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lundi 7 mai 2018

Mémoires d'un estomac racontées par lui-même 3 Sydney Whiting ( Roman Angleterre )


Salvador Dali.
eternels-eclairs.fr


                                                   Mémoires d'un estomac
                                                   racontées par lui-même - 3 -

            M'étant étendu sur l'idiosyncrasie de cet aimable habitant des mers plus que je ne le voulais d'abord, je dois être aussi concis que possible dans la description de mes impressions lors d'un événement qui opéra une véritable révolution dans toute mon économie domestique et affecta ma constitution presque autant que les révolutions en général affectent les constitutions.
            J'étais un jour dans la jouissance tranquille de mon " otium cum dignitate ", digérant paisiblement et confortablement, content de moi-même, content de mon dîner et de tous mes semblables, lorsque, tout-à-coup je sentis distiller sur ma malheureuse tête un mélange de salive et de je ne sais quel poison mortel qui, m'arrachant aux douceurs du " far niente ", me jette dans un état inexprimable d'émotion et d'horreur.
            J'en avisai aussitôt mon voisin Cérébral et il me répondit, par son télégraphe, que lui aussi souffrait et, graduellement, j'allai de mal en pis.
            Je fus immédiatement forcé de quitter l'occupation, toujours si agréable, de pourvoir aux besoins du corps dont je fais partie, et je ne pus qu'exprimer l'agonie de souffrances où j'étais par des spasmes et des contorsions que terminèrent des effets semblables à ceux déjà éprouvés sous l'influence du tangage à la mer, effets qu'il n'est pas nécessaire de décrire.
            Il suffit de dire que je fus malade tout le jour suivant et, rejetant toutes les offres de réconciliation, je restai maussade et dégoûté jusqu'à ce que le temps eût calmé le mal et m'eût rendu l'énergie nécessaire pour pouvoir me rendre compte de cet étrange phénomène !
            J'appris alors que mes maux, plus réels pour moi qu'une vaine fumée, avaient leur source pourtant dans la fumée ! La fumée d'une plante délétère, un génie malfaisant introduit par le feu, et chassé, exorcisé, par la nausée.
            La nature la fit nauséeuse et vénéneuse, cette plante. Mais l'homme luttant contre les pénalités attachées à l'infraction de l'avertissement qui nous en éloigne, l'homme passe sa vie à fumer. Et  l'épreuve que je venais de subir n'était, hélas, que la bouffée préliminaire.
            La répétition de l'acte vainquit mon dégoût et, à la fin, avec le stoïcisme propre à ma race, j'endurai ce que je ne pouvais empêcher. Les pipes et les cigares contribuèrent pour égale part à la somme de ces nouveaux maléfices, ainsi conjugués pour la ruine du système tout entier.
            Quant à moi, je partageai ce mal avec la confraternité adjacente et, personnellement, je subis l'injure qui m'était faite avec la dignité d'un estomac ayant la conscience de sa propre rectitude.
            A ce moment je quittai l'école.........
            Cependant bientôt une nouvelle ère s'ouvrit dans mon existence et commença une série d'infortunes qui me livrèrent à ceux qui ont toujours été les bourreaux de ma race, aux docteurs !
            ................Arrivèrent le médecin et son séide, le droguiste.            eternels-eclairs.fr 
Par Banksy            Oh ! comme je tremblais quand on annonçait un de ces messieurs ! Et il me parut bien étrange qu'il pût exister encore, dans ce siècle des lumières, des listes de poisons domestiques et une société de " posologistes " assermentés......... suivant la prétendue garantie de titres et de certificats officiels.
            Ma carrière universitaire débuta par des soupers prolongés jusqu'au jour, et par des déjeuners qui se terminaient à midi.
            Et quels déjeuners ! Habitué à un bol de thé et à cette chère tartine de pain beurré, concevez ma consternation lorsque je vins à être bourré d'une masse hétérogène renfermant tous les condiments et tous les composés culinaires connus sous le soleil !
             " Des rognons sautés et du vin de Moselle !                                   
             Du cacao et du curaçao ! De la pâte aux anchois et du pâté de pigeons.
             Des champignons, de la marmelade et des conserves de poisson.
             Du poisson salé, du jambon de Catalogne et des langues de daim d'Archangel.
             Du pain de varech, du caviar, du café et du cognac ! "
            Tous ces mets et beaucoup d'autres moins délicats...... constituaient très souvent mon premier repas et dans ce mélange on s'attendait à me voir discerner le bon du mauvais, sans murmurer de ce surcroît de labeur !
            Mon ami et mon parent, Mr Head, avait aussi sa tâche à remplir, et jamais deux chevaux de fiacre, un jour de fête, ne travaillèrent plus rudement. Mais enfin...... je succombai tout net et demeurai insensible au fouet et à l'éperon.
            En vain essaya-t-on toutes sortes de drogues et de stimulants. J'étais devenu si blasé qu'ils avaient perdu toute leur vertu.
            En vain de petites boulettes de mercure me furent-elles expédiées pour essayer leur effet. Le Dieu de ce nom, lui-même, aurait secoué sans résultat son caducée sur ma face. Dans le fait, je ne pouvais, je ne voulais pas bouger, et ce n'est qu'après avoir été en quelque sorte affamé que je consentis à reprendre mes fonctions, lentement et par degrés.
            Après cet incident, je fus pour quelque temps traité avec plus d'indulgence. Mais, dès que j'eus recouvré mes forces, ils revinrent à leur habitude de me surcharger d'aliments, et alors, commença un plan systématique de me droguer, véritablement horrible à décrire. Le garçon apothicaire frappait incessamment à la porte, et un estomac seul peut apprécier l'état de trépidation nerveuse où son coup de marteau me jetait. Ils jugèrent à propos d'appeler mon malaise " dyspepsie ", et je n'ai jamais pu entendre prononcer ce mot sans frissonner. Tous les premiers hommes de l'époque * furent consultés pour cette maladie, et ils prescrivaient des remèdes ordinairement opposés les uns aux autres. Il y avait toutefois à cela un avantage, c'est que, comme ces messieurs tâtonnaient, la variété des drogues prescrites assurait leur innocuité en donnant une chance de neutralisation des poisons les uns par les autres.
            Pour prouver qu'il n'y a dans tout ceci ni exagération ni fantaisie, j'ai transcrit quelques prescriptions réelles, émanant de praticiens les plus célèbres du jour, achetées au prix d'une guinée, toutes adressées à la même maladie constamment décrite dans les mêmes termes par le malheureux patient. Observez que mon maître avait le bon sens de ne pas consulter ces médecins qui vendent eux-mêmes leurs drogues. S'il l'avait fait, je n'aurais pas vécu pour écrire ces mémoires. Les grands globes de verre remplis de liquides colorés que l'on voit au vitrage des boutiques d'apothicaires sont tous simplement des fanaux, puisqu'on les éclaire la nuit, destinés à avertir notre santé des lieux où elle est sûre de faire naufrage. Mais, pour couper court à cette digression, on me permettra de décrire, sous la forme dramatique........... l'entrevue du

