui me chagrine. Cependant souper, prières et au lit. Et alors que nous nous couchions, ma femme commença de lui parler, et lui demanda tout de go si elle avait ou non trouvé une place, et l'autre lui répondit qu'elle pouvait aller, si nous étions d'accord, chez quelqu'un de notre bureau. Nous acceptâmes. Là-dessus elle dit que non, elle voulait aller là où elle pourrait enseigner à des enfants, pour ainsi continuer à faire usage des choses qu'elle avait apprises, ce qu'elle ne fait pas ici, ni ne ferait chez ces gens, servant seulement de camériste.
            Je vois que cette fille est futée, mais tout à fait prête à cette sorte de place, et ferait une dame de compagnie accomplie au service de n'importe quelle dame du pays.
            Nous endormîmes ensuite, l'esprit apaisé. La nuit était froide.
            Mais jusqu'à ce que ma maison soit remise en ordre, je ne vois pas comment je peux m'intéresser à mon travail à mon bureau, ce qui m'afflige profondément. J'espère que tout sera réglé dans peu de temps, je l'espère pour le mieux.
            Aujourd'hui, chez Mrs Holden, j'ai vu que mon nouveau chapeau de castor bas de forme, comme c'est la mode, est prêt. On me l'apportera demain.


                                                                                                          18 août

            Lever et au bureau, réunion toute la matinée. A midi à la maison où mon père vint dîner. Susan était venue aider ma femme. Après dîner causer avec mon père des affaires à la campagne.
En bref, il m'apparaît qu'à son avis, il pourra peu à peu faire vivre la famille avec 50 livres par an, ce qui me réjouit. Après qu'il eut pris congé de ma femme et moi, sans jamais parler des différends qu'ils ont eus à la campagne. Je sortis et allai dans plusieurs endroits pour affaires, puis rentrai et, après souper, au lit.


                                                                                                                19 août
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Ma polonaise de foies de lapin            Levé de bonne heure, ma femme s'affaire dans la maison. Susan recommença à faire des siennes parce qu'elle avait bu, ce qui nous rappela ses anciens défauts, sa déraison et ses égarements que nous avions oubliés, de sorte que sa présence commença de fort m'inquiéter. Ce matin mes menuisiers sont venus parqueter de neuf mes planchers et ils ont commencé par la salle à manger.
            Je sortis et allai de nouveau voir ma viole qui est fort belle. Puis chez Mr Hollier qui me donna des pilules et une ordonnance de sa main me prescrivant de boire du vin avec ma bière. Sans cette ordonnance j'étais obligé, par mes résolutions personnelles, et je les ai strictement observées, de n'en point boire du tout pendant longtemps. Comme je bois de la petite bière sans manger je suis si fort incommodé par des vents que je ne sais que faire ou presque.
            Ensuite à Whitehall, rencontrai Mr Moore. Nous commençâmes à parler de la folie de milord à Chelsea, retournant par le fleuve à Londres et au grand café près de la Bourse, où nous passâmes un bon moment. J'apprends que milord est entièrement sous l'emprise de cette fille publique. Mr Moore ne m'encourage guère à m'en mêler, à en parler à milord, de crainte que cela ne lui fasse pas de bien, mais me cause du tort.
            Puis repris le chemin de la maison, pris congé de lui et rencontrai Tom Marsh que j'ai connu à Westminster et qui ne tarit pas sur la gloire tirée de son emploi ( il est secrétaire adjoint du secrétaire de la Chambre des Communes ) mais je le tiens pour un fat. Je lui payai une demi-pinte de vin, mais n'en bus point, puis m'en débarrassai, et à la maison. Je trouve ma femme rendue à demi folle par les lubies de Susan, de sorte qu'il lui faut la renvoyer en laissant la maison toute sale et la lessive trempée, et qu'elle demande à la mère Taylor de faire ce travail pour elle jusqu'à l'arrivée d'une autre servante.
            Voilà qu'arriva Will Howe. Lui et moi nous retirâmes dans mon cabinet pour parler de milord. Il me demande, par amour pour milord, de parler à milord des affaires dont nous nous sommes entretenus, qui le poussent si fort à la ruine. Je résolus donc de rassembler tout mon courage et de le faire, et advienne que pourra.
            Après son départ nous nous mîmes à table et mangeâmes une modeste collation de chez le traiteur, puis je me levai et allai voir mes menuisiers qui vont me faire de fort beaux parquets. Sur ces entrefaites arrive Pembleton, ce qui commença de me donner une suée, mais je lui fis fort mauvaise figure et me déclarai, dès qu'il ouvrit la bouche, opposé à de nouvelles leçons de danse, puis le saluai d'un " Dieu vous accompagne ! " Il prit congé de ma femme aussi vite, s'en alla n'ayant guère eu le temps, je crois, de recevoir de ma femme grande satisfaction ni invitation à revenir.
            A mon bureau jusqu'à la nuit tombée, puis à la maison et à la lueur de la bougie fis mes comptes pour milord et Mr Moore qui arriva sur ces entrefaites, resta un long moment à faire ses comptes et les miens, mais ne put achever car il n'avait pas ses papiers.
            Il soupa avec moi au milieu de toute la saleté et du désordre de ma maison, puis partit et nous nous mîmes au lit.
            Je m'entretins longuement avec lui de l'opportunité de parler à milord de son affaire, et je comprends d'après ce qu'il me dit que cela s'avèrerait probablement mauvais pour moi et inutile pour lui, je ne m'en occuperai donc point et laisserai la volonté de Dieu s'accomplir, tout au moins jusqu'à ce que milord parte à la campagne. Nous verrons ensuite s'il décide ou non de retourner à Chelsea, et nous arrangerons pour l'en empêcher si nous le pouvons.


