dimanche 12 juin 2016

Anecdotes et réflexions d'hier pour aujourd'hui 60 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )

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                                                                                                     1er Décembre 1661
                                                                                          Jour du Seigneur
            Le matin à l'église entendis Mr Mills. Dînai chez moi avec, comme convenu, Mr Sankey, qui aurait dû amener sa belle, Mrs Mary Archer de Cambridge, mais elle ne put venir. Nous lui servîmes un bon dîner et, l'après-midi, ma femme alla à l'église, tandis que lui et moi restions à la maison à boire et à causer. Il resta jusqu'au soir et soupa avec moi. Je m'attendais à voir Jack Cole et Lemuel Wagstaffe, mais ils ne vinrent pas.
          Nous avons entamé aujourd'hui un bon fromage de hure de Winchcombe, se trouva être fort savoureux. Avons également ouvert le bocal de cornichons que le capitaine Cocke donna à ma femme l'autre jour. Ce sont là d'excellents produits.
            Le soir au lit.
            On a récemment arrêté de nombreux anciens républicains, tels que Ireton, Moyer et d'autres. En raison d'un vaste complot, mais je ne le crois pas. Ce n'est toutefois que justice qu'ils reçoivent le traitement qu'ils ont fait subir aux malheureux Cavaliers et, à mon avis, cela se reproduira souvent de mon vivant, justifié ou non.
            Ce soir, je reparlai à mon frère Tom de la fille de Mr Townshend. J'ai l'intention de faire avancer l'affaire. Je prie Dieu qu'il lui assure une issue heureuse.


                                                                                                        2 Décembre

            Chez Savill, le peintre, mais comme il ne se sentait pas bien, je retournai chez moi. Rencontrai en chemin Mr Moore et l'emmenai chez moi. Restâmes à parler toute la matinée et il dîna avec moi. Allâmes ensuite au Sceau privé, la première fois ce mois-ci. Peu après visite de Mr Sankey et de sa belle, et avec eux, en voiture à l'Opéra voir L'Amant fou, mais la pièce ne me plut guère. Puis les ramenai chez moi où ils restèrent souper, et joyeusement. A la fin, tard, nous donnèrent le bonsoir, et nous au lit.


                                                                                                      3 Décembre

Résultat de recherche d'images pour "femmes tableaux angleterre 18è"            Chez le peintre, posai. Mon portrait avance, mais il ne me plait pas, je crains qu'il ne soit pas ressemblant. Partis à midi pour la Garde-Robe, mais comme le dîner n'était pas prêt, Mr Moore et moi dans le quartier du Temple chez Mr Turner pour ma petite affaire, puis retour. Comme ils étaient au milieu du dîner j'entrai chez milady qui dînait avec milady Wright. Toute notre conversation sur le bonheur, selon milady Wright, à être à la mode, à suivre les modes les plus diverses, à mépriser ceux qui ne les suivent pas, comme les femmes de bourgeois et les dames de la campagne, et bien que cela ne me plût guère, je ne dis rien. Ensuite, par le fleuve, au bureau, en passant le Pont, emmené par le marinier dont le canot, l'autre jour, était arrivé plus vite que le mien à la Tour. Je lui donnai 6 pence. Au bureau tout l'après-midi et le soir chez moi à lire Mare Clausum jusqu'au coucher. Au lit.
            Mais passai une fort mauvaise nuit à rêver à ma femme : elle était à cheval avec moi, le cheval la jetait à terre et elle se cassait la jambe. Puis je rêvai qu'un de mes testicules était enflé et me faisait si mal que je me réveillai. Je souffris le martyre un long moment avant de me rendormir. J'en conçus une telle appréhension qu'à mon lever je mis un bandage, pensant qu'il ne s'agissait pas d'un rêve. Mais ne ressentant aucune douleur dans la journée, je me souvins que j'avais rêvé, avais rêvé aussi que Mr Creed était avec moi, que je me plaignis à lui de ma douleur et qu'il me dit qu'il souffrait autant de la couille  gauche que moi de la droite. J'eus grand plaisir de me rappeler cela.


                                                                                                       4 Décembre

            A la Grand-Salle de Westminster avec les deux sirs William, puis par le fleuve où je vis un homme mort allongé sur l'embarcadère de Westminster, noyé hier, jusqu'au quartier du Temple, puis chez Mr Phillips où je reçus ma copie des titres de cession pour les terres de Stirtloe. Retour à la taverne des Trois Tonneaux à Charing Cross, où je retrouvai les deux sirs William, le colonel Treswell et Mr Falconer, et dînai là aux frais de sir William Penn. Après dîner, par le fleuve à Cheapside chez le peintre où trouve ma femme. Après une courte séance de pose, elle et moi allons en voiture à l'Opéra et au Théâtre. Mais arrivés en retard aux deux et me sentant d'humeur maussade nous rentrâmes à la maison et repris ma lecture de Mare Clausum jusqu'à l'heure du coucher. Au lit.


                                                                                                    5 Décembre

            Ce matin je me rendis de bonne heure chez le peintre et posai pour la quatrième fois, mais il ne me plaît guère, ce qui me chagrine fort. Ensuite au bureau du Trésorier de la Marine où je rencontrai sir William Batten arrivé avant moi et nous entreprîmes le désarmement et le paiement des soldes du " St Georges ", puis arrive sir William Penne. Restâmes tous deux tandis que sir William Batten allait dîner chez lui. Il en revint et sir William Penn et moi allâmes dîner chez moi. Nous nous étions fait apporter deux tourtes par le commissionnaire Slater. Nous dînâmes fort gaiement et après le  partîmes dîner dans son carrosse, lui pour Whitehall et ma femme et moi pour l'Opéra, où vîmes Hamlet bien joué. Ensuite dans le quartier du Temple et chez Mrs Turner, toujours fort malade. Retour à la maison, et au lit.


