Dans l'Eternité
Au fond noir du passé les principes du monde,
A d'insondables fins soumis,
Débrouillaient leur mêlée aveuglément féconde :
Ils façonnaient la terre, hélas ! où ne se fonde
Nul Eden aux amours promis.
Des monstres au long col rampent, troupeau farouche
De la pesanteur prisonnier ;
L'aile s'ébauche et tend vers le ciel ; elle y touche ;
De l'herbe éclôt la fleur, la fleur devient la bouche,
La femme apparaît, lys dernier !
Nos amours sont sans doute infiniment anciennes ;
Nos âmes ont pris corps cent fois.
Mes yeux cherchent les tiens, mes mains cherchent les tiennes,
Et je t'appelle, hélas ! partout sans que tu viennes,
Sans connaître encore ta voix.....
Depuis qu'est né l'Amour, j'en ai connu la chaîne,
Le lien caressant, jamais !
A peine, quand l'argile eut pris figure humaine,
Ton âme eut-elle fait de la beauté sa gaine
Que dans l'inconnu je t'aimais.
Par l'espace, au hasard de la cime et du gouffre,
Mon coeur vers toi s'est élancé
Comme la flamme court sur la trace du soufre,
Et, si loin que tu sois, quand tu pleures il souffre
A ta fortune fiancé.
Car sa chaîne est rivée à ton intime essence :
Les innombrables éléments
Dont ta bouche est pétrie ont depuis ta naissance,
Par une mutuelle et secrète puissance,
Ceux de mes lèvres pour amants.
Comme l'abeille aux fleurs emprunte leur arôme,
Et, charmeuse exquise à son tour,
Change en durable miel la sève qui l'embaume,
De mon sang épuisé survivra chaque atome
Tout imprégné de mon amour ;
La forme en vain retourne au néant qui l'appelle,
La matière et l'âme ont pour loi
De fournir à l'amour une proie éternelle :
Oui, sous les vents, la pluie et les sourds coups de pelle,
Ma cendre frémira pour toi !
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Descartes
Fier du loisir conquis, son salaire et sa gloire,
L'homme osa détourner son regard des sillons,
Et, s'enivrant d'abord de science illusoire,
Il courut, l'âme ouverte, au-devant des rayons !
Dupé par les couleurs dont l'être se décore,
Du conseil de Socrate, hélas ! vite oublieux,
Au monde intérieur qu'il dédaignait encore,
Crédule, il préférait le monde offert aux yeux.
Les contours le leurraient, car la forme s'altère,
Et la main n'y perçoit que le vide ou qu'un mur,
Il sentait dans les sons soupirer un mystère.
Tous les signaux des sens ne sont qu'un chiffre obscur.
Leur témoignage ondoie, et leur félon service,
Loin d'éclairer, voilait l'assuré fondement
Où pourra la pensée asseoir son édifice,
Tour de bronze où le Vrai veille éternellement.
Quelle étrange odyssée avait longtemps fournie
La raison confiante en ces traîtres appuis,
Quand, douteur par prudence et croyant par génie,
Descartes proclama : " Je pense, donc je suis ! "
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Je lui ferai des vers
Je lui ferai des vers aimants,
Et, comme un lapidaire incliné sur sa meule
Se cache pour tailler ses plus purs diamants,
Je polirai tout bas ces vers pour elle seule,
Et nul ne les verra se former sous mon front,
Nul ne verra sur eux tomber des pleurs de femme,
Et ces choses se passeront
Hors du monde et très haut, de mon âme à son âme.
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** diane-eve.blo Sully Prudhomme
*** pgosse.com
**** thehoneygatherers.com
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