1er mai 1662
Avec sir George Carteret et sir William Penn, et nos commis, nous quittâmes ce matin Portsmouth de fort bonne humeur et arrivâmes avant midi à Petersfield, accompagnés également de plusieurs officiers de l'arsenal. Nous avons là dîné très gaiement.
Arrive à ce moment, de Londres, milord Carlingford en route pour Portsmouth. Il nous dit que la duchesse d'York est accouchée d'une fille, ce qui, je le vois, ne fait plaisir à personne. Et que le prince Rupert, le duc de Buckingham ont prêté serment comme membres du Conseil priivé.
Il cuisina lui-même un plat d'oeufs avec le beurre des asperges. C'est un excellent mets dont j'userai à l'avenir.
Remontés à cheval après dîner et arrivés à Guilford. Après souper j'allai au lit, ayant été froissé aujourd'hui par les sottes remarques de sir William Penn, et l'ayant moi-même froissé par mes réponses. Il se plaignit entre autres dans la conversation de manquer d'assurance, et me pria de lui en prêter quelques grains, ce dont, je crois, lui répondis-je en présence de sir George, il était mieux fourni que moi. Je vois qu'il me faut être plus distant que je ne l'étais. Et j'espère y arriver, grâce au crédit que je suis en train d'acquérir auprès de sir George.
Au lit, tout seul, et mon Will dans le lit bas.
2 mai
De nouveau en voiture de bon matin jusqu'à Kingston, où nous nous restaurâmes un peu, et aussitôt de nouveau en voiture et arrivâmes de bonne heure à Londres. Je trouve les choses en bon état à la maison. Mrs et Mr Hunt ont dîné avec ma femme aujourd'hui, et ils ont été très attentionnés avec elle en mon absence. Après m'être lavé car c'était la journée la plus chaude qu'il y ait eue cette année, je les emmenai tous chez Mrs Hunt et j'allai chez la femme du Dr Clarke lui donner sa lettre et son cadeau. C'est une femme très élégante, et entre elle et le grand nombre de dames élégantes qu'il y avait en sa compagnie je fus fort intimidé et j'eus peine à me conduire en homme au milieu d'elles. Je restai cependant jusqu'à ce que le courage me revint, et je causai avec elles et visitai sa maison qui est très agréable, et je bus et dis au revoir. Puis au logis de milord où, par hasard, j'aperçus le carrosse de milady et je la trouvai chez elle ainsi que milady Wright. Et je leur parlai. Et quand elles furent parties j'allai chercher ma femme chez Mr Hunt, et retour. Et au lit.
3 mai
Avec sir William Penn en voiture au palais de St James et dans la chambre du Duc qui a été à la chasse ce matin et est de retour. De là à Westminster où je rencontrai Mr Moore et j'apprends que Mr Watkins est mort soudainement depuis mon départ. A dîner chez milady Sandwich et les enfants de sir Thpmas Crew arrivant je les ai tous emmenés avec ceux de milady à la Tour leur montrer les lions et tout ce qu'il y a à voir. Puis je les emmenai chez moi où je les choyai, et les raccompagnai chez milady. Les enfants de sir Thomas Crew sont aussi beaux et bien élevés que tous ceux de leur âge que je connais.
De là chez l'orfèvre d'où j'ai rapporté mon portrait en miniature, maintenant terminé, à la maison. Et il me plaît extrêmement, et à ma femme aussi. Et souper, et au lit par une chaleur extrême
4 mai
Jour du Seigneur
Restai longtemps couché à causer avec ma femme. Puis levé et visite de Mr Hollier et m'a tiré du sang. Je commençai à me sentir mal, mais en me couchant sur le dos je fus aussitôt remis et je lui donnai 5 shillings pour sa peine, et nous nous séparâmes. Et j'allai dans mon cabinet rédiger mon journal depuis le début de mon récent voyage jusqu'à ce moment.
Bien dîné, et après dîner, le bras en écharpe retenu par un ruban noir, ma femme et moi à pied chez mon frère Tom, escortés de mon petit laquais avec son épée qu'il commence aujourd'hui à porter afin de surpasser le petit laquais de sir William Penn qui, de même que celui de sir William Batten commencent à porter aussi des livrées neuves. Mais je crois bien que le mien est le plus élégant.