                                                                                                   6 Décembre 1661
                                                                                                       classiquenews.com 
Afficher l'image d'origine            Fis la grasse matinée puis à la Grand-Salle de Westminster où je me promenai. Puis avec Mr Spicer, Hawley, Washington et le petit Mr Ashwell, mes vieux amis de l'Echiquier, à la taverne du Chien où leur offris deux ou trois quartes de vin. Partîmes pour Whitehall et chez George Carteret, les deux sirs William et moi dînâmes fort agréablement. Après vinrent les gouverneurs de la compagnie  des Indes orientales pour signer et sceller le contrat que nous passions, au nom du roi, avec eux. Puis nous nous rendîmes à l'oratoire du roi où parlâmes avec le roi et le duc d'York qui promit de surveiller de près le commerce des Indes. Revînmes chez George Carteret où nous finîmes notre travail. Prîmes le chemin du retour, mais sir William Batten proposant d'aller aux Trois Tonneaux dans Charing Cross, dont la jolie servante est la fille de la maison, je dis que la chose émoustillait fort sir William Penn. Il parut prendre ombrage de ces paroles et se fâcher, ce que voyant je fis semblant de ne pas tenir à revenir avec eux, et pris congé d'eux. Allai à la chambre du conseil parler avec milord le garde du Sceau privé. Mais ils m'attendirent, ce qui me fit plaisir. Nous n'échangeâmes toutefois pas un mot lui et moi pendant tout le trajet. Chez moi, et au lit.


                                                                                                7 Décembre

            Ce matin le capitaine Ferrer et l'Allemand Emmanuel Luffe, qui fait office de valet de pied de milord mais mériterait un bien meilleur emploi, vinrent me faire leurs adieux. Je priai l'Allemand de jouer sur mon théorbe, ce qu'il fit en bas, comme dans la chambre de ma femme qui était couchée. Il joue à merveille. Je prends conscience, grâce à lui, que mon luth est un excellent instrument. Je leur servis une tourte, du fromage de hure et du vin pour le déjeuner, et fûmes fort gais. Envoyai chercher Mr Adams, notre voisin, pour boire à la santé de Mr Shipley. Enfin nous nous séparâmes, mais moins d'un quart d'heure après leur départ, alors que ma femme et moi parlions d'acheter un beau col festonné de dentelles, qu'une femme lui a proposé ce matin, et qui vaut 45 shillings, voici que l'Allemand revient tout ensanglanté. Je m'en étonne et il me dit qu'il craint que le capitaine n'ait été tué par les bateliers à l'embarcadère de la Tour. Je m'y rends aussitôt et apprends que, bousculé par les bateliers qui lui offraient leurs services, le capitaine avait frappé l'un d'entre eux à coups de canne. Ils s'étaient rebiffés et lui avaient rendu la pareille, ils furent tous deux rossés d'importance. C'est alors que l'Allemand tira son épée et se précipita sur l'un d'entre eux. Le capitaine a cependant réussi à prendre le heu qui le transporte aux Downs avec les petits laquais. J'allai dans une taverne de l'embarcadère me faire restituer le panache du capitaine qu'un de ses hommes était venu réclamer. Rentré chez moi je trouvai ma femme pensant la tête de l'Allemand. Je lui donnai une cravate pour son cou et une couronne pour sa bourse et le laissai repartir. Vint ensuite Mr Moore, avec lui à Westminster et à l'hôtel de Worcester voir Mr Montagu avant son départ, ce soir.. Mais ne pûmes le voir, et à mon avis, il n'a pas envie de nous voir de crainte que nous lui réclamions de l'argent pour une raison ou une autre. Retour à Whitehall, mangeons un morceau de viande chez Wilkinson, puis au Sceau privé. J'apposai le Sceau pour la première fois ce mois-ci. Parmi les pièces visées, un brevet pour Roger Palmer, mari de Mme Palmer, le faisant comte de Castlemaine et baron de Limerick en Irelande. Mais cet honneur est limité aux enfants mâles nés de cette femme, lady Barbara, pour une raison que tout le monde connaît. Travail terminé, par le fleuve au bureau. J'apprends que sir William Penn a passé là toute la nuit, seul, qu'il vient de se lever. Me rendis auprès de lui et rendîmes visite au capitaine Holmes qui a rédigé un mémoire sur son affaire, dont il me donna copie ainsi qu'à un grand nombre de ses amis et l'a aussi présenté au roi et au Conseil. Je m'en servirai pour ce que je compte écrire sur le salut à la voile. Mais il fulmine contre sir John Mennes, qui est à son avis un gredin, un coquin, un lâche, le pire qui soit au monde. J'eus plaisir à le lui entendre dire, parce que sir John a eu des paroles très dure pour milord, bien que je regrette que les choses prennent ce tour. Le capitaine Cox arriva alors, nous restâmes un long moment ensemble, puis bonsoir. Retour à la maison et écrivis à mon père par la poste. Au lit.


                                                                                                  8 Décembre
 transports.blog.lemonde.fr                                             Jour du Seigneur
Résultat de recherche d'images pour "heu  véhicule anglais 17è siècle"            Au lit toute la matinée, songeant à me purger, mais comme il gelait ma femme ne me le permit pas. Dîner à la Garde-Robe et, après une longue conversation intéressante avec milady, après dîner, et entre autres sur le grand baptême qui eut lieu hier chez Mr Rumbold, avec les courtisans et toute cette pompe, dont je m'émerveille, je partis, fis à droite et à gauche toutes les églises ou presque omjusqu'à ma maison. Vint alors mon frère Tom qui resta causer avec moi. J'espère que tout ira au mieux pour lui et qu'il gagnera de l'argent. Souper et au lit.
  mieux pour lui et qu'il gagnera de l'argent. Souper et au lit.
          Ce matin, alors que j'étais au lit on m'apporta de la part de Mr Smallwood la réponse de Tom Trice au mémoire que j'ai adressé à la cour de la chancellerie. Je suis heureux de voir cette réponse, bien que je craigne d'avoir en pâtir.


