lundi 17 juillet 2017

Au sud de la fente 1/2 Jack London ( Nouvelle EtatsUnis )

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                                              Au Sud de la Fente

            Le San Francisco d'antan, c'est-à-dire le San Francisco d'hier encore, celui d'avant le tremblement de terre, était partagé en deux par la Fente. Celle-ci une crevasse métallique qui partageait le milieu de Market Street, laissait échapper le bourdonnement d'un câble interminable, infini, accroché selon les besoins aux voitures qu'il tractait dans un sens et dans l'autre. En réalité, il y avait deux fentes, mais dans la langue expéditive de l'Ouest, on gagnait du temps en les appelant, ainsi que bien d'autres choses qu'elles symbolisaient, " La Fente ". Au nord de la Fente se trouvaient les théâtres, les hôtels, les grands magasins, les banques et les sièges d'entreprises respectables. Au sud se massaient les usines, les taudis, les blanchisseries, les ateliers, les fabriques de chaudières et les logements ouvriers.
            La Fente était la métaphore du clivage entre les classes sociales et aucun homme ne la traversait, dans les deux sens, avec plus d'aisance que Freddie Drummond. Il s'était fait une spécialité de vivre dans les deux mondes et il y vivait parfaitement bien. Freddie Drummond était professeur au département de sociologie de l'université de Californie, et c'est en tant que tel qu'il traversa pour la première fois la Fente, qu'il vécut six mois dans le grand quartier ouvrier et écrivit " L'ouvrier non qualifié ", livre qui fut unanimement loué comme une adroite contribution à la littérature progressiste et une réplique imparable à la littérature contestataire. Politiquement et économiquement, l'ouvrage était en tout point orthodoxe. Les présidents des grandes compagnies ferroviaires achetèrent des tirages entiers pour les distribuer à leurs employés. L'Association des Industriels, à elle seule, en distribua cinquante mille exemplaires. En un sens c'était un livre presque aussi immoral que le très, et tristement célèbre, Message à Garcia, tandis que sa louange pernicieuse de l'épargne et de l'absence d'ambition le rapprochait de Mrs Wiggs du carré de chou.
Image associée  *         Au commencement, Freddie Drummond éprouva toutes les difficultés du monde à se mêler à la population des travailleurs. Il n'était pas accoutumé à leurs moeurs et eux ne l'étaient certainement pas aux siennes. Ils se méfiaient de lui : il n'avait pas d'expérience, ne pouvait faire état d'aucun travail antérieur, il avait les mains lisses et son exceptionnelle courtoisie n'augurait rien de bon. Dans un premier temps, Freddie Drummond pensa jouer le rôle d'un Américain indépendant et libre qui avait choisi de travailler avec ses mains, sans donner d'explications. Cependant il fut prompt à se rendre compte que cela ne marcherait pas. Au début les ouvriers l'acceptèrent, de façon tout à fait temporaire, comme un excentrique. Un peu plus tard, comme il commençait à prendre ses repères dans leur monde, il glissa insensiblement vers un rôle mieux adapté : celui d'un homme qui a connu des jours meilleurs, bien meilleurs, puis a subi un revers du destin, mais ne va pas tarder à rebondir.
            Il apprit beaucoup durant cette période et il tira de cet  apprentissage de nombreuses conclusions, souvent erronées, que l'on peut trouver dans les pages de son Ouvrier non qualifié. Il prit néanmoins des précautions avec la sage prudence des hommes de son milieu, qualifiant ses conclusions de provisoires. L'une de ses premières expériences eut lieu à la grande conserverie Wilmax où il fut affecté au travail à la pièce pour fabriquer de petites caisses de rangement. Une fabrique de boîtes fournissait les pièces, et tout ce que Freddie Drummon avait à faire était de les assembler pour leur donner la forme souhaitée et d'enfoncer des clous avec un petit marteau.
            Ce n'était pas du travail qualifié, c'était du travail à la pièce. Les travailleurs ordinaires de la conserverie gagnaient un dollar et demi par jour. Freddue Drummond découvrit que les hommes avec qui il travaillait gagnaient, sans se presser, un dollar et soixante quinze cents par jour. Au troisième jour il était capable de faire de même. Cependant il avait de l'ambition. Son but n'était pas de lambiner et, comme il était plus habile et vigoureux que la moyenne, au quatrième jour il gagna deux dollars et demi. Les ouvriers le regardèrent de travers et firent des commentaires spirituels dans un argot qu'il ne comprenait pas, où il était question de fayoter auprès du patron, d'accélérer la cadence et de ménager sa monture. Il était stupéfait de les voir traîner pour du travail à la pièce, et parvint à la conclusion que l'ouvrier non qualifié est intrinsèquement paresseux et entreprit le jour suivant de produire pour trois dollars de boîtes.                          forum-lozere.boardsmessage.com
Résultat de recherche d'images pour "san francisco tremblement de terre 1900"            Ce soir-là, en sortant de la conserverie, il fut pris à partie par ses collègues très en colère qui s'exprimaient dans un argot incohérent. Il ne comprenait pas le motif de leur action. Celle-ci fut énergique. Quand il refusa de ralentir le rythme de son travail et se lança dans une tirade sur la liberté de contrat, l'esprit d'indépendance américain et la dignité du labeur, ils entreprirent de compromettre sa capacité à accélérer la cadence. La bataille fut féroce car Drummond était vigoureux et athlétique, mais la foule finit par lui sauter sur les côtes, lui marcher sur le visage et lui écraser les doigts, si bien qu'il dut passer une semaine au lit avant de pouvoir chercher un autre emploi. Tous ces événements sont dûment consignés dans son premier ouvrage au chapitre " La Tyrannie du labeur".
            Un peu plus tard, alors qu'il travaillait dans un autre compartiment de la conserverie Wilmax comme assembleur de fruits, au milieu des femmes, il tenta de porter les boîtes de fruits deux par deux, ce qui fut promptement reproché par les assembleuses. Cela relevait indubitablement de la fainéantise de leur part. Néanmoins, il jugea qu'il n'était pas là pour changer les modalités de travail, mais pour les observer. Il transporta donc les boîtes une par une à partir de ce moment, et il étudia l'art du tirage au flanc de si près qu'il lui dédia un chapitre spécial de son livre, les derniers paragraphes étant consacrés à des conclusions provisoires.
            Au long de ces six mois il occupa de nombreux emplois et devint l'imitation parfaite d'un véritable travailleur. Il était naturellement doué pour l'étude du langage et il consigna ses observations dans des carnets, apprenant méthodiquement l'argot des ouvriers jusqu'à le parler de manière tout à fait intelligible. Cette maîtrise linguistique lui permit aussi de comprendre plus intimement leurs processus mentaux, et ainsi de réunir des données pour le chapitre d'un futur ouvrage qu'il comptait intituler " Synthèse sur la psychologie des classes laborieuses ".
            Avant de revenir à la surface après ce premier plongeon dans les bas-fonds de la société, il découvrit qu'il était bon acteur et faisait preuve d'un tempérament malléable. Il était stupéfait de sa propre souplesse. Une fois qu'il eut acquis la maîtrise du langage des prolétaires et surmonté un certain nombre de réticences qui l'entravaient, il constata qu'il était capable de pénétrer dans n'importe quel lieu de la vie populaire et de s'y sentir à l'aise, comme chez lui. Ainsi qu'il le formula dans la préface de son deuxième ouvrage, Le Travailleur, il essayait de connaître véritablement les ouvriers, et le seul moyen d'y parvenir était de travailler à leur côté, de manger leur nourriture, de dormir dans leur lit, de s'amuser de leurs divertissements et de partager leurs pensées et sentiments.
            Freddie Drummond n'était pas un grand penseur. Il n'avait aucune confiance dans les nouvelles théories. Toutes ces normes et valeurs étaient conformistes. Sa thèse qui portait sur la Révolution française était connue dans les annales universitaires, non seulement pour sa précision méticuleuse et exhaustive, mais pour le fait qu'il s'agissait du pavé le plus aride, le plus formel et le plus conventionnel jamais écrit sur le sujet. Il était d'un naturel très réservé et sa rigidité était aussi grande qu'inflexible. Il avait peu d'amis.  Il était trop peu démonstratif, trop froid pour cela. On ne lui connaissait pas de vices et personne ne lui avait découvert de tentations secrètes. Il détestait le tabac, abhorrait la bière et ne buvait jamais rien de plus fort qu'un verre de vin léger, de temps en temps, au dîner.     simuseum.org
Image associée            Lorsqu'il était en première année à l'Université, ses camarades au tempérament plus sanguin l'avaient surnommé "  La Glacière." Maintenant qu'il était professeur son sobriquet était " La Chambre froide ". Il n'avait qu'un regret, qu'on l'appelât Freddie. Ce surnom lui avait été attribué alors qu'il était arrière dans l'équipe de football de son université, et son esprit guindé ne s'en était jamais remis. Il serait Freddie à jamais, sauf dans les documents officiels et il entretenait des visions cauchemardesques d'un futur où il serait connu parmi les siens comme " Le vieux Freddie ".
            Il était très jeune pour être docteur en sociologie, car il n'avait que vingt-sept ans, et il paraissait plus jeune encore. D'apparence et d'allure c'était un universitaire bien charpenté, au visage lisse et au caractère aimable, soigné, simple et sain, réputé pour être un excellent athlète et posséder une grande connaissance de la culture ennuyeuse du genre respectable. Il ne parlait jamais de son travail en-dehors des cours et des réunions avec ses collègues, du moins au début de sa carrière, car plus tard, ses livres lui ayant apporté une embarrassante notoriété, il consentit à lire, de temps à autre des articles ou essais devant les membres de certaines sociétés savantes en lettres ou économie.
