samedi 25 janvier 2020

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 106 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

Fliegende Fische treffen sich in der Torrid Zone, von Americae Tertia Pars ... von Theodore de Bry
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                                                                                                              1er Décembre 1663

            Lever et réunion toute la matinée à mon bureau. A midi dîner à la maison avec ma pauvre femme. J'ai ces temps-ci grand plaisir à me trouver avec elle et à lui enseigner l'arithmétique.
            A l'Hôtel de Ville pour assister à un procès au Banc du roi en présence du président Hyde. Toutes les preuves y étaient : comment l'argent avait été escroqué aux prêteurs à la grosse aventure et aux assureurs, et le vaisseau abandonné par le capitaine et les marins sur des écueils où il aurait dû périr à marée descendante. Le capitaine s'était vu proposé de l'aide, mais avait donné 20 sols à boire aux pilotes pour les prier de retourner à leurs affaires, disant que les rochers étaient vieux, alors que son vaisseau était neuf. Ce dernier fut réparé pour moins de 6 livres et vient d'être ramené sur la Tamise par un agent des assureurs, avec sa cargaison, des grands pots, non point de beurre, mais de suif couvert d'une couche de beurre, le tout ne valait pas plus de 500 livres, vaisseau et chargement ensemble, alors qu'ils avaient empoché, à ce qu'il paraît, plus de 2 400 livres. Le capitaine avait acheté la complicité de ses hommes et, en dépit de ces preuves accablantes, il fit comparaître plusieurs d'entre eux pour jurer qu'ils avaient été pris dans une tempête et avaient fait tout leur possible pour sauver le vaisseau, et qu'il y avait sept pieds d'eau dans la cale, et qu'il leur avait fallu couper le grand mât de misaine. Que le capitaine avait quitté le vaisseau le dernier et qu'ils avaient été contraints de l'abandonner alors qu'il était sur le point de sombrer et que le gouvernail avait cassé, et qu'on l'avait ramené au port après leur départ, tout rompu, à l'état d'épave et la cargaison perdue..... Les plus grands avocats du royaume étaient là, mais après qu'un ou deux témoins eurent déposé pour le plaignant on s'écria que c'était une escroquerie flagrante, et le jury sans être sorti pour délibérer trancha en faveur du plaignant.
            Mais il était amusant de voir quels témoignages extravagants étaient donnés par les marins, qu'il était impossible d'amener à ordonner leurs propos, et il y avait aussi les termes qu'ils utilisaient et que le juge n'entendait pas....... Et surtout il y avait un Français qui ne savait que le français, qui prêta en anglais un serment qu'il n'entendit point, et fit assermenter un interprète qui pût nous traduire ce qu'il disait, et ce fut le meilleur de tous les témoignages.
            A la maison fort satisfait de mon travail de cet après-midi, et j'ai l'intention de passer un ou deux après-midi ainsi à chaque session. A mon bureau pour souper, arithmétique avec ma femme et, au lit.                                                                                                       
            << J'ai aussi écouté d'autres procès, et j'ai vu en assistant à celui-ci, comment on plaide. J'ai aussi entendu et appris deux choses :
               -   La première est que chacun a le droit d'emprunter n'importe quel grand chemin, mais n'en a pas la propriété.
                -  La deuxième est que le juge n'a pas voulu souffrir que Mr Crowe, qui s'est libéré de ses fonctions d'échevin contre le paiement d'une amende, fût appelé par ce titre, mais seulement par celui de " maître " et s'est irrité huit ou neuf fois à cause de cela, et interrompait toute personne qui l'appelait de cette façon. >>

                                                                                                                  2 décembre

            Ma femme a été tourmentée toute la nuit et ce matin par une rage de dents.
            Me levai et à mon bureau fort occupé. A la maison pour dîner avec ma femme qui souffre maintenant moins de ses dents. L'après-midi visitai Mr Bland comme convenu, et l'accompagnai au Navire, une taverne voisine, où rencontrai son adversaire Mr Custos et son arbitre Mr Clerke, également négociant. Ils commencèrent à disputer du fret d'un vaisseau loué par Mr Bland pour transporter des provisions jusqu'à Tanger et qu'on lui demande maintenant de payer, alors, dit-il, qu'une partie des marchandises est arrivée gâtée, et l'autre n'a pu être livrée. Et pour tout cela il exige 1 300 livres. Ils ont l'esprit si échauffé, leurs exigences sont si éloignées et leurs paroles si souvent hostiles et violentes, que je crains que nous ne parvenions à rien. Cependant je suis content de voir que j'entends si bien cette affaire, et je vais m'efforcer de servir Mr Bland le mieux et le plus justement possible.
            Nous nous trouvions dans une méchante salle et c'est ce qui le fâcha le plus, mais la prochaine fois nous nous retrouverons dans une autre taverne. A midi à la maison et à mon bureau jusqu'à 9 heures puis rentrai auprès de ma femme pour lui tenir compagnie, arithmétique, souper et, au lit, son mal de dents est passé.


                                                                                                                      3 décembre
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            Lever et au bureau toute la matinée, puis, dans le carrosse de Mr Coventry, à la Bourse. Dîner à la maison, fort agréablement avec ma pauvre femme. Quelqu'un de Portsmouth, je ne sais pas qui, m'a envoyé un tonnelet de vin rouge. A mon bureau tout l'après-midi fort occupé jusqu'à une heure avancée. Retour auprès de ma femme, souper et, au lit.
            Aujourd'hui sir George Carteret nous a dit, à la table du Conseil, que la marine, à l'exception de ce qui est dû aux arsenaux pour ce trimestre en cours, et les quelques factures dont il n'a pas eu connaissance, n'a plus du tout de dettes, ce qui est une excellente nouvelle, et extraordinaire. Et à la Bourse, cela fait fort plaisir d'entendre que notre crédit est aussi bon que celui de n'importe quel négociant de la place. Dieu fasse que cela continue ! Je suis sûr que le roi en récoltera le bénéfice, et nous un peu de tranquillité et de crédit.


                                                                                                               4 décembre

            Levé de fort bonne heure, c'est-à-dire vers 7 heures, car maintenant il fait encore noir à ce moment-là. Puis je mis mes vêtements, mes chaussures et mes bas chauds, et me rendis par le fleuve avec Henry Russell, dans le froid, l'humidité et le vent, à Woolwich pour m'occuper d'un vaisseau chargé de chanvre. Je restai un moment à le regarder et donner des instructions pour le faire accoster, et retournai à la maison par un froid glacial. Rendu chez moi sans m'être nulle part arrêté, vers midi, redoutant d'avoir pris froid. Puis dînai à la maison, me changeai et tout l'après-midi à mon bureau jusqu'au soir. Puis à la maison pour tenir compagnie à ma pauvre femme, souper et, au lit.


                                                                                                                    5 décembre

            Lever et au bureau, réunion toute la matinée. Puis le Conseil au complet, sir John Mennes, sir William Batten et moi, accompagnâmes le capitaine Allin chez lui, non loin d'ici dans Market Lane, pour dîner. Le repas fut simple, mais fort bon et l'accueil aimable. C'est une jolie petite maison, mais si enfumée que nous en étions tous incommodés, jusqu'au moment où l'on éteignit ce feu-là pour en faire un de charbon de bois.
            Ce dîner me plut fort à cause des nombreuses et excellentes histoires que conta Mr Coventry, que j'ai notées dans mon recueil d'histoires et ne rapporterai donc pas ici.
            Nous restâmes jusqu'au soir, puis Mr Coventry s'en alla. Je rentrai bientôt à la maison, puis à mon bureau jusqu'à 9 ou 10 heures du soir, puis à la maison pour souper et, au lit, après avoir un peu causé et fait de l'arithmétique avec ma pauvre femme. Ma vie avec elle me donne maintenant de grandes satisfactions, et mon esprit est entièrement délivré de toute jalousie, que Dieu me pardonne !; et rien d'autre ne me trouble que la crainte que j'ai d'avoir encouru le déplaisir de milord.


                                                                                                                6 décembre 1663
                                                                                                        Jour du Seigneur
            Grasse matinée et seul à l'office. C'est ce qui me gêne le plus, n'ayant pas de domestique ni de petit valet pour m'accompagner. A la maison pour dîner. Ma femme, comme il faisait froid et qu'il commençait à neiger ( la première neige cette année ) garda le lit jusque après le dîner. Je restai seul en bas à étudier mes livres d'arithmétique et ma règle à cuber le bois.
            Ma femme se leva peu après et nous passâmes tout l'après-midi à faire de l'arithmétique. Elle sait maintenant très bien faire les additions, les soustractions et les multiplications. J'ai l'intention de ne pas l'importuner pour le moment avec la division, et de commencer maintenant mes leçons sur les globes terrestre et céleste.
            Dans la soirée le capitaine Grove vint s'entretenir avec moi de l'affaire Field et d'autres sujets. Après son départ allai à mon bureau où passai une heure ou deux à lire Rushworth, puis rentrai souper à la maison, prières et, au lit. A cause du froid je recommence à avoir des douleurs. Dieu fasse que cela n'empire pas !


                                                                                                                       7 décembre
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Résultat de recherche d'images pour "mât de misaine"            Levé de bonne heure et, comme il gelait ce matin, allai à pied à Whitehall, mais non sans craindre le retour de mes douleurs. Une fois arrivé j'apprends et je vois que tout Whitehall a été inondé hier soir par la plus grande marée qui se soit jamais produite de mémoire d'homme sur la Tamise. Il n'était bruit que de cela.
            Nous nous retrouvâmes tous bientôt, montâmes avec le Duc et expédiâmes nos affaires. Un peu plus tard, milord Sandwich fit son entrée. Sont-ce mes appréhensions ou non, je ne saurais le dire, mais je ne remarquai point qu'il m'adressât le moindre signe d'amitié ni de respect, ce qui me tourmente plus qu'aucune autre chose au monde. Quand nous eûmes fini, sir William Batte, le capitaine Allen et moi passâmes en voiture dans le quartier du Temple, où je descendis, tandis qu'ils rentraient chez eux, et pour la seule raison que j'étais tourmenté et voulais essayer de voir milord Sandwich pour le mettre à l'épreuve et voir comment il me recevrait, je pris un fiacre et retournai à Whitehall, mais ne pus l'y trouver. Je rencontrai le Dr Clarke et lui contai mes ennuis de santé, lui dis que mes douleurs revenaient en ce moment. Il m'écrivit une ordonnance que je prendrai si besoin est. Puis j'abordai le sujet du Dr Knapp, qu'il me dit être le médecin du roi, et devenu un grand solliciteur de places pour les gens, et m'importune fort. Clarke me dit que c'est l'homme le plus impudent du monde, qui se présente comme un médecin du roi, alors qu'il ne l'est pas. Il a été chassé de la Cour. Ce qui m'apprend quel degré d'impudence il y a dans le monde, et comment on peut se tromper sur les gens.
            Un peu plus tard, le roi, le Duc et la Duchesse vinrent dîner dans la salle de la girouette où je ne les avais encore jamais vus. Mais il paraît que depuis que les tables ont été démontées, c'est maintenant toujours là qu'il dîne.
            La reine se porte assez bien et peut sortir de sa chambre pour se rendre à la petite chapelle dans le palais. Le roi de France, à ce que l'on dit, va louer 60 vaisseaux aux Hollandais, mais on ne sait dans quel dessein.
            Bientôt, désespérant de voir milord, je me rendis à la table d'hôte de la Tête du Roi où fis un bon dîner, mais presque sans parler à personne. Après dîner rentrai en fiacre à la maison où trouvai ma femme sortant à peine du lit, car la journée est très froide, et, après une agréable petite conversation avec elle, à mon bureau où restai tard.
            Passai deux ou trois heures avec sir William Warren, à causer de commerce et d'autres sujets de manière fort intéressante, ce qui me fit un grand plaisir, puis, après avoir un peu lu Rushworth, à la maison, souper et, au lit.