                                                     Docteur et du Patient

        eternels-eclairs.fr                                                      Acte I Scène I
Autoportrait, par Francis Bacon
            Intérieur d'une belle maison dans une rue fashionable de Londres. Entre le patient et attend avec d'autres dans l'antichambre, jusqu'à son tour et est introduit en présence de l'Esculape, selon l'ordre de son arrivée. Entre le laquais.
            Le laquais - Par ici, Monsieur, s'il vous plaît.
            Le patient suit le laquais dans une vaste salle : livres, bustes, papiers, partout.
            Le patient un peu nerveux - J'ai pris la liberté...
            Le Docteur debout, le dos au feu - Prenez un siège, mon cher Monsieur.
            Le Patient - Je vous remercie. Il fait assez froid ( ou chaud ) ce matin.
            Le Docteur - Oui. Que puis-je ?
            Le Patient - Je ne suis pas du tout bien, Docteur. Le fait est que je n'ai pas le moindre appétit. Ainsi j'ai cru...
            Le Docteur l'interrompant - Montrez votre langue. Hum ! sale, dyspeptique, très dyspeptique.
            Le Patient -Quand je me lève le matin.
            Le Docteur l'interrompt - Un moment, donnez-moi votre main ( il tâte le pouls ), pouls languissant. Combien y a-t-il que vous ne vous sentez pas bien ?
            Le Patient - Environ une semaine.
            Le Docteur - Vous souffrez d'acidité ?
            Le Patient avec enthousiasme - Oh ! excessivement, une constante sensation brûlante.
            Le Docteur - Oui, je vois, Monsieur. L'estomac est dans un état morbide. Tout est-il bien là ?
( Il percute la poitrine du patient et avec un sourire ) - Il n'y a rien de mal dans cette région. Avez-vous mal à la tête ?
            Le Patient - Non, mais un terrible...
            Le Docteur l'interrompt - Oh ! cela se borne aux organes " un peu " en désordre. Je vous ferai une prescription, mon cher Monsieur, qui vous rétablira en quelques jours. ( Il s'assied pour écrire ).
             Le Patient - J'oubliais de dire que j'ai une vive douleur entre les épaules, et...
             Le Docteur l'interrompt - Justement, j'ajouterai une mixture pour vous en débarrasser. ( Il continue d'écrire, passe avec soin le buvard sur sa prescription, et la présente au patient avec un sourire placide ). Voilà, mon cher Monsieur, prenez ceci suivant l'instruction ** et revenez me voir dans quelques jours.
            Le Patient au comble de la reconnaissance - Je vous suis extrêmement obligé pour votre bonté. ( Il fouille dans sa poche après la guinée d'usage, honteux presque d'offrir une récompense quelconque à un Galien si savant et, en lui serrant la main, il glisse la pièce de monnaie. Le Docteur ne manifeste aucune fausse honte. Le Patient se dirige vers la porte ).
            Le Docteur - Si vous n'avez pas de pharmacien ordinaire, mon cher Monsieur, je vous recommande fortement M. Morbus, 24 Doom Street, Bury Square. Permettez-moi de mettre son adresse sur la prescription. Donnez-lui mon nom et vous trouverez ces médicaments excellents.
            Le Patient - Je vous remercie, il aura certainement votre prescription à exécuter. Ainsi je reviendrai vous voir mercredi prochain ?
            Le Docteur - S'il vous plaît, mon cher Monsieur, je ne doute pas que vous ne soyez bientôt entièrement rétabli. (Il sonne, reconduit en saluant le malade qui pense avoir encore quelque chose à dire. Ce dernier s'incline, le laquais lui ouvre la porte de la rue, et le malade sort.
            Entre un autre innocent. Scène semblable, ou à peu près. La porte de la rue se ferme, le patient lit tout haut la prescription en se dirigeant vers Doom Street, Bury Square ).


                                                              Prescription                                     eternels-eclairs.fr
Personnage avec quartiers de viande, par Francis Bacon
            Infusion de colombo, 5 onces. Mixture de gomme, quantité suffisante. Trinitate de bismuth, 18 grains. Sesqui carbonate de soude, 1/2 gros. Teinture d'opium, 1 gros. Ditto de colombo, 4 gros.

            Je suis persuadé que cet échantillon *** et les suivants, de drogues magistralement administrées recevraient la sanction de toute la faculté. Le bismuth tend, dit-on, à diminuer l'irritabilité nerveuse de l'estomac. L'acide minérale stimule l'action de suc gastrique. L'alcali favorise ses sécrétions alcalines du foie, etc., etc, etc. Mais je vous en prie n'en croyez pas un mot. Quels effets ces drogues peuvent avoir sur d'autres parties du corps, c'est ce que je ne prétends pas savoir. Je ne désire pas me mêler des affaires des autres.
            Quant à moi, tout cela, m'était plus qu'inutile, et certainement je suis le meilleur juge sur la matière.
            Avec quelle rage je reçus un pareil composé, mettant de côté le bismuth, la soude et le colombo, il y avait là l'opium - l'opium ! - qui, au lieu d'activer les sécrétions, les anéantit ! L'opium qui n'agit pas de même sur trois personnes différentes, excitant les unes, calmant les autres. En vérité, j'aurais pu grincer les dents de colère, si j'en avais eu, et cependant je fus forcé de prendre des doses répétées de cette mixture, deux fois par jour, si je me rappelle bien. Car, heureusement, nous n'avons pas le souvenir tenace des maux de cette vie. Comme de raison, j'empirai au lieu d'amender et ainsi une seconde visite fut payée au docteur.
            La même scène se reproduisit chez lui. Et je n'oublierai jamais la froide complaisance avec laquelle il écouta la description de mes maux, ajoutant tranquillement :
            " - Donnez-moi la recette, mon cher Monsieur, et je ferai une petite modification qui, je suis sûr, vous remettra en bon ordre. "
            Il jeta alors un coup d'oeil sur le précieux document et passa la plume sur l'un des items, l'opium, je crois. Puis, paraissant se raviser, il écrivit une nouvelle ordonnance et la remit à mon maître avec le même air de suavité bienveillante. Il refusa aussi le second honoraire, car les médecins sont ordinairement polis et généreux, et il nous salua avec les manières d'un parfait gentleman.
            Or, on peut bien imaginer que mes craintes et ma curiosité étaient vivement intéressées à connaître la nature de ce nouvel arrêt d'exécution. Le lecteur qui m'a suivi jusqu'ici, sympathisera, je suis sûr, à ma souffrance, et comprendra l'anxiété de ma position. L'épée de Damoclès était encore suspendue sur ma tête, et je ne pouvais que soupçonner l'épaisseur du fil qui la retenait. On doit se rappeler aussi qu'à cette époque j'étais incapable de donner l'attention convenable à mes affaires domestiques, en raison du dommage que j'avais subi par la surcharge alimentaire. Tout ce dont j'avais besoin c'était un régime léger, et la permission d'être livré aux seules opérations curatives de la nature, toujours bienveillante, et toujours empressée à guérir nos blessures pourvu qu'on la laisse             Dans ces circonstances, jugez donc de mon incertitude pénible lorsque, me dirigeant vers la demeure de M. Morbus, je lus le second composé, que voici :
            Trinitate de bismuth, confection aromatique, de chaque 2 gros, de gomme arabique, 3 gros. Esprit d'ammoniaque composé, 4 gros. Infusion d'écorce d'orange composée, une once. Infusion de à gentiane composée, assez pour faire 8 onces du tout. - Mêlez. - Deux cuillerées à soupe par jour.

            Je ne sais si ce poison me répugna plus que l'autre, il me parut, au moins, suffisamment nauséeux. Je reconnus mon ami le bismuth, et la gentiane n'était qu'un amer pour un autre. Mais tous deux se présentèrent sur mon territoire accompagnés de deux esprits plus méchants qu'eux. Évidemment ma condition rétrograda au lieu d'avancer et je fus immédiatement conduit à un autre
" éminent praticien " qui entra un peu plus avant dans le diagnostic de ma maladie. Comme d'ordinaire frappa sur les barreaux de ma prison, les côtes, et ensuite procéda à une série de questions d'une nature toute confidentielle.
            De nouveau, le désespoir s'empara de moi lorsque j'entendis sa plume écrire un autre manifeste contre la santé et la longévité. Cette fois la forme prit une forme un peu différente, et l'amertume de mon chagrin n'eut d'égal que l'amertume de l'aloès.

*           Sans doute, un de ces jours nous aurons des docteurs féminins. L'Amérique vient de nous donner cet exemple qui, après tout, n'a rien de nouveau. M. Torrens.......... rapporte qu'un monument de l'ancienne Rome portait une inscription grecque où se trouvait le nom de Euhodia, dame d'un rang élevé qui possédait un talent extraordinaire en médecine.
**          Dans l'apologie pour Hérodote d'Henry d'Estienne, on trouve l'histoire d'un paysan qui avala la prescription sous forme de bol, parce qu'on lui avait dit " prenez ceci selon l'ordonnance........... celui qui prit le billet du docteur, l'avala au lieu de la pilule.
***       Toute les prescriptions sont réelles et nullement imaginaires.
         