            Il faisait tout bien, trop bien même, dans sa tenue comme dans son comportement, il ne pouvait être que correct. Pour autant, il était loin d'être un dandy. C'était un universitaire et, par sa façon de se vêtir et ses manière, il ressemblait comme deux gouttes d'eau au type d'individu qui, depuis quelques années, est fabriqué si généreusement par nos institutions d'enseignement supérieur. Sa poignée de main offrait une agréable fermeté, ses yeux d'un bleu froid exprimaient une sincérité convaincante, sa voix forte et masculine à l'élocution claire plaisait à l'oreille. Le seul défaut de Freddie Drummond était sa rigidité. Il ne se détendait jamais. A l'époque où il jouait au football, plus la tension du jeu augmentait, plus il était concentré. Il avait la réputation d'un bon boxeur, mais on le considérait comme un automate doté de la précision inhumaine d'une machine lorsqu'il s'agissait de jauger la distance, choisir l'instant où frapper, se défendre, faire une parade ou pratiquer l'esquive. Il encaissait rarement beaucoup de coups et n'abusait pas de sa force non plus. Il était trop intelligent maître de lui pour frapper un coup un peu plus fort qu'il ne l'aurait voulu. Pour lui la boxe était une question d'exercice. Elle le maintenait en bonne condition physique.
            Au fil du temps Freddie Drummond se surprit à traverser plus souvent la Fente et à se perdre dans le quartier au sud de Market Street. Il y passait l'intégralité de ses vacances d'été et d'hiver et, qu'il y restât une semaine ou deux jours, le temps passé là lui était toujours agréable et profitable. Il y avait tant de données à recueillir ! Son troisième livre, " Les Masses et leurs maîtres ", devint un manuel de référence dans les universités américaines et, avant même d'y avoir réfléchi, il s'était attelé à la rédaction d'un quatrième ouvrage " La Tromperie des fainéants ".         lefigaro.fr 
Image associée            Quelque part dans la construction de son personnage se trouvait un noeud, une anomalie. Peut-être était-ce le rejet de son milieu et de son éducation, ou bien celui de son lignage, car ses aÎeux avaient de tout temps été des personnes cultivées, toujours est-il qu'il prenait plaisir à se trouver dans le monde des prolétaires. " La Chambre froide " auprès des siens, mais au sud de la Fente, un homme qui pouvait boire, fumer, jurer et se battre et qui jouissait d'une grande popularité. Tout le monde appréciait Bill et plus d'une fille tentait de gagner ses faveurs. Au début il n'était qu'un bon acteur, mais avec le temps, la simulation était devenue pour lui une seconde nature. Il ne jouait plus un rôle. Il en était même venu à aimer les saucisses, les saucisses avec du bacon qui, dans son milieu, étaient considérées comme un plat des plus répugnants.
            Ce qu'il avait entrepris par nécessité il le poursuivit par plaisir. Il se prit à redouter le moment du retour à son amphithéâtre et à sa rigidité coutumière. Il découvrit aussi qu'il attendait avec impatience l'heure où il pouvait à nouveau franchir la Fente, se laisser aller et faire les quatre cents coups. Il n'était pas mauvais mais en tant Big Bill Totts il participait à de nombreuses frasques qui n'auraient jamais été permises à Freddie Drummond et qui, en outre, ne lui auraient pas paru désirables. C'était l'aspect le plus étrange de sa découverte. Freddie Drummond et Big Bill Totts étaient totalement différents. Les désirs, goûts et inclinations de l'un étaient à l'opposé de de ceux de l'autre. Bill Totts pouvait se tourner les pouces en toute bonne conscience alors que Freddie Drummond condamnait le tirage au flanc comme une action perverse, criminelle et antiaméricaine qu'il dénonçait dans des chapitres entiers de ses livres. Freddie n'aimait pas danser, mais Bill ne manquait jamais une soirée à l'un des dancings locaux comme le Magnolia, le Western Star ou l'Elite. Il gagna d'ailleurs une imposante coupe en argent haute de 30 pouces au concours du meilleur déguisement lors du grand bal masqué annuel de la confrérie des bouchers et charcutiers. Bill Totts aimait les filles et les filles l'aimaient, alors que Freddie Drummond jouait délibérément les ascètes, ne cachait pas son opposition au suffrage des femmes et, secrètement, condamnait sans scrupules l'éducation mixte.
            Freddie Drummond changeait de manières en même temps que d'habit, et cela sans effort. Quand il entrait dans la petite pièce obscure où il accomplissait sa transformation, son port était un rien raide. Il se tenait trop droit, les épaules un peu trop en arrière, et son visage était grave, presque dur, pour ainsi dire sans expression. Cependant quand il apparaissait dans les habits de Bill Totts il était devenu un autre. Bill ne manquait pas de tenue, mais toute sa silhouette s'assouplissait et devenait séduisante. Le son même de sa voix était différent, son rire était fort et jovial, ses paroles devenaient plus familières et des jurons lui échappaient naturellement. Par ailleurs Bill Totts ne détestait pas les sorties tardives et parfois, dans des caves, il lui arrivait de s'engager dans des rixes amicales. Lors de pique-niques dominicaux ou en revenant d'un spectacle, il glissait avec aisance ses bras autour de la taille des femmes et faisait preuve d'un esprit aussi agile qu'agréable dans le badinage que l'on attendait d'un brave garçon de son milieu.                         pinterest.com 
Image associée            Bill Totts était si parfaitement lui-même, un travailleur et un honnête citoyen si authentique du quartier au sud de la Fente, qu'il était tout aussi conscient de la lutte des classes que ses camarades et que sa haine des briseurs de grève surpassait même celle d'un syndicaliste loyal ordinaire. Durant la grève des dockers Freddie parvint miraculeusement à se tenir à l'écart de cette étrange posture et à observer d'un oeil critique Bill Totts qui frappait d'une manière comique sur des jaunes. Bill était en effet un membre cotisant du syndicat des dockers et il se sentait indigné, légitimement, par les faux frères de sa profession. Big Bill Totts était si grand et si doué pour le combat qu'il se trouvait en première ligne lorsque des échauffourées se produisaient. A force de feindre d'être outragé à travers son alter-ego, Freddie Drummond le devint vraiment, et ce n'est que lorsqu'il regagnait l'atmosphère compassé de l'Université qu'il pouvait, la tête froide, tirer des conclusions de ses expériences et les coucher sur le papier, en bon sociologue. Que Bill manquât du recul qui lui permettrait de s'élever au-dessus des conflits de classe, Freddie en était tout à fait conscient, mais Bill lui-même, ne pouvait s'en rendre compte. Quand un briseur de grève prenait son travail il voyait rouge et ne voyait pas plus loin. C'était Freddie Drummon aux vêtements et au comportement impeccables, assis à son bureau ou devant ses étudiants du cours " Sociologie 17 ", qui portait un regard lucide sur Bill Totts, sur son environnement et sur l'ensemble du conflit entre syndicalistes et briseurs de grève, dans le rapport qu'il entretenait avec la prospérité de l'économie américaine et la compétition pour obtenir les marchés mondiaux. Bill Totts n'était pas capable de voir au-delà de son prochain repas et du combat de boxe du lendemain soir au Gaiety Athletic Club.
            C'est en rassemblant des données pour son livre Les Femmes et le travail que Freddie perçut le premier signal du danger qu'il courrait. Il était trop habile à vivre dans les deux mondes. Cette dualité qu'il avait développée était après tout très instable et, lorsqu'il méditait assis dans son bureau, il comprit que cela ne pouvait durer. C'était, en vérité, une phase de transition et il vit que s'il poursuivait ainsi il devrait inévitablement abandonner l'un des deux mondes. Il ne pouvait pas continuer à vivre dans les deux. Alors qu'il contemplait la rangée de livres élégamment alignés sur la plus haute étagère de sa bibliothèque tournante, ses propres livres, depuis sa thèse jusqu'au dernier, il décida que ce monde-ci était celui auquel il demeurerait fidèle. Bill Totts avait bien rempli sa fonction, mais il était devenu trop dangereux de l'avoir pour complice. Bill Totts allait devoir disparaître.
            A l'origine de la peur de Freddie Drummond il y avait Mary Condon, présidente de la section n° 974 de la Fédération Internationale des gantiers. Il l'avait vue, la première fois, depuis la galerie des spectateurs lors du congrès annuel de la Fédération des travailleurs du Nord-Ouest, et donc à travers les yeux de Bill Totts, sur qui la jeune femme avait produit la plus favorable impression.
Résultat de recherche d'images pour "greves sanfrancisco 1906"  **         Elle n'était, en revanche, pas du tout le genre de Freddie. Peu importait que sa silhouette fut splendide, élégante et musclée comme une panthère, qu'elle eut de merveilleux yeux noirs qui pouvaient se remplir du feu de la colère comme d'une espièglerie amoureuse. Il détestait les femmes à la vitalité trop exubérante, les femmes qui témoignaient d'un manque de... eh bien de réserve. Freddie Drummond acceptait la doctrine de l'évolution parce qu'elle était presque universellement admise par les universitaires, et il ne niait pas que l'homme eût gravi l'échelle des espèces depuis la fange ignoble où se vautraient des créatures inférieures et monstrueuses. Il n'était toutefois pas fier de cette généalogie et préférait ne pas y penser. C'est sans doute pour cette raison qu'il entretenait sa rigidité inflexible et en prêchait aux autres les vertus et préférait les femmes de son type, celles qui pouvaient se dégager de cette regrettable ascendance bestiale et, à force de discipline et d'empire sur soi, souligner l'étendue du gouffre qui les séparait de leurs lointains ancêtres.
            Pour Bill Totts ces considérations n'existaient pas. Il avait été attiré par Mary Condon à l'instant où ses yeux s'étaient posés sur elle et il s'était promis sur-le-champ de découvrir qui elle était. La deuxième fois qu'il la vit, tout à fait par hasard, il conduisait une wagonnette pour Pat Morrissey. Il s'était rendu dans une pension de Mission Street où il avait été appelé pour chercher une malle et l'emmener dans un garde-meubles. La fille de la propriétaire l'avait conduit dans la petite chambre dont l'occupante, une gantière, venait de partir pour l'hôpital, ce que Bill ignorait. Il se pencha, souleva un côté de la malle volumineuse, la hissa sur son épaule et, non sans difficulté, se remit debout, le dos tourné vers la porte. Il entendit à cet instant une voix de femme.
            - Vous appartenez au syndicat ? lui demanda-t-elle.