                                                                                                             20 août 1663

            Levé de bonne heure et à mon bureau. J'ai commencé par me fâcher contre mon frère John et, dans la chaleur de mon emportement, l'ai traité d'âne et de benêt, ce que je regrette, et cela seulement parce qu'il avait laissé la clef de sa chambre, dont la serrure est à ressort, sur la porte à l'intérieur. Et réunion toute la matinée. A midi dînai à la maison où je trouvai une jeune fille qui a dit elle-même à ma femme qu'elle s'appelait Jinny. Je pense que c'est une bonne petite fille qui nous conviendra, une enfant à la charge de la paroisse de St Bride, de parents honnêtes et recommandée par le marguillier.
            Après le dîner m'en fus voir mes menuisiers poser mes parquets qui me plaisent fort, puis à mon bureau où réunion cet après-midi pour une affaire extraordinaire de subsistances.
            Dans la soirée arriva le commissaire Pett qui me querella sur la façon dont je m'étais conduit avec lui à Chatham. Mais il se calma après que j'eus protesté de mon amitié et de mes bonnes intentions.. Mais je crains qu'il ne fasse là-bas un aussi bon travail que ne le pourrait n'importe quel autre homme de son intelligence.
            Retour chez moi dans la soirée, ma viole ainsi que mon luth pourvu de cordes neuves furent apportés à la maison et j'aurais voulu en régler le prix à Mr Hunt, mais il ne vint pas les apporter en personne, contrairement à mon attente, et cela me fâcha, tant il est contre ma nature de devoir quoi que ce soit à quiconque.
             Ce soir la jeune fille que l'on m'avait amenée aujourd'hui en m'en disant tant de bien, après avoir été épouillée aujourd'hui par ma femme et vêtue de bons habits neufs, a échappé à la mère Taylor tandis que celle-ci lui montrait le chemin de la boulangerie, et nous n'en avons plus de nouvelles.
            Puis souper et, au lit.


                                                                                                             21 août
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Résultat de recherche d'images pour "petit cabinet meuble 18è"            Levé de bonne heure et m'en fus voir mes menuisiers, puis à mon bureau où les menuisiers posent des moulures dans mon petit cabinet.
            Puis sortis et à Whitehall par le fleuve où fis signer par sir George Carteret mes billets à ordre pour mes appointements du trimestre écoulé. Je rencontrai Mr Creed qui me conta comment milord Treviot a résisté à une nouvelle attaque de Guyland, à la tête de 10 000 hommes à Tanger, pour finalement, dit-on, après avoir conclu un traité de personne à personne, parvenir à une bonne entente et à la paix avec lui. Ensuite chez mon frère, lui dis le tour que cette fille qu'il m'a envoyée nous a joué, et lui commandai de recouvrer mes habits et de faire fouetter la fille.
            Rentrai à la maison, m'arrêtant en chemin dans d'autres endroits pour de menues affaires. Après avoir vérifié le travail de mes ouvriers, me rendis par le fleuve et par la route à Deptford où retrouvai sir William Batten, mais il était allé dîner chez Mr Waith, je l'y rejoignis, bonne chère et agréable conversation, et sa femme, je le pense, est une femme de bien. Nous parlâmes du capitaine Cocke et de la façon dont sa femme a perdu tout son beau linge. On affirme en outre qu'elle affirme posséder pour 3 000 livres de linge, ce qui nous fait tous rire...........
            Puis nous rendîmes à Greenwich........ écoutâmes de la musique........... et rentrai à la maison par le fleuve. Je trouvai là ma petite servante qui s'était enfuie ramenée par un bedeau de la paroisse de St Bride. Je lui ôtai ses vêtements et la renvoyai, et une autre arriva envoyée par Griffith, et qui, je pense, s'avèrera une bonne servante, elle s'appelle Susan.
            Souper après avoir ce soir payé 3 livres à Mr Hunt pour ma viole, outre la sculpture que j'ai payée aujourd'hui 10 shillings au sculpteur. A son avis, je peux dire sans me flatter que mon théorbe, ma viole et mon violon sont parmi les plus beaux d'Angleterre. Puis, au lit.


