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Vie et Opinions philosophiques d'un chat
Je suis né dans un tonneau au fond d'un grenier à foin. La lumière tombait sur mes paupières fermées, en sorte que, les huit premiers jours, tout me parut couleur de rose.
Le huitième, ce fut encore mieux : je regardai et vis une grande chute de clarté sur l'ombre noire, la poussière et les insectes y dansaient. Le foin était chaud et odorant, les araignées dormaient pendues aux tuiles, les moucherons bourdonnaient. Tout le monde avait l'air heureux, cela m'enhardit, je voulus toucher la plaque blanche où tourbillonnaient ces petits diamants et qui rejoignait le toit par une colonne d'or.
Je roulai comme une boule, j'eus les yeux brûlés, les côtes meurtries, j'étranglai et je toussai jusqu'au soir.
maintenantunehistoire.fr II
Mes pattes étant devenues solides, je sortis et fis bientôt amitié avec une oie, bête estimable, car elle avait le ventre tiède. Je me blottissais dessous, et pendant ce temps ses discours philosophiques me formaient.
Elle disait que la basse-cour était une république d'alliés, que le plus industrieux, l'homme, avait été choisi pour chef et que les chiens, quoique turbulents, étaient nos gardiens. Je pleurais d'attendrissement sous le ventre de ma bonne amie.
Un matin la cuisinière approcha d'un air bonasse, montrant dans la main une poignée d'orge. L'oie tendit le cou, que la cuisinière empoigna, tirant un grand couteau. Mon oncle, philosophe, alerte, accourut et commença à exhorter l'oie, qui poussait des cris inconvenants :
- Chère soeur, disait-il, le fermier, ayant mangé votre chair, aura l'intelligence plus nette et veillera mieux à votre bien-être. Et les chiens, s'étant nourris de vos os, seront plus capables de vous défendre.
Là-dessus l'oie se tut, car sa tête était coupée, et une sorte de tuyau rouge s'avança hors du cou qui saignait. Mon oncle courut à la tête et l'emporta prestement. Pour moi, un peu effarouché, j'approchai de la mare de sang et, sans réfléchir, j'y trempai ma langue. Ce sang était bien bon, et j'allai à la cuisine pour voir si je n'en aurai pas d'avantage.
III
Mon oncle, animal fort expérimenté et très vieux, m'a enseigné l'histoire universelle.
Taine
à suivre........
A l'origine........
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