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                                                                         à suivre......... 
                                                                                         2 suite et fin

            - Eh ! Qu'est-ce que ça peut vous..........

                                                                                       Jack London

mercredi 12 juillet 2017

Sonnet 59 - 10 Shakespeare ( Poèmes Angleterre )

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                                                   Sonnet 59

            Est-il vrai qu'il n'est rien de neuf ? Que tout
            A déjà existé ? Bien naïf notre esprit
            Qui s'échine à créer mais pour ne mettre au monde
            Qu'une seconde fois l'enfant d'autres époques  !

            Ah, si le souvenir, retraversant cinq cents
            Soleils antérieurs, me montrait ton image
            Dans quelqu'un des vieux livres où la pensée
            Commença d'être dite avec des lettres !

            Je découvrirais                    là ce qu'a pu dire
            De l'harmonie miraculeuse de ton corps
            Le monde ancien. Valait-il plus, ou moins ?
            Ou les âges s'engrènent-ils sans que rien change ?

            Ah, beaux esprits de ces temps révolus,
            Vous admiriez des êtres de moindre lustre !


                                                                           William Shakespeare


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                                                 Sonnet 10
                                                                                                            pinterest.com         
Image associée            Honte, honte ! Consens que tu n'aimes personne,
            Toi qui es avec toi si imprévoyant !
            C'est vrai que beaucoup t'aiment, je te l'accorde,
            Mais il est clair que toi, tu n'as pas d'amour.
           
           Si débordant es-tu de haine meurtrière
           Qu'à t'armer contre toi tu n'hésites pas
           Et, de ce beau logis, recherches la ruine
           Quand tout ton soin devrait l'entretenir.

            Oh, change d'intention, que je puisse changer d'avis !
            Faudrait-il mieux loger la haine que l'amour ?
            Sois comme tu parais, gracieux et tendre. Prouve
            Qu'avec toi-même au moins tu peux être tendre,

            Et pour l'amour de toi procrée un autre toi,
            Pour qu'en toi ou par toi la beauté vive encore.


                                                                                  Shakespeare

Papiers collés 3 Georges Perros ( Flash France )

Papiers collés (Tome 3)

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                                             Papiers collés
                                                          ( extraits )

            Toute femme ne connaît et ne peut connaître qu'une fois Don Juan. Don Juan, image concrète d'un rêve. Si D. J. a de l'esprit, il n'est pas D. J.


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            Vous avez failli vous faire écraser. A un millimètre près. Votre coeur a battu. Vous avez été bouleversé. Eh bien, pour recréer ce langage ce fait divers raté, il faut du génie. Toute idée en nous est ainsi miraculée. C'est dans la mesure extrême où elle a frôlé la mort qu'elle se signale, exige une conservation.


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                                                                                                                     fanpop.com
Résultat de recherche d'images pour "van gogh"             J'aurai beaucoup plus souffert - au sens amoureux - par les hommes que par les femmes. Tous les hommes que j'ai aimés, c'était avec ce qu'à défaut d'autres mots, je dois bien appeler ma sensibilité. Avec une femme on rompt, et la souffrance monte en pointe, atteint un sommet. Mais le lendemain il n'y paraît plus. Seul le souvenir... plutôt d'essence nostalgique, ce qui constitue un genre de bonheur du malheur. Mais avec les hommes on traîne. Rien à se dire, rien à se faire. Et cependant la perpétuelle menace de les perdre. Une femme vous oublie. Un homme vous hait, dans la mesure où il est obligé de vous annuler de lui-même pour continuer sa quête.


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            Le premier homme qui a pensé au suicide a humilié la vie pour l'éternité. La vie est une grande vexée. 


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            Molière a besoin de notre présence pour être admirable. Shakespeare s'en passe.


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   inconnus_dans_maison_04         Si le comédien s'appuie, pour incarner son personnage, sur la logique conventionnelle et consentie, s'il le ramène dans la vie en tentant de copier très exactement tel et tel tics, maintes façons d'être du caractère qu'il croit propre à la fiction qu'il se propose d'animer, le voilà dès l'abord terriblement limité. Et insuffisant. Seule la transcendance peut donner vie à un héros digne de ce nom. Les bons comédiens - Fresnay - sont d'excellents psychologues à l'état primaire. Les grands acteurs devinent, opèrent par intuition. Osent.

                                                                         Raimu 
                                                                                     in Théâtre Papiers collés


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            La poésie donne le plaisir de ne pas avoir à comprendre. La compréhension elle-même est charmée, remet à plus tard. Car on ne comprend pas plus la prose digne de ce nom que la poésie, mais on s'obstine. La poésie libère la mémoire, s'apprend par coeur, se lit moins qu'elle ne se boit. Lire un poème pour la première fois, un grand poème, c'est une corvée, un indispensable travail. Le poème se laisse comprendre plastiquement, est fait d'ombre et de lumière. Difficiles à dégager. On se laisse faire par un poème, et un vers appris par coeur, sans le vouloir, c'est le signalement même de notre mémoire.


