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Journal secret 3
( extraits suite )
J'observe mes réactions et l'influence qu'exerce sur elles l'habitude........
Toutefois, au bout d'un mois, la routine m'avait déprimé et, une nuit qu'elle avait lâché un pet au lit, j'ai préféré me tourner dans l'autre sens, en silence, plutôt que de lui sauter dessus. Mes sentiments émoussés par l'habitude étaient en sommeil.
Je me souviens de la première nuit où nous sommes restés allongés au lit et où nous nous sommes endormis sans faire l'amour. Auparavant, nous n'avions pas manqué une seule nuit. A partir de là, ce fut de plus en plus fréquent.
............. Le déménagement à Tsarskoïé Sélo a été un grand soulagement pour N. et pour moi. Nous nous sommes accordés un répit nécessaire, à l'écart des parents ennuyeux et des connaissances importunes.
La visite du Lycée a réveillé en moi des souvenirs qui auraient provoqué sa jalousie si elle en avait eu vent. Alors, encore fidèle à N., je me suis demandé si l'adultère mental était un véritable adultère. J'en suis arrivé à la conclusion que mes souvenirs poignants n'étaient pas de l'adultère, car mon expérience de l'amour rend mes rêves négligeables en comparaison. Avec N. c'est le contraire. Si elle rêve à quelqu'un d'autre elle me devient infidèle parce qu'elle n'a connu que moi. En un mot, mes rêves sont provoqués par des souvenirs que je ne donne pas, et ses rêves s'inspirent de basses pensées nées du présent qu'elle invoque délibérément.
Bientôt, quand j'aurai franchi le Rubicon et recommencé à baiser à droite et à gauche, ce sujet cessera de me faire souffrir et je lui pardonnerai tous ses fantasmes, demandant simplement à Dieu que, moi vivant, elle ne me soit pas infidèle. Mais le plus effrayant c'est que rien ne nous permet de savoir si nos femmes sont fidèles. Je ne saurai jamais ce que fait N. lorsque je ne la vois pas. On ne peut être fidèle qu'à la fidélité. Quand ma fidélité faiblit apparaît un Diable jaloux et les preuves de fidélité n'y peuvent rien car chaque signe du contraire, dans mon esprit, devient irréfutable. Et seul le retour de la fidélité dans mon propre coeur en chasse la jalousie. Hélas pas pour longtemps.
Je me fais penser à Othello : lui aussi était Noir et lui non plus n'était pas jaloux, il était confiant.
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............................ bibo.kz
Je suis jaloux de chaque jolie femme parce que j'aime chaque jolie femme. Et n'importe quelle femme est jolie après la jouissance en elle, cela signifie qu'elle est vraiment jolie. N. est vraiment très très jolie car, bien qu'ayant depuis longtemps cessé de la désirer, je n'ai jamais cessé de l'admirer.
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La fidélité est une lutte contre la tentation d'être infidèle. J'ai épuisé mes forces au cours de cette longue bataille. Quand j'ai senti que cette faiblesse à laquelle je m'abandonnais me menait droit aux ennuis, j'ai essayé de persuader N. d'aller passer quelque temps au village. Je savais que je serais incapable de résister à la tentation et que l'isolement me maintiendrait à mon bureau. Quand le désir s'allumerait en moi, il n'y aurait que N. à mes côtés. Je n'avais pas compté avec les filles des serfs du manoir.
Son tempérament serein, que j'ai toujours eu quelque peine à perturber, trouvait son plus vif plaisir lorsqu'elle aguichait les hommes, ce qui est absolument sans risque, c'est en tout cas ce qu'elle m'a assuré. Elle s'enivrait du pouvoir de sa propre beauté qui mettait à ses pieds les hommes les plus influents de Pétersbourg, dont le Tsar. Grâce à sa décence et à sa gentillesse elle ne prenait pas avantage de sa beauté dans un esprit de conquête, mais se contenter d'en jouer, comme le ferait une enfant.