                                                                                                               22 août

                 Levé vers 4 heures pour partir avec sir William Batten et sir John Mennes à Woolwich, mais pas avant 6 ou 7 heures car ils n'étaient pas levés. Le but était d'examiner le nouveau quai en construction, afin de donner à celui qui le construit, Mr Rundells, davantage qu'il n'était convenu dans le contrat, mais cela ne me semble aucunement justifié....... car ce n'est pas mieux que ce qui était convenu.
            Nous mangeâmes et bûmes chez le vérificateur des rôles. Avant de nous embarquer à la porte de la Tour nous bûmes un gobelet d'eau-de-vie, ce que je fis par seul souci de ma santé, je crois que ce n'est pas interdit par mes résolutions, mais je ne le referai plus et espère ne pas retrouver semblable occasion. Après avoir déjeuner, Mr Castle et moi nous rendîmes à pied à Greenwich, et en chemin rencontrâmes des Égyptiennes qui voulurent absolument me dire la bonne aventure, et je permis à une d'elles de le faire. Elle me dit maintes choses communes, comme le font les autres, mais me recommanda de me méfier d'un John et d'un Thomas qui me voulaient du mal, et que quelqu'un d'ici une semaine viendrait me voir pour m'emprunter de l'argent, mais que je ne devais pas lui en prêter. Elle obtint 9 pence de moi, puis je les quittai.
            Retour à la maison par le fleuve. Je trouve mon petit cabinet achevé dans mon bureau, à ma convenance. Miss Ashwell est sortie voir son père, car ma femme lui a parlé rudement. Après le dîner à mon bureau où fis nettoyer mon petit cabinet, mis de l'ordre dans des papiers. Puis à la maison et, au lit.
            Aujourd'hui sir William Batten me dit que Mr Newborne ( surnommé " Lève-toi Tom Newborne ) est mort d'avoir mangé des concombres. J'ai entendu parler d'un cas semblable l'autre jour, le fils de sir Nicolas  Crisp, je crois.


                                                                                                                      23 août
                                                                                                    Jour du Seigneur
            Lever et à l'office sans ma femme qui est toute sale, comme ma maison, Dieu me pardonne !
Je regardai autour de moi pour voir si Pembleton était présent, mais je ne le vis pas, ce qui ne me fit pas peu plaisir. Dîner à la maison et ensuite fis les cent pas dans ma maison avec ma femme à parler de nos affaires de famille, et j'espère après toutes mes inquiétudes et ma jalousie que nous continuerons à vivre heureux.
            Derechef à l'office, puis retour à la maison auprès de ma femme avec qui je lus Iter boreale, un poème écrit juste au moment du retour du roi, mais que je n'avais encore jamais lu, je le trouve fort bon mais pas autant qu'on l'a dit. Souper, ne retirai ni agrément ni conversation de Miss Ashwell, parce qu'elle néglige et se moque de faire quoique ce soit dans la maison à un moment où elle est si sale et si en désordre, mais préfère sortir se promener comme elle l'a fait tout l'après-midi, je ne sais où. Le souper terminé, prières et, au lit, après être allé, car j'avais reçu de Mr Coventry une lettre inattendue, chez sir William Penn pour m'entretenir avec lui de l'envoi de 500 soldats en Irlande. Je crains que les choses n'aillent pas bien là-bas.