                                                                                                   9 Décembre

            A Whitehall puis à la taverne du Vin du Rhin où je rencontrai Mr d'Esquier et lui fis mes adieux, car il se rend ce soir aux Downs avant de partir au Portugal, et passai ainsi la matinée. A midi dîner à la Garde-Robe où se trouvait milady Wright qui parla beaucoup de la valeur et du mérite des bonnes manières et pour qui seules les personnes qui étaient allées à l'étranger et connaissaient le monde étaient dignes d'être des gens de la Cour. Ce que je tentai de contredire et fus navré de l'entendre parler ainsi, elle qui, par ailleurs, est une femme fort sage et avisée. Ensuite avec Mr Moore dans le quartier du Temple pour parler avec mon cousin Turner de mon procès. Nous lûmes la réponse donnée par Tom Trice à mon mémoire, le consultâmes à ce sujet, et sur ce qu'il faudrait faire en son absence, car il doit quitter Londres demain. De là allâmes chez mon procureur Mr Walpole, que je n'avais encore jamais vu, et allâmes tous dans une taverne proche où nous discutâmes de notre affaire. Il me donna de grands espoirs, mais ce n'est qu'un jeune homme, et je ne crois guère à ses encouragements. Retour chez moi en voiture, souper et au lit. Ayant veillé jusqu'à minuit pour écrire des lettres à milord Sandwich et à tous mes amis qui sont à la mer avec lui. Je les enverrai demain par l'intermédiaire de Mr d'Esquier qui prend demain la mer vers le Portugal avec la flotte.


                                                                                                   10 Décembre

            A whitehall, Mr d'Esquier parti je fis porter mes lettres par un portier à la poste de Southwark pour qu'elles soient expédiées aux Downs par courrier exprès. En voiture chez milord Crew pour dîner. Fus arrêté en chemin plus d'une heure et demie, ce qui est une plaie en ces temps de cession parlementaire, mais il n'y a rien à faire. J'arrivai cependant avant que milord ne fût sorti de la Chambre, de dînai avec lui. Après retour au bureau, où tins réunion jusque tard le soir. Retour chez moi.


                                                                                                 11 Décembre
                                                                                                          ladressemuseedelaposte.fr
Afficher l'image d'origine            Mon frère Tom, puis Mr Moore vinrent me voir ce matin et restèrent un moment avec moi. Sortis ensuite et, en chemin rencontrai Mr Howell, le tourneur, m'invita à dîner aujourd'hui chez Mr Rawlinson avec des amis à lui, des officiers de la Tour, d'un pâté de venaison. Je promis de m'y rendre/ J'allai à la taverne de l'Old Bailey où je restai boire avec lui.Il me raconta en détail comment Pegg Kite s'était mariée à un tisserand, un homme fort laid, pour son plus grand malheur. Je suis bien content de n'avoir pas été mêlé à cette affaire. Retour chez moi, je mis mon manteau de velours, me rendis à la Mître pour dîner, comme je l'avais promis ce matin, mais montant à l'étage je trouvai au moins douze personnes dont le visage m'était inconnu. Je redescendis donc et j'eus beau rencontrer Mr Young, le tapissier, je ne voulus pas rester et m'en allai. A pied jusqu'à la Bourse, me promenai de long en large avec une faim de loup. Retour chez moi où, à ce que je crus comprendre, Mr Howell était venu pour m'emmener là-bas, mais je suis heureux de ne pas m'être trouvé chez moi. Ma femme était partie en voiture pour Clerkenwell voir Mrs Margaret Penn qui fait ses études dans cette ville. J'allai voir sir William Penn souffrant depuis deux ou trois jours. Avons un peu causé, allâmes à Moorfields en voiture, nous y promenâmes en dépit du froid fort vif, pendant une ou deux heures et entrâmes dans une taverne. Je bus de la bière et mangeai du pain et du fromage, mais il ne voulut rien prendre, rentrâmes fort joyeusement en voiture. Lui dans son appartement, moi, comme je l'avais promis, chez sir William Batten qui avait quitté la ville avec sa femme, si bien que Mrs Martha était seule à la maison avec Mrs Moore. Soupai des relifs appétissants du dîner de la veille, auquel avait pris part de nombreux convives. Arrive le capitaine Cox qui avait promis de me rencontrer là, mais il s'était beaucoup attardé, avait bu quelque part, était fort saoul et, partant, très fantasque, ce qui me gêna fort chez un homme que je tenais pour très sage et prudent. Le laissai là et rentrai chez moi, et au lit.


                                                                                             12 Décembre

            Nous fîmes la grasse matinée. Me levai et me préparai. Viennent bientôt me voir Will Bowyer et Mr Gregory, mes vieux amis de l'Echiquier. Je les emmenai au Dauphin où je leur offris une bonne boisson du matin, puis nous nous quittâmes. Je les invitai ainsi que toutes les vieilles connaissances de l'Echiquier à venir dîner chez moi mercredi prochain.
            Ensuite à la Garde-Robe où je dînai avec milady, son frère Mr John Crew et une dame qui ne m'était pas familière dîna à la table comme domestique de milady. Je ne la connaissais pas et craignis que la pauvre Madamoiselle ne fût partie. Mais j'ai appris depuis qu'elle était venue comme gouvernante de milady, et que c'est une femme mariée. Puis à Westminster à la Chambre des Lords pour rencontrer milord le garde du Sceau privé qui m'avait donné rendez-vous pour apposer le sceau
cet après-midi. Bientôt cependant on me prévient qu'il s'est rendu à Whitehall, si bien que nous voilà contraints de le rejoindre là-bas. Nous restâmes à apposer le sceau jusqu'à une heure si tardive que, même en obtenant de partir avant que la tâche ne fût terminée, je n'en arrivai pas moins après la fermeture du bureau. Me rendis donc chez sir William Penn et restai parler et boire avec lui. Retour chez moi.


                                                                                                  13 Décembre 1661

Afficher l'image d'origine            A la maison toute la matinée, le temps froid qui s'est mis au gel ces deux derniers jours, me causant des douleurs de vessie. Dîner chez moi, puis chez le peintre avec ma femme. C'était sa première séance de pose pour le dessin, et tout ce temps-là je contemplai le portrait d'une jolie femme dont le visage m'enchantait. Quand il eut enfin achevé la première couche du portrait de ma femme, je la trouvai plus belle que je ne m'y attendais, ce qui me plut infiniment. Retour chez moi et au bureau pour une affaire particulière. Les deux sirs William étaient là et avec eux au Steelyard où nous rejoinrent milady Batten et d'autres personnes. Nous bûmes et eûmes de la musique et la compagnie du capitaine Cox. Il paya tout. Retour tardif chez moi et voiture, et au lit.