                                                                                à suivre.......................

            Décoction d'...............

                                                      
                                                                  
                                            

dimanche 29 avril 2018

Mémoires d'un estomac racontées par lui-même 2 Sydney Whithin ( Roman Angleterre )

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                                                Mémoires d'un estomac
                                                     
                                                        Suite.......

                                              Légende de la Cornemuse

            " L'un des anciens Rois du Nord quitta un jour son palais scandinave pour une expédition lointaine et avec une bande d'aventuriers choisis. Il fit voile pour la côte d'Ecosse. Son voyage fut prospère. Il débarqua sans encombre, se dirigeant tout droit vers un certain grand village d'où il envoya ses ordres et se donna tous les airs d'un Monarque naturel du sol. Les malheureux aborigènes s'efforcèrent de le calmer plutôt que de le repousser, et celui-ci, après avoir levé force tributs en bestiaux, en peaux d'animaux et en une sorte d'esprit que les premiers habitants de cette contrée appelaient " Weiss Keigh ", se disposa à retourner dans son pays.
            Je dois ici remarquer que non seulement le Monarque était le représentant d'un peuple puissant, inquiet et maraudeur, mais qu'il était continuellement doué de plusieurs talents, entre autres, de la connaissance de l'alchimie et de la magie. Par son art il pouvait changer des objets inanimés en êtres animés et, quand il avait besoin d'un coursier de guerre ou d'un vaisseau, il recourait à ses incantations.
            Comme il était sur le point de retourner dans son royaume chargé de dépouilles, un picte aussi téméraire que brave, indigné de la soumission apathique avec laquelle ce conquérant pirate avait été accueilli, résolut de prendre, comme l'on dit, la Loi dans ses mains et d'essayer de tuer cet intrus.
            S'armant d'une grosse pierre qu'il plaça dans une fronde faite de peau de bouc il attendit près du rivage l'arrivée de l'ennemi de son pays et, sollicitant une entrevue, il fut introduit en sa royale présence. Se dressant alors de toute sa hauteur il s'écria :
            - Pourquoi, ô Monarque du Maëlstrom et de l'Iceberg, viens-tu lever des taxes impies sur un peuple inoffensif ? Mais Thor et Odin, que tu sers, ont permis à ce bras de venger mon pays, et ta dernière heure, homme téméraire, est arrivée !
            Il dit, et la fronde, rapide comme l'éclair, décrivit une évolution dans l'air et, avec la force de la foudre, elle descendit sur le trône, vide, du Monarque.
            Oui, le Roi Nécromancien avait disparu et, ses courtisans se précipitant sur cet homme dévoué et malheureux l'entraînèrent dans un appartement intérieur pour y être jugé.
            Là siégeait le terrible Roi du Nord, aussi calme et impassible que si rien n'était arrivé, méditant quel châtiment il infligerait à celui qui voulait être son meurtrier. Enfin, fronçant son sourcil ténébreux, il lui dit :
            - Sache, ô homme, que tu dois mourir ! Il est écrit dans le livre des destins que, si jamais je pardonne au misérable qui attente à ma vie, les calamités de toutes sortes visiteront mon peuple, et les portiques du Valhalla me seront fermés pour toujours. Donc, tu dois mourir ! J'aurais pu pardonner à ton dessein insensé en l'honneur de ton patriotisme, mais le destin me le défend et, par Igdrasil, ( à ce serment terrible la terre trembla ), je le jure, tu mourras ! Tout ce que je puis faire pour atténuer ta juste punition, est de rendre ta mort douce et facile. Au lieu de t'envoyer à la chambre des tortures où tes cris de douleur charmeraient les oreilles des cruelles Euménides. Leur fureur doit cependant être apaisée et les clameurs d'angoisse que j'épargne à ton agonie doivent être à jamais perpétuées sous une autre forme dans la terre que tu habites. C'est assez. J'ai prononcé l'arrêt des destins et ton sort est fixé.
            A ces mots, avant que le captif terrifié ait pu prononcer une seule parole, l'Enchanteur lui jette une poudre à la face, les spectres de la mort s'assemblent autour de lui, et il tombe sur le sol, cadavre inanimé.
            L'austère arbitre de son sort le regarde quelque temps en silence, puis s'écrie en accents où perce presque la pitié :                                                                              lejournaltoulousain.fr
            - Qu'on l'enterre là où les corlieus volent en cercle dans les airs, où la mouette fait entendre son chant funèbre, et où l'océan murmure son éternel requiem pour les trépassés. Mais avant tout, rendez-moi l'estomac de cet homme afin que je l'offre en sacrifice aux furies, comme je l'ai promis, et que l'esprit du défunt puisse reposer en paix.                                       
            A cet ordre, le principal de la bande ouvrit avec son sabre le cadavre du picte et, en ayant soigneusement extrait l'estomac avec le tuyau qui y conduit, autrement dit l'oesophage, il le déposa sur la terre, au pied du Nécromancien, pendant que d'autres serviteurs emportaient le corps pour l'enterrer sur le rivage. La scène à ce moment fut véritablement touchante et pleine de grandeur. Le Roi Magicien était assis, baguette en main et, à ses pieds gisaient les organes digestifs du défunt. Enfin il prononça quelques mots étranges et, traçant de sa main royale des hiéroglyphiques dans l'air, il s'écria à haute voix :
            - Change de forme, ô objet qui fus d'un si puissant usage à ce peu d'argile, lorsque la vie l'animait, et que sur ton tube il y ait des clefs et des touches, et que dans ta cavité il y ait de l'air, et que les habitants de cette contrée acquièrent l'art de t'employer comme instrument de musique, et que les sons soient aussi perçants que les cris d'un homme torturé, afin que les Euménides soient apaisées, et que l'on t'appelle dorénavant " pipeau-sac " ( Cornemuse ), pour que mes paroles reçoivent à la lettre leur entier accomplissement.
            Il dit et ses compagnons émerveillés ramassèrent sur le sol le premier instrument de ce nom qu'ait vu l'Ecosse. Bientôt un naturel du pays l'ayant trouvé, et s'étant mis à en jouer, ils se précipitèrent tous vers leurs vaisseaux, en se bouchant les oreilles, et ne mirent plus jamais les pieds sur le rivage d'Alben. "

