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L'instinct
Le vieil homme, qui est revenu de tout,
du seuil de sa maison, sous le tiède soleil,
Sur sa bouche édentée les mouches se poursuivent.
Sa femme est morte il y a très longtemps. Elle aussi,
comme toutes les chiennes, ne voulait rien savoir,
mais elle avait l'instinct. Le vieil homme flairait,
- pas encore édenté - la nuit venait,
ils se mettaient au lit. C'était beau l'instinct.
Ce qui est bien chez le chien, c'est qu'il est vraiment libre,
Du matin jusqu'au soir, il vadrouille dans la rue ;
et il mange, ou il dort, ou il monte les chiennes :
il n'attend même pas qu'il fasse nuit. Sa raison
c'est son flair, et les odeurs qu'il sent sont à lui.
Le vieil homme se souvient qu'il a fait ça une fois skyrock.com
dans un champ de blé, en plein jour, comme un chien.
La chienne, il ne s'en souvient plus, mais il se rappelle
le grand soleil d'été, la sueur et l'envie de ne plus s'arrêter
C'était comme dans un lit. S'il avait encore l'âge,
il voudrait ne faire ça que dans un champ de blé.
Une femme descend dans la rue et s'arrête pour voir ;
passe un prêtre qui se tourne. Sur la place publique,
on peut faire ce qu'on veut. Et la femme elle-même
qui, à cause de l'homme, n'ose se retourner, s'arrête.
Un enfant, seulement, ne tolère pas le jeu
et il fait pleuvoir des pierres. Le vieil homme s'indigne.
Pavese
( 1933 )
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