                                                                                                14 Décembre

            Toute la matinée chez moi, au lit avec ma femme jusqu'à 11 heures. C'est une habitude que nous avons prise cet hiver, de faire la grasse matinée. Dîner à la maison. Au bureau l'après-midi. En réunion jusque tard. Le soir retour chez moi, et au lit.


                                                                     ( à suivre )
                                                                                       15 décembre
                                                                              Jour...../
            A l'église le matin....../
                       

vendredi 10 juin 2016

Correspondance Proust Lucien Daudet 2 ( Lettres France )

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            Mon cher petit,
            Je vous avais dit de ne pas vous fatiguer à me répondre. Et voici une nouvelle et adorable lettre. Quant à ma reconnaissance de la 1è, je pense que votre étonnement est de pur " style ". Car je vous l'ai bien insuffisamment exprimé, je dis insuffisamment non seulement auprès de ce que je dois mais de ce que je sens. Je vous remercie pour les noms de fleurs, mais les " pensées " ( que j'adore et sur qui j'ai écrit beaucoup de choses ) ne sont guère mon affaire parce que ce sont des fleurs plates, larges et sans parfum, il me faut quelque chose qui ressemble plus à la verveine. Peut-être je m'arrêterai, faute de mieux, aux jacinthes qui ne ressemblent en rien aux verveines, mais enfin ne sont pas larges et plates. Mais il me semble que ce n'est guère une fleur de plate-bande. Mimulus est ravissant mais trop latin et ayant besoin d'explications ( à moins que cela n'ait un nom " vulgaire " ) mais ne me répondez pas pour tout cela. Naturellement si Cocteau est auprès de vous vous pouvez parfaitement lui dire que vous avez mes épreuves, mais ne me jugez pas sur elles. Non seulement l'ouvrage est impossible à prévoir par ce seul premier volume qui ne prend son sens que par les autres, mais encore les épreuves ne sont pas corrigées, elles fourmillent de fautes, et encore il manque surtout dans la seconde partie des petits faits très importants qui resserrent autour du pauvre Swann les noeuds de la jalousie. Et même quand ce sera prêt à paraître, ce sera comme des morceaux dont on ne sait qu'ils sont des leitmotives quand on les a entendus isolément au Concert dans une Ouverture sans compter tout ce qui se situera après coup ( ainsi " la Dame en rose " était Odette, etc.)
Afficher l'image d'origine          Mon cher petit, dites à Cocteau combien j'ai été et suis malade pour qu'il m'excuse d'être si en retard avec lui, mais je ne puis vous dire ce qu'une lettre me fatigue et c'est même pour cela que je vous ai écrit si longuement, parce que en ce moment je sens que je ne peux pas donner plus que mes forces si comptées et si défaillantes.
            Pour l'article tout ce que vous me dites est parfait, je voudrais seulement qu'il n'y ait pas de malentendu entre nous sur ce point. Vous me dites : " ...à moins qu'au Figaro quelqu'un de plus autorisé, etc... " Mon cher petit, littérairement ( je veux dire dans l'ordre réel de talent ) personne ne peut être plus autorisé que vous à mes yeux, et à tous les yeux, fort rares, qui savent voir. Si donc vous croyez que je peux souhaiter quelqu'un de plus autorisé, c'est que vous avez pris trop à la lettre ce que j'ai dit de mon plaisir d'amour-propre, etc. Je l'ai dit pour " ne pas me faire plus désintéressé " que je ne suis. Mais je vous assure que je le suis cependant plus que vous ne croyez. Vous pourriez demander à de nombreux Y. comment j'ai répondu à leurs gentilles offres d'articles. Il est vrai que je tiens plus à ce livre-ci. ( Je suis trop fatigué pour développer l'élucidation inutile d'un malentendu qui n'existe pas, ne me répondez pas sur tout cela ). Je ne doute pas que Calmette prendra tout cela avec joie. Le précédent du Roi du Portugal et du Prince Impérial n'est pas convaincant car le cas actuel est comme dit La Fontaine " tiré d'animaux plus petits ". Mais votre signature suffit. Seulement si vous ne répugnez pas à mon idée de me le confier ( sous pli cacheté car je ne veux pas le lire, sans cela je ne pourrais pas décemment le mettre en circulation ), j'aimerais mieux que Reynaldo ou mon éditeur Grasset essayassent du Journal ou du Temps, lus par une clientèle un peu moins exclusivement
" Madame *** " et " M/ *** " que le Figaro. Quant au Figaro, j'en serais ravi aussi et de même que l'Intransigeant. Mais là, comme je suis ami de Bailby, peut-être vaut-il mieux le laisser à son inspiration s'il désire en parler. De plus, comme j'y ai parlé de vous, cela n'aurait-il pas plus l'air d'un
" échange de bons procédés " qu'ailleurs. Mais ce serait parfait aussi... Mais surtout si à ce moment-là vous êtes fatigué ou en train de travailler, ne le faites nulle part, votre lettre restera la grande joie et suffit à elle seule bien largement !
            J'ai retrouvé le passage du poulet et en effet cela veut dire que c'est le même jour. Mais je ne sais pas si je pourrais arranger cela, car ma maladie se traduit maintenant par buter pendant des mois contre un mot que je ne peux pas changer.
            Je suis bien heureux de ce que vous me dites de l'opinion favorable de Madame votre Mère. Si Jean Cocteau est auprès de vous, dites-lui mille affections de ma part. Je vous embrasse tendrement
( sans barbe, je l'ai coupée ).
                                     Votre                                                                       loree-des-reves.com
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                                                                                          Marcel