            Je reviens aux événements de mon aventureuse existence. Le temps s'écoulait et le moment était venu de me mettre à l'école. On m'envoya à un établissement public. Là, je dois l'avouer, je gagnai rapidement bonne humeur et santé, car le régime strict, la régularité des repas et la discipline générale auxquels je fus soumis firent bientôt disparaître les traces d'une indigestion préliminaire de
riche gâteau de pudding et autres objets malfaisants emballés pour mon usage dans une malle dont, il faut le dire, la clef, pendant les premiers jours, grinçait dans la serrure environ toutes les deux heures. Ces provisions étant bien vite épuisées je commençai tout de bon la vie d'école.
            Une fois, il m'en souvient, pendant les heures consacrées au jeu, j'entendis une grande rumeur parmi les jeunes gens lorsque, tout à coup, je reçus une telle bourrade que je crus franchement être . chassé de la cage osseuse qui m'enserre. Je découvris que cet incident était dû à un échange poli de coups entre deux garçons, un ancien et un nouveau, qu'on avait mis aux prises pour essayer la force du second, afin de lui assigner sa place propre dans l'échelle proportionnelle du pugilisme. J'avoue que je détestais cordialement ces engagements-là, mais toute souffrance était préférable aux angoisses d'une surcharge ou d'une indigestion. Au reste, il faut dire, à l'honneur de ces gamins, qu'il était reconnu déloyal parmi eux de me choisir comme le lieu de l'attaque. Au contraire la tête et les côtes étaient plus généralement favorisées des attentions courtoises de ces messieurs. Loi très équitable et qui reçut mon entière approbation.
            A l'occasion, les plus grands s'échappaient de l'enceinte du collège pour acheter toutes sortes d'abominations, quoique je fusse bien aise, de temps en temps, d'une petite addition à la carte de nos repas ordinaires.
            Dans une circonstance particulière, le comique et le tragique combinés marquèrent si étrangement un incident que l'habitude a depuis dépouillé pour moi de sa nouveauté, qu'il convient de le raconter avant d'aller plus loin.                                                                                   zazzle.ca
Résultat de recherche d'images pour "pipeau sac"            Le jour était tombé, la cloche avait sonné la retraite et l'appel à la prière lorsque, au milieu du tumulte des écoliers courant à leurs places respectives, je me sentis enlever, aussi vite qu'une paire de jeunes jambes pouvaient me porter, bien au-delà du territoire scolaire. J'eus bientôt la conscience qu'une épreuve d'une sorte ou d'une autre m'était réservée.
            Au lieu de me trouver, comme d'ordinaire, dans une boutique de pâtissier, une certaine odeur
marine, comme de vieux poissons, m'embarrassa extraordinairement. Et j'attendais l'éclaircissement de ce mystère au milieu de sensations que seul peut éprouver un estomac dans l'incertitude pénible de ce qui va lui arriver et de ce qu'il va recevoir, surtout lorsqu'il est livré à la merci d'un écolier affamé et sans scrupules.
            On ne me tint pas longtemps en suspens et je n'oublierai jamais les impressions de ce moment.
             Tout à coup descend en clapotant, c'est le mot, dans mon intérieur étonné, une petite masse mucilagineuse, d'une saveur saumâtre, où la vie semblait palpiter encore.
            Grands Dieux ! Je crois qu'il n'avait pas eu le temps de régler ses affaires !
            L'ensemble était accompagné d'un fluide d'une extrême acidité et de particules de poivre noir chaud et piquant. En vérité, jamais de ma vie je ne fus aussi complètement abasourdi.
            Je tournai et retournai ce merveilleux composé, et ne savais que faire de l'informe petit monstre. Avant qu'il me fût possible de donner issue au flot d'invectives que l'indignation soulevait en moi, un autre, puis un autre se glissèrent sans cérémonie, et à la suite vint, gargouillant et écumant, un torrent d'une sorte de liquide, couleur jus de réglisse, appelé Porter !
            Alors, un horrible soupçon traversa mon esprit. Un instant je me demandai si ces substances particulières, salées et mollasses, qui m'avaient inspiré tant d'horreur, n'étaient pas les yeux de ces pauvres brasseurs employés dans l'Etablissement bien connu sous la raison " Nux vomica et Cie ".
Cette idée terrible paraissait être, jusqu'à un certain point, corroborée par le goût saumâtre auquel j'ai déjà fait allusion et que j'attribuais naturellement à la saveur spéciale des larmes de ces malheureux.
La poudre, il est vrai, rendait douteuse l'exactitude de mes suppositions mais, avec mes ressources exquises d'imagination, je le considérais comme un rejaillissement à la face de ces hommes, d'une portion de cette poudre malfaisante que leur maître s'était efforcé de jeter aux yeux du public, lorsqu'il s'amusait à soutenir que sa bière était " génuine ".
            Mon attention, toutefois, fut bientôt distraite par un autre cataracte de la liqueur noire, et quand l'argent sonna sur le comptoir, le nom de cet extraordinaire petit étranger, qui n'avait pas été le bienvenu, je vous assure, vint pour la première fois frapper mon oreille et le mot HUÎTRE fut ineffaçablement gravé dans ma mémoire.
            Depuis ce temps j'ai eu mainte occasion de recevoir ces créatures avec une extrême courtoisie sous toutes les formes et dans toutes les circonstances, à l'écaille, cuites à l'étuve, au beurre, grillées, avec barbes et sans barbes, etc. Mais pour un estomac jeune et ingénu, comme je l'étais alors, l'huître crue, assaisonnée légèrement de vinaigre fort et de poivre noir, et arrosée d'un fluide semi-opaque, pour la faire descendre, présentera toujours un ensemble gastronomique propre à fixer agréablement ses souvenirs, prouvant une fois de plus combien est mince la partition qui sépare le sublime du ridicule.   saveur-biere.com
Résultat de recherche d'images pour "bière favorite d'homer simpson"            L"expérience m'a appris, depuis, qu'il est d'usage dans la bonne société de commencer le dîner par quelques huîtres pour aiguiser l'appétit., et cela ne m'a nullement surpris, car tout estomac ayant tant soit peu la conscience de la dignité de sa position, comme membre scientifique d'un corps merveilleux, est si curieux d'analyser ce remarquable mollusque dès que celui-ci arrive à sa destination intérieure qu'il secrète, incontinent, une plus grande quantité de l'acide gastrique qu'il n'est absolument nécessaire pour l'épreuve, et l'excédent devient pour l'appétit un stimulant additionnel.
            Pendant mon travail d'analyse je découvris que cette agglomération de matière, en apparence inorganique, possède une très importante structure ayant une bouche, des lèvres prolongées, de branchies, un foie, des muscles, des intestins et, par-dessus tout, un coeur dans lequel peuvent reposer, à ce que nous sachions, des affections douces, et les plus gracieux instincts.
            Dans tous les cas la femelle peut produire environ 1 200 000 oeufs, si petits qu'un million de ces oeufs tiendraient dans un espace d'un pouce carré, en sorte que si les facultés affectives sont tant soit peu dépendantes de la fécondité, l'Huître doit prétendre à une rare distinction sur ce point. Leur sensibilité est telle qu'on les a vues fermer leurs valves sous l'ombre d'un bateau qui passait au-dessus d'elles. Conséquemment il ne serait pas téméraire de supposer qu'elles sentent vivement leur cruelle position lorsqu'un couteau sans pitié les ouvre violemment, quand elles sont arrachées de leurs demeures, et brutalement jetées dans la puissante solution que je tiens toujours prête pour mes victimes.
            On se demandera, naturellement, si ces délicats petits animaux ont été uniquement destinés à chatouiller les appétits gastronomiques de l'homme ?
            - Héliogabale était-il né pour les huîtres, ou les huîtres pour Héliogabale ? Je croirais volontiers que la nature les a appelées à un plus noble rôle que celui de contribuer aux plaisirs de la table, même d'une table romaine dans tout son luxe. Car la géologie nous apprend que les immenses bancs formés par les huîtres constituent une des plus puissantes barrières aux envahissements de la mer sur la terre ferme. Ces animaux voulant ainsi, sans doute, se réserver l'usage exclusif de leur propre élément. Cet égoïsme légitime, au reste, nous est très utile, et certaines personnes ne croiraient pas, en considérant une huître isolée, que l'agglomération des individus de cette espèce crée à la longue une sorte de brise-mer sous-marin.                                               madame.lefigaro.fr
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            Les huîtres vivent ensemble dans une république plus heureuse que celle de Thomas Morus, remplissant les devoirs de la vie avec mesure et énergie, nous donnant l'exemple des vertus conjugales, accumulant un capital commun en bijoux plus précieux que l'or, et faisant même de ces maladies particulières à vie marine une source incalculable de richesses pour le genre humain.
            Je ne sais si les beaux messieurs et les belles dames qui étaient leur luxe dans le Hay Market, ce grand marché pour la vente de tous les articles appartenant à la famille des mollusques, je ne sais s'ils ont jamais réfléchi sur tous ces titres à notre considération, et si, lorsque les tendres entrailles du pauvre bivalve palpitant étaient soudainement exposées à leur vue, ils les avalaient au moins avec des sentiments de bienveillante sympathie.
           - Hélas ! pour l'honneur de l'humaine nature, je crains bien qu'il n'en soit rien. Toutefois en voilà assez pour ma première expérience de l'huître, production animale chez laquelle, soit dit en finissant, la nature semble avoir interverti la manière ordinaire de mourir. Car elle ne vit que dans son lit, et meurt presque toujours dehors.



                                                                                   à suivre.............

            M'étant étendu sur l'idiosyncrasie.............