                                                                                                                    24 août

            Lever très tôt et arrivent mes menuisiers. Me rendis chez Mr Moore, puis rentrai directement à la maison où rédigeai pour milord une présentation de ses comptes. Cela fait je le retrouvai chez milord Sandwich et passai un bon moment seul avec milord. Je vois qu'il me fait confiance et qu'il m'aime toujours autant. Il me parle de sa situation fort bonne maintenant. Je ne crains qu'une chose c'est qu'il ne vive au-dessus de ses moyens, car on m'a parlé ce matin des étranges faiblesses qu'il a pour cette catin de Chelsea, même en la présence de sa fille milady Jem et Mrs Ferrer qui l'ont remarqué.
            Il a reçu aujourd'hui ses gravures représentant le Tage et la cité de Lisbonne dont il a lui-même établi la topographie et qu'il a fait imprimer sur l'ordre du roi. Milord en est content mais il me semble qu'on aurait dû les faire plus belles en utilisant une autre méthode que l'eau-forte. Je l'incitai, en outre, à en faire tirer sur satin blanc, ce qu'il commanda aussitôt.
            Je présentai mes comptes à milord et lui rendis son vieux billet à ordre pour 500 livres, et en reçus un nouveau pour 700 livres. Je vais parfaire la différence en lui prêtant davantage d'argent, et j'en suis heureux.
            Milord aurait voulu me faire dîner avec lui, mais j'avais envie de rentrer à la maison voir mes ouvriers et pris donc fort civilement congé de lui.
            J'allai avec Mr Creek à St James, ne trouvai point Mr Coventry, me rendis à pied à la nouvelle Bourse où bus du petit-lait, puis en barque à la maison. Je trouvai mon petit cabinet dans mon bureau fort bien nettoyé et propre, exactement à ma convenance. Dîner à la maison puis à mon bureau pour épousseter mes livres et les remettre en ordre ainsi que mes papiers, et travaillai là tout l'après-midi, jusqu'à une heure avancée de la nuit. Puis dînai chez moi et ensuite dans mon petit cabinet travaillai., notai les détails des comptes d'aujourd'hui bien clairement dans mes livres, car ils sortent un peu de l'ordinaire. A une heure fort tardive je me mis tout seul au lit, tout le monde étant depuis longtemps parti se coucher.


                                                                                                                25 août
                                                                                                                     essentiam.fr/
Résultat de recherche d'images pour "livres anciens 18ème siècle"            Levé très tôt et déménageai le contenu de mon cabinet de travail dans la salle à manger, car on doit aujourd'hui poser un nouveau parquet. Puis les ouvriers étant arrivés et se mettant au travail, me rendis au bureau puis à Limehouse chez Phineas Pett pour une affaire de mâts. Retour au bureau, réunion....... et me rendis à la Bourse, parlai avec plusieurs personnes et finalement avec sir William Warren, et allai avec lui dans un café où restâmes deux heures à parler des affaires du bureau et de la filouterie de Mr Wood, dont je ne doute pas un instant............
            Retour à la maison à 2 heures où je vois que Miss Ashwell est partie. Ses gages se montaient à 50 shillings, mais ma femme, à cause d'une erreur de ma part, lui en a donné 20 de plus. Mais je suis content qu'elle soit partie et qu'elle ne me coûte plus rien.
             Après le dîner fus voir mes menuisiers que je ne quittai pas jusqu'à la nuit noire. Ils ont ce soir achevé tout leur ouvrage. Je leur ai payé 40 shillings pour leur six jours de travail, et je suis content qu'ils aient terminé et qu'ils soient partis, car ma femme et moi sommes las de leurs saletés.
            Ma femme devient maussade le soir, car elle est fatiguée et je suis un peu irrité de voir qu'elle ne se souvient pas des choses qui se trouvent dans la maison, comme elle le devrait et comme je le fais. Je sortis l'air un peu mécontent, et allai au bureau, et après un moment souper et, au lit.
            On dit que demain le roi et le Duc partent pour Bath.
            Ce midi, sur le chemin de la Bourse j'ai rencontré un homme de belle mine précédé par des trompettes dans Leadenhall Street, et l'on me dit qu'il est le clerc du marché de la Cité, et trois ou quatre hommes portaient chacun une flèche pesant une livre dans leurs mains. Il semble que ce lord-maire rétablisse une vieille coutume selon laquelle les trois premiers jours de la Saint-Barthélémy se tient, le premier jour une épreuve de lutte qui a eu lieu en présence du lord-maire et des échevins hier à Moorfields. Aujourd'hui chasse au fusil, et demain chasse à courre.......... Il semble que les gens de la foire protestent contre cela en disant que c'est une grande entrave au commerce.