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            Mon cher petit,
            Abusant de votre bonté, je vous envoie pour vous la soumettre la fin " possible " de ce volume, sans l'allonger que de quelques pages. La seule modification à ce que vous connaissez serait que le jour de neige, les jours où je vois du soleil sur le balcon, seraient quelques pages plus haut. Et ce n'est qu'après eux que je mettrais ( ce qui en ce moment est un peu avant :
            " Les jours où Gilberte ne venait pas, j'allais en pèlerinage devant sa maison, ou tâchais de voir passer Swann allant chez son dentiste, ou emmenais Françoise jusqu'à l'allée des acacias voir passer Mme Swann "
dit mieux je vous résume seulement pour vous montrer comment j'enchaînerais ). Alors se placerait ce morceau sur mes promenades allée des Acacias que je vous envoie et sur lequel je finirais, ( je finirais après les mots : " Les maisons, les route, les avenues sont hélas fugitives comme les années. ) Ce morceau ne venait qu'une centaine de pages plus loin et était rétrospectif, puisqu'après être allé chez les Swann, j'évoquais un temps où je ne les connaissais pas encore. Maintenant ce serait le contraire. Je vois des inconvénients à finir par ce morceau, mais j'y vois aussi de grands avantages. Je ne vous dis ni les uns ni les autres pour ne pas vous influencer. Vous venez de lire ( j'en suis encore pour prendre votre verbe " moulu " de reconnaissance ) tout le livre. Vous jugerez bien si cela termine mieux que le soleil sur le balcon.
            Je vous embrasse avec une tendre reconnaissance mon cher petit


                                                                                          Marcel Proust

            Il y a plein de fautes dans ces épreuves. J'ai aperçu " entêté " pour " étêté ", etc, mais cela ne fait rien, vous pourrez vous rendre compte.

                                                                                                             lesbulbesafleurs.com
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            Mon cher petit,
            Puisque cela vous convient aujourd'hui, je vous attends maintenant 6 heures ( si vous n'avez eu dans l'intervalle aucun changement ). Si à 7 h. 1/4 vous n'êtes pas là , je penserai que vous n'avez pas pu et commencerai ma fumigation. Dans ce cas, si vers 10 heures j'étais de nouveau bien, je vous renverrais un mot. D'autre part, demain mercredi, dès que je serai bien ( si je le suis ), je vous renverrai un mot par un taxi. Et de même jeudi.
            Pardon de cet abus de vous. Et tendrement à vous

                                                                                      Marcel


         



                                                               

mercredi 8 juin 2016

Révolte Paul Vérola ( Poème France )

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ancoco.centerblog.net





                                     Révolte

            Eh bien non ! j'ai menti, je suis jaloux, je saigne
            Plus que si l'on m'avait percé de mille clous !
            Non, je ne veux pas qu'une autre bouche t'enseigne
            D'impurs baisers ! Non, j'ai menti ! je suis jaloux !

            Eh quoi donc ! tu m'as cru ? tu n'as donc rien compris !
            Tes yeux ne voient donc pas ? Ton coeur est donc de glace ?
            Il te faut donc des pleurs ? il te faut donc des cris ?
            Es-tu donc à ce point aveugle, à ce point lasse  ?
                                                                                               
            Quoi ! tu peux tolérer que ma lèvre se ceigne                          utpictura18.univ-montp3.fr
Afficher l'image d'origine            D'un rire qui ressemble au hurlement d'un loup !
            Qui ? moi !... permettre, moi, qu'un autre amant t'étreigne...
            Que sa main, sur ta chair... Oh ! non ! j'étais fou !

            Dis-moi que tu les as jugés à leur vrai prix,
            Mon calme et mes raisonnements de Lovelace ;
            Dis que te pardonner eût été du mépris
            Et que je te tuerai si d'autres bras t'enlacent !

            Non ! non ! L'amour n'est pas le printemps anonyme
            Qui nous fait verdoyer quand la sève s'anime,
            Et si j'ai dit cela, je ne suis qu'un menteur !

            Non ! non ! le coeur humain c'est la fleur diaphane
            Que la poussière des chemins ternit et fane,
            Et qui perd un pétale à tout nouvel amour !

            Oh ! ne t'effeuille pas fleur tendre encor intacte,            
            Et, liée à mon coeur par un radieux pacte,
            Conserve auprès de moi ta forme et ta senteur !

            La femme sans candeur, c'est la fleur sans corolle :
            Mais si tu me chéris, fidèle à ta parole,
            Même en l'herbier du temps, tu seras fleur toujours !
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Fleur, Pavot, Jardin, Feuilles, Bourgeon, Capsule





           Paul Verola                                                                

                                                               
                                                     

                                                      ( in Les Baisers morts - Oeuvres en prose complètes de Verlaine.
                                          Présentant le texte il souligne "..... M. Vérola est auteur ( non le                             préconisateur, ainsi qu'il le dit avec une plaisante franchise ) d'une nouvelle science de traiter
          le sonnet. C'est ce qu'il appelle des sonnets accouplés.... )
                                   

mardi 7 juin 2016

Anecdotes et Réflexions d'hier pour aujourd'hui 59 Samuel Pepys ( Journal Angleterre )


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                                                                                                   15 Novembre 1661

            A la maison toute la matinée, et à midi, avec ma femme, ensemble dîner à la Garde-Robe. Elle se montra à milady avec le foulard acheté avec la dentelle choisie l'autre jour, vraiment fort beau. Laissai ma femme et me rendis auprès de milord le Garde du Sceau privé à Whitehall. Lui donnai copie du tarif des droits perçus au bureau et il s'en montra fort satisfait. A l'Opéra où je rencontrai ma femme, le capitaine Ferrer et Mademoiselle Le Blanc et vis la seconde partie du Siège de Rhodes, fort bien représentée. La reconduisis en voiture chez elle. La voiture descendit la colline en empruntant Thames Street. Nulle voiture, je pense, n'avait encore descendu de là jusqu'au pied du Pont, mais en remontant la côte de Fish Street, les chevaux étaient si fourbus qu'on ne put leur faire gravir la pente, malgré les bourrades et coups de fouet que lui donnèrent tous les enfants et hommes de la rue. Il me fallut bien à la fin envoyer mon petit valet chercher un flambeau. Descendîmes de voiture et en prîmes une autre quelque temps après au coin de Fenchurch Street. Retour à la maison. Au lit.


                                                                                                           16 Novembre

            Au bureau toute la matinée. Dîner à la maison. Partis l'après-midi à mes affaires dans le quartier du Temple où trouvai rédigé  mon mémoire contre Tom Trice. Je le lus, me parut bon. A la maison.


