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Le Caucase
Sous mes pieds, le Caucase. Et seul sur les hauteurs
au-dessus des neiges, je côtoie le précipice.
Un aigle parti de quelque sommet lointain
plane, immobile, juste à mon niveau.
De là je vois le surgissement des torrents,
le départ des avalanches dévastatrices.
Tranquillement, sous moi cheminent les nuages,
on entend au travers le fracas des chutes d'eau ;
au-dessous viennent les masses lisses des parois
et plus bas un maigre lichen, des buissons secs ;
mais tout au fond déjà les bosquets, les prés verts
où gazouillent les oiseaux et bondissent les cerfs.
Ici, dans la montagne, les hommes font leur gîte,
les troupeaux de brebis flânent sur les pentes grasses
et le pâtre descend vers les vertes vallées
où se rue l'Aragva entre des rives ombreuses.
Un pauvre cavalier disparaît dans la gorge
où le joyeux Terek se lance, impétueux
et mugit et s'ébat ainsi qu'un jeune fauve
qui, de sa cage de fer aperçoit une proie,
dans sa rage inutile se jette contre les rives
et lèche les parois d'une lame affamée.
En vain ! Il n'y aura pour lui ni proie ni joie,
car les masses muettes l'enserrent férocement.
Ainsi les lois brisent-elles la fougueuse liberté,
Ainsi la tribu sauvage soupire-t-elle sous le joug,
Ainsi le Caucase muet se dresse-t-il aujourd'hui,
Quand, de même, l'étranglent les puissances étrangères.
* culture.gouv.fr
Pouchkine
- 20 septembre 1829 -
( in L'heure de la nuit - éd. bilingue -
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