                                                               extrait de Papiers collés

                                                                                Georges Perros


            

samedi 8 juillet 2017

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 79 Samuel Pepys ( Angleterre Journal )

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                                                                                                                          1er Octobre 1662

            Levé, l'esprit à peu près en repos quant à mes comptes et autres affaires. Allai dans ma maison où je mis mes ouvriers à l'ouvrage, puis à Deptford pour la même chose, et retour, et tout l'après-midi avec mes ouvriers et ma femme à arranger une chambre pour que nous y dormions. Le soir examinai quelques papiers de Brampton pour l'audience. J'attends des nouvelles incessamment. Cela fait, avec ma femme au lit. La première fois que je couche ici depuis deux mois, ce qui me rend heureux, et la chambre telle qu'elle est maintenant me plaît tellement que ma seule crainte c'est de ne pas la conserver. Mais j'ai bon espoir, car je serais profondément contrarié de la perdre.


                                                                                                                         2 octobre

            Levé et réunion au bureau jusqu'à midi. Puis dîner avec Mr Moore. Examinai ensuite mes papiers pour Brampton, tâche bien nécessaire, mais les choses étaient bien moins satisfaisantes que je l'eusse souhaité, je le crains. Mais les choses sont comme elles sont et non comme je le voudrais. Lui parti j'allai retrouver mes ouvriers. Le soir, en voiture, à Whitehall, pris Mr Moore et le déposai chez milord où je me rendis aussi. Apprenant qu'on donnait la comédie au Cockpit, et que milord Sandwich, arrivé à Londres hier soir, s'y trouvait, je m'y rendis. Et par chance je suivis trois ou quatre messieurs que l'on conduisit à une petite porte privée dans un mur, et me glissai ainsi dans un espace étroit et arrivai dans une des loges voisines de celle du roi et de la reine, sans pouvoir les voir, mais bon nombre de dames élégantes qui, pourtant ne sont pas aussi belles que je le croyais autrefois, si ce n'est qu'elles sont élégamment vêtues. Nous avons vu Le Cardinal, tragédie que je ne connaissais pas et où il n'y a pas grand chose. Ceux qui étaient entrés avec moi étaient tous des Français et ne connaissaient pas l'anglais, mais, bon Dieu ! comme ils s'amusaient à questionner une jolie femme qui les accompagnait et qui parlait les deux langues et leur racontait ce que disaient les acteurs. De là chez milord où je fus reçu. Restai une demi-heure dans son cabinet à parler de certaines de mes affaires et des siennes. Puis au lit avec Mr Moore dans la chambre qui est au-dessus de celle de milord.


                                                                                                              3 octobre
                                                                                              virginia-anthology.org 
Résultat de recherche d'images pour "meuble samuel pepys"            Levé et sans prendre congé de milord sortis de bonne heure et rentrai à pied en m'arrêtant chez mon frère et dans l'enclos de Saint-Paul, mais n'achetai rien à cause de mon serment, quoique j'en eusse grande envie.
            A mon bureau et avec mes ouvriers jusqu'à midi, puis dînai de harengs avec ma femme, les premiers que j'ai mangés cette année, puis de nouveau avec mes ouvriers. Au bout d'un moment arrive un homme du monde qui veut parler à ma femme. Je découvris que c'est quelqu'un qui a été fort poli avec elle lors de son retour de la campagne, je lui manifestai donc beaucoup de respect. Je l'ai trouvé fort intelligent et suis resté à parler avec lui un grand moment.
            Lui parti retournai à mes ouvriers et dans la soirée arrive le capitaine Ferrer qui resta un grand moment et me raconta comment il avait été blessé à la main en se querellant avec un des valets de pied de milord. Il me raconta aussi l'impertinence et le mal qu'avait fait Ned Pickering à la campagne dans les rapports entre milord et presque tous ses domestiques par ses critiques. Ce qui me contrarie, car c'est une grande honte pour milord que cet homme soit toujours aux yeux de tous aussi intime avec lui. Il m'apporte une lettre de mon père qui fixe au 13 la date de l'audience à Brampton. Mais je m'aperçois qu'il a gardé cette lettre dans sa poche depuis trois jours, si bien que si l'audience avait lieu plus tôt j'aurais pu être lésé. C'est donc une grande sottise d'envoyer une lettre d'affaires pressée par l'intermédiaire d'un ami. Lui parti à mon bureau jusqu'à l'heure du coucher, car c'est maintenant mon habitude depuis le retour de ma femme, de passer trop de temps avec elle et mes ouvriers dans la journée et de faire mon travail de bureau le soir, ce qui ne devra pas être quand les travaux seront terminés. Tard ce soir on m'avise que Mr Dickons, le négociant, est mort soudainement cet après-midi, de ce que sa fille, ma Morena, malade depuis longtemps est considérée comme perdue par les médecins. J'en suis fort triste pour tous deux.
            Puis rentrai, et au lit.


                                                                                                                 4 octobre 1662

            A mon bureau le matin ( ma femme me fait rester couché longtemps le matin ) et réunion jusqu'à midi. Dînai à la maison et après un petit moment passé avec mes ouvriers à mon bureau jusqu'à 9 heures du soir. J'examinai, entre autres, les circonstances de la perte du Satisfaction qui a sombré l'autre jour sur la côte de Hollande par la négligence du pilote. Et puis j'écrivis une lettre à mon père, et à mon frère qui est à Banbury avec sa maîtresse, et signalé mon intention d'être à Brampton la semaine prochaine. Puis rentrai et au lit.


                                                                                                                 5 octobre
   abebooks.co.uk                                                                                            Jour du Seigneur
Résultat de recherche d'images pour "meuble samuel pepys"            Fait la grasse matinée à causer avec ma femme. Nous sommes querellés à propos de ma servante Sarah que ma femme voudrait chasser, alors que je la crois aussi bonne domestique qu'aucune autre que nous ayons eue. Mais il semble que ma femme en voudrait une qui sache bien coiffer. Nous avons fini par nous réconcilier.
            Je fus à l'église. Aujourd'hui le pasteur a fait lire quelqu'un en surplis. J'imagine qu'il va lui aussi en porter par la suite, car il est aussi rusé qu'aucun de ses confrères. Dînai avec ma femme, puis recommençai à causer à l'étage principalement sur les leçons de danse qu'elle doit prendre en prévision de son séjour à la campagne l'année prochaine, ce à quoi je consens.
            Puis à l'église pour un sermon ennuyeux, puis chez Tom pour voir comment vont les choses pendant qu'il est à la campagne, puis rentrai et dans la chambre de ma femme jusqu'à l'heure du coucher à causer. Puis à mon bureau à me préparer à me mettre au service chez le Duc demain matin, et rentrai et au lit.


                                                                                                                6 octobre

            Avec sir William Penn de bonne heure par le fleuve à St James où était Mr Coventry. Trouvant le Duc au lit et indisposé nous ne restâmes pas mais allâmes à Whitehall où nous prîmes un canot et nous rendîmes à Woolwich. En chemin Mr Coventry nous raconta qu'il y a peu, quand on s'enquit des intempéries de la maison du Duc Mr biggs, son intendant, fut trouvé fautif et chassé de son emploi. Puis nous commençâmes à lire un livre que je vis l'autre jour chez milord Sandwich, destiné au feu roi, élégamment relié, un traité sur le profit que les Hollandais tirent de nos pêcheries, mais, alors que j'en attendait beaucoup, je m'aperçois que c'est un livre fort sot, bien qu'il contienne quelques bonnes choses, il est si plein de répétitions qu'il nous lassa.
            A Woolwich nous fîmes l'appel de l'arsenal puis allâmes dîner au Cerf. Puis à la corderie où je sais que je contrariai sir William Penn en me montrant si bien au courant, davantage je crois que lui, des questions de chanvre. Puis à Deptford pour certaines affaires et réveiller les officiers, puis à pied à Rotherhite, de là déposant sir William Penn à la Tour, à Whitehall avec Mr Coventry, puis au logis de milord Sandwich. Mais milord était absent, il était ce soir à un bal avec le roi et milady Castlemaine dans l'hôtel voisin. Mais, à mon grand regret, j'apprends que Mr Moore est tombé fort malade à la Garde-Robe cet après-midi, ce qui me tracasse fort, aussi bien pour lui que pour moi, à cause des questions juridiques dont il s'occupe pour mon compte et aussi celui de milord. Aussi je fus par le fleuve, bien qu'il fût tard, à la Garde-Robe. Je le trouve au lit fort abattu, avec une forte fièvre. Il ne me parut pas opportun de rester, je le quittai et rentrai à pied. Et là, fatigué, fus souper, puis le barbier. Quand il eut fini, à mon bureau pour écrire mon journal d'aujourd'hui, et à la maison, et au lit.