                                                                                                           17 Novembre
pretapartir.fr                                                                                               Jour du Seigneur
Afficher l'image d'origine            A notre église. A midi sir William Penn répondit à mon invitation à dîner et je ramenai avec moi de l'église Mrs Hester, parente de milady Batten. Fûmes de fort bonne humeur. Derechef à l'église et entendis un benêt faire l'éloge de la musique d''église et tonner contre les hommes qui gardent leur chapeau à l'église. Mais je dormis pendant une partie du sermon ainsi que pendant la prière et la bénédiction qui suivirent. Tout se passa sans que je me réveille, ce qui ne m'était encore jamais arrivé. Retour chez moi, arrivent bientôt mon oncle Wight et ma tante, ainsi que Mr Norbury et sa femme. Nous bûmes ferme, et très joyeux jusqu'à l'heure du souper. Puis nous nous quittâmes, ma femme et moi étant invités cher sir William Penn, où nous fûmes là aussi fort gais. Retour à la maison, prières et au lit.


                                                                                                       18 Novembre

            En voiture avec sir William Penn, ma femme et moi vers Westminster, mais voyant Mr Moore dans la rue, je descendis et allai avec lui chez Mr Battersby, le pasteur, m'arrêtant en cheminà Saint-Paul où je vis les petits chanteurs qui allaient en surplis à la prière, quelques pauvres gens et des gamins désoeuvrés pour les écouter. Première fois que je les vois et navré de trouver les choses dans une telle confusion. Reçu de Mr Battersby 50 livres sterling de plus, ce qui fait 100 que je lui ai maintenant empruntées. Je déchirai l'ancien billet de 50 livres et, payant l'intérêt que je lui devais sur cette somme, lui fis un nouveau billet pour le total de 100 livres. Dînai chez lui, bon repas, et son épouse jolie et femme de bien. Il y avait à table un jeune pasteur qui s'enivra avant le dîner, ce qui me navra.
            Après dîner chez Mr Bowyer à Westminster pour chercher ma femme. L'emmenai au Théâtre voir Philastère, que je n'avais jamais vu, mais trouvai cette pièce très inférieure à ce que j'en attendais. Retour à la maison en voiture.


                                                                                             19 Novembre

            Au bureau toute la matinée. Alors que je rentrais à la maison, trouvai Mr Hunt seul avec ma femme dans la chambre ce qui, Dieu me pardonne, jeta le trouble dans mon esprit. Mais me souvenant que c'était jour de lessive et qu'il n'y avait de feu ailleurs pour le recevoir, car il faisait froid, je retrouvai ma sérénité. Il dîna avec nous, et ensuite pris une voiture et l'emmenai avec nous chez mon cousin Scott, où nous le déposâmes et le quittâmes, et ma femme et moi restâmes pour le baptême du fils de mon cousin, mon cousin Samuel Pepys d'Irlande et moi étions parrains. Je donnai à l'enfant le nom de Samuel. Il y avait dans la chambre un groupe de jolies femmes, mais nous ne restâmes pas là et partîmes boire et manger avec le pasteur dans une autre pièce. A la fin, lorsque la plupart des femmes furent parties, Sam et moi allâmes rendre visite à ma cousine Scott qui avait quitté son lit. Nous restâmes à parler fort gaiement. Ma cousine Stradwick était marraine. Puis je laissai ma femme rentrer chez nous en voiture, tandis que j'allais à pied au quartier du Temple pour mon procès. Reçus une assignation pour Tom Trice que je lui portai moi-même à la maison habituelle des Doctors Communs et lui remis en mains propres. Retour chez moi, et au lit. ( La sage-femme et les deux nourrices m'ont coûté aujourd'hui 20 shillings à elles deux. )


                                                                                               20 Novembre 1661
                                                                                                       visitlondon.com
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            A la Grand-Salle de Westminster par le fleuve, le matin; Vis le roi qui allait dans son canot au Parlement dont la session débute aujourd'hui. Les évêques, à ce que j'entends dire, siègent aujourd'hui à la Chambre des Lords. Je me promenai longtemps dans la Grand-Salle, mais n'appris d'autres nouvelles que celles que m'apprit Ned Pickering, et qui me chagrina : sir John Mennes aurait écrit au roi que s'il ne renvoyait tous les capitaines de lord Sandwich, il ne serait, à son avis, maître de la flotte lorsque celle-ci serait de retour. Il tente ainsi de provoquer la disgrâce de milord. J'espère néanmoins que tout cela restera sans effet, car le roi a de l'affection pour lui.
            Ensuite par le fleuve jusqu'à la Garde-Robe où je dînai avec milady et milady Wight. Cette dernière me paraît être une femme pleine d'esprit mais fort vaniteuse et fière. Allai après dîner avec Mr Moore dans le quartier du Temple où il lut mon mémoire qui lui parut assez bon. Nous revînmes et il m'accompagna jusqu'au bas de Cheapside, où je lui offris une pindte de xerès, et nous nous séparâmes . Retour chez moi, examinai mes papiers concernant le procès Tom Trice, pense avoir trouvé qui ont des chances de m'être plus utiles dans le différend qui nous oppose que tous ceux qui m'avaient servi jusqu'ici. Au lit, ravi de tout cela. Restai longtemps à lire Liberté et Nécessité de Hobbes, ouvrage court mais fort pertinent. M'endormis.


                                                                                                  21 Novembre

            Le matin repris l'examen des papiers. Arriva bientôt Mr Moore qui trouva que ces papiers me seront peut-être fort profitables. Il resta dîner avec moi et nous mangeâmes un bon aloyau de boeuf ( le premier que j'ai acheté moi-même depuis que je possède ma maison ). Puis, avec lui, au quartier du Temple. Montrai mes papiers à Mr Smallwood qui les trouva intéressants. Les lui laissai et me rendis avec Mr Moore à son logement de Gray's Inn, me montra son vieil exemplaire de Britannia  de Camden, que j'ai l'intention de lui acheter. Je l'emportai et le laissai en l'enclos de Saint-Paul pour le faire relier. Retour chez moi, et au bureau tout l'après-midi. C'est la première fois que nous nous réunissons l'après-midi. Nous le ferons dorénavant durant toute la session du Parlement. Aujourd'hui a été voté au roi une somme de 120 000 livres, qu'il faudra lever pour payer ses dettes. Après le bureau, avec sir William Batten, au Dauphin. Bûmes un verre et l'y laissai pour retourner dans le quartier du Temple à mes affaires. Retour à la maison à pied. Au lit.