                                                                                                          26 août 1663

            Lever et après avoir essayé de remettre ma maison en ordre, maintenant que les travaux de menuiserie sont achevés, j'allai en barque à Whitehall. La cour du palais est remplie de chariots et de chevaux, car le roi et la Cour partent aujourd'hui pour Bath. Me rendis à St James où je passai une heure ou plus, à parler fort agréablement de maintes choses avec Mr Coventry. Il est prêt à partir avec le Duc aujourd'hui. Je le quittai puis je retrouvai Mr Gauden et retournai avec lui à notre bureau............
            A la maison pour dîner avec Mr Moore. Après le repas je lui payai une somme ce qui nous rend parfaitement quittes, et je lui remis aussi de l'argent pour milord, de sorte que maintenant milord me doit exactement 700 livres pour lesquelles j'ai son billet.
            Après nous être longuement demandé s'il était bon qu'il me donnât un reçu pour cet argent, ce que, comme garantie, je crois nécessaire, alors qu'il est d'avis contraire, finalement, après nous être un peu échauffés, et quand je me montrai résolu à ne pas me séparer de mon argent sans cela, il m'en donna un.
            Je sortis avec lui et nous fîmes une agréable promenade jusqu'à Deptford où je réglai de nombreuses affaires. Au retour il rentra chez lui et moi aussi pour souper, fort content de voir ma maison commencer à reprendre son aspect habituel. J'espère, quand tout ceci sera terminé, ne plus vivre dans la saleté, avant fort longtemps, mais le résultat est fort beau et le sera davantage quand la couleur du parquet sera devenue la même.
            Puis au lit, fort las.
            Content de voir aujourd'hui le capitaine Hickes. Il m'apporta une liste de tous les officiers de l'arsenal de Deptford, dans laquelle lui, qui est un vieux Cavalier fidèle, me fait un rapport sur chacun d'entre eux, et ils sont à blâmer sur tous les points. Il relève beaucoup de leurs friponneries et me dit, comme Dieu soit loué ! je l'entends dire partout, que j'ai la réputation d'être un bon administrateur des affaires du roi et un homme de bien, ce pourquoi je remercie Dieu, et qu'il a fait cela à la demande expresse de Mr Coventry.


                                                                                                                  27 août

            Lever après avoir échangé avec ma femme maints propos agréables, et quelques-uns qui me fâchent, car je vois qu'elle est persuadée que tout ce que je fais est par calcul, et que le fait même de laisser la maison dans un tel état de saleté, et tout ce que je fais d'autre dans la maison, n'ont d'autre but que de lui fournir de quoi s'occuper pour l'empêcher de sortir et de se distraire. Cela, bien que je sois fâché qu'elle s'en soit aperçue, est fort exact pour une large part.
            A mon bureau, réunion, et à la maison où fis un bon dîner avec ma femme, puis montai et époussetai ma bibliothèque et fis nettoyer très soigneusement mon cabinet une troisième fois, de sorte qu'il est maintenant en excellent état.
            Allai ensuite voir de bonnes planches sur le fleuve avec sir William Batten, puis retour. Journée très froide avec un vent froid........ Suis fortement encouragé par tous ceux que je rencontre à la Bourse et partout ailleurs, ils me disent que l'on me tient pour un homme qui travaille bien, avec un entier dévouement au roi. Le Seigneur en soit loué, car je ne connais point d'honneur que je désire davantage !
            Retour chez moi pour souper et trouve ma maison redevenue fort propre de fond en comble, à ma grande satisfaction. Je trouve un " fecho " comme il l'appelle, de sucre fin et un coffret de fleur d'oranger arrivés de Lisbonne de la part de Mr Cocke, les fruits du service que je lui ai rendu l'année dernière, en quoi j'ai seulement agi en toute justice envers l'homme que je ne connaissais pas du tout. Il m'envoie ceci en me priant de ne pas en informer sir John Mennes. C'est de lui qu'il attendait le service que je lui ai rendu, mais ce ne pouvait être qu'en vain, et l'autre n'a rien fait, ni n'aurait rien fait, j'en suis sûr.......
            Après souper, au lit.


                                                                                                                     28 août

            De bonne heure au bureau. Il a fait froid toute la nuit, et ce matin on dit qu'il y a eu de fortes gelées à la campagne, ce qui est peu ordinaire, car nous n'avons presque pas eu d'été. Réunion qui se poursuivit aussi l'après-midi pour fixer les effectifs des vaisseaux, etc., jusqu'au soir. Après dans mon petit cabinet jusqu'à une heure avancée et, recru de fatigue d'avoir tant travaillé, à la maison souper et, au lit.