                                                                                                                  8 décembre

            Grasse matinée, puis lever et au bureau toute la matinée. Entre autres, Mr Berkeley blâma son commis, Mr Davis pour quelque chose que sir William Batten et moi lui avions dite hier, mais je fis mon possible pour réduire l'importance de l'incident, et tout s'arrangea.
            A midi à la Bourse. Entre autres affaires je parlai au capitaine Taylor, et je pense que le fret de ses vaisseaux va presque certainement me rapporter 20 livres dans l'immédiat, sans compter de possibles gains à l'avenir.
            A la maison pour dîner et à Whitehall en fiacre où me promenai longuement avec Mr Treviot. Il m'apparaît comme un homme extrêmement prudent, réfléchi et habile, ce que j'ai toujours pensé de lui. Il nous présente aujourd'hui les comptes d'après lesquels le roi lui doit déjà 10 000 livres au titre de l'entretien de la garnison de Tanger. Il ne demande pourtant pas à être payé en espèces, mais propose d'autres façons de régler la somme par la vente de vieilles provisions gâtées, de quoi l'enrichir de belle façon. Cependant, je vais faire en sorte de savoir s'il l'est ou non.
            La réunion terminée, je pris un fiacre et rentrai à mon bureau où restai tard, puis souper à la maison et, au lit, craignant le retour de mes douleurs à cause du temps très froid, mais je vais prendre toutes les précautions possibles pour l'éviter.
 

                                                                                                                     9 décembre
                                                                                                       eyeofthewind.net
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            Aujourd'hui restai très longtemps au lit, de crainte de me rendre malade. Puis me levai et allai très bien à la selle, de la manière recommandée par ma femme qui veut absolument que je reste assis bien droit et longtemps. Après m'être habillé, au bureau où ma femme m'envoya bientôt chercher car elle était souffrante. Je me rendis auprès d'elle et la trouvai fort malade de ses affaires. Retournai à mon bureau et ressortis à la recherche d'un brasero où brûler du charbon de bois dans mon bureau, et en trouvai un à ma convenance au marché de Newgate. Comme je rencontrai le domestique de Foley dans la rue, je lui donnai comme instruction de le livrer demain au bureau pour le compte du roi. A la maison pour dîner et, après avoir causé avec ma femme, qui a passé toute la journée souffrante au lit, retournai à mon bureau la plus grande partie de la soirée, puis rentrai auprès de ma femme. < Aujourd'hui Mrs Russell a donné à ma femme  un très beau saint George d'albâtre qui décorera fort bien son petit salon. >
            Ce soir au bureau, après avoir noté les événements de la journée, j'ai reçu la visite de mon cousin Angier de Cambridge, le pauvre homme, et entendu ses lamentations. Il a obtenu de moi que je ferai embarquer son fils sans brevet, et je vais m'appliquer à tenir ma promesse. Mais comme on oublie facilement l'amitié dans les heures d'adversité ! Comme je fus soulagé quand il s'en fut allé, car j'avais peur qu'il ne me demande de me porter caution pour lui ou de lui prêter de l'argent.


                                                                                                                       10 décembre

            Me levai fort dispos car le temps s'est beaucoup radouci. Réunion au bureau toute la matinée. J'avoue qu'ayant reçu un cadeau de Mrs Russel, il y a quelque temps, je me suis senti gêné du fait que nous ne lui achetons pas de suif ( elle l'a acheté hier à dessein, mais fort malencontreusement, et c'est une grosse perte pour elle, car elle était sûre de nous en vendre ), tant il est difficile de celui qui reçoit un pot de vin de ne pas se laisser détourner de son devoir et de l'intérêt de son maître. Mais il faudra bien qu'elle fasse contre mauvaise fortune bon coeur, je lui rendrai service quand je pourrai sans léser le roi.
            A la maison pour dîner. J'ai bu un verre de vin et de bière avec d'autant plus de joie que c'est aujourd'hui le jour le plus court de l'année, ce qui est une plaisante considération. avec ma femme. Elle est alitée mais se sent assez bien. Ayant reçu de mon frère le message qu'il est souffrant et ne sort pas de chez lui, j'allai le voir et le trouvai en bas. Il ne se sent pas bien mais n'est pas malade. Je le trouvai réglant la distribution du charbon de Mrs Ramsey, chose dont mon père s'est chargé de nombreuses années, et il a pris sa succession. Ceci m'a fait plaisir, et aussi que Mr Wheatley recommence à chercher à le voir, j'espère que c'est au sujet de sa fille.
            Puis à l'enclos de Saint-Paul chez mes libraires, et comme, aujourd'hui, j'ai gagné 2 ou 3 livres en faisant payer par le roi ma fourniture de bureau, je passai là deux ou trois heures, me faisant apporter une vingtaine d'ouvrages dans le dessein de dépenser cet argent. Je me trouvai fort embarrassé pour faire mon choix, et je vois bien que mon inclination naturelle m'entraîne bien volontiers de nouveau à dépenser de l'argent pour ce genre d'articles. Je me demandai si je n'allais pas acheter des livres divertissants, tels que des pièces, vers quoi mes goûts me portaient le plus, mais finalement, après avoir feuilleter Chaucer, l'Histoire de Saint-Paul  de Dugdale, le Londres de Stow, l'Histoire de Trente de Gesner, en plus des pièces de Shakespeare du Dr Fuller, La Cabale ou Recueil de lettres d'Etat, et un petit livre, Délices de Hollande, ainsi qu'un ou deux autres petits ouvrages, tous fort utiles ou mêlant le sérieux et l'agréable, et aussi Hudibras, les deux parties, le livre qui est en ce moment le plus à la mode pour sa drôlerie, quoique je ne parvienne pas, je l'avoue, à bien voir où réside l'esprit que l'on y trouve. Une fois mon choix ainsi arrêté je rentrai à la maison accompagné par un porteur de torches. Puis à mon bureau où lus Rushworth, puis à la maison, souper et, au lit.
            Je suis allé aujourd'hui chez Wotton, mon bottier qui me dit que sir Henry Wright est mourant, et que Harris est revenu au Théâtre du Duc, et il me parle d'une excellente pièce de sir William Davenant qui doit être jouée cette semaine, l'Histoire d'Henri VIII et de toutes ses femmes.


                                                                                                                       11 décembre 1663
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Résultat de recherche d'images pour "mât de misaine"            Lever et partis en direction de la Garde-Robe. Comme je sortais Mr Clerke m'annonça que Field avait obtenu un commandement contre moi au sujet de cette dernière affaire, pour la somme de 30 livres 10 shillings, et qu'il croit qu'il va me faire porter un exploit ce matin. Et quoiqu'il m'eût dit que cela ne pourrait se faire de bonne heure et qu'il allait arrêter l'affaire chez le shérif, Tom aurait peine à imaginer la peur dans laquelle j'étais en marchant dans les rues, et comme je soupçonnais chaque homme que je voyais et sursautai entendant quelqu'un tousser derrière moi.
            Arrivé à la Garde-Robe ne trouvai point Mr Moore, puis chez Mr Holden à qui je réglai tout ce que je devais pour des chapeaux. Allai ensuite à l'enclos de Saint-Paul, et après avoir passé un petit moment chez mes libraires et acheté dans une boutique le testament du cardinal de Mazarin en français, j'allai au café où j'eus, entre autres, une intéressante conversation avec un négociant en fer qui me dit que c'était un grand mal de décourager la production nationale de cette marchandise en Angleterre, en souffrant que les Suédois exportent chez nous trois fois plus qu'ils ne l'ont jamais fait et en laissant nos forges faire faillite, ce qui est déjà arrivé, dit-il, à presque la moitié d'entre elles. Puis j'allai m'asseoir à côté de Mr Harrington et d'autres.
            < Histoires des contrées de l'est > Négociants qui traitent avec les contrées de l'Est, à propos de la région de Königsberg et de ses environs, il nous dit lui-même que personne là-bas, même les plus pauvres d'entre les pauvres, ne daignerait acheter un poisson mort, il faut qu'il soit vivant, à moins que ce soit l'hiver. Puis on nous conta comment ils jetaient leurs filets dans l'eau par des trous creusés dans la glace épaisse. Ils tendent un filet d'un quart de lieue, et il a vu prendre 130 ou 170 barils de poisson d'un seul coup. Ensuite les gens arrivent sur la glace avec des traîneaux dont le fond est garni de neige, et les emportent ainsi jusqu'au marché. Et il a vu les poissons gelés dans le traîneau, si durs qu'il en a pris un et l'a cassé en morceaux. Et pourtant ces mêmes poissons sortis de la neige et apportés dans une pièce chaude, sont vivants et sautent en l'air. Ils retirent souvent dans leurs filets des hirondelles prises dans la boue des rivières, suspendues ensemble à quelque branche, cadavres en chapelets. Si on les approche d'un feu elles revivent. Des volailles tuées en décembre, l'échevin Barker nous dit qu'il en avait achetées. Les ayant placées dans le coffre sous son traîneau, il oublia de les en retirer pour les manger jusqu'au mois d'avril suivant. Il les retrouva grâce au gel, nullement gâtées, mais aussi bonnes et fraîches à manger que si elles venaient d'être tuées. Il y a là-bas de jeunes ours dont on vend la chair sur les marchés aussi communément que le boeuf chez nous, et c'est une viande excellente et savoureuse. On nous dit que les ours ne font jamais de mal à personne, mais fuient les hommes, sauf si on les poursuit ou on les attaque, mais les loups causent de grands dommages. Mr Harrington nous conta comment ils récoltent tout ce miel qu'ils envoient à l'étranger. Ils évident un grand sapin, ne faisant qu'une petite entaille verticale à un endroit, ils la rebouchent ne laissant qu'un petit trou par lequel les abeilles entrent dans l'arbre et le remplissent d'autant de cire et de miel qu'il peut en contenir. Et les habitants, au moment voulu, retournent ouvrir l'entaille et prennent ce qu'ils veulent, sans tuer les abeilles qu'ils laissent vivre pour qu'elles continuent à produire toujours plus de cire et de miel. Les sapins sont toujours plantés serrés, car ils se garantissent ainsi mutuellement de la violence des vents et, quand on fait une coupe on laisse ici et là, un arbre adulte pour qu'il protège la croissance des arbrisseaux.
            Le plus grand divertissement et amusement du duc de Courlande et des princes de là-bas est la chasse, qui ne se fait pas avec des chiens, comme chez nous, il désigne certain jour et convoque tous les paysans comme pour une campagne militaire. Il les répartit en plusieurs compagnies et assigne à chacun son circuit, et ils se mettent d'accord sur l'endroit où doivent être tendus les rets. Et ainsi, les compagnies en allumant des feux au fur et à mesure de leur avancée, rabattent toutes les bêtes sauvages, ours, loups, renards, sangliers, cerfs et chevreuils vers les rets. Et les grands seigneurs ont pris position à tel ou tel endroit et tirent ce qui leur fait envie, et c'est comme cela qu'ils chassent.
            Là-bas, la population n'est pas très nombreuse, car les hommes, ils ont en général entre 30 et 40 ans, épousent en général des femmes qui approchent ou dépassent la trentaine.
            En prévision d'une chasse publique le Duc mande qu'aucun loup ne soit tué par les paysans et, quels que soient les dégâts que causent ces animaux, le Duc dédommage celui qui a subi le préjudice. Mr Harrington nous donna l'exemple d'une maison où il logeait, où un loup pénétra dans une porcherie et arracha trois ou quatre morceaux de chair sur l'échine du porc, avant que la maisonnée ne lui porte secours, ses cris avaient donné l'alerte, et le fermier lui dit qu'il y avait trois ou quatre loups dans les environs qui leur causaient de grands dégâts...........
            Ensuite à la maison et montai à l'étage car ma femme gardait le lit, et je fis un fort bon dîner, puis à mon bureau où restai tard à travailler. Entre autres, le capitaine Taylor vint me voir au sujet de sa facture pour le fret, et outre qu'il est d'accord pour que je touche les 30 livres que j'ai obtenues, il me propose 6 livres si je me charge de lui faire payer sa facture, ce que je suis prêt à faire, mais je répugnerais à ce que cela se sût jamais. Je vais cependant lui rendre ce service, et je m'en remets à sa bonne volonté quant à ce qu'il voudra bien me donner.
            Rentrai tard souper à la maison. A ma grande joie, je suis presque parvenu, grâce aux bons conseils de ma femme, en allant souvent à la selle et en prenant mon temps, à évacuer mes selles naturellement, comme auparavant, et je prie le Seigneur que cela continue.