       

vendredi 27 avril 2018

Mémoires d'un estomac racontés par lui-même - extraits - Sidney Whiting ( Roman Angleterre )

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                                          Mémoires d'un estomac
                           écrits par lui-même pour le bénéfice de tous ceux
                                         qui mangent et qui lisent
                                          
                                         D'après une édition parue en 1874

                             Préface

            Ces derniers temps, un ou deux phallus, dont celui d'un célèbre marquis, ont pris la parole, et un futur bambin nous a expédié de sa matrice quelques réflexions sur le monde. Habituellement tout quidam, vous, moi, se contente de parler au nom de son cerveau, reptilien ou non.
            Le foie n'est plus en crise depuis l'invention des produits allégés, notre rate doit trop souvent se contenter de ses dimensions naturelles, quant aux boyaux, à peine si leur existence nous est rappelée......... Où en est Mr Gaster ? En ces temps des Trois M, Minceur, Mise en forme et Musculation, il n'émet que quelques borborygmes lorsque le régime se fait trop sévère.
            Pourtant, si l'on prend le temps de s'y arrêter on s'étonne de la place que l'estomac, organe apparemment dépourvu de noblesse, tient dans notre imaginaire. Bien accroché il peut aussi se dilater vers le bas jusqu'à occuper la partie la plus inférieure de notre corps.....................
            Ainsi débute la présentation du livre par Monique Lebailly dans une édition de 1991.

...............................................

                                              Mémoires d'un estomac

                       Il est rare qu'un estomac affamé méprise les plats ordinaires
            ( Oh ! que mon estomac n'est-il long d'une encablure, et que chaque pouce de
            sa surface n'est-il un palais ! )

            Je passerai rapidement sur les jours de ma première enfance, mais je dois déclarer que je suis de bonne lignée, car je tiens du côté maternel aux célèbres Sternums, de Eaton Hall, émigrés depuis à Eaton-Moore, et, du côté de mon père, je date mon origine d'une époque très reculée, celle de la première invasion des Saxons, quand le sir Hughes Stomach fut créé baron en récompense de l'énorme quantité de boeuf qu'il était capable de digérer. Depuis ce temps une certaine portion de l'animal a été nommée d'après lui.
            ...............
                                                                                                                      culturebox.francetvinfo.fr
Résultat de recherche d'images pour "peinture estomac"            De ma pauvre mère je dirai peu de choses : elle était d'une humeur douce, conciliante et nullement adaptée à la société de son mari. Celui-ci, je suis obligé de l'avouer, doué d'une nature robuste et grossière, était incapable d'apprécier l'excellente aménité de sa compagne.
            Cette union était en vérité mal assortie, sous beaucoup de rapports.
            Trois mois environ après avoir donné naissance à un héritier, dans la personne de l'auteur, ma vénérable mère alla rejoindre les estomacs d'une autre sphère, et fut enterrée ( je veux dire ses restes )
dans le mausolée de famille. Sur sa tombe fut gravé ce simple et touchant épitaphe impromptu que composa mon père :
                                  Ma digne femme au monstre terrifique
                                          A payé le dernier tribut ;
                                        L'infortunée ! Elle mourut 
                                      Par défaut de suc gastrique !

            Je ne puis, bien entendu, me rappeler cet événement, mais je sais que je fus livré à une nourrice avant le sevrage, et que ce changement fut très préjudiciable à ma santé et à mon bien-être. La délicieuse nourriture d'une saveur amygdaline et d'un goût si suave, que me prodiguait le sein de ma pauvre mère, fit place à une sorte de lait Londinien. Les docteurs lui dirent de boire du Porter. Elle en buvait et, par-dessus le marché tout autre espèce de liqueur qu'on pouvait se procurer au cabaret. Le pire en cette affaire, c'est que je n'avais aucun redresseur de mes griefs. J'avais soin, toutefois, de faire participer tout le monde à mon dégoût, en excitant mes voisins, les bras et les jambes, à une variété de mouvements et de contorsions. Quant à la petite voix qui habitait en haut, je lui suggérais des cris si aigus et si perçants, que chacun dans la maison en vint à détester cordialement le petit corps dont j'étais le centre. Quoiqu'il en soit, je souffris terriblement pour mon défaut de patience, car, parfois, lorsque les angoisses de la faim me forçaient de prendre ce qui se présentait pour me rafraîchir, j'entendais mes bonnes amies les lèvres se débattre contre quelque mélange amer avec lequel les pauvrettes étaient obligées de se mettre en contact.
            Ces cris étaient le prélude infaillible d'une saveur horrible qui, en descendant, m'apportait autant d'étonnement que de trouble. Mais je découvris bientôt, quand la nourrice trouvait suffisante l'administration de ses dons généreux, qu'elle réprimait en moi tout désir d'en avoir davantage, au moyen d'un certain fiel, connu de la sollicitude maternelle, qui me retournait presque sens dessus dessous.
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Résultat de recherche d'images pour "estomac peinture"            Après avoir enduré cette malheureuse existence pendant quelque temps, l'heureuse période de mon changement de nourriture arriva enfin.
            Je remplirais un volume des surprises extraordinaires qui m'attendaient à chaque nouveau composé alimentaire qui sollicitait mon attention, et que j'étais, bon gré mal gré, obligé de digérer de mon mieux dans l'intérêt du système en général.
            Je me souviens, entre autres, que la bouillie m'embarrassa extrêmement. Les innocentes personnes qui me servaient s'imaginaient, je pense, qu'elles me donnaient de la farine de froment. De la farine, grands dieux !
            Quand je vins à essayer cette substance à l'aide de ma puissante machine d'analyse, machine si énergique que je pourrais dissoudre un morceau de marbre et vous dire de quoi il est composé, quand je vins, dis-je, à en faire l'épreuve, par un acide fort que je possède, je trouvai qu'il n'y avait pas plus de 20 °/de farine dans toute la composition, le reste étant un mélange d'amidon commun, d'os pulvérisé, de fécule de pommes de terre, et souvent de plâtre de Paris.
           Je dois dire qu'il y avait une sorte d'officier surveillant, appelé  Palais qui m'a toujours accompagné dans la vie, dont le devoir était de goûter chaque particule de la nourriture destinée à ma consommation, et de la rejeter s'il la désapprouver. La vigilance de ce personnage toutefois, me fut d'un faible secours contre les stratagèmes auxquels on recourait pour nous tromper tous deux. La conséquence fut qu'il tomba très souvent dans un état de sensibilité morbide, ne distinguant plus le bon du mauvais et qu'au lieu de me garder contre le mal, il m'y précipita.
            A l'occasion, alors que je me reposais tranquillement, après le rude travail consécutif à un bon repas, ou quand j'étais activement occupé à distribuer l'élément nutritif à tout ce qui m'environne, je me trouvais subitement arraché à mon sommeil, ou à mes fonctions, suivant le cas, par la descente rapide de composés dont la nature m'était totalement inconnue et qui, parfois, soulevaient en moi un tel dégoût, que je devenais rétif, et me refusais tout net à cet injuste appel fait à ma puissance d'assimilation et à ma bonne volonté à obliger.
            Mais j'étais généralement bien puni de cette résistance , et je n'oublierai jamais qu'un jour, ayant repoussé et littéralement mis à la porte un abominable mélange de sucre, de craie et de mélasse, jamais, dis-je, je n'oublierai la sensation éprouvée lorsque, après une courte conversation préliminaire entre ma garde et un médecin, mon malheureux intérieur fut inondé par une noire cascade d'une si horrible nature qu'il me sembla que les eaux du Phlégéton avaient été remuées pour m'être administrées pour mon bénéfice personnel.
            Je pensais, en vérité, que c'en était fait de moi. Et, ce qui aggrava mes souffrances, ce fut la crainte de rejeter ce poison nauséeux, accident qui m'aurait probablement soumis à une répétition de la dose. Aussi je supportai ce mal aussi bien que je pus et pris tout spécialement soin de donner à mes voisins une idée substantielle, et non simplement théorique, de mes douleurs.
            Je date de ce moment une série de petites vexations d'une nature      vraiment " protéique ", et c'était en vérité risible d'entendre frictionner de prétendus rhumatismes, de voir appliquer des cataplasmes et autres épithèmes à des ulcères rebelles, de voir recommander toutes sortes d'eaux minérales pour des maladies cutanées, et même pratiquer des opérations sur des membres malades, quand j'étais seul la cause de tout cela.
Résultat de recherche d'images pour "dionysos picasso"  *          Si les gardes-malades et les docteurs m'avaient seulement permis, pendant mes premières indispositions de rester dans un repos parfait, me fournissant, à des intervalles réguliers, une nourriture légère et suffisante, ne me donnant, de fait, rien ou peu de chose à faire, au-delà d'une agréable récréation, j'aurais jeté mes pieds reconnaissants sur mon sofa bien rembourré et, après un instant de sommeil, je me serais réveillé rafraîchi et tout aurait bien été. Mais un système de médecine, une fois commencé impliquait la nécessité de le continuer, et on s'imaginera mieux que je ne le pourrais décrire ce que j'éprouvais quand j'entendais prescrire pour moi certaines drogues que je savais devoir ultérieurement miner et détériorer ma constitution.                                                                                                     
            Il conviendra de donner ici une description brève et familière de ma mission dans la vie et, comme je désire que tous ceux qui mangent puissent me lire je me servirai le moins possible de ces locutions techniques ou anatomiques qui ne seraient comprises que de mes plus grands ennemis, la tourbe des médecins praticiens.
            Mon apparence personnelle, je dois l'avouer, ne prévient point en ma faveur, car je ressemble, pour la forme, à une cornemuse écossaise, étant moi-même le sac, et l'oesophage le tuyau de l'instrument.
            J'ai souvent désiré qu'il y ait plus de touches, surtout quand la gloutonnerie se mêle de le faire fonctionner. Il en serait probablement ainsi si je pouvais produire des sons semblables à ceux de la cornemuse calédonienne, sons si terribles, que les braves Highlanders, dit-on, pour y échapper, se précipitent au combat.
            La nature donne originellement une structure intérieure à peu près parfaite à tous les individus de mon espèce, mais elle accorda une très grande influence à une faculté présidant aux opérations de l'esprit, et appelé " raison ". En considération de l'élévation de l'homme au-dessus des autres créatures, elle établit comme une règle absolue que l'homme, par l'usage de la faculté sus-nommée, régnerait sur ses propres destinées.
            Or cette disposition paraît être très sage, car si la nature avait voulu faire de l'homme une simple machine d'un jeu parfait, elle aurait sans doute pu le faire. Mais, en lui assignant certaines facultés élevées et en lui donnant un pouvoir discrétionnaire, elle en a fait un agent libre, et lui permet de développer ces nuances et ces particularités de caractère qui nous montrent en lui un animal remarquable, et si digne d'être étudié.
            Donc, comme je l'ai dit plus haut, quoique ma forme matérielle ait été merveilleusement adaptée aux fonctions auxquelles je suis destiné, beaucoup a pourtant été laissé aux décisions de cette même raison, et le mépris de ses préceptes est la cause qui a produit un grand nombre des maux corporels qui affligent les habitants de notre planète.

