La Carte postale
Dès la fin du 19è siècle la violence des pogroms s'accentue, en particulier dans les pays d'Europe de l'Est. Certains juifs plus lucides que d'autres fuient les villages, les villes et partent vers l'Europe, les Etats-Unis ou Jérusalem. Ainsi de la famille Rabinovitch. L'une de leurs descendantes, Lélia, mère de l'auteure ( le livre est écrit à la première personne ), reçoit un jour une carte postale représentant l'Opéra Garnier, carte visiblement d'une autre époque, et carte sans signature. Enigme. Bien des années plus tard cette carte, sans signature ni signe particulier hormis l'ancienneté de l'imprimerie, sera le centre et le sujet constant des préoccupations de Lélia et de sa fille qui partent à la recherche de l'expéditeur er du sens à donner à cet envoi. Et le sujet évoluera, car la fille de Lélia, juive sans avoir aucune notion de la culture de ses ancêtres est sans réponse devant les questions de sa propre fille. Elles remonteront donc jusqu'à l'origine des déportations, du départ de Lod en Pologne, pour les Rabinovith, passant par la Roumanie et l'embarquement pour la Palestine. Mais la culture des orangers, la vie encore primaire dans un pays porté par la foi de ses nouveaux habitants, ne convient pas aux parents de Lélia et retour en France. Ainsi nous est contée l'histoire de Myriam, Emma, Jacques, Ephraïm et d'autres durant les année cruelles, la seconde guerre mondiale. Le livre est précieux. Anne Berest fait, en un seul, assez épais volume, le tour notamment, des déportations, de Auschwitz et autres camps, de la vie dans les camps, du retour au Lutétia réquisitionné. Espoir et désespoir. Visite dans la petite R5 de Lélia dans le village de l'Eure où s'étaient réfugiés ses grands-parents et leurs enfants. Délation. La France provençale, Apt où une résistance s'est organisée, René Char, poète, est l'un d'eux. Des couples éphémères, Myriam mère de Lélia, mariée à Vicente Picabia, fils du peintre. Le parcours de la famille en ces temps de guerre, et toujours décryptage de chaque ligne, mot, lettre de cette carte. Le cabinet Duluc, rue du Louvre ne peut que lui indiquer un graphologue. Chacun trouve sujet à réflexion dans cette histoire où une mère et sa fille se sont enfouies dans leur problème actuel de religion, mélange de vie quotidienne avec des réflexions jetées au visage d'enfants aussi innocents qu'ignorants, ainsi de la petite fille de Lélia. Les étudiants américains ne se sont pas trompés, élèves des universités de New-York, Yale, Harvard, Duke, Princeton ont attribué le premier prix Goncourt américain, après sélection, à La Carte postale et Anne Berest. Le prix Goncourt attirera sans doute un public qui ignore les cruautés de la Shoah, de la collaboration. Trio familial, Marcel Duchamp Gabriele et Francis Picabia est l'un d'eux, et aussi Myriam, Vicente Picabia et Yves. Tous intelligents, tentent de sortir des griffes de la guerre le moins endommagés. Mais d'où vient donc Myriam "...... La famille de ma mère est polonaise, moi je suis née à Moscou, en Russie...... - Moi, je suis né à Céreste. C'est pas loin du Buoux. Deux heures de vélo si vous prenez la route de Manosque. Mon père est artisan charron, il joue du piston........ " Lettre à sa mère de la petite fille d'Ephraïm " ........ Maman les histoires étranges du passé n'étaient jamais des contes pour enfants...... " Une vie de famille, brouillée, détruite pas la guerre, les dénonciations. Destruction reconstruction avec la portion congrue revenue des camps. Bonne lecture.
Pour les lecteurs ayant des problèmes de vue, intéressés, il existe une édition en gros caractères en deux volumes, en français. Existe-t-elle dans d'autres langues je l'ignore. Bonne lecture..
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