Si on la frustrait d'une vénération constante, la vie perdrait toute signification à ses yeux. Rien, pas même les enfants, ne revêt tant d'importance pour elle. Non, c'est trop de dire cela. Les enfants ont encore sa préférence. Après la naissance de Mashka elle s'est tellement épanouie qu'elle espérait accroître encore son charme après chaque nouvelle naissance. Mais non, je ne veux pas être caustique envers ma femme, je l'aime. Seules mes propres faiblesses me poussent à vouloir l'atteindre dans sa dignité.
La première fois que je lui ai été infidèle je savais que je rompais des liens impossibles à rétablir. J'ai pensé " Quand on baise une putain on ne trompe pas sa femme ". Mais au même moment j'avais compris que j'avais brisé mes voeux de mariage et qu'à partir de ce jour notre vie serait irrévocablement changée, même si elle ne le découvrait jamais. Je n'ai cessé de me répéter qu'un poète ne peut vivre sans fièvre et n'est pas fait pour le monde du mariage. Il me fallait accepter que tombe cette fièvre, parce que c'est la loi. Dieu ne nous empêche pas d'apprendre ses lois, mais il punit toute tentative qui les changerait. J'aurais dû être croyant, mais j'ai osé les enfreindre, et cela ne peut se faire qu'en tournant le dos à Dieu
* Après cette première transgression je ne pouvais plus m'arrêter. N. l'a deviné avant même de l'apprendre de ma bouche, et de celles des autres. J'ai plongé dans la luxure avec avidité, et si l'on veut appeler cela des saletés, alors du miel étalé partout sur un corps c'est aussi de la saleté. Elle n'en paraîtra pas moins douce.
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Le rendez-vous fatal s'est déroulé dans un bordel Il n'y a pas de meilleur endroit pour assouvir ma passion d'observer le plaisir des autres. Quel exemple frappant n'a-t-on pas de l'amour d'un homme pour l'humanité quand le plaisir d'un homme en éveille un semblable chez lui !........... Ma passion pour ce genre de spectacle m'a conduit à faire une connaissance qui pourrait bientôt entraîner ma mort.
Chez Sofya Astafievna............... C'était d'Anthès qui avait récemment été admis dans la Garde et dont toutes les femmes raffolaient. Nous n'avions pas été présentés mais quelqu'un me l'avait un jour fait remarquer, dans une demeure où se réunissaient les plus belles femmes de Saint-Pétersbours. J'étais debout avec N. qui, elle aussi, le voyait pour la première fois.
- " Il est vraiment remarquablement beau ! " furent les mots qui s'échappèrent de ses lèvres. Le sang m'est monté à la tête. Dans l'instant où je m'en suis souvenu..........
Repartant pour la maison je suis passé par le salon et j'ai vu d'Anthès soûl....... Il parlait français et son compagnon traduisait. Il s'est tourné vers moi et m'a gratifié d'un large sourire.
- Je parie que vous êtes Pouchkine !
- Désolé, je ne vous connais pas, ai-je dit avec froideur sans m'arrêter.
- Eh bien, permettez que je me présente. Il a élégamment sauté du sofa et m'a emboîté le pas, m'a dépassé en quelques enjambées rapides, s'est courbé et s'est nommé. Je l'ai salué avant de poursuivre mon chemin dans l'antichambre. Tenant à peine sur ses jambes il me suivait de très près.
- Je viens d'arriver à Pétersbourg et j'aimerais faire votre connaissance, dit-il.
- Ce n'est pas l'endroit idéal pour faire connaissance, ai-je répondu comme je pouvais.
- Pourquoi ? C'est exactement le contraire ! Cette maison pousse les gens à l'intimité.
Je me suis arrêté et l'ai regardé avec curiosité. Je ne savais pas à ce moment-là combien de ses inepties il me faudrait encore entendre à l'avenir.
Entre temps il a continué :
- Eh bien, vous êtes un poète célèbre, mais avez-vous vraiment réfléchi au plus poétique des phénomènes naturels ?
Ce qu'il allait dire m'intéresserait peut-être, je décidai donc de rester un peu.