Je conduisis ma femme au banc de Mrs Turner, et l'église étant comble, car si s'agissait d'entendre un docteur qui doit faire un sermon de probation, je sortis et allai au Temple où je me promenai, et l'office terminé j'allai chez Mrs Turner Nous restâmes un moment et nous rendîmes alors à Grey's Inn pour regarder la mode des dames, parce que ma femme est en train de se faire quelques vêtements. Puis en rentrant à la maison je passai chez Anthony Joyce où nous trouvâmes sa femme ramenée malade de l'église et qui était dans une crise de convulsions. De sorte que nous rentrâmes et nous rendîmes chez sir William Penn où nous soupâmes, et à la prière, et au lit.
5 mai 1662
Souffrant encore de mon bras je restai chez moi toute la matinée et dînai seul à la maison, ma femme étant sortie acheter certains objets pour elle et une robe de chambre pour moi. Et j'ai passé tout l'après-midi à examiner mes papiers, et le soir promené sur la terrasse, et au lit.
6 mai
Ce matin j'ai fait installer mon banc sur la terrasse, ce dont je suis très content. Puis au bureau et de là à la Bourse mais sans pouvoir trouver mon oncle Wight et à la maison pour dîner. Et puis ressortis pour me rendre dans différents endroits verser de l'argent et vérifier mes dettes, et retour à la maison, et promené sur la terrasse avec ma femme, et souper, et au lit.
Je trouve difficile de me mettre au travail après tant de repos et de plaisirs.
7 mai
Allai à pied à Westminster où j'apprends que Mr Montagu est arrivé auprès du roi hier soir et qu'il a laissé la reine et la flotte dans le golfe de Gascogne, en route pour ici, et qu'il pense qu'elle est maintenant à l'île Sorlingue. A midi je dînai chez Mr Crew. Après cela je me suis entretenu avec sir Thomas Crew, entre autres exemples des propos frivoles qui se tiennent parfois au Parlement, il me raconta que dans la récente affaire du fouage que devaient payer tous les occupants, on demanda si les femmes devaient payer en cette qualité, et quelqu'un se leva pour dire qu'elles n'étaient pas occupantes mais occupées.
De là à l'enclos de Saint-Paul où, voyant miladies Sandwich et Carteret et ma femme, qui a aujourd'hui rendu visite à Mrs Carteret pour la première fois, arriver en voiture et allant à Hyde Park, je résolus de les suivre et j'allai donc chez Mrs Turner et de là la trouver au Théâtre où je vis le dernier acte du
Chevalier au pilon ardent, qui ne me plut pas du tout. La pièce finie ces dames et moi allâmes au parc en voiture retrouver ma femme et les miladies. Nous remarquâmes nombre de dames élégantes et nous restâmes jusqu'au départ de la plupart, et revînmes alors chez Mrs Turner. Et là je soupai et rentrai à pied à la maison. Peu après ma femme entra, ramenée jusqu'à la grille par milady Carteret. Et au lit.
8 mai
Au bureau toute la matinée, à travailler seul. Puis à la Garde-Robe où milady sortant avec les enfants pour dîner, je ne restai pas, mais rentrai à la maison. Et à l'enclos de Saint-Paul je fus rattrapé par sir George Carteret dans son carrosse, et il m'amena à la Bourse où je restai un moment. Il me dit que la reine et la flotte étaient dans le golfe du Mont lundi dernier, et que la reine supporte assez bien son mal de mer. Il me dit aussi que sir John Lawson a infligé des pertes aux Turcs en Méditerranée, ce dont je me réjouis, et je fus le premier à annoncer cette nouvelle à la Bourse. Et je fus fort poursuivi par des négociants qui voulaient me l'entendre dire. Puis je rentrai à la maison et dînai. Ensuite au bureau, et après que les autres furent partis, milady Albermale étant aujourd'hui à dîner chez sir William Batten, sir George Carteret vint, et nous nous promenâmes dans le jardin. Il me dit, entre autres propos, que c'est Mr Coventry qui doit venir chez nous comme commissaire du Conseil de la marine. Ce dont il est fort contrarié et s'en prend à sir William Penn et lui fait de grandes menaces. Et, regardant ses appartements qu'on agrandit, il s'est écrié, dans sa colère "
guarda mi spada ( nte de l'édit. Prends garde à mon épée ), car par Dieu je pourrai bien le laisser en Irla
nde quand il y sera, car sir William Penn va là-bas avec le lord-lieutenant. Mais j'entends être en bons termes avec sir George et je crois que cela est déjà en bonne voie. Puis au bureau où je restai tard à travailler, et puis l'esprit plein de ces affaires, j'allai au lit.