                                                                                                                 12 décembre
                                                                                                 zvab.com
Résultat de recherche d'images pour "mât de misaine"            Lever et toute la matinée au bureau. Obtins, entre autres, de sir George Carteret qu'il apposât sa signature sur la facture du capitaine Taylor. J'ai ainsi l'espérance de gagner 6 livres, ce qui me réjouit le coeur.
            Nous avons assisté ce matin à une grande querelle entre Mr Gauden, entrepreneur des substances de la marine et sir John Lawson ainsi que les autres capitaines qui vont partir attaquer Alger, au sujet de leur poisson et de l'observance du carême. Sur quoi Mr Gauden insiste fortement car c'est la seule chose qui compense les pertes de son onéreux contrat tout le reste de l'année.
            Rentrai à midi à la maison, et j'apprenais qu'un certain Abraham, qui souhaitait devenir fournisseur de la Marine royale, a envoyé à ma femme une robe japonaise. Elle lui plaît beaucoup et à moi aussi, et elle vient fort à propos, mais je ne sais comment me conduire, car je suis déjà tellement l'obligé de Mrs Russell ! De sorte que maintenant je leur suis redevable à tous les deux.
            A la Bourse où j'avais fait aviser Llewellyn que je viendrais le retrouver. Je le ramenai à la maison pour dîner. Il me dit que la femme de Will Symons est morte, ce dont je suis bien marri, car c'était une femme de bien. Et il me conte l'étrange histoire qu'elle aurait contée avant de mourir, alors qu'elle avait tous ses esprits : qu'elle voyait debout devant elle son oncle Scobell.
            Puis il entreprit de me dire que Mr Dering avait eu un entretien avec lui, et l'avait prié de me parler : si j'acceptais de le débarrasser des marchandises qu'il avait sur les bras, il me donnerait 50 pièces d'or. Et de plus, si je voulais être son ami et l'aider à faire fructifier sa patente de marchand du roi, il pourrait me céder 200 livres par an sur ses bénéfices. Je fus heureux d'entendre ces deux propositions, mais je répondis sans m'engager, disant que s'il était vrai que je ne me laisserais jamais acheter pour agir injustement, je ne poussais pas le scrupule au point de refuser les témoignages de reconnaissance des gens quand j'avais eu la bonne fortune de leur rendre, grâce à mes soins, de bons et justes services. Et donc je ne conclurais pas d'accord avec lui, mais m'efforcerais de lui rendre ce service, comptant qu'il m'en remercierait plus tard, de la façon qu'il jugerait bonne. Je m'attends donc à ce que l'affaire n'en reste pas là.
            Je fis force compliments à Llewellyn car j'ai l'espoir de gagner quelque chose dans cette affaire, et après son départ allai à mon bureau travailler. Dans la soirée reçus de l'argent de la part de Mr Moore et allai donc mettre notre compte à jour dans mes livres. J'espère découvrir à Noël non seulement que je suis aussi riche, ou plus riche que je ne l'ai jamais été, mais aussi que mes comptes sont moins complexes et comportent moins de dettes et de créances qu'ils n'en ont jamais comporté depuis plusieurs années. Et c'est en effet le cas. Dieu dans sa bonté augmente mes espérances et mes perspectives de prospérité. Aujourd'hui j'ai entendu milord Berkeley dire à sir George Carteret qu'il avait appris par des lettres de France que le roi a privé douze ducs de leurs titres de noblesse, dans le seul dessein de montrer son pouvoir et d'écraser sa noblesse dont il voyait bien, disait-il, qu'elle s'était, jusque-là, employée à le contrecarrer. Et cela, milord Berkeley le loua fort, car c'était pour lui le signe d'un esprit brave et vigoureux qui osait appliquer ce qu'il jugeait bon de faire.
            Le soir, après avoir terminé mon travail au bureau, à la maison, souper et, au lit.
            J'ai oublié de noter un incident très remarquable. Après le départ de Llewellyn j'allai au bureau. Il commençait à faire sombre et je trouvai l'endroit désert, car mes commis étaient à l'enterrement d'un des enfants de Mr Griffith. J'allai donc faire un petit tour dans le jardin en attendant leur retour, et tandis que je me promenais, la jolie servante de Mrs Penn passa près de moi et entra dans le bureau et, comme il n'y avait personne, je l'y suivis, ravi de l'occasion. Elle me dit, alors qu'elle s'apprêtait à ressortir, qu'il n'y avait personne et qu'elle était venue chercher une feuille de papier. Je lui dis alors que j'allais la lui donner, la laissai dans le bureau, entrai dans le mien et ouvris ma porte qui donne sur le jardin, pensant la faire entrer et la caresser. Tout en faisant mine de chercher du papier, je lui dis qu'elle aurait aussi vite fait de passer par ici, mais elle me dit qu'elle avait laissé la porte ouverte et n'entra pas. Je lui apportai donc du papier et lui donnai un baiser, la pris par la main pour la reconduire à la porte du jardin et la laissai partir. Mais, Seigneur, comme cette surprise me bouleversa, et comme mon envie de patiner cette fille et me montrer tendre avec elle aurait pu facilement subjuguer ma raison ! Et comme par la suite je m'inquiétai en pensant à ce qui se passerait si elle venait à en parler ! Je me demandai si j'avais fait ou dit quoi que ce fût qui pourrait me faire du tort si elle le répétait. Mais je pense qu'il ne s'est rien passé de plus que ce que j'ai écrit plus haut.


                                                                                                   13 décembre 1663
                                                                                          Jour du Seigneur
            Lever et me préparai pour l'office. Mais ma femme et moi nous querellâmes au sujet de sa vieille manie d'accuser ses servantes de mensonge, et c'est maintenant le tour de Jane. Ce que j'ai vu ne suffit pas à me convaincre qu'elle ait menti, et je n'ai donc pas à me ranger à l'avis de ma femme.
            A l'office et, après le sermon, à la maison et à mon bureau avant de dîner pour relire mes résolutions. Tom me rejoignit et nous mangeâmes tous les deux, ma femme ne s'étant pas levée. Après le repas je lui réglai son dû, et passai tout l'après-midi dans mon cabinet à parler de maintes choses avec lui : de la possibilité qu'il épouse la fille de Wheatley et puis de Joyce et de leur père, Fenner, qui sont parfois tout miel les uns envers les autres, et parfois tout fiel, et qui mènent une vie bien étrange et fruste.
            Le soir, après son départ, allai à mon bureau pour lire dans Rushworth les chefs d'accusation contre le duc de Buckingham et sa réponse, ce qui est fort intéressant. Puis m'occupai un peu de préparer certaines choses pour demain. Ensuite retour auprès de ma femme pour souper puis, au lit.


                                                                                                              14 décembre
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Image associée            Me levai à la chandelle, ce qui n'est pas mon habitude, quoi qu'il fût fort tard, c'est-à-dire presque 8 heures. Partis en fiacre pour Whitehall où nous nous retrouvâmes tous, et chez le Duc. Entendis un long discours que nous fit un homme qui doit partir pour Livourne et dans les environs pour faire cesser les désagréments dont sont victimes ses vaisseaux à qui l'on refuse la libre pratique, ce qui ne s'emploie plus aujourd'hui que comme un subterfuge, car on peut acheter un certificat de santé pour une pièce de huit et mon ennemi peut s'entendre avec l'intendant de la santé contre environ dix pièces de huit pour que celui-ci ne me le donne pas et ainsi contrecarrer mes projets, quels qu'ils soient. Cela le roi ne le tolérera pas et a résolu soit de faire mettre un terme à ces agissements soit d'empêcher tout vaisseau d'entrer ou de sortir de ce port, tant que l'on immobilisera ses propres navires en leur refusant la libre pratique.
            Puis milord Sandwich étant arrivé nous entrâmes tous dans le cabinet de travail du Duc et nous mîmes à nos affaires. Mais, entre autres, Seigneur ! quel récit nous firent sir John Mennes et sir William Batten sur la manière dont a été démontée et brûlée la figure de proue du " Charles " qui représente Cromwell écrasant des gens sous les sabots de son cheval, et Peter, comme l'appelait le Duc, qui lui adressait une prière. Et sir John Mennes voulait absolument tirer une conclusion sur l'état d'esprit des gens du fait qu'ils se réjouissaient de voir faire cela, et du fait qu'ils avaient construit un gibet pour y pendre la tête de Cromwell alors que, Dieu le sait bien, cette affaire signifie à coup sûr le gaspillage de 100 livres prises dans les coffres du roi pour en sculpter une autre. Apparemment ce sera un Neptune.
            Puis je parcourus Whitehall, juste pour voir ce qui se passait, mais ne rencontrant personne de ma connaissance, je traversai le jardin et me rendis dans les appartements de milord Sandwich. J'appris que milord était arrivé avant moi, ce qui n'entrait pas dans mes plans et à quoi je ne m'attendais pas. Il travaillait à une composition musicale dont il veut faire une anthem à trois parties. Je ne sais si c'est pour la Chapelle royale ou non, mais il semble s'y consacrer avec passion. Mais je fus fâché de l'entendre proférer des " Tudieu ! " et autres jurons, comme il le faisait de temps à autre sans raison ce qui, à mon avis, lui sied fort mal, et j'espère que cela me servira d'avertissement , tant c'est chez lui chose laide.
            Quand il en eut fini avec sa musique, sans me faire ni bon ni mauvais visage, il me salua et adieu, puis descendit pour partir en carrosse, sans me dire un mot. Après son départ je parlai un bon moment avec William Howe. Il me dit que milord, en effet, a été mécontent après avoir reçu ma lettre et, à maintes reprises, a montré pour moi du dédain, mais que maintenant milord est de bonne humeur, et il pense que désormais il va me témoigner autant de respect que jamais, et il me prie de ne pas éviter de venir le voir.
            Cette nouvelle, je l'avoue, m'inquiéta fort, mais quand j'entendis qu'il est maintenant revenu à la raison et a complètement abandonné Chelsea et cette catin, et quand je le vois prendre de nouveau soin de ses affaires et gagner en réputation, je me réjouis, quoique cela me coûte d'être en disgrâce quelque temps. Car, si d'aventure son bon naturel et son intelligence n'y suffisaient pas, je crois que sa mémoire ne conserverait pas éternellement le souvenir de cette affaire. Mais c'est mon réconfort de penser que c'est cette chose-là, après tant d'années de bons et loyaux services, qui a fait de lui mon ennemi.
             Puis à la table d'hôte de la Tête du Roi où dînai en compagnie d'élégants gentilshommes. Certains d'entre eux parlaient de la grandeur du roi de France et de la façon dont il en est venu à donner aux princes du sang la préséance sur tous les ambassadeurs étrangers. Il semble que cela soit accepté par Venise et d'autres États et que l'on attende autant de milord Holles, l'ambassadeur de notre roi là-bas et que, à cause de cela ou d'autre chose, il n'a pas encore fait son entrée à Paris, mais a reçu plusieurs affronts, notamment, le harnais de sa monture a été coupée et les gentilshommes de sa garde à cheval tués, ce qui sera cause de rancoeurs, si c'est vrai. ( nte de l'éd. Information fausse ). Ils disent aussi que le roi de France a loué soixante vaisseaux à la Hollande, et 40 aux Suédois, mais personne ne sait pour quoi faire. Mais il a certains grands desseins pour l'année prochaine.
            Rentrai en fiacre à la maison et à mon bureau, où je passai toute la soirée jusqu'à la nuit avec le capitaine Taylor, à causer de la conservation des mâts, et après son départ, avec sir William Warren qui me fit aussi un excellent exposé sur la même question, que j'ai couché par écrit. Puis nous en vînmes à sa récente visite à Chatham et là, le commissaire Pett parlant de ses mâts laissa tomber plusieurs viles remarques au sujet de ma prétention d'en savoir autant sur les mâts que quiconque. Je sais que cela remonte au jour où je lui ai dit que je savais cuber un madrier aussi bien que n'importe quel ouvrier du roi. Quoiqu'il en soit je me souviendrai de lui comme d'une brebis galeuse pour longtemps, avec toutes les belles paroles qu'il me dit par-devant, et peut-être lui ferai-je savoir que mon ignorance bénéficie autant au roi que toutes ses connaissances, qui accompliraient davantage, il est vrai, si elles étaient utilisées à bon escient.
            Puis nous en vînmes à parler de sir John Mennes et sir William Batten qui ont fait brûler la tête d'Olivier alors que Pett se trouvait là. Alors s'est déroulé avec une abondance d'insultes et un ridicule inouïs, et ils ont fait venir la milice de Rochester pour la cérémonie, alors qu'en fin de compte, dit le commissaire Pett, on a pas du tout fait cela à cause de Cromwell........
            Après son départ, fort content de sa conversation ( il m'apprend toujours quelque chose ), j'allai lire un peu de Rushworth, puis retour auprès de ma femme pour souper. Aujourd'hui était jour de lessive. Puis au lit, l'esprit un peu tourmenté, je l'avoue, par le déplaisir de milord Sandwich. Mais Dieu me donnera la patience de supporter son mécontentement, puisqu'il a pour origine une si bonne cause.