                                                                                                                         29 août

            Levé de bonne heure et mis en ordre certains papiers nécessaires pour me couvrir concernant l'apurement récent de mes comptes avec milord Sandwich, puis réunion au bureau toute la matinée. Dîner à la maison, puis sortis avec ma femme et en barque à Westminster. Je la laissai chez milord pour parler à Mrs Harper de la venue la semaine prochaine de sa parente comme servante de ma femme. Me rendis chez Jervas le barbier qui me rasa, et lui rendis une perruque qu'il m'avait apportée à ma demande l'autre jour pour me la montrer, car je caresse l'idée d'en porter une, quoique je n'en aie point encore grande envie, et que je n'y sois point encore résolu. Je remets donc cela à plus tard.
            Rejoignis ensuite ma femme et nous nous arrêtâmes aux deux Bourses pour acheter des bas pour elle et pour moi, et aussi à Leadenhall, où elle et moi, à la lueur des chandelles, achetâmes de la viande pour demain, car nous n'avons pas de servante pour le faire, et j'achetai moi-même, tandis que ma femme était dans une autre boutique, un cuisseau de boeuf, un beau, pour 6 pence, et ma femme me dit que j'en ai pour mon argent. Ensuite à pied à la maison, avec une femme qui portait nos achats, et fort agréable promenade de Whitehall à la maison. Puis à mon bureau, expédiai des affaires et à la maison, souper et, au lit.
            Nous nous arrêtâmes chez Tom en passant et vîmes là le nouvel étage qu'il construit et qui sera fort commode. Mais je suis très mécontent d'une lettre qu'il m'a envoyée hier soir pour m'emprunter encore 20 livres. Il ne me fait pourtant aucun rapport, comme je le lui demande depuis longtemps, sur l'état de ses affaires. Je suis aussi inquiet de voir que, contrairement à mon attente, mon frère John n'est pas le savant, l'étudiant sérieux que je croyais qu'il aurait été, mais a gaspillé son temps à flâner, de sorte que je dois, sans tarder, le renvoyer à Cambridge.


                                                                                                                              30 août                          franceculture.fr                                                                                                          Jour du Seigneur
Résultat de recherche d'images pour "livres anciens 18ème siècle"            Grasse matinée. Comme Will souffrait d'une rage de dents je restai à la maison et fis mes comptes. A ma grande satisfaction, ma fortune se monte à 750 livres, et je n'ai pas de dettes. La plus grosse somme que j'aie jamais possédée. Dînai seul avec ma femme car mon frères dînait chez mon oncle Whight, je crois. A l'office seul dans l'après-midi. Je vis Pembleton entrer et regarder dans ma direction, ce qui me donna une suée et, ne voyant pas ma femme, ressortit. Mais, Seigneur, comme j'avais peur que me voyant à l'église, il n'allât chez moi voir ma femme ! Je suis à ce point impuissant à me garder de la jalousie, et fus donc dévoré d'impatience pendant tout le sermon. A la maison trouve tout en ordre et aucun signe de la venue de quiconque, et donc, avec grand contentement, jouai et badinai avec ma femme. Puis à mon bureau, travaillai un peu sur mes papiers et retour chez moi auprès de ma femme pour parler, souper et, au lit.


                                                                                                                            31 août 1663

            Lever et à mon bureau toute la matinée. Sir William Batten et sir John Mennes payèrent aux équipages des vaisseaux qui viennent de rentrer des Indes orientales leurs indemnités  compensatoires et, avec l'aide du lieutenant de police de la Cité et de ses hommes ils se sont emparés de deux ou trois des meneurs de la compagnie de marins qui se sont mutinés l'autre jour et les ont envoyés en prison. Je rentrai à la maison pour dîner, puis ma femme partit avec mon frère pour voir une pièce et je retournai à mon bureau jusque tard à travailler, et à la maison souper et, au lit.
            Ce midi est arrivée Jane Gentleman pour servir ma femme en qualité de femme de chambre. Je souhaite qu'elle s'avère une bonne servante. La seule chose est qu'elle est dure d'oreille, ce qui pourrait être ennuyeux, mais nous ne le savons point encore, en outre elle n'entend pas toujours aussi mal.
            Ainsi s'achève ce mois. J'ai l'esprit bien en paix, et suis en bonne santé depuis que je bois à la maison un peu de vin avec ma bière, mais je ne bois de vin nulle part ailleurs. Ma maison est en bonne voie d'être de nouveau propre, car les menuisiers ont terminé. La seule chose est que nous sommes sans cuisinière et que Jane vient juste d'arriver chez nous.
            Le roi, la reine et la Cour sont à Bath. Milord Sandwich est à la campagne depuis peu et j'appréhende qu'il ne soit débauché par une catin dans la maison où il loge à Chelsea. Mon frère John est chez moi mais sans me donner grande satisfaction...............
            Je suis estimé au bureau et j'espère être en bonne voie d'économiser de l'argent à la maison.


                                                               à suivre...............
                                                                               
                                                                                                                  1er septembre 1663

            Levé de f................
     