9 mai 1662
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Levé et été au bureau, puis dîner à la maison, en différents lieux pour payer mes dettes, et puis à Westminster voir le Dr Castle qui m'a entretenu de l'affaire du Sceau privé, qui m'importe peu car cela ne me rapporte guère. Mais la récente mort soudaine de Watkins va sans doute nous faire perdre de l'argent. De là été voir Mr de Critz où j'ai vu de bons tableaux qu'il a copiés sur les tableaux du roi, dont certains de Raphaêl et de Michel-Ange. Et j'ai emprunté une
Elisabeth qu'il a copiée pour l'accrocher chez moi, je l'ai fait porter par Will. Puis en compagnie de Mr Sallsbury, que je rencontrai là, j'allai à Covent Garden dans une taverne voir un tableau qui y est exposé et qui est en vente pour 20 shillings et j'en ai offert 14; Il en vaut bien plus, mais je ne l'ai pas acheté, ne voulant pas enfreindre mon serment. Puis je suis allé voir une pièce de marionnettes italiennes qu'on joue dans l'enceinte, fort jolie, la meilleure que j'ai vue, et un grand rendez-vous d'élégants. Puis au quartier du Temple et par le fleuve à la maison, promenade sur la terrasse et dans le noir. J'ai joué là de mon flageolet, car c'était une belle soirée calme, et souper et au lit.
Aujourd'hui j'ai payé la dette due à Godefrey de 40 et quelques livres. Le duc d'York est allé hier soir à Portsmouth, je pense donc que la reine n'est pas loin.
10 mai
Seul au bureau toute la matinée, à rédiger des instructions destinées à l'arsenal de Portsmouth au sujet de ce qu'il nous a semblé utile de réformer lors de notre dernier passage. Et je les ai fait signer ce matin pour les envoyer ce soir, le Duc s'y trouvant maintenant.
A midi à la Garde-Robe où je dînai. Milady me dit que milady Castlemaine parle d'aller accoucher à Hampton Court, ce dont elle et toutes les dames sont fort affligées, parce que le roi serait obligé de lui faire bon visage devant la reine quand celle-ci viendra. Au bureau où je restai tout l'après-midi et dans la soirée vint sir George Carteret. Nous avons affrété un navire pour Tanger et traité ensemble d'autres affaires. Et je vois qu'il me distingue des autres pour travailler avec lui, ce dont je suis très heureux. A la maison et après m'être fait raser, au lit.
11 mai
Jour du Seigneur
Allai à notre église paroissiale le matin où notre ministre étant absent de Londres c'est un presbytérien ennuyeux et terne qui a prêché. Dînai à la maison, le frère de ma femme avec nous. Nous avions un bon plat de ragoût de boeuf cuisiné par Jane, bien préparé, et un morceau d'esturgeon provenant d'un baril que m'a récemment envoyé le capitaine Cocke. L'après-midi à Whitehall et promenade une ou deux heures dans le parc où j'ai vu le roi qui a maintenant quitté le deuil, vêtu d'un costume galonné d'or et d'argent ce qui, disait-on, n'est plus à la mode. De là à la Garde-Robe où je me suis entretenu avec ces dames pour savoir si nous irions à Hampton Court demain. Retour à la maison et après avoir réglé nos affaires, ma femme et moi allons à la Garde-Robe, et nous y avons couché toute la nuit dans la chambre du capitaine Ferrer, mais le lit était si mou que je n'ai pas pu dormir par cette nuit très chaude.
12 mai
Mr Townshen nous a réveillés à 4 heures, et à 5 heures les trois dames, ma femme et moi, Mr Townshend, son fils et sa fille étions arrivés au canot major et étions en route. Nous allâmes à pied de Mortlake à Richmond où nous reprîmes un bateau, et de Teddington à Hampton Court, Mr Townshend de nouveau à pied, et là nous retrouvâmes les dames, et Mr Marriot nous fit visiter tout le château vraiment splendidement meublé, en particulier le lit de la reine que lui ont donné les Etats de Hollande. Un miroir envoyé par la reine mère de France, accroché dans la chambre de la reine, et nombre de superbes tableaux.