                                                                                                                         15 décembre 1663
                                                                                                                       vrin.fr
Image associée            Avant mon lever le domestique de mon frère vint m'annoncer la mort de mon cousin Edward Pepys, il est mort chez Mrs Turner, ce qui nous attriste beaucoup ma femme et moi, d'autant plus que son épouse était de toutes les femmes qui portent notre nom la seule à être belle.
            Puis lever et au bureau où l'affaire la plus importante fut l'attaque que lancèrent contre moi sir John Mennes et sir William Batten au sujet du contrat de sir William Warren pour l'achat de mâts. Je peux en référer à mes tablettes pour en lire les détails. Mais j'en sortis victorieux, et Mr Berkeley et Mr Coventry sont parfaitement convaincus que nous n'y perdrons pas.
            A la maison pour dîner. Je reçus la visite de Mr Mount et Llewellyn, à moitié ivres je crois. Ils dînèrent avec moi. Je fus aussi gai que possible, fâché que cela se passe ainsi au Conseil, quoiqu'il n'en résulte pour moi rien de désobligeant.
            Pendant le dîner arrive un messager du Comptoir, porteur d'un exécutoire par lequel je suis enjoint de payer les 30 livres x shillings accordés à Field lors du dernier jugement. L'homme s'appelle Thomas, du Comptoir de Poultry, J'envoyai Griffith avec lui au Dauphin où dînait sir William Batten et comme il était d'accord pour que je lui paye cette somme, je fis en sorte que l'argent lui fut versé et demandai à Griffith de le compter et de le lui donner au bureau. Il me proposa d'aller avec moi chez sir Richard Ford, mais je ne jugeai pas cela nécessaire et le laissai partir avec l'argent. Il me dit qu'il n'avait pas été délivré de reçu, mais j'ai de bonnes preuves que la somme a été payée.
            Avant de partir Llewellyn me dit à nouveau que Dering serait heureux de me donner 50 livres si je veux vendre pour lui ses planches au roi. Non point que j'aie jamais proposé de prendre cet argent ni demander à Llewellyn de marchander pour moi avec Dering, mais j'ai tacitement paru disposé à lui rendre ce service, si je le pouvais, en attendant de lui les remerciements qu'il jugerait bon de me donner.
            Ensuite à Whitehall en fiacre. En chemin je rattrapai Mr Moore que je fis monter dans ma voiture. Il ne put rien me dire de ce que milord pense de moi, ni de la place que j'occupe dans son estime. Mais sa conclusion est que s'il est peut-être en colère en ce moment, il ne fait aucun doute qu'il en viendra à être de nouveau content de moi, et il dit qu'il s'occupe bien de ses affaires et fréquente la Cour.
            A Whitehall je vois que certains membres de la commission de Tanger sont en réunion, comme ils en ont reçu l'ordre, milord Sandwich était du nombre. Je m'inclinai mais c'est à peine s'il parut me voir, et cela m'inquiète fort.
            J'eus bientôt fini et ramenai Mr Moore à Saint-Paul. En chemin il me proposa une possibilité de gagner rapidement de l'argent avec des fonds provenant de baux concernant des locaux de la Garde-Robe. Mais de quelle façon je ne l'entends point, et laissai cela pour une conversation ultérieure.
            Puis repris le chemin de la maison. J'allai voir Mr Fenn, comme me l'avait commandé sir George Carteret, et lui montrai la facture du capitaine Taylor sur laquelle j'espère, à juste titre, obtenir quelque chose.
            A la maison et à mon bureau où restai fort tard avec sir William Warren à parler fort sérieusement de la façon dont les choses se sont passées aujourd'hui. Et vers la fin nous parlâmes à coeur ouvert des affaires de ce bureau et ( peut-être me montrai-je un peu trop libre en lui disant où se trouvait mon intérêt, ce qui est ma faute ) il me donna des conseils tout à fait admirables, qui dénotent un homme extrêmement compétent et estimable, et dix fois plus intelligent que je ne l'aurais jamais cru. Il passa en revue chaque officier et capitaine, et me montra les raisons de me défier de chacun d'eux, soit à cause de leur malhonnêteté, soit à cause de leur pouvoir excessif, quand ils sont trop haut placés pour pouvoir sceller une amitié véritable. Et il me cita un dicton bien connu mais tout à fait excellent dont je devrais me souvenir dans toutes les circonstances de ma vie. Il me le donna en vers, mais le sens était le suivant : que l'on devrait parler et s'ouvrir à chaque ami en pensant qu'il pourrait plus tard devenir son ennemi. Il me conseilla aussi de saisir toutes les occasions de faire savoir au monde le soin et les efforts que j'apporte à mon travail et, par-dessus tout, d'acquérir une connaissance approfondie de ce qui a trait à ma charge et d'ajouter à cela tous les appuis que je peux obtenir à la Cour. Ce à quoi j'espère parvenir.
            Il demeura à parler avec moi presque jusqu'à minuit, puis je lui souhaitai une bonne nuit, bien marri de me séparer de lui, et plus encore qu'il allait devoir marcher jusqu'à Wapping cette nuit. Ensuite à la maison, souper et, au lit.


                                                                         à suivre...........

                                                                                                     16 décembre 1663

            Lever et l'esprit..................


mardi 21 janvier 2020

Ne t'enfuis plus Harlan Corben ( Policier EtatsUnis )

Ne t'enfuis plus
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                                                 Ne t'enfuis plus

            Famille newyorkaise, aisée. Le père Simon, véritable héros du livre, léger, simple, conseiller financier, époux d'Ingrid, pédiatre, suédoise, fut, paraît-il, mannequin, et trois enfants deux filles et un garçon. Autour d'eux vont se réunir Georges, ami et beau-frère, et Yvonne, soeur d'Ingrid. Elles se ressemblent peu, de plus Yvonne est l'associée de Simon dans le cabinet de gestion financière qu'ils possèdent. Tous sont sous le choc de la disparition de Paige, étudiante à l'université de Columbia. Simon ne veut pas abandonner les recherches, alors que la mère, Ingrid refuse. " C'est son choix, elle a choisi de disparaître ", insiste la pédiatre. Mais Simon, en secret, poursuit sa quête de renseignements. Apprenant qu'elle chante à une heure précise à un certain angle de Central Park, il parcourt l'allée et dans un premier temps ne reconnaît pas sa fille qui massacre une chanson des Beattles, amaigrie, osseuse. L'intervention, la surprise de Paige, amènent un homme Aaron, que Simon reconnaît comme le mauvais génie qui a détruit sa fille. Paige fuit, Simon tente de la rattraper mais Aaron s'est interposé, Simon donne un coup de poing à l'homme au jean déchiré, visiblement sans le sou. Les promeneurs jusque-là passifs s'avancent, filment la scène, virale sur les réseaux sociaux. " On ne boxe pas, pas de coups à un SDF ". Hué, honni par les tweeters et autres réseaux, il est accusé de coups et blessures par Aaron. Et Paige a disparu. Alors Simon accusé de mauvais traitements sur personne sans défense, décide de poursuivre, de retrouver sa fille et de se défendre de ses accusation et des soupçons de la police. Par ailleurs, une enquêtrice, ex-FBI, Elena Ramirez, est engagée pour retrouver Henry Thorpe, fils adoptif d'un homme d'affaires de Chicago, lui aussi disparu. Un autre assassinat, sans lien apparent, puis un Centre " Le Havre de Paix " dirigé par un homme surnommé La Vérité père de deux fils demeurés sur place et sans doute de beaucoup d'autres. L'enquête se poursuit dans le calme, sans agitation excessive, Simon se déplace en métro, devenu à la mode ( ? ), elle le conduit dans le Bronx. La drogue bien sûr fait des ravages. Mais surtout Simon très actif dans sa recherche de sa fille disparue s'aperçoit que des secrets bien cachés apparaissent. Que sa fille suivait des cours de génétique, entre autres, que sa femme avait un passé, que connait Yvonne. De la génétique et un monde caché de bébés poussés à l'abandon et vendus chers, si ce sont des garçons. Si les meurtres sont ce qu'ils sont, l'écriture surprend, comme Simon et le dénouement.

lundi 13 janvier 2020

White Bret Easton Ellis ( Document EtatsUnis )


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                                                            White

