mercredi 18 mars 2020

Tous les vivants C.E. Morgan ( Roman États-Unis )

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                                                      Tous les vivants

            Dans tous les pays l'agriculteur se ronge d'angoisse devant ses terres asséchées ses plants mourant sur pied, espère désespérément la pluie lors d'une rosée imprévue. Ainsi Morgan nous conte la rencontre de deux héros ordinaires dans un lieu inconnu d'un coin d'Amérique. Les classiques, les grands, Faulkner, Steinbeck, ont décrit les fureurs, les angoisses et les rages de ces fermiers. Ici c'est une femme qui écrit. Orren appuyé contre son camion devant l'institut où Aloma termine ses études tout en jouant du piano autant qu'elle peut, l'homme viril remarque la jeune fille. Rencontre innocente, mais ils se reverront, et c'est l'histoire de deux êtres si différents, mais physiquement unis, que les éclats de l'une et le mutisme de l'autre seront le contrepoids de la terre assoiffée et silencieuse. Qui sont-ils ? Orren perd son père très jeune, sa mère met tout son courage au service de la ferme aidée par l'aîné de ses fils, mais tous deux meurent dans un accident de voiture et donc Orren hérite du bien des hectares, tabac, blé, poules et vaches, grange et maison, vieille, poussiéreuse, tout juste habitable avant un très gros ménage. Et c'est là, sans connaître le lieu, que Aloma accepte de suivre son amoureux qui tout un hiver, dans le froid, l'emmène le weekend rouler et s'aimer dans le camion. Aloma a trois ans lorsque ses parents meurent. Recueillie par des cousins parents déjà de trois enfants, vivent dans un mobil home. Ils ne sont pas méchants mais leurs enfants d'abord, et pas de tendresse. Elle sera donc pensionnaire, sans sentiment, n'a pas connu ses parents ou si peu, pas de cruauté au pensionnat, une passion, le piano. Dès son arrivée, Aloma s'émeut à sa façon constatant l'éloignement de leur habitation. Mais Orren, farouche, taiseux, ne s'intéressera plus qu'à ses terres qu'il veut travailler seul, ce que faisaient sa mère et son frère. Aloma trouve un piano, mais plus du tout utile, espoir déçu. Elle doit apprendre à cuire le riz, le poulet et à cuisiner. Si la nuit les réunit le jour les colères grondent. Un coq hargneux, une vache qui vêle, un petit veau, des poules pondeuses, certaines mortes empoisonnées parce qu'elles ont mangé des grains humides. La ferme est là, bien présente dans le cours de l'histoire, ferme entourée de montagnes. Mais Aloma est dure, n'ayant pas connu les caresses de la vie, marquée par l'absence de famille, et Orren est dur, marqué par la mort récente de ses êtres qu'il vénère. La sueur, les plants de tabac qui jaunissent. Marque de bonne volonté Orren propose à sa compagne, ils ne sont pas mariés, de demander au pasteur l'autorisation de jouer quelques fois sur le piano de l'église. Jeu dangereux. Sans arrière pensée, sa proposition acceptée, elle ne donne pas son adresse, reste vague quant à sa situation, et Bell qui succède à son père pasteur et vit avec sa mère, au pied de la montagne, Bell est encore jeune. Tout ira bien durant quelques semaines, puis l'orage bien venu près de se transformer en entonnoir au-dessus de la vallée, puis le regard d'une mère qui veut savoir d'où vient cette jeune pianiste qui joue à la messe sous les yeux bienveillants de son fils. Trois mois d'été, où les hommes, la terre souffrent attendant la pluie qui permettra la récolte. Les sentiments absents ici, vont-ils mûrir ailleurs. Trois êtres marqués par la disparition des parents, chacun réagit, agit à sa manière, brutale, polie, irréfléchie. Ils attendent la pluie. C'est un beau roman plein de sueur, de rancœur, de petits bonheurs, Les deux hommes, Bell et Orren pensent à ceux qu'ils ont aimés et qu'ils aiment encore, père, mère, frère, Aloma à personne. Alors elle réfléchit, cuisine et pense et se plaît en jouant au piano, tant qu'elle le pourra, à la messe le dimanche et tous les jours à quatre heures précises. Roman chaleureux, on se coule auprès de ces personnages, on les quitte interrogateurs, un peu de nous en chacun sans doute.

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