                                                                                                             7 octobre 1662

            Au bureau toute la matinée, dînai à la maison avec ma femme. Ensuite, avec elle en voiture voir Mr Moore toujours malade. Je pris ses livres de comptes et nous parlâmes des affaires de milord et des miennes et comme Mr Battersby était là ils prirent note de ce que je lui avais payé les 100 livres que je lui avais empruntées, ce qu'ils reconnurent et promirent de m'envoyer mon billet. Puis par le fleuve avec Will Howe à Westminster où je restai un petit moment dans la Grand-Salle ( les parents de ma femme étaient sortis de sorte qu'elle revint bientôt ), puis en voiture chez milord où je laissai de l'argent pour que le capitaine Ferrer m'achetât deux cravates, puis à la nouvelle Bourse où, tandis que ma femme faisait des emplettes, je me promenai avec le Dr Williams en parlant de mon procès, puis je l'emmenai chez mon frère où je lui offris un verre de vin et nous nous séparâmes. Rentrai en voiture avec ma femme. Sir John Mennes et sir William Batten étant revenus de faire la paie à Chatham, j'allai les voir par politesse. Et rentrai, et au lit.


                                                                                                             8 octobre
                                                                                                     london-footprints.co.uk
            Levé de bonne heure et par le fleuve chez milord Sandwich. Restai un moment dans sa chambre. Il me dit, entre autres à ma très grande joie, quelle obligation j'avais à l'égard du duc d'York qui, hier, lui dit qu'il le remerciait d'avoir fait entrer une personne dans la Marine, voulant dire moi, et bien d'autres éloges. Ce qui est le plus grand réconfort et le plus grand encouragement que j'aie jamais eus, et tout cela grâce à la bonté et à la perspicacité de Mr Coventry. J'en ai été immensément
heureux.
            Puis allai voir Mr Moore qui, je l'espère, va mieux, et à la maison dînai, tout l'après-midi occupé à mon bureau. Le soir retournai en voiture chez milord espérant lui parler, mais il est à Whithall avec le roi devant qui on présente ce soir le spectacle de marionnettes que j'ai vu cet été à Covent Garden. C'est là qu'on a apporté mon col de dentelle acheté et préparé par la femme du capitaine Ferrer, et je l'ai rapporté chez moi. Très distingué, il me coûte environ 3 livres, je lui ai donné 3 autres livres pour m'en acheter un autre. Je me vois obligé d'être bien mis, et c'est ce que je ferai pour ma lingerie, et le reste pourra être d'autant plus simple.
            Je restai là à jouer quelques airs nouveaux à deux parties avec William Howe. Milord ne revenant pas je rentrai à pied mon petit laquais tenant une torche. Mangeai un peu et au lit, l'esprit tout occupé d'arranger mes affaires pour mon voyage de demain afin qu'il ne se fasse rien de fâcheux en mon absence.
            Aujourd'hui sir William Penn m'a parlé de la part de sir John Mennes, pour me demander ma belle chambre et, à ma grande joie, c'est qu'il ne la réclame pas comme de droit, ce que je craignais fort. J'espère donc m'arranger avec lui pour cette chambre, car je n'y renoncerai pour rien au monde, même si je fais en sorte de lui donner une autre pièce en échange.


                                                                                                                  9 octobre

            Levé de bonne heure pour travailler, pour me préparer à mon voyage. Mais d'abord au bureau en réunion jusqu'à midi. Je leur ai dit adieu pour une semaine, ayant la permission du Duc, obtenue pour moi par Mr Coventry, que j'ai remercié pour ce que j'ai appris hier du Duc à milord Sandwich à mon sujet. Et il déclare si ouvertement l'affection et l'estime qu'il a pour moi, que j'ai l'esprit autant en repos, en ce qui concerne ma situation au bureau, que je puis le désirer.
            J'aurais dû aujourd'hui dîner chez sir William Penn d'un pâté de chevreuil avec mes collègues, mais je n'en trouvai pas le temps et envoyai chercher quelque chose à la maison. Entre une et deux heures je montai à cheval par la porte de derrière et, accompagné de mon commis Will, tous deux bien montés sur deux chevaux gris.
            Nous arrivâmes à Ware avant la nuit et résolûmes de continuer jusqu'à Puckeridge, malgré le mauvais état de la route, et le soir tombé avant notre arrivée, grâce à un groupe de voyageurs qui était devant nous, entre autres qui descendit à la même auberge que moi, le Faucon, qui s'appelait Mr Brian avec qui je soupai. C'était un homme agréable et un homme de sciences.
            Il me dit qu'on croit la reine enceinte, car les carrosses ont ordre de rouler très doucement dans les rues.
            Après souper nous payâmes la note de concert, puis il gagna sa chambre et moi mon lit, me sentant très bien. Mais mes pieds très serrés dans les bottes de cuir dur neuves me faisaient grand mal. Will coucha dans un autre lit dans la même chambre que moi.


                                                                                                                  10 octobre
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            Levé, et entre 8 et 9 à cheval. J'avais tant souffert hier de mes pieds tellement gonflés que je ne pus remettre mes bottes, ce qui me contraria très vivement. Je fus obligé de donner 4 shillings pour une paire de vieux souliers de l'hôte et allai à cheval en souliers jusqu'à Cambridge. Mais la route était si bonne qu'à part un peu de pluie j'arrivai sans encombre et descendis à l'Ours. Là, m'ayant aperçu dans la rue comme je passais dans la ville, mon cousin Angier vint me trouver. Il me fallut aller chez lui. Je trouvai le Dr Fairbrother, avec un bon dîner, une bourriche d'excellentes huîtres, une couple de homards et du vin. Mais surtout comme il me dit qu'il y a aujourd'hui assemblée générale pour l'élection de quelques officiers de l'Université, après le dîner il me trouve une robe, un bonnet et un chaperon et m'emmène aux écoles où Mr Pepper, précepteur de mon frère et aujourd'hui élu censeur, désigne un maître es arts pour me conduire dans l'hôtel du régent où je siégeai avec eux et votai en signant des papiers comme ceci : " Ego Samuel Pepys Magistrum Bernardum Skeltum ", et, ce qui est plus étrange, mon ancien condisciple et ami, et qui un peu plus tard me salua et avec qui nous causâmes " qui était l'autre taxatoribus de cette Académie des événements suivants dans le annum sequentem. " Je fis de même pour un certain Biggs comme autre taxateur et pour d'autres officiers comme le vice-censeur, Mr Covel, pour être l'adjoint de Mr Pepper et celui-là même qui m'avait fait entrer dans l'hôtel du régent.
            La séance levée par le vice-chancelier, je revins très content chez mon cousin Angier, fort satisfait d'avoir accompli cette tâche. Ce que je désirais depuis longtemps et pour quoi je n'aurais jamais trouver un moment où cela fût si facile.
            Puis à Trinity Hall où je restai un bon moment avec le Dr John Pepys qui me dit que son frère Roger a quitté la ville pour tenir une audience. Je fus donc forcé d'aller à Impington pour prendre conseil de mon vieil oncle et de son fils Claxton. Je soupai et parlai avec eux, mais pas de mes affaires jusqu'à ce qu'arrivât, après le souper, inopinément mon cousin Roger avec qui je m'entretins longuement. Il me donne de bons conseils mais me dit clairement que ce que j'ai de mieux à faire c'est de chercher un accommodement avec mon oncle Thomas, car nous n'avons pas le droit pour nous et ce serait folie de nous leurrer. Ce dont, bien que cela me tracassât grandement, je fus cependant satisfait, parce que c'était me dire ce sur quoi je pouvais me fonder. Et au lit.


                                                                                                            11 octobre.