            D'un boomer à un - une - génération X, qui comprend le mieux les EtatsUnis, peut-être les millenials. Bret Easton Ellis auteur du dérangeant American Psycho a ici abandonné la fiction et dresse un état des lieux de cette société américaine qu'il scrute comme un chirurgien sans atteindre l'os malade. Son premier roman accepté, édité, alors qu'il n'a que 20 ans, Easton Ellis poursuit des études dans une université près de NewYork. Il entre rapidement dans le monde du cinéma et de la littérature. Il restera éloigné quelques années de sa ville natale, Los Angeles. Ses parents ont leur préoccupations, le jeune garçon mène une enfance entre études et découverte de son corps et de ses goûts. Ce sont les années soixante-dix quatre-vingts et, pour résumer le premier chapitre l'auteur inscrit une courte pensée de Janet Malcolm " ...... la société..... entre une moralité intolérablement stricte et d'autre part une permissivité dangereusement anarchique....... " Bret E Ellis lit beaucoup et après sa lecture de King " Carrie, Salem et Shining il me restait peu d'illusions sur l'innocence de neutre de mon enfance ou sur celle de qui que ce soit........" A Los Angeles Bret E. Ellis travaille pour le cinéma, écrit des scénarios au destin incertain ou nul. Il enregistre des podcasts avec des comédiens, auteurs, réalisateurs et trace leurs portraits. Celui de Tom Cruise, génération Boomer, éclaire nos esprits embrumés par la notoriété de l'acteur, uniquement par ces propos qui décrivent un personnage, souriant "..... Cruise n'a jamais vraiment effacé la persona du boy-toy sexy un peu ringard qu'il a joué dans Risky Business...... L'été 1990 était-il le début d'une prise de conscience........ du fait que vous êtes une chose façonnée par l'humeur du public............. " Bret Easton Ellis réfléchit tout au long du livre sur l'évolution de l'Amérique, de la Société, de la musique, notamment sur des compositions très pointues. Il écrit "......... En 2006........ impliqué dans mon travail d'écrivain  ( il adapte l'un de ses livres Zombies ) et de producteur........... une certain désespoir que de nombreux acteurs portent en eux tout en s'efforçant de le masquer, j'ai ressenti plus d'empathie pour eux....... "  Et cinéphile il constate que "..... froideur.........distance....... minimalisme...... genre que Hollywood préfère à la subtilité....... La nature même du médium encourage la grandiloquence...... Hitchcock, Antonioni, Kubrick........ " Le monde a connu des drames éprouvants ces deux décennies, et l'auteur s'exprime, raconte sa visite chez un médecin alors qu'un peu plus loin les deux tours étaient percutées, et l'horreur qui s'ensuivit, il y eut Charlie Hebdo. Lire White ne nous ramène pas quelques décennies en arrière mais très vivant dans son écriture, on peut ne pas être d'accord avec ses points de vue, son addiction à l'alcool et aux drogues. Bien qu'engagé quelques années avec l'un ou l'autre millénium, les rencontres se multiplient. Quelque soit le sujet du chapitre Ellis revient toujours au cinéma et nous rappelle malgré la violence du film American Psycho fut quelques années une comédie musicale jouée à Broadway après une création à Londres avec succès. Le plus surprenant de ce livre se lit avec étonnement, intérêt et sourire. L'élection de Donald Trump. Les réactions de ses amis l'ont fasciné, bouleversé, nombre d'entre eux lui ont tourné le dos, car il aurait voté pour Trump alors que la petite foule de gauche qui l'entoure s'est trouvée si mortifiée que cela entraîna vers des cris et des réactions proches de l'hystérie. Ce sont des démocrates déçus. Il y eut ces dernières décennies, outre boomers, millenials, générations X, les yuppies. Victimes puis redevenus, certains, acteurs des grands et graves mouvements monétaires. Patrick Bateman, son double d'American Psycho " Je trouve plus étrange en vieillissant que ce personnage........ flottant librement du désespoir yuppie, était en fait fondé sur ma propre colère............. En déménageant à Manhattan après mon diplôme universitaire de lettres........ fantasme tellement désuet à une époque où les diplômés ne pensent même pas s'installer à Manhattan, je me suis retrouvé dans un monde qui avait avalé les valeurs des années 1980.........." Ne pas oublier son amitié avec Kanye West, ultra riche, chanteur et homme d'affaires, qui ne connut pas son père. Très bon livre, écrit par un auteur qui vit beaucoup et très vite, comme les Américains. Pas de temps mort, seulement celui qu'on prend, Bret Easton Ellis.

dimanche 12 janvier 2020

Sensation de haschisch Charles Cros ( Poème France )

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             Sensation de Haschisch

            Tiède et blanc était le sein.
            Toute blanche était la chatte.
            Le sein soulevait la chatte.
            La chatte griffait le sein.

            Les oreilles de la chatte
            Faisaient ombre sur le sein.                                                                               pinterest.fr
littlechien:  littlechien posted this            Rose était le bout du sein,
            Comme le nez de la chatte.
                                                      

            Un signe noir sur le sein
            Intrigua longtemps la chatte ;
            Puis, vers d'autres jeux, la chatte
            Courut, laissant nu le sein.


                                           Charles Cros
                                                                                                                                     

samedi 4 janvier 2020

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 105 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )



Illustration.
John Michael Wright








                                                                                                                          16 Novembre 1663

            Lever et, après m'être habillé, allai en fiacre à Whitehall. Réunion avec le Duc. Mr Coventry entreprit à nouveau de se justifier de ce dont on l'accuse et de prouver, grâce à maints témoignages qu'il avait apportés, qu'il n'avait rien fait qui n'eût été déjà pratiqué par les précédents secrétaires du lord-amiral, quoiqu'il n'approuvât pas ces agissements.........
            Sortis et sir George Carteret me fit appeler pour parler de ma lettre d'hier.......... Il me promit que dorénavant, quoi qu'il pût entendre contre moi, il m'en parlerait avant de le croire.......
            Ensuite chez milord, pensant trouver Mr Moore pour le consulter avant d'envoyer ma lettre de remontrances à milord, mais il n'est pas là. Je trouve en revanche milord venu à la Cour. Je suis content de l'apprendre et le serais encore davantage si j'apprenais si l'on me disait qu'il prend soin de ses affaires, car je n'aurais ainsi plus de raison de mettre son bon naturel à l'épreuve par une aussi grande provocation que cette lettre.
            Puis retour en fiacre à la maison en passant par la Bourse, où m'entretins de plusieurs affaires avec plusieurs personnes. Dîner avec ma femme. L'après-midi à mon bureau jusque tard.
            Le soir vint Mr Hollier, et nous entreprîmes tous deux d'examiner la maladie dont sont affectées les parties intimes de ma femme. Il semble que la grande confluence d'humeurs qui précédemment s'accumulait à cet endroit a laissé en crevant une cavité devenue, avec le temps, de plus en plus profonde, et mesure maintenant près de trois pouces. Mais Dieu a voulu qu'elle n'allât point vers l'intérieur du corps, mais restât à la surface de la peau, et il va donc devoir l'inciser sur toute sa longueur. Je crains de ne pas avoir assez de courage pour voir cela, et pourtant elle  refuse la présence de toute autre personne que moi. Elle ne veut pas même ses propres servantes. Je dois donc être là pour elle, la pauvre chère âme. Il doit l'opérer demain soir.
            Après son départ derechef à mon bureau un petit moment, puis à la maison, souper et, au lit.


                                                                                                                17 novembre

            Lever et alors que je m'habille visite de Mr Deane de Woolwich...... Je l'incitai à ne pas se soucier de ce qui était arrivé samedi dernier, car je n'avais nulle crainte qu'il ne fût bientôt maître de ses ennemis autant que ceux-ci croient maintenant le maîtriser. Puis il me conta maints exemples de la conduite abominable de Mr Pett de Woolwich à son endroit. Ensuite au bureau réunion tout l'avant-midi. Mr Moore me rejoignit ensuite à midi à la Bourse, ainsi que Tom Trice et mon oncle Wight. Allâmes dans une nouvelle taverne ( le propriétaire se révèle être mon vieil ami d'enfance Ben Stanley ), puis chez un notaire pour rédiger un billet à ordre, puis dans une autre taverne, la Tête du Roi, puis nous rendîmes visite à mon cousin Angier à la maison des Indes orientales toute proche et mangeâmes ensemble un morceau de porc acheté chez un traiteur. Après le dîner nous scellâmes le billet et l'on me remit l'ancien billet de mon oncle à ma tante. A ce moment Tom Trice reconnaît qu'aucun différend ne nous oppose plus sur cet héritage, et qu'il me remettra dans six jours une attestation de la main de son procureur..........
Résultat de recherche d'images pour "metiers angleterre 17è siècle"            Nous nous quittâmes vers le soir. Je rentrai à la maison et allai voir Mr Moore à mon bureau....... Je lui lus la lettre concernant milord........ il la jugea si bien écrite qu'il ne voulut à aucun prix que je me dispensasse de l'envoyer............. Après son départ j'en fis une copie pour mes archives en sténographie et cachetai la lettre que je ferai porter demain par mon commis Will. Puis à la maison où Mr Hollier était arrivé pour voir ma femme. Comme elle était au lit et que nous étions seuls pour examiner de nouveau ses parties, il considère qu'en dépit du fait que la douleur ne serait pas grande, elle a tellement peur et que les soins seront quelque peu douloureux, dont je ne pourrai me charger, requerront la présence d'une infirmière et de gens auprès d'elle, si bien qu'à la réflexion il pense  qu'une fomentation fera aussi bien l'affaire. Quoique ce remède soit gênant il n'est pas douloureux et sa servante pourra l'appliquer, sans savoir directement pour quoi il est, et pourra penser qu'il sert à soigner les hémorroïdes, car bien qu'il n'y ait là rien que de très honnête, ma femme répugne pourtant à donner l'occasion
qu'on en parle.
            Médecine -
                              Ma femme et moi sommes fort soulagés d'entendre cela, car j'avoue que j'aurais été fort chagrin de vois ma femme opérée sous mes yeux. Je n'aurais pas pu supporter de voir cela. Je parlai longuement avec lui de ma maladie. Il me dit à nouveau que le matin je dois manger du gruau pour lâcher le ventre, et le soir des pommes cuites au four. Que je dois, de temps à autre, boire de la bière avec mon vin, et manger des tartines de beurre et de miel, et du pain de seigle, si je peux le supporter, car c'est un laxatif. Je dois prendre une fois par semaine le clystère qu'il m'a prescrit la dernière fois, en remplaçant de temps en temps le beurre par du miel. Toutes recommandations que je suis maintenant résolu à suivre exactement.
            Après son départ, à mon bureau pour travailler un peu, puis à la maison, souper et, au lit, un peu souffrant pour avoir bu de la petite bière trop froide et m'être trouvé dans une pièce froide, à la taverne, je pense.