- Quand je regarde les femmes je sais avec une certitude absolue que chacune a une intimité. Oui, oui, c'est un fait simple, cependant tant de poésie repose sur cette certitude inébranlable qui peut donner un but aux manoeuvres que nous employons pour approcher une femme quelle qu'elle soit. Si nous n'avions pas une telle certitude nous serions angoissés, car dans la société les femmes se comportent comme si elles n'avaient pas d'intimité du tout. richardunord6.skynetblogs.be
Je n'ai pu m'empêcher de sourire à l'idée de la similitude qui existe entre nos façons de penser.........
Je ne tardai pas à le saluer afin de couper court à cette conversation désagréable avec le jeune homme. Dans d'autres circonstances et avec quelqu'un de différent une telle discussion aurait été la bienvenue, mais je n'aimais pas d'Anthès et cela depuis la première fois où je le vis. Par ailleurs peu après mon mariage j'étais beaucoup moins disposé à parler de ma fascination pour les affaires de sexe, pourtant mon sujet favori de conversation, même avec des amis proches. J'ai compris que si un homme marié parlait de cela il impliquait inévitablement sa femme à qui chacun de ses commentaires serait attribué. Et la réputation d'une épouse doit être immaculée.
Quand je suis devenu infidèle j'ai également cessé de me retenir verbalement, ne me privant pas de mentionner d'autres femmes. Mais mes interlocuteurs, comme toujours, lui ont attribué tout ce que je disais. Aujourd'hui cela m'apparaît clairement. Trop tard, hélas !
Depuis l'incident au bordel, chaque fois que je voyais d'Anthès en société, je croisais son regard malicieux. Une fois il a même osé me faire un clin d'oeil, mais en voyant la fureur mettre le feu à mon visage, il ne sait plus jamais hasardé à une telle familiarité.
Chaque fois qu'il danse avec N. je le soupçonne de la baiser. Il est trop certain de la présence de son intime. Il est libre de toute interprétation romantique. Cette pensée ne me laisse pas tranquille, me met hors de moi. Alors je quitte la salle et fait taire ma jalousie dans la fièvre d'un jeu de cartes, ou dans la poursuite de quelque jupon.
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A regarder d'Anthès faire la cour, je me souviens du temps où j'étais célibataire et de ma passion à rendre les maris cocus. " Voici venu ton tour ", me dis-je. Le cercle se referme, le passé se reproduit, mais cette fois j'y joue le rôle du mari devant défendre sa femme contre des brigands affamés par sa moniche. Que lui disent-ils, comment s'y prennent-ils pour la séduire ?
** Personnellement, ma méthode consistait à raconter aux rares femmes intelligentes qu'il n'y avait rien de mieux que la variété, et qu'en se soumettant à moi elles aimeraient davantage leur mari, grâce à des sentiments rafraîchis par mes soins. Aux femmes stupides je déclarais un amour si passionné que jamais leur mari ne pourrait rivaliser. Et j'étais totalement sincère avec chacune d'entre elles.
J'ai confiance en N., et le fait que d'autres aient des doutes me rend encore plus insupportable sa coquetterie sans bornes. Je suis forcé de m'avouer que les rumeurs, l'honneur et l'opinion de la société ont plus d'importance pour moi que la véritable nature des choses. Je préférerais qu'elle se fît reluire avec quelqu'un, secrètement - mais une fois seulement - et que personne ne le découvre, plutôt que de me trouver face à un flot de racontars et de rumeurs au sujet de son infidélité, et cela malgré son innocence absolue. Voilà pourquoi je me contente de sourire du coin de la bouche si Vyazemsky courtise N. La société ne pourrait jamais croire qu'elle fût attirée par un homme si commun et si peu raffiné. Mais d'Anthès est dangereux avec sa beauté, son impudence........ Je hais l'impertinence de ces bruits de couloir qui me stigmatisent derrière mon dos. Je me sens pousser des cornes alors même que je suis persuadé qu'elles n'ont rien à faire sur ma tête. Les ragots insinuent le doute dans ma certitude. Combien d'innombrables occasions N. peut-elle avoir eu de commettre l'adultère avec tous ces hommes à ses pieds ? Qu'est-ce qui la retient de se servir ?
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** .carnetnature.com
( à suivre )
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