            Levé de bonne heure et après un maigre petit déjeuner, et bien misérable, semblable à notre souper et qui ne peut me nourrir, à cause de la goutte au doigt de ma cousine Claxton et après que mon cousin Roger m'eut fait parcourir sa maison et ses vergers, je montai à cheval et allai à Hutington puis à Brampton où je trouvai mon père, mes deux frères et Mr Cooke, ma mère et ma soeur. Nous voilà donc tous réunis. Dieu sait quand cela se reproduira. Je parcours la maison et le jardin, et je trouve que les aménagement que mon père faits fort élégants, mais pas au point qu'il n'y ait lieu d'en faire davantage si jamais je viens vivre ici. Mais enfin c'est fort bien pour une campagne et qui en vaut bien une autre.
            Puis dîner où il n'y avait rien qu'une misérable poitrine d'agneau, et mal rôtie, je fus fort mécontent, car il y avait là Mr Cooke que j'avais invité à venir avec mon frère et qu'il m'importait de voir bien traité. Je le dis à mes parents et fis bien améliorer les choses par la suite, tant que j'y fus, bien que je me réjouisse de les voir vivre de si frugale façon.    cuisine.journaldesfemmes.com
Résultat de recherche d'images pour "chapon cuit"            Mais maintenant à mon affaire. Je vois que mon oncle Thomas est arrivé et qu'il tient des propos violents, et qu'il avertit nos locataires de ne pas nous verser de loyer, et annonce qu'il va faire annuler le testament, celui-ci étant conditionnel et soumis à ce que nous payions les dettes et les legs particuliers, ce que nous n'avons pas fait. Mais j'espère que nous nous en tirerons assez bien.
            Je me mis à étudier les papiers et le déroulement de cette affaire en prévision de l'audience, jusqu'à la soirée. Puis allai à cheval à Hinchingbrooke, accompagné de Will, et je vis milady dans sa chambre. Mais comme il faisait nuit et que j'étais préoccupé par les affaires je ne restai guère. Je bus une chope de bière avec les domestiques et revins souper et me coucher. Je ne serai pas tranquille tant que je n'aurai pas parlé à Pigott, lui dont la terre est hypothéquée au bénéfice de mon oncle, mais sans que celui-ci en ait jamais pris possession, de sorte que je crains que ce soit l'héritier par filiation qui en prenne possession et qu'à nous cela soit impossible. Mais j'ai dessein de l'évincer en prétendant qu'il y a des billets à ordre aussi bien qu'une hypothèque pour la même somme, de sorte que comme exécuteur testamentaire c'est moi qui suis bénéficiaire de ces billets.


                                                                                                               12 octobre 1662
                                                                                               Jour du Seigneur
            Me suis fait beau avec la cravate du capitaine Ferrer, ne désirant pas mettre col neuf en dentelle, il est trop beau. Et quand le barbier en eût fini avec nous, je fus à l'église où j'ai vu la plus grande partie du beau monde de la paroisse, Mrs Handbury entre autres, une vraie dame, Mr Bernard et sa femme et le père de celle-ci, l'ancien milord de St John qui a maintenant l'air d'un homme très simple et grave. Mr Wells a prêché un assez bon sermon et on dit qu'il a à peu près recouvré la raison.
            Puis dînai à la maison, promenade au jardin et de nouveau à l'église, et à la maison où plusieurs personnes sont venues pour affaires, entre autres Mr Pigott qui me donne de solides promesses de sa loyauté, ce dont je suis très content. Il me dit ce que projette mon oncle Thomas, c'est-à-dire être admis à la propriété comme nous, ce qu'il faut que j'évite de mon mieux.
            Puis souper. Mais je suis si préoccupé que je suis d'un méchant commerce, et puis je n'aime pas leur boisson jusqu'à ce que j'envoie demander à la mère Stankes un peu de la sienne qui est très légère et fraîche, avec un léger goût d'absinthe que j'ai par la suite toujours aimé. Après le souper au lit songeant à ces affaires. Je fis monter chaque soir mon frère John pour converser pendant que je me déshabillais.


                                                                                                                 13 octobre

Cock Tavern plaque            Allai à Hinchingbrooke où avec Mr Shipley j'ai visité tout le château. J'avoue que les aménagements me plaisent bien ainsi que l'escalier, mais on n'a rien fait pour rendre l'extérieur plus régulier et plus moderne, de sorte que je n'en suis pas content, mais je pense qu'en effet c'était une dépense excessive. Puis avec Shipley à Huntington à la Couronne où nous déjeunons de boeuf rôti froid. Puis il alla au marche de St Ives et moi voir sir Robert Bernard pour me faire conseiller, avec pour cela une lettre de milord Sandwich. Il me conseille avec beaucoup de bonté apparente et, à ma demande, me promet d'ajourner l'admission de mon oncle à la propriété s'il peut le faire avec justice. Dans l'ensemble il fait paraître mon affaire sous un meilleur jour que le fit mon cousin Roger, mais non pas tellement que nous ne soyons exposés à bien des tracas et qu'il ne vaille pas mieux arriver à une transaction, si faire se peut. Assez tranquillisé je revins à Brampton et passai la matinée à examiner des papiers et à préparer mes copies pour demain. Puis dîner, promenade avec mon père et d'autres affaires et arrivent mon oncle Thomas et son fils Thomas, parfaitement calmes comme nous le fûmes aussi et après un bref " Comment va ? " et une chope de bière, ils repartirent. Au bout d'un moment mon père et moi fûmes chez Mr Phillips pour nous entretenir de ce qui se passera demain au tribunal et préparer différents papiers. Alors arrivèrent mon oncle Thomas et son fils, mais nous voyant je crois qu'ils furent déçus et repartirent vers la maison que Prior nous a achetée il y a peu. Ils firent leur entrée en signe de possession et signifièrent qu'on ne nous versât pas de loyer, comme ce que j'apprends maintenant, ils ont fait partout ailleurs. Je m'aperçois que tous ceux qui nous ont rencontrés aujourd'hui sont dans la crainte de voir leur titre de propriété pour ce qu'ils achètent ne soit plus valable, ce qui m'a aussi un peu tracassé. Je m'efforçai de les rassurer. Ils m'ont, entre autres, fait craindre que Barton n'ait jamais été lui-même admis à la propriété que mon oncle lui a achetée, mais j'espère qu'il n'en est rien.
            Puis rentré et promenade mélancolique avec mon père jusqu'à Portholme, voyant les paysannes traire leurs vaches et avec quelle gaieté elles s'en reviennent toutes ensemble, en grande pompe avec leur lait et parfois précédées d'une fanfare.
            Retour à la maison et souper. Arrive Pigott avec un billet à ordre faux que, d'accord avec nous, bien que rien ne soit plus juste en soi, il a fabriqué. Grâce à cela je vais revendiquer l'intérêt de l'argent de l'hypothèque. Ainsi, attendant avec beaucoup d'impatience et d'incertitude le résultat de l'audience de demain, j'allai au lit. Mais dormis à peine une demi-heure de toute la nuit, tant j'étais plein de craintes pour demain.


                                                                                                                     14 octobre

            Levé, et résumai en un exposé clair tout ce que j'avais à dire pour notre défense, en cas de nécessité, car on me dit qu'il aura un avocat pour plaider sa cause. Vers neuf heures au tribunal de sa seigneurie. On fit l'appel du jury et, comme il y avait des absents, ils auraient voulu que mon père, par respect pour lui, fit partie de l'hommage. Mais il jugea convenable de refuser n'étant pas assez au courant des coutumes du manoir. Ayant prêté serment et reçu les instructions, ils se mirent à notre affaire et déclarèrent que l'héritier légitime était mon oncle Thomas. Mais sir Robert leur dit qu'il avait vu que le domaine était légué à mon père par le testament de mon oncle selon la coutume du manoir, ce qu'ils essaièrent de nier. Dirent d'abord que ce n'était pas la coutume du manoir, soulevèrent une objection à propos du demi-arpent de terre qui est donné à l'héritier légitime selon la coutume, ce qui me fit grand peur qu'il n'eût pas été en la possession de mon oncle au moment de sa mort, mais hypothéqué avec d'autres au profit de Thomas Trice, qui était présent et qui fut, avec mon accord admis à la maison de Taylor qui est hypothéquée à son bénéfice car elle ne vaut pas l'argent pour lequel elle est hypothéquée, et je m'aperçois que maintenant, bien qu'il se soit il y a peu vanté du contraire, maintenant il s'en rend compte et voudrait que nous la dégagions en argent, et il préférerait nous la restituer à nous plutôt qu'à l'héritier légitime. Ou alors qu'il faisait partie de la part de la mère Gorham, qu'elle tient à vie et qui, par conséquent, ne peut être, selon la coutume, donnée à l'héritier légitime. Mais Will Stankes me dit que nous pouvons être rassurés sur ce point.
            Puis ils parlèrent de la terre de Pigott hypothéquée au bénéfice de mon oncle mais à laquelle il ne fut jamais admis, et maintenant comme héritiers ils voudraient être admis. Mais l'intendant, comme il me l'avait promis, trouva très aimablement et très promptement des raisons de renvoyer leur admission, ce qui, je le vois, les fait largement condamner. Et c'est maintenant, ou jamais, qu'ils prêteront l'oreille à une transaction et à un accord avec nous, lorsque nous nous rencontrerons à Londres. Là-dessus ils prirent congé, et après d'autres affaires on leva l'audience pour dîner. Mon père et moi rentrâmes très satisfaits. L'après-midi au tribunal nous commençâmes en réclamant une réintégration et la fin de la substitution, d'y faire entrer mes frères et de nous faire admettre mon père et moi en possession de toutes les terres. Lui sa vie durant, moi et mes héritiers par réversion. Nous cédâmes alors, après transaction, à Prior, Green et Shepheard les trois petites maisons avec leurs dépendances qu'ils nous ont achetées. Cela fait, congé pris, c'est avec la plus grande joie que je quittai le tribunal avec mon père. Et en un quart d'heure fus à cheval avec mon frère Tom, Cooke et Will, sans manger ni boire, dis adieu à mon père et à ma mère, à Pall à qui je donnai 10 shillings, mais ne lui marquai aucune marque de tendresse depuis mon arrivée, car je la trouve si désagréable que je ne puis l'aimer et c'est une si fieffée hypocrite qu'elle est capable de pleurer à volonté. à John, et nous partîmes, nous arrêtant en chemin pour prendre congé en deux mots de milady et des jeunes demoiselles. Par clair de lune en belle cavalcade jusqu'à Cambridge avec grand plaisir. Arrivée vers 9 heures, fort mal logés à l'Ours pleine de monde, ce qui me chagrina. Mais on nous donna à souper et j'avais l'esprit libre et allai me coucher. Will dans un autre lit dans ma chambre.