                                                                                                                      18 novembre


             Lever et après m'être habillé et avoir un peu travaillé au bureau........ à Deptford, où je n'étais pas allé depuis longtemps. Là, versai la solde de l'équipage du Milford et le fis désarmer, exactement selon la règle, et l'on m'a témoigné tout le respect possible dans l'accomplissement de ma tâche. A midi emmenai le capitaine Terne ainsi que le capitaine Berkeley dîner à la Taverne du Globe. Ce dernier qui revenait d'Alger nous fit une bonne description de l'endroit et nous dit que le pacha vit comme un prisonnier, à la merci des soldats et des officiers de sorte que règne là-bas la plus grande confusion
            Après dîner arriva sir William Batten que je laissai se charger de la solde et du désarmement d'un autre vaisseau et je rentrai à pied à la maison, lisant un petit livre de nouveaux poèmes de Cowley que m'a offert son frère. Il semble qu'Abraham soit toujours fort malade mais qu'il a de bonnes chances de guérir.
            Restai à mon bureau puis arriva Mr Hollier, si bavard et si prodigue de phrases latines que je le crois pris de boisson, mais je n'en suis pas sûr. Quoiqu'il en soit, il n'arrête pas de parle, faisant l'apologie de Calvin et de Luther. Il a commencé ce soir l'application de la fomentation à ma femme, et j'espère que cela lui fera du bien. Après son départ, un peu au bureau puis, au lit.
            Ce matin, j'ai envoyé Will porter ma grande lettre à milord Sandwich, et il la lui a remise en mains propres.
            Milord,
                        J'espère vivement que votre Seigneurie ne condamnera ni la forme ni l'objet de cet avis, quand j'aurai allégué pour ma défense au sujet de la forme que j'ai tenté à deux reprises..... de vous le présenter de vive voix............ J'estime trop l'honneur de Votre Seigneurie, et je vois que la Cité comme la Cour bruissent de propos qui vous causent du tort et sont trop répandus pour que moi ni personne, excepté Votre Seigneurie, puisse les arrêter, et je vais, milord, sans exagérer ni amoindrir l'affaire le moins du monde, faire mon devoir en l'exposant brièvement devant vous.
            ............ La vie retirée indigne.......Le fait que vous veniez de moins en moins à la Cour ont donné plus d'une fois lieu à des commentaires dans l'entourage du roi.
            D'autres ont dit, à propos de Votre Seigneurie, qu'ayant maintenant obtenu ce qui vous convenait et reçu du roi de grands biens, vous laissez votre souverain se maintenir ou choir comme il le pourra, et l'on souligne que vous avez entièrement abandonné le service de la Marine.
Image associée *           Des censeurs les plus nombreux...... insistent sur la mauvaise réputation de la maison où Votre Seigneurie ( dont on peut voir maintenant qu'elle a parfaitement recouvré la santé ) continue d'habiter. Et ont nommément accusé une des demoiselles d'être une fille publique........... et ceci....... éclabousse de scandale Votre Seigneurie. Et ceci aussi bien en réjouissant certains ennemis qu'en blessant davantage d'amis que je ne saurais dire.
            Enfin, milord, je découvre chez tout le monde une froideur générale envers Votre Seigneurie, telle que je n'en avais encore ressentie depuis que je suis votre obligé. Je n'aurai la présomption d'ajouter à cela ni réflexion, ni conseil de ma part, sachant bien que Votre Seigneurie n'en a nul besoin. Mais en vous donnant l'assurance la plus sincère que je n'ai confié à nul homme ni papier en ce monde ce que j'écris ici, dont les seuls dépositaires sont moi-même et cette lettre que j'aurai soin de vous faire remettre en mains propres, je demeure confiant que Votre Seigneurie percevra la droiture de mes intentions respectueuses et, très humblement, je prends congé,
            s'il plaît à Votre Seigneurie;
            Le dix-septième novembre 1663.
                                                                  De Votre Seigneurie le très humble serviteur
                                                                                                                                   S. P.
            Pour mémoire.
                                    La lettre ci-dessus a été cacheté avant d'être jointe à celle qui suit :
            Milord,
                        Si ce pli surprend Votre Seigneurie alors qu'elle est en compagnie ou occupée, je la supplie de différer l'ouverture de la lettre ci-jointe jusqu'à ce que les circonstances soient propices ( le sujet peut aisément souffrir un tel retard ) et je demeure très humblement,
                        s'il plaît à Votre Seigneurie,
                        Le dix-septième novembre 1663,
                                                                             De Votre Seigneurie le très humble serviteur,
                                                                                                                                               S. P. 
            Mon domestique a reçu comme instruction de vous remettre ceci en mains propres et de ne pas attendre de réponse.

            Je prie le ciel de bénir cette lettre. Mais j'avoue en craindre pour moi les conséquences, qui seront bonnes ou mauvaises, selon qu'il en admettra ou non le bien-fondé. Je suis, néanmoins, persuadé qu'elle lui fera du bien, et qu'il a besoin d'un tel avis.


                                                                                                                   Le 19 novembre


            Lever et au bureau, réunion jusqu'à midi, puis à la Bourse, où ne fis pas grand chose, et à la maison pour dîner. Creed se joignit à nous. Après le repas, Mr Gentleman, le père de ma servante Jane, vint nous voir et voir sa fille. Après avoir passé un petit moment avec eux je fus mandé, comme convenu, par sir George Carteret. Allai chez lui et l'accompagnai en carrosse chez milord le trésorier général pour nous entretenir avec lui des moyens de payer Mr Gauden, et lui demander s'il ne serait pas nécessaire, le crédit de Mr Gauden étant tombé fort bas, de prendre des garanties s'il demande une grosse somme, 20 000 livres par exemple, qui devraient lui être payées maintenant, à valoir sur ce dont il déclarera avoir besoin pour l'année prochaine. Il est bien triste que l'ayant nous-même réduit à cet état, nous fussions les premiers à mettre en doute son crédit ( la Marine doit 30 000 livres à Gauden pour la fourniture des subsistances de l'année ), mais c'est ainsi. Cependant l'on agira avec lui avec les plus grands égards. Nous avons trouvé milord le trésorier général dans sa chambre à coucher, immobilisé par un accès de goutte. Il me paraît un homme bien disposé et certainement un bon serviteur du roi. Il a parlé avec beaucoup d'allant et de justesse du service du roi. La seule chose qui m'ait déplu chez lui, ce sont ses ongles longs, qu'il laisse pousser sur une main blanche, courtaude, assez épaisse, et cela m'a gêné de les voir.
            Retour en carrosse avec sir George Carteret qui me laissa à la nouvelle Bourse. En chemin il me dit qu'une guerre avec la Hollande est tout à fait improbable, car ni eux ni nous n'y sommes préparés. Nous y viendrons certainement d'ici quelque temps, car nous avons les mêmes intérêts, en matière de commerce, cela s'entend. Mais ce n'est pas pour le moment.
            Puis dans le quartier du Temple, visitai mon cousin Roger Pepys et son frère John. Ce sont à mon avis deux hommes fort ordinaires. Je partis ensuite chez Mr Moore pour lui parler, et le rencontrai en chemin. Il me dit, à ma grande satisfaction, qu'il croit que ma lettre à milord Sandwich a opéré favorablement sur lui, et qu'elle va l'inciter à prendre soin de lui-même et de ses affaires, car il commence déjà à le faire. Mais je n'ose tirer aucune conclusion avant de l'avoir vu, ce que je dois faire demain matin, afin que cesse mon tourment de ne pas savoir comment il prend la chose.
            Ensemble au café, nous bûmes et causâmes un peu, et à la maison. Après avoir passé un petit moment à mon bureau, retour à la maison pour souper et, au lit. Ne pouvant m'empêcher d'espérer après les paroles de Mr Moore ce soir, et pourtant je crains le pire.


                                                                                                                    20 novembre 1663

            Lever et dès que je le pus chez milord Sandwich, mais il était sorti et me voilà frustré de mon espoir de trouver le repos d'une façon ou d'une autre dans cette affaire de milord. Je montai voir Mr Howe que je vis pour la première fois en perruque, ce qui lui sied à merveille, et causai avec lui. Il me dit que milord est tout à coup transformé, et il pense qu'il prend ma lettre en fort bonne part. Quoi qu'il en soit, nous louons tous deux le Seigneur que cela ait un effet si bénéfique sur lui. Puis retour à la maison en m'arrêtant à la Garde-Robe où je trouve milord, mais si occupé avec Mr Townshend à faire des comptes, que je ne voulus point le déranger et m'en allai. Un peu plus tard dîner fort gaiement. Et, vraiment, il m'apparaît comme un jeune homme fort prometteur, quoiqu'un tantinet imbu de lui-même.
            Après dîner les emmenai, lui et ma femme. Je la laissai chez sa mère à Covent Garden, et nous nous rendîmes chez milord. De là à Whitehall avec Mr Moore, et comme le roi et le Conseil étaient en réunion et que je jugeai l'endroit peu propice à une première discussion avec milord, je pris un fiacre, allai chercher ma femme et rentrai à la maison, après avoir reconduit Mr Moore. Je restai tard seul au bureau à étudier des cartes des mers du Nord, des mers blanches, et du fleuve Arkhangelsk, puis rentrai à la maison et, après souper, au lit.
            Ma femme me dit qu'elle et son frère ont eu une grande querelle ce soir, car il prétend qu'elle a de grandes obligations envers lui, et l'accuse de ne pas se conduire comme elle le devrait envers sa famille et il dit qu'elle peut obtenir davantage de moi qu'elle ne le prétend, et je ne sais quoi encore. Mais grâce soit rendue à Dieu, elle ne le peut point.
            On parle beaucoup aujourd'hui d'un affrontement entre certains fanatiques qui ont pris les armes et les soldats du roi dans le Nord. Mais je ne sais pas encore si cela est vrai.


                                                                                                                 21 novembre
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            Au bureau toute la matinée. A midi je reçois une lettre de Mr Creed accompagnée d'un présent, une très belle robe indienne multicolore pour ma femme. La lettre est curieusement écrite, exagère le prix de son cadeau, et ne reconnaît qu'à peine les services passés que j'ai pu lui rendre, et se contente de me présenter ses respects les plus sincères et je ne sais quoi encore.
            J'avoue que j'espérais tirer plus grand profit de mon aide dans l'affaire de ses comptes. Je donnai donc 12 shillings à son petit valet et lui renvoyai son présent
            Après m'être occupé de la solde d'un vaisseau cet après-midi à la Trésorerie, je me rendis en fiacre à Ludgate et, après avoir regardé là-bas les prix de plusieurs robes j'en déduis que la sienne peut valoir environ 12 ou 15 livres. J'attends, cependant, au moins 50 livres de lui. Et donc, le soir, je lui écrivis une lettre et lui exprimai clairement ma pensée. J'en garde une copie ainsi que de sa lettre. Je suis résolu à ne plus avoir avec lui les mêmes relations qu'autrefois, mais j'obtiendrai ce que je veux de lui. Puis écrivis mes lettres et quand j'eus terminé rentrai à la maison souper et, au lit, l'esprit fort soulagé d'avoir écrit à Creed et davantage encore d'avoir reçu 17 livres à la Trésorerie en remboursement des 17 livres que j'ai payées il y a un an au sculpteur sur bois pour ses travaux chez moi, que j'avais l'intention de payer moi-même, mais voyant que d'autres le faisaient, je pensai qu'il n'était pas inconvenant de me faire rembourser moi aussi. Mais j'appréhende que cela ne nous desserve plus tard et nous coûte davantage.