                                                                                                  22 Novembre
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Afficher l'image d'origine            Resté à la maison toute la matinée. A midi, comme convenu, avec ma femme, au Dauphin pour dîner. Trouvai sir William Batten, sa femme et sa fille Matt, le capitaine Cocke et sa femme, une Allemande, mais fort belle, et nous prîmes ensemble un repas payé avec l'argent de paris gagnés et perdus par lui et par moi. Nous eûmes la meilleure musique et de fort belles chansons, fûmes très gais et dansâmes. Mais ce qui me charma le plus, ce fut Madame Cocke et son petit garçon que son père me confia dans un mouvement d'allégresse. Mais après toute cette gaieté arriva la note de 4 livres, en sus des 40 shillings pour la musique, ce qui nous assombrit, mais il fallut bien payer. Je pris congé et les laissai là vers huit heures du soir. Allai à pied dans le quartier du Temple accompagné de Roger, serviteur de mon cousin Turner et, sur ses conseils, me rendis chez le sergent Fountaine avec qui je m'entretins de mon procès. Il me rassura et je lui donnai 30 shillings d'honoraires. Retour chez moi, et au lit. ( Aujourd'hui Mary Bowyer envoya à ma femme une jolie servante que ma femme a engagée ).


                                                                                                23 Novembre

            A Westminster avec ma femme qui alla chez son père, et vers 10 heures retour chez moi, puis un moment au bureau et en voiture avec le commissaire Pett à Cheapside, chez un certain Savill, à qui j'ai l'intention de commander mon portrait et celui de ma femme. Allai ensuite dîner à la Garde-Robe, puis retour au bureau où restai tout l'après-midi jusqu'au soir. Puis vinrent chez moi les deux sirs William suivis du capitaine Coc.ke. Souper fort agréable, puis bonsoir. Aujourd'hui me suis fait livrer une échine de boeuf, dans l'intention de l'envoyer en cadeau à mon oncle, ce que j'ai fait.


                                                                                           24 Novembre
                                                                                Jour du Seigneur
            Levé de bonne heure et, comme convenu, à l'église de la ruelle de St Clément pour retrouver le capitaine Clocke qui m'a souvent recommande Mr Alsopp, leur pasteur. C'est assurément quelqu'un de très capable mais, comme pour tout, il ne répondit pas à mon atten oùte. Le texte présenté : " Tout ce qui nous est donné de bon et de parfait nous vient d'en haut. "
            Ensuite, Cocke et moi à la taverne du Soleil derrière la Bourse où nous rencontrâmes d'autres personnes venue de la même église, et restâmes boire et parl render avec eux un moment. Nous nous quittâmes et j'allai dîner à la Garde-Robe. Restai tout l'après-midi seul à parler avec milady. Puis me rendis chez Madame Turner, la pauvre femme est encore malade et je commence à craindre pour elle.
Retour vers la maison et, rencontrant Mr Young le tapissier, l'accompagnai à la Mître où nous restâmes boire une quarte de xéres avec Mr Rawlinson. Me rendis ensuite chez sir William Batten où je restai souper. Puis chez moi, trouve une invitation de mon oncle Wight nous conviant, ma femme et moi, chez lui, mardi prochain, pour manger l'échine de boeuf que je lui fis envoyer hier.
            Prières et au lit.


                                                                                             25 Novembre 1661
                                                                                                              heraldique-europeenne.org 
            A la Grande-Salle de Westminster le matin avec le capitaine Lambert, là à la taverne du Chien. Il m'offrit son repas d'adieu, ainsi qu'à d'autres amis, car il devait prendre la mer demain pour le dét. Nous eûmes des huîtres et du bon vin. Ai rencontré ce matin Mr Sankey dans la Grand-Salle, et nous nous donnâmes rendez-vous au Théâtre, cet après-midi. A midi, à la fin de la séance de la Chambre, rencontrai sir William Penn et avec lui le major général Massey, que ses propos me font juger fort intelligent et, entre autres, très au fait en ce qui concerne le secret des poudres et artifices, et, avec un autre chevalier, allâmes dîner au Cygne, dans la cour du Palais, faisant venir notre repas à la taverne de la Jambe. Après dîner, au Théâtre avec sir William Penn. Vîmes Le capitaine campagnard, une pièce ennuyeuse. Je le laissai ensuite avec ses Tories et allai à l'Opéra où j'assistai au dernier acte de L'Esclave et trouve là Mr Sankey et Mrs Mary Archer, la soeur de la belle Betty que j'admirais autrefois à Cambridge. Je les emmenai à la Toison dans le quartier de Covent Garden, pour dire bonsoir à sir William Penn qui m'avait attendu. Mais, Mr Sankey, en dépit de tout ce qu'il put dire, ne réussit pas à persuader sa belle de s'aventurer avec lui dans la taverne, ce qui le chagrina fort. Nous retournâmes donc immédiatement dans la Cité en voiture et descendîmes boire à la Mître dans Cheapside, puis déposâmes la dame chez son oncle dans l'Old Jury. Lui et moi retournâmes à la Mître où nous bûmes jusqu'à minuit passé. Je me trouvai à ce moment avoir un peu trop bu. Il m'exprima son intention d'avoir cette fille riche de 1 000 livres. A maintes reprises nous bûmes à la santé de sa soeur Betty dont je chéris la mémoire. Nous nous séparâmes enfin, et je rentrai chez moi sans encombre, à ceci près que j'ai attrapé froid et que j'ai la voix enrouée. Au lit.


                                                                                                26 Novembre

            Pas bien le matin et m'attardai au lit. Me lève enfin et à midi, avec ma femme, chez mon oncle Wight où nous rencontrâmes Mr Cole, Mr Rawlinson, Norbury, sa femme et la fille de celle-ci, ainsi que d'autres amis, venus manger l'échine de boeuf que j'avais envoyée. La mangeâmes gaiement. Bientôt appelé au bureau où je me rendis et restai tard en réunion, et une fois notre travail terminé au bureau, les deux sirs William, moi, le capitaine Cocke et Mr Bence qui, saoul, montra dans ses propos tant d'impudence et de sottise que nous fûmes forcés de l'écarter et de nous défaire de lui. Restâmes entre nous au bureau jusqu'à 9 heures à discuter et à boire trois ou quatre bouteilles de vin. Retour chez moi, et au lit. Ma femme et sa servante Doll se disputaient, ce qui me peina.