                                                                                                                      15 octobre 1662
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Image associée            Bien que l'esprit libre de tout tracas, j'étais encore tout entier à mon voyage de retour, dans mon désir de savoir comment les choses allaient là-bas je ne dormis guère. M'éveillai très tôt et quand l'heure vint j'appelai Will et nous nous levâmes. Et la musique, avec une bandoura pour basse, me sonna la diane. Pendant qu'on s'occupait du petit déjeuner je sortis, rencontrai en chemin Mr George Montagu et sa femme que je saluai. Ils allaient prendre leur voiture à cette heure matinale pour continuer leur voyage, car ils avaient la chambre au-dessous de la mienne, et je montrai la chapelle de King's College à Mr Cooke et la bibliothèque du collège de St John. A l'auberge je rencontrai le Dr Fairbrother amené par mon frère Tom, un excellent homme. Il nous raconta que la salle où nous nous trouvions était celle où Cromwell et les officiers, ses complices, commencèrent à projeter et réaliser leurs méfaits dans ces comtés.
            Après un bon repas où seules les huîtres étaient mauvaises, nous montâmes à cheval. Je portais les bottes que j'avais empruntées et transportées avec moi depuis Impington, les miennes devant être renvoyées de Cambridge à Londres. Prîmes congé et commençâmes notre voyage, vers 9 heures. Après environ 10 milles nous nous égarâmes en prenant la route de Royston, ce qui me fâcha énormément, d'autant plus que le cheval de mon frère qui boitait hier va plus mal aujourd'hui et n'a pas pu avancer à notre pas. Nous retrouvâmes la route à grand-peine, ayant aussi perdu un valet qui avait perdu son maître que nous retrouvâmes, apparemment un ecclésiastique. Le cheval de Tom était hors d'état de nous suivre, je lui dis ainsi qu'à Mr Cooke de prendre leur temps. Will et moi arrivâmes à Ware vers 3 heures de l'après-midi, toutes les routes étaient mauvaises. Je liai connaissance avec l'ecclésiastique, en mangeant et buvant, mais je ne sais pas son nom. Après une heure, cet homme voulut repartir avec nous pour profiter de notre compagnie. Nous reprîmes nos chevaux à 4 heures et alla avec moi presque jusqu'à Theobalds, s'arrêtant là pour la nuit. Mais voyant nos chevaux dispos et la nuit assez claire, nous réussîmes peu à peu à gagner Londres, tous les deux fourbus. Une fois nos chevaux remis à leurs maîtres nous rentrâmes à pied. Rien, depuis mon départ, ne s'était produit qui me mécontentât, ce qui me fait un tel plaisir que je dois louer Dieu pour mon voyage, qui a été un plein succès du début à la fin. Je vois bien que c'est la récompense de mon application à la tâche en tout point exemplaire. Je n'ai pas pris le plus petit divertissement depuis mon départ, occupé seulement de mes affaires que Dieu a daigné favoriser.
            Et coucher, brûlant et fiévreux de fatigue, mais avant le matin la fièvre était passée.


                                                                                                              16 octobre

            Me suis levé de bonne humeur, constatai qu'il y avait maintenant une belle cheminée dans ma salle à manger du haut et que les lambris sont bien avancés, ce qui me réjouit. Au bureau je vois que tout est à mon gré. Sommes restés jusqu'à midi, puis rentré dîner avec ma femme, puis au bureau du Trésor avec Mr Creed pour une affaire avec sir John Mennes. Resté tard avec sir John à verser de l'argent aux rescapés du Satisfaction perdu l'autre jour. Le roi donne demi-solde ce qui est plus que ce qu'on ne fait en pareil cas, car actuellement on ne donne jamais rien. Et pourtant les hommes étaient scandaleusement mécontents et nous ont injuriés et maudits au point que j'en fus troublé et fâché d'être mêlé à cette affaire. Mr Creed nous voyant occupés se retira. Restai tard puis rentrai, puis au bureau où je mis le journal de mon voyage à jour. Puis refermai mon registre en louant Dieu de mon succès. rentrai souper et me coucher.
            J'apprends que Mr Moore est en bonne voie de guérison. Sir Henry Bennet est nommé secrétaire d'Etat à la place de sir Edward Nicholas, on ne sait si c'est avec son accord ou non.
          Mon frère Tom et Cooke sont arrivés à Londres, me dit-on, ce matin, et il me fait savoir que la mère de sa maîtresse est aussi venue pour traiter avec nous de la dot de sa fille et de son douaire, que je consens à prendre sur les terres de Stirloe.


                                                    à suivre................

                                                                                             17 octobre 1662

             Ce matin Tom................



mercredi 5 juillet 2017

Sonnet 128 - 103 Shakespeare ( Poèmes Angleterre )

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                                      Sonnet 128

            Musique de ma vie, souvent, lorsque tu joues
            Quelque musique et que le bois tressaille
            Sous tes chers doigts qui font jouir les cordes
            D'une harmonie qui subjugue mes sens,

            Combien j'envie ces touches qui, légères
Résultat de recherche d'images pour "musique musicienne"            Ne cessent de baiser le creux de tes mains
            Quand mes lèvres, frustrées de cette cueillette,
            Rougissent près de toi, de les voir si hardies !

            Pour de telles extases je les sens prêtes
            A se substituer à ces touches dansantes
            Que parcourent tes doigts, douce pression qui rend
            Le bois mort plus heureux que la lèvre vive !

            Pourtant, si c'est ce qu'elles aiment, ces effrontées,
            Laisse-leur tes doigts à baiser, donne-moi tes lèvres.


                                                                 William Shakespeare


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                                                 Sonnet 103
                                                                                                                  photomonia.canalblog.com
Résultat de recherche d'images pour "peinture muse"            Hélas, si décevants les travaux de ma Muse,
            Quand tant lui permettait d'être ambitieuse !
            Leur thème, par lui-même, vaut bien plus
            Que lorsque ma louange s'y ajoute.

            Ne me blâme donc pas si je n'écris plus !
            Regarde en ton miroir : y paraît un visage
            Qui passe de très loin ma pauvre invention,
            Mes vers en sont éteints, ma honte est grande.

            C'est pécher que gâter, en voulant l'embellir,
            Un objet qui est beau en son être propre,
            Or, je n'avais qu'un but, c'est de décrire
            Tes charmes, et les dons qui te favorisent.

            Regarde en ton miroir : tu y verras
            Bien plus, bien plus que mes vers puissent dire.