                                                                                                                22 novembre
                                                                                                 Jour du Seigneur
            Levé fort tôt. J'avais hier soir commandé un fiacre qui ce matin me fit faux bond. Je marchai donc jusqu'au quartier du Temple et pris un fiacre qui me conduisit aux appartements de milord, que je trouvai prêt à partir pour la Chapelle. Mais, quand j'entrai, il entreprit, l'air fort sérieux, qu'il avait reçu ma lettre de tantôt. Il avait tout d'abord noté le soin que je prends de lui et de son honneur, et me remercia du passage où je disais que du plus profond de mon coeur j'étais persuadé du contraire de ce que je relate comme étant les propos d'autrui. Mais, puisque mon intention avait été non de faire des remontrances, mais d'informer et de lui permettre de juger des choses avant d'agir, il me fallait lui dire de quelles personne je tenais les divers détails sur lesquels j'insiste.
            J'aurais voulu m'en dispenser mais, le voyant si déterminé, je me trouvai contraint de lui obéir. Je lui nommai donc Mr Pearse, le chirurgien, pour ce qui est des bavardages de Cour sur la façon indigne dont il vit, une ancienne servante à moi qui avait habité à l'école de Chelsea, et aussi Mr Pickering pour les rumeurs concernant la jeune femme, ainsi que Mr Hunt d'Axe Yard, près de chez qui elle habitait. J'ajoutai que la Cité tout entière dit qu'il néglige ses affaires, et j'affirmai à maintes reprises la droiture de mes intentions dans toute cette affaire. Il reconnut qu'il me croyait.
            Mais plusieurs choses me troublent extrêmement : en particulier, il m'assura de la respectabilité des gens de la maison et de la jeune dame qu'il regrettait de voir ainsi accusée. Il dit aussi qu'on ne le persuaderait pas de changer sa manière de vivre et aussi que s'il s'apprêtait à louer une maison et entendait mener une vie différente, ce n'était pas pour plaire à quiconque ou faire cesser les rumeurs, mais parce que cela lui plaisait ( mais je crois qu'il a dit cela pour ne pas sembler trop affecté par ce que j'ai écrit ). Enfin, et surtout, quand je parlai des précautions que j'avais prises pour lui déclarer tout ceci, et dis que personne d'autre n'en avait connaissance, il dit que je devais lui permettre de faire une seule exception. Je lui dis qu'il était possible que d'aucuns connaissent certaines de mes pensées, parce que j'avais obtenu d'eux quelque information, mais nul ne pouvait prétendre avoir connaissance de ce que j'avais écrit. Cela, je l'avoue cependant, me tourmente fort car il m'a paru bien prompt à rétorquer. Il doit sûrement penser à Will Howe, qui n'a rien vu de ce que j'ai écrit. Mais je crois que cela ne peut me causer de tort.                      * *                
Image associée            Force lui est d'admettre qu'il croit en mes bonnes intentions ce qu'il a affirmé à maintes reprises. Pourtant, je vois bien que dans son for intérieur, il est fâché par cette affaire et, je l'avoue, je crains de m'être fait du tort en voulant son bien. Et si c'était à refaire, et qu'il me semblât qu'il ne prendrait pas mieux la chose, je crois que je me tiendrais tranquille, faisant mine de rien voir, car j'appréhende qu'il n'y ait pas de juste milieu : ou il le prendra très bien, ou il prendra fort mal.
            A la fin, je ne pus m'empêcher de pleurer devant lui, ce dont j'ai honte à présent. Je ne puis, cependant, imaginer qu'il l'attribue à autre chose qu'à mon affection pour lui et à ma bonne volonté.
            A la fin de cette conversation, il se mit à parler joyeusement d'autre chose. Je l'accompagnai à Whitehall et nous causâmes des tableaux de la galerie. Peut-être le fit-il par calcul, pour que son petit valet ne put déceler en lui la moindre froideur, mais je crois que, d'une certaine façon, son esprit est soulagé, et j'espère que nos relations resteront inchangées. Quoi qu'il en soit, quand il verra que je prends soin de mes affaires et lui fais honneur, et qu'il est improbable que j'aie besoin de lui ou que je devienne un fardeau pour lui, et s'il continue à prendre soin de ses affaires et revient à la raison, je n'ai aucun doute qu'il prendra en compte ma loyauté envers lui, et m'accordera l'estime qu'il me doit.
            A la Chapelle je pris place sur le banc du Sceau privé avec d'autres gentilshommes et j'entendis prêcher le Dr Killigrew, mais j'avais l'esprit si troublé, ou peut-être seulement hanté par ce qui s'était passé que je ne pus prêter aucune attention et que je ne peux à cette heure me ressouvenir de trois mots. Une belle anthem suivit le sermon, il s'agissait du psaume 51 écrite pour cinq voix par un des jeunes garçons du capitaine Cook, un bien joli enfant, et l'on dit qu'ils sont quatre ou cinq à pouvoir en faire autant. Et c'est là que je vis, pour la première fois, que le roi est un peu musicien, et battit la mesure de la main tout au long de l'anthem.
            Montai dans la galerie après le sermon, rencontrai Creed. Nous nous saluâmes mais ne dîmes mot de ce qui s'était passé hier entre nous. Il me dit qu'il devait aller en un certain endroit pour dîner et nous nous quittâmes.
            Je rencontrai aussi Mr Povey qui me dit que Tanger a manqué d'être traîtreusement livré et qu'un des officiers du roi est ici, à qui l'on a offert 8 000 pièces de huit pour entrer dans le complot.
            De là à la table d'hôte de la Tête du Roi pour dîner. Maintes gens de qualité, et bon dîner. On parla principalement de chasse, dans un jargon que je n'entends guère.
            Puis en fiacre à notre église où je ne pus rien écouter, tant j'avais encore l'esprit bouleversé. Rentrai à la maison après le sermon et contai à ma femme ce qui s'était passé. Et à mon bureau, travaillai tard, uniquement pour m'occuper l'esprit, puis à la maison, souper, prières et, au lit.


                                                                                                              23 novembre

            Lever et me rendis chez l'échevin Backwell rejoint par sir William Rider, et nous nous consultâmes suivant les instructions de milord le trésorier général sur l'opportunité d'assurer notre vaisseau qui ramène du chanvre d' Arkhangelsk, au sujet duquel nous sommes fort inquiets. Une fois l'affaire engagée j'allai chez Mr Beecham, un de nos jurés, m'entretenir avec lui de notre affaire en justice contre Field, le procès ayant lieu demain. Puis à l'enclos de Saint-Paul où passai commande du Recueil de Rushworth et des Lois du Long Parlement, etc. de Scobell, que je ferai payer par le roi en disant que c'est pour le bureau, et ainsi je ne contreviens point du tout à mes résolutions.
            Retour au café, puis à la Bourse où sir William Rider et moi proposâmes 15 pour cent. Mais personne ne veut accepter moins de 20 pour cent, et l'offre la plus basse est une prime de 15 pour cent plus une déduction de 15 pour cent sur le remboursement en cas de perte du vaisseau. Nous n'avons pas jugé bon de l'accepter sans ordre. Sur ce nous nous quittâmes et je rentrai à la maison pour un dîner rapide, quoique trop bon pour être pris sans compagnie, à savoir une bonne oie et un excellent morceau de boeuf rôti.
            Ensuite dans le quartier du Temple, mais comme j'étais en avance et que je rencontrai Mr Moore, je l'emmenai chez milord le trésorier général puis chez sir Philip Warwick à qui je demandai son avis. Il me laissa libre de faire ce que je jugerais bon au sujet de cette assurance.
            Retour au quartier du Temple. En chemin racontai à Mr Moore ma conversation d'hier avec milord, et vraiment je crains de plus en plus que milord ne se corrige pas comme je l'avais espéré, ni n'ait la sagesse d'admettre le bien-fondé de mes conseils. Cependant, je suis convaincu que la personne pour laquelle il m'a demandé de faire une exception n'est pas Mr Moore, et donc, Mr Howe n'a pu lui parler de ma lettre, ni lui dire qu'il l'ait jamais vue.
            Arrivé je quittai Mr Moore et montai au cabinet du président de la Chambre où je retrouvai Mr Coventry pour m'entretenir avec lui de l'affaire Field.
            Je repris ensuite le chemin de la maison, entrai dans un café où appris par le plus grand des hasards l'arrivée d'une lettre nous annonçant que notre vaisseau était parvenu sans dommage à Newcastle. Je courus aussitôt porter la nouvelle, âne bâté que je suis, à l'échevin Backwell, et nous allâmes ensemble à la maison de l'Afrique dans Broad Street pour en parler à sir William Rider, mais il était sorti. Alors qu'il m'était si facile de faire tout cela, de feindre de prendre une assurance et d'empocher 100 livres sans me fatiguer ni courir le moindre risque ! Quand je pense que j'ai pu faire une telle sottise, comme cela me chagrine !
            Rentrai ensuite avec l'échevin Backwell, parlant de la nouvelle monnaie. Il dit, qu'à son avis, elle est impossible à contrefaire, mais qu'elle est terriblement malcommode à compter, tant elle est épaisse et les bords sont relevés.
            Il m'apparaît fort occupé, et à vrai dire, c'est un homme fort consciencieux, comme il l'a toujours été, et maintenant il est bien payé pour cela.
            Ensuite à la maison et à mon bureau où travaillai tard pour gagner un peu d'argent, puis à la maison souper et, au lit.


                                                                                                                  24 novembre
                                                                                                                                      saor-alba.fr 

Image associée            Lever et à mon bureau réunion toute la matinée. A midi à la Bourse où tout le monde me félicita de l'arrivée à bon port de notre cargaison de chanvre. Et il paraît qu'un homme, Middleburgh, a proposé 20 pour cent en or hier soir, trois ou quatre minutes avant que soit connue la nouvelle de son retour.
            Rentrai chez moi avec Mr Deane pour dîner. Après avoir mangé et parlé longuement des affaires de l'arsenal de Woolwich, nous regardâmes le plan d'un vaisseau qu'il a fait pour moi. Il est vraiment tout à fait excellent et j'espère qu'il me sera bien utile dès que j'aurai un peu de temps, et je suis fort reconnaissant envers ce brave homme.
            Vers le soir, en fiacre à la commission de Tanger et parlai là à milord, qui se montra fort civile avec moi. Mais je vais le mettre à l'épreuve demain par une visite, pour voir s'il continue ou non dans ces dispositions. Retour à la maison et à mon bureau tard avec le capitaine Minors à parler de l'affaire de la Compagnie des Indes orientales.
            A la maison pour souper et, au lit. Cela me tourmente d'être aussi constipé malgré toutes les purges que je prends.
            C'est aujourd'hui qu'avait lieu notre procès contre Field. Il paraît qu'on lui accorde 20 livres de dommages en plus, ce qui est étrange, mais ce n'est cependant pas autant que la première fois et moins que je ne le craignais.