            Mes principales fonctions étaient celles-ci :
            Recevoir d'abord, avec la courtoisie et la politesse convenables, tous les aliments qui m'arrivaient en traversant une antichambre, ou passage, nommé Oesophage et, bien qu'il y eût, comme je l'ai déjà dit, un officier nommé Palais, aidé d'un subordonné ayant nom Odorat, stationné à l'entrée pour mettre un embargo sur les importations malfaisantes, cependant, généralement parlant, je recevais gracieusement ce que les Dieux m'envoyaient et procédais de suite à l'accomplissement de mes devoirs divers. Sitôt la nourriture arrivée dans mon enceinte et touchait la surface muqueuse je sécrétais, par la vigueur des couches adjacentes de mes parois, un acte si énergique qu'il réduisait le tout en une sorte de pulpe et que des matériaux les plus étranges et les plus disparates je formais, avec l'assistance de mes coopérateurs inférieurs, un demi fluide laiteux, nommé chyle, fluide d'une si grande valeur qu'à peine formé tout un corps de porteurs, les vaisseaux lactés, l'emportaient en toute hâte pour fertiliser le sol.                                                                                          lewebpedagogique.com
Résultat de recherche d'images pour "dionysos picasso"            Or, supposez un seul instant ce qui arriverait si vous, aimable  lecteur, aviez envoyé un certain nombre de vos serviteurs remplir leurs seaux à une source d'eau pure, pour arroser votre jardin et si, au lieu d'eau limpide, ils ne trouvaient qu'un composé semblable aux eaux de la Tamise que le Times appelle " une fosse en ébullition ". Pareille chose arrivait souvent à ces vaisseaux lactés. On les avait destinés à distribuer un chyle pur et salubre dans toutes les parties du corps et ils se trouvaient en présence de si horribles mixtures dues à la gloutonnerie et à la surcharge, que j'étais obligé d'user de toute mon influence personnelle pour les décider à remplir la tâche qui leur était imposée.
            Mais ne croyez pas un seul instant que la nature ait été assez parcimonieuse pour ne me fournir qu'un seul moyen de décomposer les substances, oh ! non.
            Outre l'acide elle m'avait aussi pourvu d'un alcali présent dans le suc pancréatique aussi bien que dans la bile, de sorte qu'il n'y avait guère de chance, pour un passager quelconque, de pouvoir s'échapper, d'autant plus que, lorsque l'acide ne parvenait pas " à lui faire son affaire ", un puissant alcali était appelé en réquisition et ce dernier me débarrassait de toutes les substances grasses avec lesquelles le suc gastrique n'avait rien à démêler. Les matières que ni l'un ni l'autre de ces puissances auxiliaires ne pouvaient dissoudre, on les envoyait promener d'une manière ou d'une autre. Je me trouvais donc pourvu par la nature contre toutes les éventualités, et les choses se passaient ainsi :
je dissolvais les aliments ordinaires comme il a été dit mais, quand des substances m'arrivaient, dont ni l'un ni l'autre de mes agents acides ou alcalins ne pouvaient venir à bout, nous les passions à un autre district et, une fois entre les mains du tendre surveillant qui y préside, leur sort était digne de pitié.
            Lorsque j'éprouvais un violent dégoût pour quelque substance suspecte, par un violent effort musculaire, je la chassais, comme un vagabond et un intrus.
             J'avais, bien évidemment, ma méthode pour commencer et accomplir mes nombreux devoirs.
             Je pourrais, si cela était nécessaire, expliquer comment par la contraction de mon muscle propre, par la fermentation partielle, par la dissolution, par l'endosmose, mais surtout par mon suc gastrique agissant comme menstrue, j'accomplissais la tâche difficile de soutenir le corps tout entier, et de lui donner toute son énergie et sa vigueur. Indépendamment de ces ressources j'avais, dans toute les directions des messagers fidèles et, entre moi et cet individu, M. Cerveau, était établie une double série de fils électriques. Grâce à leur aide je pouvais, avec toute la facilité et la rapidité possibles, lui communiquer les incidents de la journée, à mesure qu'ils se présentaient, en même temps que lui, de son côté, me pouvait informer de ses sensations et de ses impressions.
            Souvent, quand il avait reçu de mauvaises nouvelles, je refusais de digérer par pure sympathie. Et quand, à l'occasion, je devenais morose et refusais de travailler, lui aussi devenait irritable et pétulant.
            Relativement à ma ressemblance avec une cornemuse écossaise, il existe dans les archives de ma famille un vieux manuscrit écrit en caractères anglais gothiques. Il prétend rendre compte de la similitude particulière de nos formes. Comme la légende est courte et qu'elle a entièrement trait au sujet de ces mémoires, je la transcris ici.

*      lenversdelacaverne.unblog.ft

                                                                           Sydney Whiting

                                                          à suivre.............

                                     Légende de la Cornemuse

            L'un...........................
         