                                                                        William Shakespeare



                                             
























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mardi 4 juillet 2017

Le dernier des Weynfeldt Martin Suter ( Roman Allemagne )

Le dernier des Weynfeldt
           fnac.com



                                                             Le dernier des Weynfeldt

            Zurich, une fin d'hiver entre chaleur et temps neigeux. Adrian Weynfeldt richissime homme de goût et de fortune aussi sûre que l'immeuble où il loge au dernier étage propriétaire des autres parties de l'immeuble louées par une banque ( il reconnaît 1 million de francs suisses de revenus officiels ). 54 ans et fils unique de parents industriels il ne connut d'autres vêtements que " le sur-mesure " des knickerbockers de son enfance aux pyjamas monogrammés, deux douzaines un pour chaque jour. Il aurait aimé peindre mais le talent le fuit néanmoins il devint expert en matière de peinture très recherché. Homme d'habitudes, il eut une amie, morte depuis de nombreuses années mais son visage encore présent dans sa mémoire permit à Lorena assez ressemblante d'accepter l'invitation de l'homme de goût assez déshabitué des rencontres féminines. Leonora proche des quarante ans, ancien mannequin, ne se voit guère d'avenir, complètement désargentée, mais personnage pour qui l'auteur a de la sympathie et Adrian ne sait pas trop lorsque brusquement réveillé il aperçoit la femme accrochée de l'autre côté de la rambarde du balcon. Elle dit vouloir se suicider, lui les cheveux emmêlés ne sait comment empêcher cet incident fâcheux. Suter nous entraîne dans l'histoire de ce couple improbable, ce n'est pas un polar et ce n'est pas ennuyeux du tout. Car Adrian est un Candide. Ses amis sont les enfants des amis de ses parents, ils se retrouvent à jour fixe, chaque semaine dans le même restaurant. Mort de l'un, ruine de l'autre. Le jeudi par contre, tous les jeudis avec la régularité qui lui est habituelle, ce sont un scénariste verbeux et sa compagne à qui l'expert en peinture, ignorant le cinéma, sert une véritable rente en attendant un film, peut-être, il y a le peintre qui est un artisan et non un artiste qui copie, et d'autres. Egalement une secrétaire périodiquement boulimique mais excelle dans son travail et apprend à Adrian l'utilité du portable. Quelques semaines  et les petites misères, les bassesses, les vols éclatent au grand jour. Heureux Adrian ? Il avoue n'avoir été et demeurer ni heureux ni malheureux. ".... Toujours encore l'hiver, avec l'avant-goût..... du printemps...... il n'était pas sensible au temps..... le sujet le laissait de marbre : avec un intérêt courtois.... " Leonora vit dans le désordre d'un petit studio, vaguement cornaquée et use de son charme encore vivant pour manipuler qui elle peut. Adrian dans les 500 m2 meublés par les meilleurs designers, dirigés par une intendante sans reproche, déjeuune, seul pour son propre plaisir parfois à " La Mangerie..... macrophotographies stylisées de grains de sel et de poivre..... mais le repas était remarquable..... hormis le sel et le poivre jamais plus de trois épices..... " Et Adrian calme avoue ne pas réfléchir mais prendre les idées au vol. Ainsi arrivera-t-il à résoudre le double problème de l'arnaque et de l'arnaqueur : son ami Baier, le plus vieux parmi ses relations se sachant ruiné a fait réaliser des copies de ses meilleures toiles, des Holder, qu'il vend aux enchères et surtout d'un Valotton ( voir la couverture du livre ) pour lequel il conserve une véritable passion, signé d'une maque particulière au-dessus de la fesse droite. Et dans la ville le foehn tourne à la tempête, Adrian et Leonora conversent "...... - J'ai été à Majorque..... en bateau.....
                                      - Un yacht ?..... Trop de gens sur trop peu d'espace à mon avis. Et pas moyen de ficher le camp. Non, non, le yacht c'est très surfait..... "
            Etre Candide et berner les arnaqueurs sans tomber dans un sombre roman policier tel est le plaisir de ce joli roman, plein de goût par ailleurs.

            

            

            

samedi 1 juillet 2017

Un racisme imaginaire Pascal Bruckner ( Document France )


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                                         Un racisme imaginaire

            Reliant des articles parus dans différents journaux depuis 2003. une conférence donnée dans l'Indiana et parue dans la Revue des Deux Mondes, entre autres, Bruckner propose un livre au sous-titre explicite : " Islamophobie et Culpabilité ". Si la société depuis ces  dernières décennies est plongée dans l'angoisse et le malaise l'ouvrage prolonge la réflexion. Retenir la plume des auteurs, des humoristes, des gens de tous bords "..... La sanction est simple. L'acquiescement ou la mort..... " Mais le philosophe reprend en partie l'histoire des trois religions monothéistes, détaille les différentes périodes et les multiples divisions de l'islam. " ....... Rien n'apaise la fureur des doctrinaires, une fois notre civilisation désignée comme satanique. Rien n'égale l'aveuglement des libéraux face à la volonté exterminatrice des premiers. Ils ne croient pas au mal, seulement aux malentendus...... " L'auteur rappelle que Londres a élu un maire musulman, Pakistanais. Mais aussi au moment du vote du Brexit ces mêmes londoniens s'en sont pris violemment aux Polonais, craignant l'arrivée d'une main-d'oeuvre venue de l'est. Une société multiculturelle, accepter l'apport de l'islam, son art, compléter la culture des Lumières. "...... La guerre contre le terrorisme est à la fois une nécessité absolue et un leurre..... " "...... Un certain libéralisme repose sur l'hypothèse que des citoyens égaux peuvent cohabiter pacifiquement dans le même espace....... Mais la juxtaposition de manières de vivre incompatibles ne semble possible que sur le papier. La société ouverte n'est pas la société offerte à tous les vents..... " " ...... Le Vieux Monde ressasse, le Nouveau recommence. Les EtatsUnis : le plus grand pouvoir de répulsion allié au plus grand pouvoir de séduction. Nous autres Européens sommes évidemment pusillanimes et décadents, pathétiques dans nos aspirations..... Nous sommes trop intelligents pour croire en Dieu, mais trop faibles pour croire en nous-mêmes et nous répétons avec perplexité ce mot de Robespierre : L'athéisme est aristocratique. ...." 

mercredi 28 juin 2017

Le nouveau nom tome 2 ( l'Amie prodigieuse ) Elena Ferrante ( Roman Italie )



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                                                                   Le nouveau nom
                                                                                   tome II ( l'Amie prodigieuse )

            
            Lila et Linu. Elles ont 16 ans, la première a épousé Stéphano l'épicier. Dès la fin du tome 1
l'auteur a exprimé la colère et la déception se profiler à la fin du repas de noces. Et Lila riche joue à l'épicière, les dons qu'elle avait à l'école elle les utilise dans son métier de marchande. Stéphano lui apprend à tricher sur le poids, Stéphano acquière une deuxième épicerie, et Stéphano frappe, et Lila reste indocile et insolente, et si elle repousse méchamment les avances de Michele Solara, camorriste, la jeune femme trouve une proie qui va ravager outre elle-même et le jeune étudiant, sa famille et Linu amoureuse de son condisciple au lycée. Les scènes sont fortes. Eléna Ferrante détaille, entoure de mots simples, nous conte et nous raconte des scènes de la vie quotidienne, les jalousies des jeunes femmes de ce quartier pauvre, "..... Lila savait depuis longtemps que les gens se racontent des histoires pour se détendre de la réalité...... " Linu fuit les rumeurs et poursuit brillamment, vaillamment ses études, pour le plaisir de son père et une apparente rancoeur de sa mère, attentive pourtant à la santé de sa fille qui travaille dès que ses cours le lui permettent. Elle aura 18 ans, bientôt 1968 et la liberté des moeurs. Linu a des amours tristes, ternes. Les deux femmes se comparent, s'entraident, se défont. Leur vieille amitié est très compliquée, les deux filles sont intelligentes. Les garçons évoluent plus lentement, engagés dans des mouvements politiques, communisme, Interrogée lors d'un concours sur Leopardi "......- Vous écrivez très bien, me dit-elle avec un accent pour moi    indéchiffrable, mais à coup sûr très éloigné de celui de Naples. - Merci; - Vous pensez vraiment que rien n'est destiné à durer, pas même la poésie ? - C'est ce que pense Léopardi..... Je pense que la beauté est un leurre....... " Lila Ulysse, Joyce, compliqué mais à son goût. Impossible de se défaire de cette société, de ce dialecte que nous ignorons mais qui pose un problème à celle qui s'écarte de son quartier, de sa ville. "....... Voilà en gros ce qui m'arriva à Pise...... C'est si facile de parler de moi sans Lila ! Le temps s'apaise, et les faits marquants glissent.....  je les prends, je les mets sur la page, et c'est fini..... " Ada jalouse, essaie d'arracher sa proie à l'épouse, Gigliola vit  avec Felipe, Antonio, Enzo toujours présent pour Lila, et les autres, savent-ils qu'ils sont les héros immortels d'un livre qu'Eléna Gréco écritl, les manipulations des Solara, l'imprévisible Lila toute meurtrie par les coups d'un Stéphano qui se défend. Fort, sensible, le livre est meilleur que le tome 1, sans doute en raison de l'âge des héros, que seront les deux prochains volumes, nous verrons, ils sont très attendus. Plus de 500 pages de mots, de scènes, de personnages peut-être croisés ici ou là.