                                                                                                                25 novembre

            Lever et me rendis chez sir George Carteret et l'accompagnai à Whitehall dans son carrosse. Il me traite fort bien, à ma grande joie et, au cours de notre conversation, trouve l'occasion de me dire que le service que je lui avais demandé l'autre jour, il me le demandait à son tour, que nous puissions réciproquement à tout moment nous rapporter le moindre incident qui se passerait parmi nous au bureau ou ailleurs, et qui nous rendrait mécontents l'un de l'autre. Et que je le trouverais en toute chose aussi bienveillant et prêt à me servir que mon propre frère.
            Ceci me parut fort soudain et extraordinaire et me fait un plaisir extrême, et je suis résolu à ne jamais, à aucun prix, perdre son estime, si je le puis.......
            Il me laissa dans Fleet Street. Je pris une autre voiture et me rendis chez milord Sandwich à qui je remis la sphère magnétique de Mr Barlow. Cela lui plut beaucoup et il se montra fort civil avec moi.........
            Je le quittai de bonne humeur et me rendis à Whitehall où retrouvai le duc d'York et Mr Coventry. Je recommandai de faire assurer notre vaisseau qui transporte le chanvre à 1,5 pour cent, nonobstant son arrivée à Newcastle, et j'espère vivement que pour mes trois places ( nte de l'éd. Pepys était secrétaire de la Marine, siégeait à la mission de Tanger et travaillait pour Sandwich ) qui sont toute mon espérance et mon gagne-pain, je n'ai maintenant nulle crainte, mais si je prends les précautions nécessaires et, avec l'aide du ciel, jamais plus je ne négligerai de le faire, je ne doute point de conserver leur estime à tous, car sur le Duc et Mr Coventry, milord Sandwich et sir George Carteret reposent mes plus grandes espérances..............
            Retour en fiacre à la Bourse, parlai avec sir William Rider de la possibilité d'assurer le vaisseau, parlai aussi affaires avec plusieurs autres personnes, et l'on va sous peu me connaître fort bien.   saor-alba.fr
Résultat de recherche d'images pour "metiers angleterre 17è siècle"            A la maison pour dîner avec ma pauvre femme, et avec grande joie à mon bureau travailler tout l'après-midi. Visite de Mr Bland, nous avons eu une conversation intéressante et il m'a choisi pour arbitrer une affaire. Un peu plus tard arrive sir Warren et nous eûmes une admirable conversation. Il me conseilla, à ma demande, sur les prêts à grosse aventure et autres façons de placer de l'argent, par exemple en parts de vaisseaux et sur les risques encourus.
            Nous en vînmes enfin à parler de l'administration de la Marine en Hollande, et je crois qu'il va m'aider à me procurer des rapports sur certains aspects de l'amirauté hollandaise que je suis fort désireux de connaître.
            Il semble fort bien connaître certaines choses concernant milord Albermarle avant son ralliement à la cause du roi, ainsi que les négociations entre le roi et lui et d'autres personnes, commencées plusieurs années auparavant. Mais j'ai l'impression que tout n'est pas entièrement vrai. Ces propos sont cependant fort instructifs en général, bien qu'ils m'aient semblé sur ce sujet sortir un peu de l'ordinaire.
            Rentré tard à la maison, souper et, au lit. J'ai l'esprit en paix, et seule ma santé m'inquiète un peu.


                                                                                                                  26 novembre 1663

            Lever et au bureau réunion toute la matinée. A midi à la Bourse, rencontrai Mr Cutler, le marchand. Il voulut à toute force m'inviter dans sa maison à côté de l'église hollandaise. Je dînai là, dans une vieille mais belle maison, avec sa femme et sa mère, deux vieilles femmes aux manières simples. Le dîner fut simple et bon, et ce qu'il me dit après le repas sur les subsistances de la marine était très intéressant et valait d'être entendu. Puis à la maison et à mon bureau dans l'après-midi, l'esprit tout occupé de mon travail. Restai tard puis rentrai auprès de ma pauvre femme pour souper et, au lit. J'ai un peu mal à un testicule, à cause d'un coup que je me suis donné en remontant mes chausses trop violemment hier. Mais je ne vais rien y appliquer avant de voir si la douleur cesse d'elle-même.
            Il paraît que la peste devient de plus en plus violente à Amsterdam, et nous nous apprêtons à obliger tous les navires provenant d'Amsterdam et de Hambourg, ou de tout autre endroit touché par l'épidémie, à effectuer à Hole Haven une quarantaine ( de 30 jours...... ), ce que nous n'avions jamais fait auparavant.


                                                                                                                    27 novembre

            Lever et à mon bureau. Travaillai avec très grand plaisir toute la matinée. A midi à la Bourse, puis à la maison pour dîner avec ma pauvre femme, fort content de retourner à mon bureau. Travaillai d'arrache-pied jusque tard le soir à établir la balance des comptes pour le fret dû au roi par la Compagnie des Indes orientales, puis à la maison souper et, au lit.
            Je parle depuis quelque temps d'aller à Calais ou dans quelque autre port français l'été prochain sur un des yachts, ce qui fait grand plaisir à ma femme. Je crois bien que cela se fera. Il est fort amusant que ma servante Jane n'ose pas y aller, alors que Bess en est ravie et ne se tient plus de joie, et pourtant elle veut bien rester si Jane le désire. Et, en cela comme en toute chose, elle montre son excellent naturel qui n'a point d'égal au monde.


                                                                                                                  28 novembre

            Lever et à mon bureau, réunion toute la matinée, et à midi à la Bourse dans le carrosse de Mr Coventry. Rencontrai Mr Pearse, le chirurgien, qui m'annonça comme une bonne nouvelle que milord Sandwich avait résolu de ne plus aller à Chelsea, et me dit que j'avais donné des conseils à milord, ce que je n'infirmai ni n'affirmai, mais lui montrai que je me réjouissais avec lui de ce qu'il n'y allât plus.
            A la maison pour dîner et à l'enclos de Saint-Paul où feuilletai la seconde partie de Hudibras, que je n'achète pas mais emprunte pour la lire, afin de voir si elle est aussi bonne que la première que tout le monde porte aux nues. Pourtant je ne l'aime guère, quoique j'aie essayé en la lisant deux ou trois fois d'y trouver de l'esprit.
            Retour à la maison, à mon bureau où restai tard à travailler, puis à la maison, souper et, au lit. On me l'avait déjà dit deux ou trois fois, mais aujourd'hui on m'a rapporté comme certain que les Hollandais ont publié des dessins qui chargent notre roi. Sur l'un il est représenté les poches retournées et vides, sur un autre en compagnie de deux courtisanes qui jouent les voleurs à la tire, sur un troisième tenant deux dames par la main, tandis que d'autres l'invectivent, ce qui est un grand outra

                                                                                                         29 novembre
   apiculture.net                                                                             Jour du Seigneur
Résultat de recherche d'images pour "metiers angleterre 17è siècle"            Ce matin j'ai mis mon plus bel habit de drap noir rehaussé de rubans écarlates, qui est fort seyant, ma cape doublée de velours et un nouveau chapeau de castor. L'ensemble est fort élégant avec mes canons attachés par des rubans de soie noire que j'ai achetés il y a un mois.
            Me rendis seul à l'office, car ma femme n'y allait pas. Vis milady Batten en robe de velours, et je fus fâché qu'elle pût en porter une avant ma femme, avant que j'eusse les moyens de lui en acheter une, mais à chose impossible nul n'est tenu. J'en parlai cependant à ma femme en rentrant, et je suis bien faible car, sur le coup, j'étais fort près de lui en offrir une, mais j'y renonçai après avoir réfléchi. Et vraiment cela me perdrait de vouloir imiter sir William Batten et sa femme, qui possède de grands biens en plus de sa charge.
            Le dîner fut bon, " du boeuf à la mode ", mais pas aussi bien préparé que ma femme ne le fait d'habitude et, après le repas, à l'église française. Mais comme le service était commencé depuis trop longtemps, je retournai à St Dunstan, à côté de chez nous, entendis un bon sermon et retournai à la maison. A mon bureau toute la soirée à faire mes comptes de ce mois et, Dieu soit loué, j'ai amélioré ma situation, mon bien se monte à présent à 770 livres, la plus grosse somme que j'aie jamais possédée, et j'ai, de plus, un grand nombre de beaux vêtements. C'est une grande grâce que Dieu me fait là.
            Ensuite, à la maison souper et, au lit.


                                                                                                                    30 novembre 1663

            Un message est venu m'appeler de la part de sir William Penn, pour me convier à aller avec lui à Whitehall dans sa voiture. Je me levai donc et l'accompagnai.
            En chemin il commença, le fat, à me rappeler l'attitude désobligeante que j'ai eue à son égard il y a une ou deux semaines lors d'une réunion du Conseil. Je lui répondis assez ouvertement que je ne pensais avoir envers personne l'obligation de faire ceci ou cela, parce qu'on le voulait ainsi........ alors il parla et je parlai, et le sujet fut abandonné sans que l'un ni l'autre n'eût reçu ni donné grande satisfaction. Nous passâmes à autre chose, mais je reste persuadé que c'est un fourbe et un coquin.
            A Whitehall nous rencontrâmes le Duc, dans une Grande Galerie où il s'entretint avec nous. Peu après arrive milord Sandwich qui resta un moment à nous parler, mais comme c'était la Saint André et jour des Insignes il nous quitta pour se rendre à la Chapelle. Sir William Penn et moi repartîmes, je descendis à la Bourse et allai au café. J'entendis là l'excellent histoire d'une escroquerie tentée par un capitaine marchand, qui avait emprunté deux fois à la grosse aventure et assuré pour la même somme son vaisseau et sa cargaison qu'il voulut ensuite abandonner sur les côtes de France où  il le laissa, refusant le secours des pilotes qu'on lui proposa, et donc le gouverneur de la place prit le vaisseau et le renvoya ici pour retrouver son propriétaire. Le vaisseau est donc arrivé sans dommage, avec sa cargaison, le tout ne vaut pas 500 livres, alors qu'il avait, d'une façon ou d'une autre empoché 3 000 livres. Le procès doit avoir lieu demain à l'Hôtel de Ville, et j'ai l'intention d'y assister.
            Dîner à la maison et donnai sa leçon d'arithmétique à ma femme. Dans la soirée visite de William Howe. Il me dit que milord a été en colère contre lui pendant trois ou quatre jours et refusait de lui parler. Quand il le fit enfin, il l'accusa de m'avoir parlé de ce qu'il avait remarqué concernant Sa Seigneurie. William Howe niant obstinément, milord s'apaisa. Il est depuis fort calme et se hâte, autant qu'il le peut, de déménager de Chelsea. Mais les regards que m'a jetés milord aujourd'hui, ou, peut-être n'est-ce que mon manque de confiance en moi, comme les propos de William Howe me font croire que milord n'est pas très content, et que peut-être il ne le sera pas de fort longtemps. J'en suis fâché, mais j'espère que cela passera avec le temps, sinon je serai bien mal récompensé de mes services.
            Un peu plus tard nous nous rendîmes ensemble dans le quartier du Temple et nous nous séparâmes. J'allai chez mon cousin Roger Pepys que je rencontrai alors qu'il se rendait à son cabinet. Il était pressé, il part demain en voyage. Il me parle d'une lettre de mon père qu'il va conserver pour me la lire à son retour. Je suppose qu'elle traite de la jalousie de mon père qui pense que ma femme le dessert auprès de moi. Uniquement parce qu'ils se sont querellés pendant qu'elle était là-bas, et cette lubie fort déraisonnable ne lui sort pas de la tête, et il se tourmente et tourmente ses amis pour trouver le moyen de me le faire savoir, par exemple milord Sandwich, Mr Moore et mon cousin Roger. Ce qui me fâche, mais je dois l'imputer à son âge et à ses inquiétudes au sujet de ma mère et de ma soeur Pall, et ne pas y prêter attention.
            Après avoir causé un peu avec lui, je pris un fiacre et rentrai à la maison. Je m'arrêtai chez mon libraire pour prendre deux livres, les Ruceuils de Rushworth et de Scobell. Je vais les faire payer par le roi. J'ai passé quelque temps à le lire à mon bureau, et c'est un excellent ouvrage. Puis à la maison, et passai la soirée à faire de l'arithmétique avec ma femme et souper et, au lit.
            Je termine ce mois l'esprit en paix, sauf pour une chose, car j'ai malencontreusement offensé milord, en lui rendant le service de lui représenter ce que le monde dit de lui et de ses affaires.


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                                                                                 à suivre..........
      
                                                                                                                   1er Décembre 1663

            Lever et.............