           

mardi 29 août 2017

L'homme est un dieu en ruine Kate Atkinson ( Roman Grande Bretagne )


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                                               L'homme est un dieu en ruine 

            Des cinq enfants Teddy était le dernier et le préféré de Sylvie, sa mort pouvait la tuer. Mais fort habile elle multiplie les couvées et autres cultures maraîchères et défend la propriété pendant les années de disette, alors que le rationnement et les tickets sont le quotidien des citadins. Teddy s'est engagé, attend son ordre de route, et l'auteur raconte dans ce second volume la vie des Anglais qui bombardent l'Allemagne. Les avions descendus en flammes, les sauts en parachute en toute extrémité. Pages de guerre. Revenu à la vie civile Teddy élève son petit-fils, il est journaliste et travaille pour une petite revue du côté de York. Après les destructions de Brême, Berlin et ailleurs, de jolies lignes décrivent la flore. Beaucoup de jacinthes, des bois et des jardins. Deux femmes obtiennent un succès facile en littérature enfantine, Izzie, soeur de Hugh dans Une vie après l'autre et la maman de Sunny qu'elle abandonne sans sentiment à son grand-père, le père Dominic, fils de famille, punk, drogué dangereux, ne subvient pas aux besoins de l'enfant, il peint de grandes toiles inabouties. Ursula apparaît, mais le principal du livre sont la guerre et les séquences bucoliques.
" L'alouette est connue pour son chant, dit-il, il est très beau...... Le but de l'Art est d'exprimer la vérité et pas d'être la vérité en soi....... " Au retour de la guerre Teddy et son épouse Nancy marquent leur désaccord lorsqu'il s'agit de l'achat d'un article fabriqué hors d'Angleterre " Alors tu as acheté un moulin à café Philips ? Et tu vas me dire qu'ils ne se sont pas salis les mains eux ? Tout le monde se salit les mains dans une guerre. - Pas Philips. Frits Philips a été déclaré " Juste parmi les Nations " après la guerre...... " Teddy a des souvenirs pleins la tête " A quatre cents pieds les jauges de carburant indiquaient zéro...... Teddy ordonna à tout le monde de prendre la position amerrisage...... Ils touchèrent l'eau à une vitesse de 95 Noeuds......... " Viola est-elle enfin prête à écouter la voie de la sagesse qu'enseigne le professeur de yoga son fils " Dharma... D'après une légende hindoue, autrefois tous les hommes étaient des dieux mais ils abusèrent de leur divinité............ Je sais où nous allons cacher la divinité de l'homme. Nous allons la cacher en lui. Il fouillera le monde entier mais il ne regardera pas au fond de lui......... " 

Une vie après l'autre Kate Atkinson ( Roman Grande Bretagne )

Une vie après l'autre
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                                                               Une vie après l'autre

            Sylvie Todd enfouie dans ses coussins bordés de dentelles souffre. Près d'elle seule un petite servante trop jeune pour la circonstance, Bridget, s'affole, apporte l'eau chaude, les linges que sa maîtresse lui commande entre des douleurs de plus en plus aigües. C'est un 11 février 1910, bien qu'assez proche de Londres le futur père ne peut rentrer assez tôt, bloqué par la neige, de même le médecin. L'auteur a deux alternatives, Ursula naît et meurt étranglée par le cordon ombilical, où sauver celle qui sera l'une des héroïnes du roman et que découlerait-il, quel serait le destin des autres personnages tous bien vivants. Ursula vit, Maurice, l'aîné n'a pas cessé de jouer aux Indiens, et le Dr Fellowes se fait servir un solide petit déjeuner par la gouvernante habituellement assez médiocre cuisinière, pour ses côtes de veau à la russe entre autres. Trois enfants suivront la naissance d'Ursula. Ursula qui développe une intuition très forte assez longtemps. Arrive 1914 et la guerre, Hugh est mobilisé, à Fox House les femmes tricotent. Beaucoup d'hommes sont morts, ceux qui reviennent sont blessés, défigurés. Bridget annonce à son entourage que son fiancé est sauvé, ils vont fêter la victoire à Paris. Sylvie et Mrs Glover s'inquiètent à juste raison. 24 heures après leur retour à la propriété le jeune homme meurt, victime de la grippe espagnole. Hugh garde secrets ses souvenirs de guerre. La vie reprend son cours, il retourne à la banque, sa soeur attend un enfant. Izzie est éloignée, l'enfant adopté par un couple allemand. La vie sentimentale d'Ursula est entâchée, sa mère ne l'aide guère. L'auteur décrit un milieu très puritain. Entre celle que l'on appela la Grande Guerre 14/18 et la seconde du siècle dernier la famille Todd voit s'éloigner les enfants. Mais Paméla revient, mariée à un médecin à Leeds, mère d'enfants jeunes elle trouve un abri dans la maison familiale lorsque commencent les bombardements sur l'Angleterre. Et là Kate Atkinson atteint son but. Elle dit avoir voulu décrire la guerre, et c'est réussi. Des dizaines de bombes tombent chaque nuit sur le sud du pays. Londres en ruines. Ursula travaille le jour et le soir devient bénévole, apprend son rôle :
" Patrouiller et surveiller, telle était la devise de Miss Wolf  ".Les garçons survivront-ils militaires engagés ? Chapitres courts, il faut entrer dans le jeu de l'auteur, avancer, reculer, et retrouver les personnages nombreux, les jacinthes, les prés et les landes et l'habileté de Sylvie dans la suite
" L'homme est un Dieu en ruine ".









   

            


            

jeudi 29 octobre 2015

La fille du train Paula Hawkins ( roman Grande-Bretagne )



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                                                    La fille du train

            Suspense. Angoisse. Que se passe-t-il chez les habitants du 15, du 23 des maisons qui bordent la voie ferrée. Banlieue nord de Londres, le train de 8 h 04 s'arrête ou ralentit beaucoup à Witney, emportant vers la capitale des banlieusards lisant des journaux ou leur tablette. Rachel, elle, boit, du gin tonic le matin, plus tard elle continuera avec le vin. Rachel a habité à Witney, au 23 Bleinheim Road, dans ces pièces où vivent maintenant son ex-mari Tom, son épouse et leur enfant. Au quinze, elle ne sait pas qui est cette jolie femme et son compagnon, alors elle imagine leur vie, invente des prénoms, Jess et Jason, en fait Megan et Scott. " ..... La tête appuyée contre la vitre du train, je regarde défiler ces maisons, comme un travelling au cinéma. J'ai une perspective unique sur elles, même leurs habitants ne doivent jamais les voir sous cet angle.... Il y a quelque chose de réconfortant à observer des inconnus à l'abri chez eux.... " Rachel licencieé, erre un peu dans Londres après être passée à la bibliothèque lire des annonces et parfaire son CV, hébergée par Cathy au-delà de Witney, Cathy gentille, trop, ignore le licenciement, et Rachel prend le train de 17 h 56, chaque jour pour retrouver la petite chambre que lui loue son amie. Du vendredi 5 juillet 2013, routine et fantasme au dimanche 18 août 2013, une série d'événements, qui seraient restés peut-être sans solution ou auraient permis d'autres meurtres si Rachel, pleine d'ennui et de nostalgie n'avait remarqué des changements, fugitifs lors du passage du train au feu rouge à proximité de Witney. Rachel refoulée, son alcoolisme rend peu crédible l'histoire qu'elle tente de raconter à la police, et pourtant... tout va s'accélérer durant ces quelques semaines. Trop saoule, la mémoire obscurcie, elle cherche des détails et voudrait tenter l'hypnose. Kamal Abdic psychanalyste serait-il le bon passeur ? Rachel si sympathique se décrit enlaidie, maladroite. Des mensonges des uns des autres, des maternités mal menées, un roman très bien mené, un premier roman.