                                                                                                     27 Novembre
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Afficher l'image d'origine            Ce matin, notre servante Doll et ma femme se quittèrent, bien que la fille ait une langue de vipère, je répugnais à la renvoyer, mais je pris congé d'elle avec gentillesse. Je me rendis chez le peintre Savill et posai une première fois pour mon portrait. Ensuite, dîner avec milady. Après avoir parlé une heure ou deux théologie avec elle, allai en compagnie du capitaine Ferrer et de Mr Moore au théâtre, vîmes Hamlet, très bien joué. Retour chez moi où j'apprends que ma femme est allée présenter ses respects à milady aujourd'hui, cet après-midi, avec ma tante Wight et Ferrer, et que là elles dansèrent et se divertirent fort. Comme toujours milady montre beaucoup de sympathie à ma femme. Au lit.


                                                                                                    28 Novembre

            Chez moi toute la matinée. A midi Will me rapporta de Westminster, où je l'avais envoyé, des lettres de lord Sandwich en provenance de Tanger, où il se trouve toujours et a mené une action militaire efficace contre les Turcs. Il a repris un navire anglais appartenant à un certain Mr Parker, négociant de Mark Lane.
            L'après-midi Mr Pett et moi nous rencontrâmes au bureau. Comme il n'y avait que nous deux, je vis que nous n'étions pas traités avec le respect qui nous était dû. M'arrangeai pour mettre fin à l'entretien et emmenai Mr Gauden avec moi. Malgré la pluie nous avons résolu d'aller, lui chez milord le trésorier, et moi chez le chancelier avec une lettre reçue de milord aujourd'hui. Allâmes dans une taverne au bout de Mark Lane, où nous attendîmes longtemps avant de trouver une voiture. Chez milord le trésorier, en pure perte, puis chez le chancelier, où je rencontrai Mr Dugdale. Avec lui et un certain Mr Simons, qui fait partie, je crois, de la maison de milord Hatton, Mr Kipps et quelques autres, à la taverne de la Fontaine. Restâmes jusqu'à minuit à boire et à chanter. Mr Simons et un certain Mr Agar chantaient fort bien. Mais, Mr Gauden, presque ivre, eut la bonne idée de partir. J'en profitai pour partir aussi, et comme il faisait un beau clair de lune, nous rentrâmes à pied, et, bien que ivre, il marcha d'un train qui m'étonna. Chez moi je trouve la nouvelle servante, Sarah, grande fille fort jolie, dont je crois que nous serons contents. Au lit.


                                                                                                 29 Novembre

            Je fis la grasse matinée jusqu'à ce que les deux sirs William m'eussent fait dire que nous devions nous présenter aujourd'hui devant le Duc et qu'ils désiraient me rencontrer dans la Grand-Salle de Westminster à midi. Je me levai donc et m'y rendis. Arrivé là je crus comprendre qu'ils étaient partis dîner chez Mr Coventry qui a un logement dans la vieille cour du Palais. Première fois que j'entends parler de ce dîner où je les retrouvai ainsi que sir George Carteret. Eûmes un fort bon dîner, bon accueil, conversation intéressante. Après le dîner, par le fleuve, jusqu'à Whitehall chez le Duc qui nous reçut dans son cabinet de travail. Il nous parla de l'affaire Holmes et nous demanda ce qui se faisait d'habitude pour amener les bâtiments étrangers à nous saluer à la voile. Ils en parlèrent de leur mieux, mais, pour ma part, je ne trouvai rien à dire, à mon grand regret, si bien que je me vis contraint d'inventer une histoire et, après que nous eûmes quitté le Duc, je dis à sir Coventry que j'avais souvent entendu dire par Mr Selden qu'il avait des preuves établissant que, du temps de Henry VIII celui-ci avait donné l'ordre d'exiger que les navires du roi du Danemark le saluent dans la Baltique.
Afficher l'image d'origine            Ensuite, sir William Penn et moi au Théâtre, mais tellement de monde que nous eûmes à trouver de la place, il monta alors dans une des loges et j'allai dans les places à 18 pence. Vîmes Le coup de foudre, une pièce de Mr Killigrew. Première fois qu'on la joue depuis les troubles. On attendait beaucoup de cette pièce que je trouve cependant médiocre, et je constate que tout le monde pense comme moi. Retour chez moi, m'arrêtant dans l'enclos de Saint-Paul pour me procurer " Un Mare Clausum " avec le projet d'écrire un opuscule, tout ce que je pourrai rassembler sur la question du salut à la voile, et que je présenterai au Duc. Ce qui serait, me semble-t-il, une bonne façon de me faire connaître. Retour à la maison, et au lit.


                                                                                              30 Novembre 1661

            Le matin dans le quartier du Temple, chez Mr Phillips et le Dr Williams pour mes diverses affaires d'ordre légal, puis dîner à la Garde-Robe. Après dîner m'éclipsai, milady dînant dans sa chambre. Retour chez moi, et au bureau tout l'après-midi. Cela fait, Mr Batten, moi et le capitaine Cocke nous fîmes apporter une bouteille de xéres au bureau, où nous restâmes tard à boire et à discuter. Retour chez moi, et au lit.                                                                        


                                                         
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                           Je suis aujourd'hui en fort bonne santé, avec seulement un léger rhume. Cela fait assez longtemps que le Parlement siège. Les anciens juges de feu Sa Majesté qui ont été condamnés ont été traduits devant le Parlement et seront sans doute pendus. Je suis engagé jusqu'au cou dans un procès contre Tom Trice. Dieu réserve à ce procès une issue heureuse ! Fort soucieux des grandes dépenses que j'ai faites dernièrement pour des futilités dont Dieu me garde à l'avenir. C'est le dernier jour où est encore acceptée la monnaie du régime précédent pour les paiements ordinaires, mais elle serait utilisés encore trois mois pour les paiements destinés au Trésor royal.


                                                   
                                                                                    ......../ à suivre......../

                         1er Décembre                      
                                 jour du
                                            ......./ le matin à l'église