            
           

dimanche 1 septembre 2019

La Fée Germain Nouveau ( Poème France );

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                                    La Fée

            Il en est encore une au monde,
            Je la rencontre quelquefois,
            Je peux vous dire qu'elle est blonde
            Et qu'elle habite au fond des bois.

            N'était que Vous, Vous êtes brune
            Et que Vous habitez Paris,
            Vous vous ressemblez... sous la lune,
             Et quand le temps est un peu gris.

             Or, dernièrement, sur ma route
             J'ai vu ma fée aux yeux subtils :
             " - Que faites-vous ? " " - Je vous écoute. "
             " - Et les amours, comment vont-ils ? "

             " - Ah ! ne m'en parlez pas, Madame,
             " C'est toujours là que l'on a mal ;
                Si ce n'est au corps... c'est à l'âme.
                L'amour, au diable l'animal. "

             " - Méchant ! voulez-vous bien vous taire,
                  Vous n'iriez pas en Paradis ;
                  Si son nom n'est pas un mystère,
                  Dites-le moi. " " - Je le lui dis. ".
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              " - Que fait-elle ? " " - Elle... attend sa fête. "
              " - C'est dire qu'elle ne fait rien.
                   Comment est-elle ! " " - Elle est parfaite. "
              " - Et vous l'aimez ? " " - Je le crois bien. "


              " - Vous l'adorez ! " " - J'en perds la tête. "
              " - Vous la suivriez n'importe où ;
                   Ah ! mon ami... quel grand poète
                   Vous faites... Oui vous êtes fou.

                    Mais si votre femme est sans tache,
                    Sans le moindre... petit défaut,                                                                wattpad.com.
                    Inutile qu'on vous le cache,
                    Ce n'est pas celle qu'il vous faut.

                     Il faut partir... battre les routes,
                     Et vous verrez à l'horizon
                     Luire enfin la femme entre toutes
                     Que vous destine... la Raison.

                     Voulez-vous que je vous la peigne
                     Comme on se peint dans les miroirs ?
                     Ses cheveux mordus par le peigne
                     Ont des fils blancs dans leurs fils noirs ;

                     Elle n'a... qu'une faim de louve,
                     Et du coeur... si vous en avez ;
                     C'est une femme qui se trouve
                     Un peu comme vous vous trouvez.

                     Elle n'est ni laide ni bête,                                                       ebay.com
Résultat de recherche d'images pour "fairy love"                     Avec... comment dire ?... un travers...
                     Un petit coup... quoi ! sur la tête,
                     Et capable d'aimer les vers ;

                     Ni très mauvaise ni très bonne,
                     Tâchant de vivre...  comme il sied,
                     Et... dans un coin de sa personne
                     Elle a... mettons... un cor au pied ! "

                 " - Ah !... quelle horreur !... jamais, Madame !... "
                 " - Je vous dis, clair comme le jour :
                      Ce qu'il faut avoir dans la femme
                      N'est pas la femme, c'est l'amour.

                       Pour avoir l'amour, imbécile !
                       On ne prend pas trente partis,
                        La chanson le dit, c'est facile :                                                              
                        Il faut des époux assortis.

                        L'amour n'est pas fils de Bohème ;
                        Il a parfaitement sa loi :
                        Si tu n'es pas digne que je t'aime                                                           pinterest.com
Image associée                        Je me fiche pas mal de toi.

                        Bonsoir ! " Ainsi parla ma fée
                        Qui parle... presque avec ta voix :
                         Puis je la vis, d'aube coiffée,
                         Reprendre le chemin des bois.
                                                                                                                           
                          Son conseil est bon ; qu'il se perde,
                          Saint-Antoine, on peut vous prier ;
                           Mais partir!... au loin... et puis, flûte !
                           Je ne veux pas me marier.


                                              Germain Nouveau




                     

mardi 20 août 2019

Lino Ventura Le Gouëfflec Stéphane Oiry ( BD France )

...