Puis chez Mr Marriot où nous nous reposâmes et on nous donna à boire. Et puis retour au canot où nous eûmes bonne chère et bon vin et fûmes très gais. Arrivés vers 8 heures du soir nous sentant très bien. Ma femme et moi prîmes donc congé de milady et rentrâmes à la maison en voiture de louage, la plus douce que j'aie jamais connue et au lit.
13 mai
Au bureau toute la matinée. Dînai seul à la maison ma femme étant malade de ses " mois " et alitée. Puis à pied à l'enclos de Saint-Paul et je réglai là tous mes comptes jusqu'à aujourd'hui. Et retour au bureau et à la maison. Visite de Will Joyce avec un ami, un de ses cousins. Je leur ai fait boire une bouteille de vin. Puis je me suis mis à chanter et à lire, puis au lit.
14 mai 1662
Toute la matinée à Westminster et ailleurs pour affaires, et dînai à la Garde-Robe, suis resté une heure ou deux seul avec milady. Elle craint que milady Castlemaine ne reste en bons termes avec le roi. Et moi j'ai peur du contraire, car j'aime fort cette femme. De là chez mon frère et en découvrant qu'il m'a menti à propos de la doublure de ma robe de chambre neuve, disant que c'est le même tissu que l'extérieur, je fus très fâché et le quittai en colère. A la maison après être resté une heure à l'enclos de Saint-Paul. Est arrivé Mr Moorcock de Chatham qui m'apportait un superbe gâteau, et je vois qu'il en a fait autant pour les autres, ce dont je suis content. Et au lit.
15 mai
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A Westminster et au Sceau privé j'ai vu le sceau de Mr Coventry qui le fait commissaire avec nous, ce dont je ne sais s'il faut me réjouir ou m'attrister. Je rentrai à pied faisant différentes choses en route, et après dîner je fus au bureau tout l'après-midi. Le soir toutes les cloches de la ville ont sonné et on a fait des feux de joie en signe de réjouissance pour l'arrivée de la reine. Elle était arrivée et avait débarqué la veille au soir. Mais je ne vois pas beaucoup de grande joie, seulement une joie médiocre dans le coeur des gens fort mécontents de l'arrogance et du luxe de la Cour et du fait de ses dettes. Et au lit.
16 mai
Levé de bonne heure. Mr Hayter et moi au bureau où j'ai terminé mon registre des marchés dont j'ai fait un état récapitulatif. Dînai à la maison et passai la plus grande partie de la journée au bureau. Le soir souper et au lit.
17 mai
Ce matin au reçu d'une lettre de Mr Moore j'allai au cabinet de mon cousin Turner et je le chargeai de rédiger rapidement une réplique à la réponse de Tom Trice. Puis à Whitehall où je vis Mr Moore, et je me promenai longtemps dans la Grand-Salle de Westminster et de là nous allâmes dîner à la Garde-Robe. Etaient présentes Mrs Sanderson, la mère des demoiselles d'honneur, et après dîner milady et moi fûmes à pied dans Paternoster Row où milady acheta une jupe de satin uni et d'autres choses en prévision de l'arrivée de la reine. De retour nous trouvâmes à la Garde-Robe Mr Nathaniel Crew avec un jeune homme, son ami et condisciple, issu d'une bonne famille. Mr Knightly connu des Crew et à propos de qui milady me dit en confidence qu'elle pensait un peu à un mariage pour milady Jemima. Il me plaît bien, et il a 2 000 livres de rente. De là au bureau où nous eûmes une réunion, et puis après avoir écrit à tous mes amis qui sont à Portsmouth avec milord, allai à pied chez mon frère Tom pour voir un manteau de velours que j'achète à Mr Moore. Il me coûtera 8 livres 10 shillings, il l'a acheté 6 livres 10 shillings, mais il vaut l'argent que j'y mets. Et à la maison où je trouve tout nettoyé pour demain, ce qui me fait plaisir. Et au lit.
* aparences.net
à suivre
18 mai 1662
Pentecôte
Par le fleuve jusqu'à Whitehall