            

lundi 24 août 2015

Le trésor d'Istanbul Jason Goodwin ( roman Grande Bretagne )



                                                 Le Trésor d'Istanbul

            De Pera à Galata, à Üsküdar, les caïques longent les rives du Bosphore et les muezzins lancent leur mélopée qui passe au-dessus de la Corne d'Or. 1838 à Istanbul, un meurtre est commis ( dès la 1è page ). Un peu plus tard dans la matinée Hachim sort parcourt la rue des Libraires, entre chez Goulandris le libraire "... Les livres en eux-mêmes ne l'intéressaient pas. Mais en fixer le prix c'était une autre affaire..... " Et il observe Hachim, l'eunuque, de " belle prestance ", âgé d'environ 40 ans. Il feuillette les livres en toutes langues, grecs, turcs, arméniens, hébreux, livres rares aussi et ces livres français qu'il aime tant. Jouant l'indifférence il achète quelque livre qui provoquera bien des morts, outre un livre de cuisine " L'art de la cuisine française au XIXè siècle. Plus tard un archéologue français, Lefèvre lui demande asile, il dit avoir rencontré Byron à Missolonghi. Troublant personnage. Mais Hachim est un Lala. Son rôle auprès du sultan Mahmud II qui se meurt, sa grande proximité avec " La Valide ", la reine-mère ( ils partagent un goût fort pour la lecture ), les femmes nombreuses du harem, font de lui le personnage averti, curieux, ami aussi de l'ambassadeur et du médecin, bien en cours auprès des logeuses. Mais le grand intérêt du livre, outre le rôle des porteurs d'eau, le rôle de l'eau dans la ville aux sept collines, tient à l'histoire de l'ex-Byzance, de Sainte-Sophie, aux rues, au marché d'Istanbul, l'intrigue offre au détective Hachim le prétexte, et pour le lecteur, de parcourir une ville du 19è siècle bien vivante. Ville d'intrigues, au passé turbulent. Livre d'histoire mais roman, par l'auteur qui étudia l' " Histoire de Byzance " à l'Université de Cambridge. Et roman policier, Jason Goodwin a obtenu le prix Edgar Poe pour les précédentes aventures de Hachim dans Le Complot des Janissaires.












mercredi 28 janvier 2015

Un rossignol sans jardin Ruth Rendell ( Angleterre roman policier )



                                        Un rossignol sans jardin

            Kingsmarkham dans les environs de Londres. Il y a le bedeau, le jardinier, la femme de ménage, son fils Jason, un homme sans activité perdu dans ses vapeurs d'alcool avalé au goulot de sa flasque et ses épouses, Jeremy, et d'autres encore, et un presbytère où a été retrouvée morte, assassinée Sarah Hussain, révérende à l'église Saint-Peter. Celle-ci d'origine indienne est convertie, profondément croyante, mais nommée à ce poste peut-être celle ou celui ( ! ) qui l'a tuée " la détestait à cause de tous les changements qu'elle introduisait dans les services et la liturgie de l'église.... toucher aux cantiques anciens. " La révérende et mère d'une fille " Clarissa.... pourquoi Clarissa ? - Parce qu'elle a passé beaucoup de temps durant sa grossesse à lire la Clarissa de Richardson. " Et bien sûr, Wexford, retraité mais inspecteur toujours, il apporte à Burden, son successeur, sa réflexion. L'auteur parcourt la société, d'assez bas de l'échelle à la riche bourgeoisie. C'est l'hiver, la neige, le froid, puis mars et peut-être la résolution d'un meurtre qui permet d'entrer chez une mama dotée de plusieurs enfants, d'une mythomane, d'un mari harceleur verbal, ricaneur, Quelques jours après la mort de Sarah Hussain, Clarissa née de père inconnu, aura 18 ans, et aurait dû apprendre le nom de ce père. Vie quotidienne à Londres et ses environs, cuisine variée, les deux policiers finiront l'enquête en mangeant persan, accoutrement des jeunes, les jeans déchirés sont souvent notés. Maxine excessivement bavarde confiera à l'inspecteur retraité plongé dans Gibbon, entre deux explosions d'aspirateur, quelque fait qu'elle espérait secret, mais l'inspecteur s'interroge a-t-il le droit de se taire, même hors circuit. Un mauvais coupable, et un ascenseur, Ruth Rendell nous mène en douceur, en patinant dans les rues enneigées vers le dénouement. 70 livres, traduits en 32 langues, François Ozon a adapté et mis en scène récemment " Une nouvelle amie ", livre paru il y a trente ans, dit l'auteur dans une courte interview qui termine le livre.

mercredi 1 janvier 2014

Le grand Dieu Pan Arthur Machen ( roman Angleterre )

Couverture de Le grand dieu Pan                                                                               
                                                                                                               
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                              
                                                       Le grand Dieu Pan                                  
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                     
             Arthur Machen était-il préparé à l'écriture de livres fantastiques ? Né au pays de Galles, en 1863, près du lieu où se réunissaient le roi Arthur et Les Chevaliers de la Table Ronde, fils de pasteur, il privilégie une vie à Londres. C'est à Londres que se situe la partie principale de ce court roman diabolique. Clarke invité par le Dr Raymond est invité à une expérience qu'il tentera d'oublier tant l'horreur de ces moments l'ont épouvanté. S'approcher de l'autre monde happée par celui nommé Le Grand Dieu Pan, les traits déformés, sous une forme hideuse, inacceptable. La jeune femme est belle, attrayante, ruineuse et évidemment sans coeur, pis même. D'une expérience débutée dans la campagne anglaise près de ruines romaines, au rendez-vous à Soho, l'auteur nous piège. Déchéance et morts étranges, une maison d'aspect joyeux, une autre antre de sombres passés, "... les savants d'aujourd'hui sont incapables d'expliquer la présence ou de spécifier les fonctions d'un certain groupe de cellules... " le but "... contempler le monde des esprits... " Les rets du diable ne se délient pas. " ... Près de Regent's Park, la nuit dernière, la fantaisie me prit de rentrer à pied au lieu de prendre un hansom... j'eus les rues à moi tout seul... je tournai dans Ashley Street... j'entendis une porte s'ouvrir tout doucement... Je vis un homme debout sur le seuil... je dois confesser que je pris la fuite au pas de course jusque chez moi... la forme de l'homme existait encore... et c'est une face de démon que j'ai contemplée. " Le personnage auteur du récit note " Le sens de tout cela je l'ignore... " Paru à Londres en 1894 le livre, de même que les suivants fut difficilement édité, pourtant en France il attira l'attention de Paul-Jean Toulet qui le traduisit, et trouva difficilement un éditeur, ce qui ne toucha guère l'auteur habitué à ces lenteurs. Il fut un modèle pour Lovecraft et pour Stephen King entre autres. Arthur Machen est mort en 1947 en Angleterre.
                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                 
                

jeudi 13 juin 2013

Tous les conspirateurs Christopher Isherwood ( roman Angleterre )


Tous les conspirateurs


                                                 Tous les conspirateurs

            1920 - Londres - Cambridge. Philipp jeune bourgeois tente désespérément de poursuivre une carrière de peintre et d'écrivain. Sa peinture provoque l'ironie de son compagnon. En villégiature au bord de la mer ils rencontrent Victor étudiant à Cambridge, leur relation se poursuit à Londres où il est présenté à Mrs Lindsay, qui lui trouve bien des attraits comme éventuel mari pour sa fille Joan, très attachée à Philipp, son frère. Invitées au bal de fin d'année de l'université, une promenade en barque, et le jeune homme timide demande à la jeune fille qui a une approche plus moderne de la vie, de l'épouser. L'emprise de Madame Lindsay affecte profondément son fils à qui elle voyait un avenir brillant, installé dans un bureau. Mais Philipp étouffe, donne sa démission. Il veut peindre, écrire, c'est là son avenir, son but, il le sait. Il se confie à Allen, toujours sceptique et plongé dans ses livres de médecine. La lutte est rude. Théâtre, promenades et tasses de thé, Philpp lit beaucoup de romans, Joan s'interroge, Victor, digne neveu de son oncle le colonel Page, un peu éberlué par les moeurs et les problèmes de la famille est bien près de jeter l'éponge, Philipp prêt à accepter une proposition qui le promènera au Kénya, dans les champs de caféiers et Joan songe, une vie de couple ? "... une feuille d'impôts partagée... " Écrit à 24 ans, premier roman d'Isherwood, auteur entre autres d' Adieu à Berlin ( Cabaret au cinéma ), sur une société qu'il connaît, avant qu'il ne quitte la Grande Bretagne pour un tour du monde qui le conduit à Los Angelès où il termine ses jours. Le livre épuisé est réédité.