                                                   Lino Ventura


            Lino, disent ses fans et Ventura a des idées précises sur les rôles qu'il peut interpréter, sur son métier et sa vie privée. Merlin, jeune journaliste, tente de cerner la personnalité de l'acteur, ses origines. Angiolino Giuseppe Pasquale né à Parme il y a cent ans cette année 2O19. Il a huit ans lorsque sa mère et lui arrivent à Paris. Mais le père absent, le jeune garçon délaisse bientôt l'école et travaille pour aider sa mère. Merlin toujours embarrassé de son dictaphone qu'il finit par abandonner et reprendre crayon et papier, suit l'acteur dans ses déplacements. Les auteurs de l'ouvrage notent la méticulosité de Ventura dans la vie quotidienne. Doté d'une forte musculature, il est boxeur, puis catcheur, champion d'Europe, et manager d'une équipe de catcheurs à la suite d'un accident. Le destin, le hasard, mettent l'entraîneur qu'il est sur le chemin de Jean Becker qui cherche une forte personnalité pour jouer un dur. Étonné par la proposition, Lino Ventura refuse le rôle, le salaire proposé ne lui convient pas, il part, Becker lui demande quelle somme lui conviendrait, il répond un million. De retour chez lui, son épouse, Odette l'interroge, apprenant qu'il a été engagé elle lui dit : " Mais tu lui as fait le co up du million ? " De Gabin avec qui il tourne aux producteurs, le million du contrat étonne. Des rôles aux côtés des stars, puis la rencontre avec José Giovanni qu'il défend et donne ses raisons. Mais ce comédien hors norme, ovni dans le métier disent certains, refusera toujours imprésario et agent. Il règle seul ses contrats, dissèque les scénarios, tout ceci bien rendu dans les petites cases de la BD.
" ..... J'ai compris très tôt ce qui caractérise un grand champion...... Dans le combat j'ai forgé mes principes, on ne doit s'exposer que si on a une chance de gagner..... Tout se joue dès le scénario. Si on doit mordre la poussière et passer pour un con, c'est écrit, il suffit de savoir lire....... Il faut être soi-même, pas de tromperie sur la marchandise, sinon, de quoi on a l'air...... Le vrai combat est avec le public...........
- ...... L'oeuvre qui vous a le mieux correspondu est celle de Giovanni. Tous ces personnages traqués, profondément seuls......... " Ventura choisit les histoires, les personnages qu'il accepte d'incarner :
" ....... Tous les scénaristes racontent la cérémonie de lecture du script... Ils appellent votre bureau
" La Salle des Tortures ". Votre méthode était redoutable.......... " Le regard du père absent 
était-il le moteur qui a poussé Lino Ventura à ce perfectionnement : " ...... Moi je crois qu'on ne peut pas tout raccourcir comme ça....... pas à un seul regard qui lui aurait manqué...... " Charisme et pudeur ont été la marque de l'acteur. Bonne BD, très, très simple, bonne lecture.




                                    

vendredi 16 août 2019

Salinger Valentina Grande Eva Rossetti ( Bande dessinée Italie )


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                                   Salinger
                                            
                                 Avant l'Attrape-coeur

            Allemagne les dernières années de la dernière guerre, un certain Jérôme David Salinger étudiant en médecine, est membre d'une branche des services secrets américains. Il fait la chasse aux nazis, les arrêter avant qu'ils ne réintègrent la société et l'empoisonnent à nouveau. Il rentre de quelques lieux où les corps brûlés, les cadavres décharnés s'entassent. Mais Salinger croise le regard d'une jolie femme, Silvia, allemande. Durant des jours, des mois, des années J.D. Salinger s'interrogera Silvia était-elle nazie ? Il tombe amoureux. La jeune femme, ophtalmologiste, est-elle sincère. Si le passé de Silvia est trouble, qui est ce docteur Heinz qui la contacte, celui de Jérôme est aussi curieux. Il est dépressif, bien qu'en apparence guéri. Les deux héros décident de se marier. La famille de Silvia n'apprécie pas, Silvia est allemande, Jérôme D. est juif, et américain, et les images montrent des villes allemandes totalement détruites par les bombardements alliés. Néanmoins ils s'installent à Munich puis Salinger décide de retourner aux USA, et présenter sa toute jeune femme à ses parents, aussi désagréablement surpris par ce mariage que ceux de Silvia. Celle-ci a-t-elle profité de son mariage avec un américain, avec un passeport pas très net. Rien ne le prouve. Mais les Américains n'ont pas vécu la même guerre. Par ailleurs depuis quelques mois Jérôme D. Salinger assure à Silvia qu'il a le sujet d'un grand roman qui fera sa gloire, les prénoms sont trouvés. Le couple a cependant des difficultés. Chacun son passé, son éducation. Ils se séparent, Silvia retourne en Allemagne, exerce son métier, ophtalmologiste, chacun refonde un foyer. Un jour séjournant pour ses activités, peut-être espionne-t-elle pour le compte de la Russie, à Washington, Silvia ouvre un livre :
" The Catcher in the rye ". Les années ont passé, J.D. Salinger vit éloigné des villes bruyantes, Silvia poursuit ses activités scientifiques. De jolis dessins, changement de couleurs en changeant de continent, un épisode de la vie de Salinger, que l'auteur du texte s'apprêtait à adapter pour une émission radiophonique. Bonne BD.